Crise à l’hôpital : «Tout le système de santé a besoin d’un remède de cheval»

Le manque de personnel a fait doubler le nombre de fermetures de lits dans les établissements publics. Frédéric Valletoux, président de la Fédération hospitalière de France, estime que les revalorisations salariales ne répondront pas à tous les maux chez les infirmières et autres personnels.

«Tout nous fait penser que la situation est pire qu’avant la crise sanitaire», alerte Frédéric Valletoux, président de la Fédération hospitalière de France. LP/Olivier Corsan
«Tout nous fait penser que la situation est pire qu’avant la crise sanitaire», alerte Frédéric Valletoux, président de la Fédération hospitalière de France. LP/Olivier Corsan

    Frédéric Valletoux, le président de la Fédération hospitalière de France, confirme une situation critique dans les établissements publics et considère que le mal-être des infirmières et des autres soignants n’est qu’un des symptômes d’un système hospitalier qui nécessite « un remède de cheval ».

    Quelles sont les conséquences de la pénurie de main-d’œuvre à l’hôpital ?

    FRÉDÉRIC VALLETOUX. La tension sur les effectifs concerne toutes les professions de l’hôpital, y compris les emplois non médicaux. Cela entraîne des fermetures de lits dans des proportions plus importantes qu’avant la crise sanitaire. On n’est sans doute pas à 20 % comme le rapport de Jean-François Delfraissy publié ce mercredi l’indique, mais plutôt entre 5 et 10 %, ce qui représenterait le double de 2019. C’est lié aux difficultés de recrutement, à l’absentéisme, aux gens qui ont lâché prise, même s’il n’y a pas de grande vague de départs de l’hôpital. Une ou deux personnes en moins suffisent à rendre le travail inconfortable dans un service. Tout nous fait penser que la situation est pire qu’avant la crise.

    Le manque de soignants menace-t-il la qualité des soins ?

    Je pense que non. L’hôpital est encore en capacité de faire face, dans ces conditions. Il ne faut pas laisser penser à la population que les hospitaliers ne feraient plus leur job. N’importe quelle personne qui ira aux urgences continuera d’être prise en charge et recevra les meilleurs soins. Mais on voit que le prix à payer est de plus en plus élevé pour des organisations mises à mal depuis deux ans. J’ai repris une tournée des hôpitaux, grands, petits, et moyens, et c’est toujours le même discours qui revient, avec un profond espoir que l’après-épidémie ne ressemble pas à l’avant et qu’il y ait de vraies réformes. Il faut s’attaquer aux difficultés du système plutôt que faire du colmatage à l’infini, comme c’est le cas depuis 15 ans.

    Le Ségur de la santé n’est pas une réponse suffisante ?

    Le Ségur de la santé (la grande consultation de l’ensemble des acteurs du secteur, en 2020, afin d’améliorer le système de soins) a été un rendez-vous historique, inédit, où le gouvernement a mis 8 milliards d’euros sur la table pour augmenter les rémunérations. C’est un élément important, mais l’autre question que posent les hospitaliers est : « À quoi on sert, quel est notre rôle ? » Ils ne veulent plus être ballottés par la régulation financière drastique, par la crise de la médecine de ville qui rejaillit sur l’hôpital, par une bureaucratie qui ne fait qu’augmenter. Tout le système de santé a besoin d’un remède de cheval.