La flambée des prix de l’énergie fragilise encore un peu plus les foyers les plus modestes. Ces augmentations contraignent les plus précaires à faire "des choix indignes de notre pays", selon un collectif associatif mené par la Fondation Abbé Pierre qui organise la première journée dédiée à la lutte contre la précarité énergétique.

"Aujourd’hui, on n’a plus le droit, ni d’avoir faim ni d’avoir froid !" 35 ans après ce cri de ralliement des Resto du Cœur, le vœu de Coluche n’a toujours pas été exaucé. "12 millions de Français ont froid chez eux ou peinent à payer leurs factures d’énergie", alerte le collectif à l’origine de la "Journée contre la précarité énergétique", initiée par la Fondation Abbé Pierre et 19 autres associations comme Greenpeace, Negawatt, le Secours Catholique, Le Cler, Amorce ou encore les Compagnons bâtisseurs.
"Le sujet a tardé à être saisi par les pouvoirs publics. Il est apparu dans l’espace public il y a une dizaine d’années avec le Grenelle 2 de l’environnement", explique Hélène Denise, chargée de plaidoyer et mobilisation à la Fondation Abbé Pierre. Cette loi a en effet défini la notion de précarité énergétique qui "concerne les ménages vivant dans des passoires thermiques, ceux qui consacrent une part excessive de leur budget aux dépenses énergétiques et ceux qui déclarent avoir régulièrement froid dans leur logement", précise le collectif associatif. Au total, 5,6 millions de ménages sont dans ces situations, soit 12 millions de personnes, selon l’Observatoire National de la Précarité Energétique (ONPE).
"Nos 200 euros de gaz mensuels s’engouffraient dans les fuites du toit, les murs étaient tout humides et, l’hiver dernier, la température est tombée à neuf degrés un jour de neige", témoigne ainsi une Française citée par les organisateurs. De telles situations ont des conséquences sur la santé physique – avec une hausse des maladies respiratoires chroniques -, et le bien-être psychologique – les personnes ont honte de recevoir des visiteurs chez elles et s’isolent, soulignent les associations. Plus que jamais, "il est indigne d’avoir froid chez soi" alertent ainsi les ONG. Or, la flambée des prix de l’énergie aggrave le problème, tout comme la hausse des coûts du logement qui pèsent de plus en plus sur le budget des ménages. "Le Covid a également accentué ces inégalités car les gens sont restés bloqués chez eux, ce qui augmente les frais dépensés pour se chauffer chez soi", ajoute Hélène Denise de la Fondation Abbé Pierre.

Les aides d’Etat "sont mal calibrées"


Le gouvernement a ainsi mis en place en place des aides financières à la rénovation thermique. D’abord avec Ma Prime Rénov, qui a été prise d’assaut, puis, un nouveau dispositif plus simple et disponible à partir de janvier 2022 : France Rénov. D’autres mesures ont été annoncées mais les associations les jugent "mal calibrées". Elles encouragent les petits gestes avec de petites rénovations et non des rénovations globales", explique Hélène Denise. 
La Fondation Abbé Pierre prône "un reste à charge de zéro pour les foyers les plus modestes, afin de sortir de la précarité". Aujourd’hui, avec "Ma Prime Renov’", les plus précaires ont un reste à charge de 35% or "payer 15 000 euros de travaux lorsque vous bénéficiez des minimas sociaux, c’est tout simplement impossible", précise Hélène Denise. Ces mesures faciliteraient la rénovation des 4,8 millions de "passoires thermiques" encore implantées en France, selon le décompte du gouvernement.
Alors que les premières vagues de froid déferlent sur l’Hexagone, les associations appellent également à la mise en place de mesures immédiates comme le versement d’un "chèque énergie" du gouvernement de 700 euros, au lieu des 100 euros annoncés par l’Etat ou encore la fin des coupures électriques en cas d’impayés. 
Outre la dimension sociale et les répercussions sur la santé, la précarité énergétique a également des conséquences environnementales. "Aujourd’hui, l’énergie des logements génère 20 % des émissions de gaz à effet de serre", souligne Hélène Denise. Un argument de plus pour inciter le gouvernement à déployer des mesures efficaces.
Mathilde Golla @Mathgolla

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