Urbanisme - L'objectif ZAN face aux projets commerciaux

La loi Climat bouleverse les conditions d'implantation et de développement des surfaces commerciales.

 

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Urbanisme - L'objectif ZAN face aux projets commerciaux

La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 dite loi « Climat et résilience » fixe un objectif national d'absence de toute artificialisation nette des sols d'ici à 2050. L'atteinte de ce zéro artificialisation nette (ZAN) est le prolongement législatif des mesures prises dans le cadre du Plan biodiversité de 2018, de l'instruction gouvernementale du 29 juillet 2019 (NOR : LOGL1918090J) relative à l'engagement de l'Etat en faveur d'une gestion économe de l'espace, des propositions de la Convention citoyenne pour le climat de juin 2020 - en particulier celle visant à « prendre des mesures coercitives pour stopper les aménagements de zones commerciales périurbaines » - et de la circulaire du Premier ministre du 24 août 2020 (NOR : PRMX2022573C) sur le rôle des préfets en matière d'aménagement commercial dans le cadre de la lutte contre l'artificialisation. Les nouvelles mesures législatives impactent fortement l'aménagement commercial.

L'interdiction de principe des projets qui engendrent une artificialisation des sols

L'article L. 752-6 V du Code de commerce (C. com.), issu de l'article 215 de la loi, prévoit qu'il ne peut plus être délivré d'autorisation d'exploitation commerciale (AEC) pour les projets qui engendreraient une artificialisation des sols.

Projets de moins de 10 000 m² de surface de vente.

S'agissant de la création de commerces ou d'ensembles commerciaux dont la surface de vente est inférieure à 10 000 m², et pour les extensions, à condition que la surface totale du commerce ou de l'ensemble commercial concerné reste inférieure à 10 000 m² de surface de vente, l'AEC peut toutefois être accordée si le pétitionnaire démontre, dans l'analyse d'impact produite à l'appui de son dossier de demande, que son projet remplit certaines conditions.

Celui-ci doit impérativement s'insérer en continuité avec les espaces urbanisés, dans un secteur au type d'urbanisation adéquat, et répondre aux besoins du territoire. Il doit, en outre, obéir à l'un des critères suivants : - s'insérer dans le secteur d'intervention d'une opération de revitalisation de territoire (ORT) ou dans un quartier prioritaire de la politique de la ville ; - s'insérer dans une opération d'aménagement au sein d'un espace déjà urbanisé, afin de favoriser notamment sa mixité fonctionnelle ;

- opérer une compensation par transformation d'un sol artificialisé en sol non artificialisé, au sens de l'article L. 101-2-1 du Code de l'urbanisme ;

- s'insérer au sein d'un secteur d'implantation périphérique (SIP) ou d'une centralité urbaine identifiés dans le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale (Scot) entré en vigueur avant la date de publication de la loi Climat et résilience, c'est-à-dire avant le 24 août 2021, ou au sein d'une zone d'activité commerciale délimitée dans le règlement du plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) entré en vigueur avant cette même date.

A noter que, pour les projets d'une surface de vente supérieure à 3 000 m², cette dérogation ne peut être accordée qu'après avis conforme du préfet.

Projets de 10 000 m² de surface de vente et plus. Les créations de commerces ou d'ensembles commerciaux, dont la surface de vente est supérieure ou égale à 10 000 m², ne pourront pas bénéficier de ce dispositif dérogatoire et devront donc être refusées, dès lors qu'elles entraîneraient une artificialisation des sols, y compris en cas de compensation aboutissant à une artificialisation nette égale à zéro.

En revanche, les extensions de magasins ou ensembles commerciaux ayant déjà atteint le seuil des 10 000 m², ou devant le dépasser par la réalisation du projet, pourront bénéficier du dispositif dérogatoire, dans la limite d'une seule extension par magasin ou ensemble commercial et sous réserve que celle-ci soit inférieure à 1 000 m² de surface de vente.

Dans l'attente du décret, le juge appréciera si les nouvelles règles sont immédiatement applicables ou non

Cette mesure, issue d'un compromis entre le projet de loi initial et le texte voté par le Sénat, permettra à des commerces ou ensembles commerciaux existants, ne satisfaisant plus aux objectifs et critères de la législation actuelle, d'améliorer leur qualité paysagère et environnementale à l'occasion d'une extension modérée.

Entrée en vigueur. Un décret en Conseil d'Etat doit préciser les modalités d'application de ces dispositions, ainsi que « les projets considérés comme engendrant une artificialisation des sols », ce qui laisse penser que les nouvelles règles n'entreront en vigueur qu'après la publication de ce texte.

Telle ne semble toutefois pas être la position du ministère de la Transition écologique qui annonce sur son site Internet la fin immédiate des centres commerciaux sur des territoires naturels ou agricoles. L'artificialisation des sols étant définie par le nouvel article L. 101-2-1 du Code de l'urbanisme, il reviendra au juge de se prononcer, le cas échéant, sur le caractère suffisamment précis de ces nouvelles règles pour être applicables immédiatement.

Les autres dispositions introduites par la loi

A côté de cette interdiction de principe, la loi prévoit d'autres mesures visant à restreindre les implantations de commerces et les entrepôts commerciaux.

Renforcement des Scot. Le document d'aménagement artisanal et commercial (DAAC), qui définit « les conditions d'implantation des équipements commerciaux qui, en raison de leur importance, sont susceptibles d'avoir un impact significatif sur l'aménagement du territoire, le commerce de centre-ville et le développement durable » (art. L. 141-6 C. urb.) est rebaptisé document d'aménagement artisanal, commercial et logistique (DAACL). Cette pièce du Scot doit désormais déterminer les conditions d'implantation des constructions commerciales et des constructions logistiques commerciales, en prenant également en compte leur impact sur l'artificialisation des sols.

Entrepôts de commerce en ligne. La proposition du Sénat de soumettre à AEC les créations et extensions d'entrepôts de commerce en ligne de plus de 5 000 m² de surface de plancher n'a pas été retenue.

En revanche, pour ces équipements, le DAACL devra localiser les secteurs d'implantation privilégiés au regard des besoins logistiques du territoire, de la capacité des voiries - existantes ou en projet - à gérer les flux de marchandises et de l'objectif de réduction du rythme de l'artificialisation prévu au 2e alinéa de l'article L. 141-3 du Code de l'urbanisme.

Elargissement des cas de saisine de la CDAC. Par ailleurs, depuis 2008, les projets faisant l'objet d'une demande de permis de construire un équipement commercial dont la surface est comprise entre 300 et 1 000 m², situés dans une commune de moins de 20 000 habitants, peuvent être soumis à l'avis conforme des commissions départementales d'aménagement commercial (CDAC) à l'initiative de l'autorité compétente pour délivrer le permis de construire ou de celle en charge du Scot (art. L. 752-4 C. com.). La loi Climat et résilience ouvre cette faculté à toutes les communes lorsque le projet engendre une artificialisation des sols.

En outre, la dispense d'AEC qui bénéficie, depuis la loi Elan du 23 novembre 2018, aux projets dont l'implantation est prévue dans un secteur d'intervention d'une ORT ne s'applique plus à ceux considérés comme engendrant une artificialisation des sols (art. L. 752-1-1 C. com.).

Performances énergétiques et environnementales. Enfin, à compter du 1er juillet 2023, les mesures prévues à l'article L. 111-18-1 du Code de l'urbanisme (végétalisation des toitures et des parkings, pose de panneaux photovoltaïques…) deviendront plus contraignantes et s'appliqueront notamment aux créations, extensions et rénovations lourdes de bâtiments commerciaux (soumis ou non à AEC) créant plus de 500 m² d'emprise au sol (art. 101 de la loi).

Ce qu'il faut retenir

  • Avec la parution de la loi Climat et résilience, les projets commerciaux engendrant une artificialisation des sols ne pourront plus obtenir d'autorisation d'exploitation commerciale, sauf à démontrer qu'ils remplissent les critères prévus par l'article L. 752-6 V du Code de commerce.
  • Pourront seuls bénéficier de cette dérogation, les projets de création inférieurs à 10 000 m² de surface de vente, et les extensions de commerces ou ensembles commerciaux ayant atteint ce seuil ou devant le dépasser par la réalisation du projet, dans la limite d'une seule extension, et sous réserve qu'elle soit inférieure à 1 000 m² de surface de vente.
  • Les conditions d'implantation des équipements commerciaux et logistiques commerciaux devront figurer dans le document d'aménagement artisanal, commercial et logistique du Scot et prendre en compte leur impact sur l'artificialisation des sols.
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