Artificialisation des sols : Matignon indique aux préfets la marche à suivre
Dans une circulaire datée du 7 janvier 2022 et non publiée à ce jour, le Premier ministre précise ce qu’il attend de l’ensemble des préfets dans le cadre de la mise en œuvre des mesures de la loi Climat et résilience en matière de lutte contre la consommation d’espaces naturels et agricoles. L'occasion d'affirmer que le ZAN ne signe pas l’arrêt des projets.
Sandrine Pheulpin
Faire connaître au bloc local les enjeux et dispositions de la loi Climat et résilience, accompagner les élus ruraux dans la territorialisation de l’objectif de réduction de consommation d’espaces et veiller au bon déroulement du processus de révision des documents de planification régionale. Trois axes sur lesquels le Premier ministre attend les préfets et qu’il détaille dans une circulaire du 7 janvier 2022.
La loi Climat et résilience du 22 août 2021 a fixé, conformément aux ambitions européennes, un objectif national d’ « absence de toute artificialisation des sols » (zéro artificialisation nette – ZAN) d’ici 2050. Un objectif qui place les collectivités en première ligne puisqu’il s’appréciera à l’échelle des documents de planification (Sraddet, SAR, Sdrif…) et d’urbanisme (Scot, PLU…) et qui doit se traduire par une réduction progressive des surfaces artificialisées, soit une division par deux du rythme d’artificialisation dans les 10 prochaines années (2022-2031). Il s'agira pour les collectivités de faire des « bilans de consommation effective d'espaces ».
À LIRE AUSSI
La lutte contre l'artificialisation passera par la planification
ZAN n’est pas synonyme d’arrêt des projets de construction
Pour dissiper les inquiétudes de certains élus locaux qui craignent une entrave au développement futur de leur territoire, le Premier ministre demande tout d’abord aux préfets de faire connaître les enjeux de sobriété foncière et de rappeler aux élus que l’objectif de réduction de la consommation d’espaces et l’atteinte de l’objectif du ZAN en 2050 ne signifient « en aucun l’arrêt des projets de construction ou d’aménagement ». Ils permettent « au contraire de moduler le rythme d’artificialisation des sols en tenant compte des besoins et des enjeux locaux et ainsi de poursuivre les projets qui y répondent ».
Territorialisation indispensable
Par ailleurs, la territorialisation des objectifs est indispensable pour adapter l’effort du rythme de réduction de la consommation d’espaces aux réalités différenciées que rencontrent les territoires, explique Matignon. Cette territorialisation prendra en compte les enjeux et besoins des territoires, les efforts de sobriété foncière déjà réalisés et le foncier déjà artificialisé mobilisable. Il ne s’agit donc pas d’une « réduction uniforme de l’artificialisation par rapport à l’artificialisation passée ».
À LIRE AUSSI
Concilier zéro artificialisation nette et développement territorial
Conférence des Scot
Première étape donc : « répartir l’objectif régional entre les différents bassins de vie ». A cet égard, outre la concertation organisée dans le cadre de l’élaboration des documents de planification régionaux, la loi Climat et résilience (art. 194) a prévu l’organisation de conférences des Scot qui peuvent formuler des propositions aux conseils régionaux sur leur stratégie d’aménagement à mettre en place pour répondre aux objectifs législatifs en la matière. Deux canaux qui permettent d’assurer « la remontée des besoins du terrain et le dialogue entre les différents niveaux de collectivités ».
Jean Castex invite les préfets à proposer leur aide aux élus locaux pour préparer ces conférences, « en y associant les collectivités compétentes en matière d’urbanisme, et les associations des maires et maires ruraux du département ». L’objectif étant d’esquisser les modalités de réduction de la consommation foncière dans les 10 prochaines années.
La circulaire appelle aussi les préfets à s’assurer de la bonne mise en œuvre par les collectivités concernées de cette conférence des Scot et en particulier la transmission dans les délais de sa proposition au conseil régional. Ce délai fixé initialement au 22 février 2022, est reporté au 22 octobre 2022 par le projet de loi 3DS, adopté définitivement le 9 février dernier.
Le Premier ministre met aussi l’accent sur les contrats de relance et de transition écologique (CRTE), outils particulièrement pertinents pour établir un diagnostic partagé des besoins d’un territoire. « Les enjeux de la maîtrise de l’artificialisation des sols devront être systématiquement pris en compte dans ces contrats ».
À LIRE AUSSI
Lutte contre l’artificialisation des sols : les préfets invités à se mobiliser illico presto
Vigilance accrue pour les territoires soumis au RNU
Au-delà de la planification, Matignon rappelle que la mise en œuvre de l’objectif de réduction de l’artificialisation implique de mener une politique ambitieuse d’aménagement durable du territoire. Et qu’une « vigilance accrue » s’impose pour les territoires relevant du RNU qui, de fait ne sont pas concernés par les obligations de la loi Climat et résilience.
Pour mémoire, dans ces territoires, c’est le principe de constructibilité limitée qui prévaut ; les nouvelles constructions doivent intervenir, sauf exceptions, dans les espaces déjà urbanisés. Les préfets devront alors veiller « à la cohérence des dérogations accordées […] avec les besoins des territoires et les objectifs nationaux » de sobriété foncière. Le Premier ministre encourage d’ailleurs ces collectivités à s’inscrire dans une démarche de planification et demande aux préfets de rendre compte tous les trois ans, de l’artificialisation des sols constatée dans ces communes.
Analyses de jurisprudence
Toute l’expertise juridique du Moniteur avec plus de 6000 commentaires et 25 ans d’historique
Je découvre