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EJO, LE SPORT SANS ENTRAVES

(© DR)
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Et si le sport permettait de dépasser les limites et les stéréotypes pour ouvrir de nouvelles perspectives à la jeunesse ? C'est le défi relevé par plusieurs associations réunies dans le projet Ejo, qui met la pratique sportive au service de l'inclusion et du respect de la diversité.

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Dans une cour d'école de Cap Skirring, à la pointe sud-ouest du Sénégal, les crissements des semelles laissent peu de doute sur l'intensité du match de basket qui oppose les enfants de la commune. Filles et garçons de 12 à 15 ans se disputent la balle orange sous le regard de leurs entraîneurs, mais également de bénévoles de deux ONG : PLAY International (anciennement Sport Sans Frontières) et Futur au Présent. Car ce qui se joue cette après-midi-là à quelques encablures de la côte atlantique va bien au-delà d'un simple match de quartier : les animateurs sont en train d'évaluer un atelier consacré aux violences basées sur le genre. À travers le jeu proposé aux enfants de l'école communale, c'est toute une série de mises en situation qui sont réalisées afin de questionner leur rapport au consentement, à l'inclusion ou encore aux stéréotypes de genre. Au terme de l'opposition, garçons et filles sont ainsi rassemblés au centre du terrain pour échanger, discuter et débattre autour de kits présentés par les animateurs du quartier. Ce parti-pris de mettre le sport au service des enjeux de développement, c'est un peu la signature du projet Ejo, piloté par PLAY International avec le concours de l'Agence française de développement (AFD), et qui se déploie depuis 2019 au Sénégal, au Burundi, au Libéria et en Europe au Kosovo. « Notre ADN, c'est d'utiliser le jeu sportif comme un moteur d'inclusion, précise Guillemette Petit, directrice générale de l'association. Tout l'enjeu de nos programmes, c'est de permettre aux formateurs de passer des messages aux jeunes pour les aider à changer leur rapport au monde. Et pour que la démarche soit efficace, il faut dépasser une approche scolaire ou académique, et le fait de passer par le jeu permet de mettre rapidement et facilement les jeunes en situation pour déclencher des prises de conscience. »

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Apprendre à compter grâce au football

Dans de nombreux pays, l'accès à l'éducation pour tous ne va pas nécessairement de soi. L'entrée tardive à l'école, ainsi que le fort taux de déscolarisation viennent s'ajouter à un environnement souvent inadapté : classes surchargées, temps d'instruction limité, climat social détérioré ou encore outils pédagogiques inadaptés. Dans ce paysage, les filles sont bien souvent les premières exclues du système scolaire, en raison du rôle que la société leur attribue, de stéréotypes de genre, de violences sexuelles ou encore de grossesses précoces. Celles-ci font donc partie, avec les enfants en situation de handicap ou issus de minorités communautaires, des publics prioritaires pour les associatifs impliqués dans Ejo. « Ejo signifie « demain » en Kirundi, l'une des langues officielles du Burundi, explique Guillemette Petit. Nous essayons de bâtir avec nos associations partenaires un futur plus désirable, plus solidaire et plus équitable pour les jeunes que nous accompagnons, mais également pour ceux qui les encadrent. Ejo s'adresse en effet aussi bien aux enfants qu'aux jeunes adultes, qui sont les moteurs du changement, et ce dans toutes les strates de la société : de l'école jusqu'aux institutions et aux gouvernements. Nous avons par exemple développé des séances pour apprendre à compter en notant les buts inscrits par une équipe de football. Ce jeu a été testé dans une classe, puis transmis à l'inspection académique, à un centre pour la jeunesse... et si les résultats sont positifs, nos équipes vont former les futurs animateurs en charge de ces séances demain. Mine de rien, et à travers le sport, ce type de dispositif permet de développer des apprentissages cruciaux. »

(© Rilind Beqa)
(© Rilind Beqa)

Le sport comme vecteur de changement

En l'espace de trois ans, Ejo a permis d'accompagner plus de 54 000 enfants à travers quatre pays, mais également de nouer des relations fortes avec des associations et des institutions locales pour pérenniser les actions entreprises. Un bilan plus que positif qui a conduit l'AFD, principal parrain du projet, à reconduire le dispositif pour un nouveau volet de trois ans. « Le développement est par nature une discipline du temps long, relève Eléa Chiron, chercheuse en sciences sociales qui a accompagné PLAY International durant plusieurs années pour tenter d'évaluer l'efficacité des actions mises en oeuvre. L'impact réel d'un tel projet est très difficile à quantifier : les résultats se jugent à travers des parcours de vie, des témoignages d'enfants qui ont vu évoluer leur rapport à l'école, à leur famille, ou qui ont pu initier un projet professionnel. Le sport a ici une utilité évidente en matière sociale et éducative. » Pour ce nouveau chapitre de son histoire, Ejo va s'ouvrir à de nouveaux pays (Côte d'Ivoire en 2025...), avec en ligne de mire les Jeux Olympiques de la Jeunesse 2026 organisés à Dakar. Un horizon riche de sens pour Ejo et PLAY International, qui compte bien capitaliser sur cet événement pour donner davantage d'écho à ses actions, mais également pour que le mouvement olympique crée un héritage social durable et profond sur le continent africain.

LE SPORT, PLUS QU'UN JEU
Le sport est un accélérateur du développement durable et un formidable moteur d'émancipation de la jeunesse. C'est sur cette conviction que, depuis 2019, l'Agence française de développement oeuvre à des projets qui mettent le sport au service d'un monde plus juste et plus solidaire. L'AFD accompagne ainsi plus de 180 projets dans plus de 45 pays pour un engagement de l'ordre de 200 M€. Cela représente plus de 20 000 éducateurs engagés auprès de plus de deux millions de bénéficiaires. C'est donc tout naturellement que l'AFD s'est mobilisée aux côtés de PLAY International pour lancer Ejo, premier projet multi-pays de ce type, et qui s'inscrit pleinement dans le mandat confié à l'organisme par le Président de la République.
publié le 30 janvier 2024 à 16h38