2021, année du vélo : récapitulation en vingt-cinq points

Piste cyclable le long du lac d’Annecy, novembre 2021.

Des vélos partout. Sur les tee-shirts, dans les devantures des boutiques, sur les courts de tennis, dans les débats politiques, chez les constructeurs automobiles, dans les usines, et, bien sûr, dans les rues et sur les routes. En 2021, la transition cyclable s’est poursuivie. Après l’explosion constatée au printemps de 2020 (qui suivait une décennie de progression plus lente), la pratique quotidienne s’est maintenue en 2021.

Dans le même temps, le mouvement provélo s’est structuré. Les pouvoirs publics, à tous niveaux, ont annoncé le financement de futurs aménagements, les entreprises du secteur ont engrangé des bénéfices et embauché des salariés, des investisseurs ont saisi des occasions. Voici un bilan de 2021, année du vélo, en vingt-cinq points.

Piste cyclable à la Défense, avril 2021.

1/ Trajets à vélo, la stagnation après le boom. Les chiffres recueillis par l’association d’élus Vélo et territoires, qui font autorité, montrent une fréquentation des axes cyclables équivalente à celle de 2020, si on exclut les confinements qui rendent les mesures complexes. Le niveau se maintient davantage en ville qu’à la campagne ou dans les quartiers périurbains. Le tourisme en bénéficie tout autant que l’usage quotidien. La part modale du vélo devrait donc se maintenir à 4 %. C’est peu, mais beaucoup plus qu’il y a cinq ans. Le potentiel demeure « énorme », selon l’expression consacrée : 60 % des déplacements domicile-travail de moins de 5 kilomètres se font en voiture.

2/ Des élus motivés. « Plus un seul des 28 maires de l’agglomération ne se prononce contre les aménagements cyclables », témoigne Nicolas Mercat, maire (divers gauche) du Bourget-du-Lac (Savoie). En Ile-de-France, Louis Belenfant, directeur du Collectif vélo Ile-de-France, confirme : « Il n’est pratiquement plus possible pour un élu de se prononcer contre la politique cyclable. » L’exception, c’est André Santini, maire (LR) d’Issy-les-Moulineaux, 81 ans, qui estimait en octobre que « les pistes cyclables à la con, ça tue Paris ».

3/ Un attribut de l’élu moderne. Nice, Lannion, l’agglomération Cœur d’Essonne… Le plan « Vélo » fait désormais partie de la panoplie de l’élu moderne. A Charleville-Mézières, le maire, Boris Ravignon (LR) a gagné, à la fin de novembre, un référendum local avalisant un schéma des mobilités comprenant des pistes cyclables. La métropole de Strasbourg a annoncé en juin 100 millions d’euros, investis notamment en infrastructures.

Sur les bords du Rhône, à Lyon, en mars 2021.

4/ La voie lyonnaise. A Lyon, plus personne n’ignore les « Voies lyonnaises », un réseau de douze lignes totalisant 250 kilomètres de pistes larges et sécurisées prévues pour 2026. Chaque itinéraire, qui s’imposera sur l’espace aujourd’hui dévolu à la voiture, est identifié par un numéro et une couleur, explique Vélo et territoires. Le nom, les « Voies lyonnaises », a été choisi par un cabinet de communication. La métropole n’a pas retenu le terme « réseau express », confie Bruno Bernard, son président (EELV), « car les gens n’aiment pas ce mot », qui évoque la vitesse. Les travaux, estimés à 100 millions d’euros, n’ont toutefois pas encore commencé.

Les vélos orange de Donkey Republic ont été recyclés en vélos verts Free Vélo’v. Villeurbanne, novembre 2021.

5/ Les Free Vélo’v étaient trop verts. La métropole lyonnaise a également lancé, en octobre, Free Vélo’v, qui consiste à réemployer 10 000 vélos issus d’une flotte à l’abandon, retapés par une entreprise d’insertion et offerts aux étudiants boursiers et jeunes en insertion professionnelle. Le tout pour un budget au moins dix fois inférieur à celui du Vélo’v : 4,8 millions d’euros. Malgré le caractère vertueux de cette initiative, qui combine les trois piliers du développement durable, certains rageux n’ont pu s’empêcher de la critiquer, parce que les vélos ont été repeints en vert. Oui, juste pour cette raison.

Présentation du plan « Vélo » de Paris par l’adjoint David Belliard (EELV), en octobre 2021.

6/ Les voies parisiennes. Le plan « Vélo » de Paris, présenté le 20 octobre (lire ici l’article du Monde), a été, comme à chaque fois qu’il s’agit de Paris, abondamment commenté par les médias nationaux. Il ne fait pourtant, pour 250 millions d’euros, que poursuivre la logique des précédents plans, en proposant un réseau sécurisé comptant 130 km supplémentaires, compatible avec les axes des villes voisines, et 130 000 nouvelles places de stationnement.

A l’échelle de la région, le RER V (comme vélo), proposé par le Collectif vélo Ile-de-France, a été adoubé par la majorité sortie gagnante des élections, dirigée par Valérie Pécresse (LR), également candidate à l’élection présidentielle. Même la Métropole du Grand Paris (MGP), assemblée consensuelle et accessoire, s’y met, versant 10 millions d’euros par an. C’est déjà ça de pris. Mais, pas plus qu’à Lyon, les travaux n’ont commencé. Le millefeuille territorial francilien rend les études préliminaires plus complexes qu’ailleurs et multiplie les risques de blocages. Certains maires précisent, en privé, qu’ils s’opposeront aux aménagements.

7/ L’argent de l’Etat. En mai, l’Etat a annoncé 50 millions d’euros supplémentaires pour les infrastructures cyclables. Cet appel à projets du fonds « mobilités actives », le quatrième depuis 2019, contribuera au financement des aménagements (passerelles, pistes, carrefours, stationnement) des collectivités territoriales. La liste des projets adoubés sera publiée en 2022. Depuis 2019, « l’Etat a déjà participé au financement de 533 projets d’aménagements cyclables répartis sur 323 territoires pour un montant total de 215 millions d’euros de subvention », annonçait alors le ministère de la transition écologique.

8/ Un objet publicitaire. En février, le premier spot télévisé pour le vélo, signé par le distributeur Cyclable, a été diffusé sur les chaînes du groupe BFM. Comme le relève le magazine Weelz, la marque a pu émettre un clip de quinze secondes, habituellement facturé plusieurs centaines de milliers d’euros, après avoir gagné un concours organisé par des communicants. En 2020, un spot de la marque Van Moof avait été retoqué par l’Autorité de régulation de la publicité, car il soulignait les nuisances de l’automobile. Le spot avait été amplement diffusé sur les réseaux sociaux. Effet Streisand.

La marque Gazelle a pour sa part diffusé à l’automne un clip publicitaire de vingt-cinq secondes sur plusieurs chaînes télévisées. En 2021, on ne compte plus les marques qui tiennent à associer leur nom à une bicyclette, pour une opération éphémère ou durable : Roland-Garros, Airbus, Citroën, Monoprix, etc. Ça fait chic.

9/ L’année de l’académie. Constituée entre février et avril par la Fédération des usagers de la bicyclette (FUB), l’Académie des mobilités actives (ADMA), financée par les entreprises qui vendent de l’énergie, est chargée de concevoir une politique de formation sur le vélo et la marche. Après quelques ratés, et notamment plusieurs démissions à ses débuts, l’ADMA, qui compte une petite dizaine d’experts venus de divers horizons, a commencé ses formations à l’automne.

10/ Etudes, guides, thèses. Le vélo devient une matière universitaire. L’urbaniste Clément Dusong, académicien (voir point 9), a publié une thèse sur l’essor du vélo en banlieue parisienne. La thèse du chercheur Aurélien Bigo sur la transition écologique des transports, soutenue en novembre 2020, a été amplement diffusée en 2021. On y trouve des arguments en faveur d’une transition écologique basée non pas sur la fuite en avant technologique, mais sur une sobriété sereine. D’autres documents cherchent à comprendre et analyser le mouvement, ou cerner ses opportunités : le guide Rendre sa voirie cyclable, du Cerema, l’évaluation faite par l’Ademe des services vélo, l’étude de la Fédération européenne des cyclistes sur la compatibilité entre le vélo et le train, la monographie du groupe de réflexion Terra Nova sur les pistes cyclables, la thèse, mise en avant par le Forum des vies mobiles, sur le traitement des accidents de vélo dans les médias, un webinaire sur l’avenir des livreurs à vélo. J’en oublie certainement, n’hésitez pas à me les signaler.

Stein van Oosteren (à droite), avec Fabien Bagnon, vice-président (écologiste) de la Métropole de Lyon, à Paris, en novembre 2021.

11/ En librairie. L’enthousiasme communicatif du diplomate néerlandais Stein van Oosteren, auteur, en avril, de Pourquoi pas le vélo? (Ecosociété), séduit partout où il se rend, à l’occasion de conférences ou dédicaces. Son livre a été réimprimé au bout de quelques semaines. Dans son Guide du vélo au féminin (Tana éditions), Louise Roussel décortique les préjugés à l’égard des femmes à vélo, et livre ses conseils. En août, des auteurs réputés, spécialistes des mobilités, publiaient Pour en finir avec la vitesse (éditions de l’Aube). On peut également citer Réenchantons le vélo, de Priscilla Parard (Terre vivante), 50 itinéraires à vélo, d’Olivier Godin (Gallimard), En roue libre, de David Le Breton (Terre urbaine), Le Vélo au quotidien, de Nicolas Pressicaud (Libre et solidaire). La liste n’est pas exhaustive.

Lire aussi: Le livre de Stein van Oosteren en 10 citations (avril 2021)

Lire aussi: Pour en finir avec les préjugés sur les femmes à vélo (mai 2021)

12/ Comme des petits pains. Selon les chiffres de l’Union sport et cycle, principale fédération professionnelle du secteur, publiés en avril, le marché du vélo a enregistré une progression de 25 % en 2020, atteignant un chiffre d’affaires de plus de 3 milliards d’euros. Chaque année, compte tenu des destructions ou mises au rebut, on compte en moyenne un demi-million de vélos en plus en France. En 2020, 514 000 des 2,7 millions de vélos vendus neufs étaient à assistance électrique. Le prix moyen d’une bicyclette s’établit en 2020 à 717 €, soit une hausse de 25 % par rapport à 2019. Lire ici l’article du Monde à ce sujet.

« Manque frein avant ». La pénurie de vélos en image, dans l’usine Moustache à Thaon (Vosges), juillet 2021.

13/ « Pas de vaccin, pas de composants ». Au début de juillet, pile le jour où ses dirigeants recevaient la visite de plusieurs parlementaires, l’usine de Moustache Bikes, dans les Vosges, devait cesser momentanément sa production. La Malaisie, où sont produits une partie des dérailleurs Shimano, était en confinement total. A ce moment-là, le faible taux de vaccination dans plusieurs pays d’Asie avait précipité de nouvelles restrictions dont les répercussions se faisaient sentir à l’autre bout de la planète. « Pas de vaccin, pas de composants », résumait alors la lettre professionnelle Bikeéco. Cette pénurie a contraint d’autres fabricants européens à décréter quelques jours d’arrêt de production, et tous ont passé l’année à jongler entre les fournisseurs.

Une ouvrière à la Manufacture française du cycle, qui salarie 700 personnes, à Machecoul (Loire-Atlantique), août 2021.

14/ L’industrie made in France. Malgré ces vicissitudes, la filière française enregistre en 2021 une hausse impressionnante de son chiffre d’affaires. Des gisements d’emplois surgissent, tandis que les responsables des usines cherchent des terrains pour s’agrandir. Le chiffre d’affaires du secteur a probablement été multiplié par 1,5 depuis 2019, confirme Nicolas Mercat, spécialiste de l’économie du vélo (et maire du Bourget-du-Lac).

De nouvelles marques sont lancées, comme Reine Bike, qui assemble ses confortables modèles dans l’usine Arcade à La Roche-sur-Yon. Peut-on réindutrialiser la France par le vélo? Lire ici l’article du Monde à ce sujet. Le député (LRM) Guillaume Gouffier-Cha, passionné, appuyé par sa collaboratrice Florence Gall et un fonctionnaire du ministère de l’écologie, Bruno Fulda, publiera un rapport parlementaire sur la filière économique du vélo le 15 janvier. Son collègue Jean-Marc Zulesi a par ailleurs été chargé d’une mission sur les mobilités actives (marche et vélo) comme instrument contre le handicap, qui sera publiée cet hiver.

Lire aussi : 10 choses apprises sur le vélo « made in France » (février 2021)

Dans Mobilettre de décembre 2021, un article détaillé sur l’industrie du vélo.

15/ Coup de pouce. Ça peut être long et compliqué d’acheter un vélo, mais heureusement, on peut réparer ceux qui traînent dans les caves. Imaginé par Olivier Schneider, président de la FUB, pendant le confinement du printemps 2020, le « coup de pouce vélo » de 50 €, financé par les entreprises qui vendent de l’énergie, a permis deux millions de réparations, pour un coût total de 100 millions d’euros. Le dispositif s’est terminé le 31 mars.

16/ Cyclologistique. Onze mille vélo-cargos électriques ont été vendus en France en 2020, soit une progression annuelle de… 354 %. C’est certes moins qu’en Allemagne (78 000), mais c’est beaucoup pour un objet qui coûte plusieurs milliers d’euros. Le gouvernement a lancé, en mai, un « plan national pour le développement de la cyclologistique », la livraison à vélo-cargo. On rappellera qu’à l’automne 2020 des cadors de la majorité LRM ironisaient, à propos d’une livraison de pavés en vélo-cargo à assistance électrique, à Strasbourg, sur « les esclaves », « les camps de rééducation » ou les « écolos-bobos idiots » qui les exploiteraient. Les Boîtes à vélo, qui réunissent des entrepreneurs de tous secteurs, ont publié en octobre leur Observatoire sur la cyclomobilité professionnelle, une enquête sur les livraisons non polluantes.

Vélogik propose, en ville, des ateliers de réparation. Paris, octobre 2021.

17/ Un secteur économique protéiforme. L’essor du vélo se décline de mille manières. Le long des boulevards des grandes villes, des magasins de cycles remplacent peu à peu les boutiques dévolues aux acheteurs de scooters. Des distributeurs s’installent dans les villes moyennes, dans les banlieues cossues, mais aussi dans les zones commerciales. Cet investissement trendy attire les grandes entreprises ou les start-up, qu’elles viennent de l’assurance, du stationnement automobile ou de l’urbanisme. En janvier, dans un clip, l’équipementier automobile Valéo présentait son futur moteur pour modèle à assistance électrique.

Le secteur bénéficie d’une image positive et attire une clientèle solvable. Alors que le budget consacré à la mobilité peut atteindre, pour certains ménages, 20 % des dépenses annuelles, le choix du vélo réduit considérablement la facture. Les néocyclistes seraient ainsi disposés à acquérir une foultitude d’accessoires à la limite entre le gadget et l’utile : vestes ad hoc, équipements contre la pluie, sacs à dos, casques éclairants, masques antipollution, applications de direction, supports muraux pour suspendre leur vélo, mécanismes de détection de chutes, compteurs, instruments de marquage, lunettes connectées, etc.

Lire aussi: Réparation de vélo, et vous, vous faites comment? (octobre 2021)

Florence Gall, Jean-Michel Bourrelier (avec la roue), Guillaume Gouffier-Cha, Bruno Fulda. Usine Mavic, Saint-Trivier-sur-Moignans (Ain), novembre 2021.

18/ Les anges du guidon. Après Marc Simoncini, serial-entrepreneur et fondateur de Meetic, qui a lancé en 2020 Angell Bike, un modèle pas encore convaincant mais qu’il a promis d’améliorer, d’autres gros patrimoines s’intéressent au secteur. Jean-Michel Bourrelier, dont la famille a revendu l’enseigne Bricorama en 2017, a racheté le producteur de roues Mavic et s’engage à moderniser l’outil de production. Geoffroy Roux de Bézieux, le patron des patrons, a investi dans Douze Cycles, fabricant de cargos (après avoir acheté Amsterdam’air et Nihola, précise SamNantes). A Bruxelles, le fonds Bikes in Brussels, de la Fondation roi Baudouin, finance, grâce à un mystérieux donateur, des pistes cyclables.

19/ Remplacer une vieille voiture par un vélo. La prime à la conversion (automobile), qui permettait jusqu’ici d’acheter une voiture neuve et moins polluante après revente d’un modèle ancien, donne depuis juillet la possibilité d’acquérir un vélo ou un vélo-cargo. L’amendement, écrit par la FUB et défendu par la ministre de la transition écologique, a été voté dans la loi Climat et résilience en avril.

Valérie Pécresse, lors de la présentation du Véligo, en décembre 2018.

20/ Pécresse et les Véligo-livreurs. Le Véligo, c’est le Vélib’ de droite : bleu turquoise (mais surtout pas vert), louable pour six mois (et pas une demi-heure), doté d’une assistance électrique. Valérie Pécresse adore en faire la promotion. Lorsqu’elle a lancé le modèle « cargo », en décembre 2020, elle aurait aimé le baptiser « vélo-famille ». Mais en pratique, si le Véligo, doté d’un siège bébé, se loue beaucoup dans les Hauts-de-Seine et les Yvelines, banlieue aisée de Paris, il sert aussi aux livreurs de repas, sous-prolétaires des années 2020, qui ont trouvé là un moyen de transport pas trop cher et performant. La région Ile-de-France tente de mettre fin à ce mésusage, officiellement parce que le Véligo doit servir en priorité aux particuliers, mais aussi parce que les Véligo-livreurs donnent du vélo bleu une image radicalement différente de celle que voudrait promouvoir sa présidente.

Olivier Schneider décoré de l’ordre national du Mérite par la ministre Barbara Pompili. Paris, septembre 2021.

21/ 277 000 réponses. Le Baromètre des villes cyclables, questionnaire à remplir en ligne de septembre à novembre, va contribuer à améliorer l’usage du vélo dans plus de 1 500 communes. Ses résultats seront présentés le 10 février. Par rapport à l’édition de 2019, qui avait rassemblé 184 000 réponses, la participation a surtout progressé dans les petites villes et les banlieues. En revanche, le nombre de réponses a stagné ou baissé dans les grandes villes, à l’exception notable de Paris, comme si les habitants de la capitale voulaient souligner le décalage entre la parole officielle et les aménagements dans la vraie vie. La FUB, dont l’effectif sera passé de 4 salariés en 2015 à 70 en février 2022, multiplie les actions et les programmes, comme celui qui vise à distinguer des employeurs pro-vélo. Son président, Olivier Schneider, a été décoré de l’ordre national du Mérite le 14 septembre.

Lire aussi : 10 choses apprises au congrès du vélo à Montpellier (juillet 2021)

22/ Les piétons s’organisent. Le baromètre vélo fait des émules. Au début de l’année, le baromètre des villes marchables, dont les résultats ont été publiés en septembre, proposait aux riverains de noter la manière dont on peut cheminer dans leur commune. Soixante-dix mille réponses ont été enregistrées, dont 43 000 exploitables.

Lire aussi : Les piétons en colère réclament plus de justice spatiale (septembre 2021)

23/ Gentrification. Un entrefilet paru dans la lettre hebdomadaire de Léry Jicquel nous informe que les habitants d’un quartier de San Francisco avaient refusé, en 2017, le vélo en libre-service local, car celui-ci symbolisait à leurs yeux une gentrification néfaste. Même si l’article est ancien, l’enjeu des politiques cyclables apparaît ainsi en creux : elles doivent s’adresser à tous, notamment car elles permettent de limiter le budget des ménages consacré à la mobilité.

Wissembourg (Bas-Rhin), octobre 2021.

24/ Et pendant ce temps, l’étalement urbain continue. Pendant que les citadins se mettent au vélo, les lieux de vie, de travail et de loisirs continuent de s’éparpiller autour et loin des villes, amenant les particuliers à choisir la voiture pour tous les trajets. « Il est très compliqué de sortir des mobilités individuelles sans repenser la ville, l’éloignement domicile-travail-lieux de consommation. Tant qu’on construira des zones pavillonnaires, il sera très difficile de sortir de l’“autosolisme” », résumait en novembre Bastien Sibille, président du directoire de la coopérative de covoiturage Mobicoop, dans Le Monde.

25/ En conclusion. En 2021, le mouvement pro-vélo s’est montré agile et puissant à la fois, protéiforme, à rebours des technologies spectaculaires et des lois indigestes censées régler d’un coup les problèmes de la planète. L’inventivité s’est amplement déployée, en particulier durant cette courte période qui fut baptisée trop vite « post-covid », entre septembre et novembre, où il ne se passait pas un jour sans nouvelle annonce concernant le vélo.

En d’autres termes, si 2020 a été l’année de l’explosion de la pratique, 2021 est l’année de la structuration du secteur. Le vélo et, plus largement, la mobilité émergeront-ils pour autant comme un enjeu de la campagne présidentielle ? Pour le moment, la plupart des candidats jouent la carte facile de l’automobiliste-qui-ne-peut-pas-faire-autrement. Toutefois, lors des campagnes électorales, il arrive que des prétendants, et surtout des électeurs, se rendent compte que la mobilité n’est pas seulement un concept qui engage la planète mais un sujet de vie quotidienne, mêlant pollution, exercice physique, risque routier, bruit, praticité. Mais c’est généralement au moment des élections locales.

Olivier Razemon (l’actu sur Twitter, des nouvelles du blog sur Facebook et de surprenants pictogrammes sur Instagram).

Post-Scriptum : Cette liste est à la fois très longue et incomplète. Ce travail a été l’occasion de me replonger dans des événements manqués, des informations lues trop vite ou des documents négligés sur le moment, faute de temps. En préparant ce récapitulatif, j’ai été frappé par la multiplicité des sources d’information dédiées au vélo. Parmi les sites bien connus figurent le magazine Weelz, le site Citycle, le blog de l’élue parisienne Isabelle Lesens ou les émissions Parigo de Bertrand Lambert. Les deux (!) associations d’élus proposent chacune des informations : le magazine Ville et vélo pour le Club des villes cyclables, et la revue de Vélo et territoires. Tous les jeudis matins paraît le Concentré vélo de Léry Jicquel, tandis que la newsletter Bike éco suit la foisonnante actualité économique. Le podcast de Bilook, la série Biclou du Parisien, la chronique Roues cool de Libération complètent le tableau, là encore non exhaustif.

Paris, février 2021.

 

 

 

25 réponses sur “2021, année du vélo : récapitulation en vingt-cinq points”

  1. Très bon article qui montre une dynamique même si tout n’est pas parfait. Au sujet des vélos électriques je constate dans ma ville que les utilisateurs sont plutôt âgés ce qui peut expliquer pourquoi et qu’il vaut mieux un vélo électrique qu’une voiture. Personnellement j’ essaye d’utiliser de plus en plus souvent un vieux vélo que je retape ( et je compte aller dans un atelier solidaire pour parfaire le tout) mais je dois avouer que le courage me manque dès que le mauvais temps arrive. Monter vite fait sur un vélo par beau temps pas difficile. S’harnacher contre la pluie et le froid pour 10 mn de trajet c’est plus décourageant mais je vais essayer de m’améliorer !

  2. C’est assez satisfaisant de voir l’expansion des déplacements à vélos mais il manque une remarque sur l’explosion des déplacements à trottinette électrique. On peut s’en indigner mais cette explosion est due à des facteurs objectifs. La trottinette n’est pas fatigante et aussi rapide que le vélo dans une ville. On peut la ranger bien plus facilement qu’un vélo sans nécessité de parking dédié. La recharge est bien plus facile que celle d’un vélo. On se salit un peu moins et le transport d’un(e) passager(e) est aisé. Même les courses sont facilités, on pose une cagette ou un sac un peu rigide et on ne risque pas la bascule du vélo. Enfin, on se faufile bien mieux qu’à vélo. Il ne faut pas s’étonner de son expansion et le vélo a une concurrente redoutable. Je pense qu’entre bus et trottinette le vélo a un avenir limité en centre ville. Pour l’activité physique ou les balades plus longues, c’est autre chose. Enfin, avec deux gamins chargés de sacs à emmener en urgence, la voiture reste le plus commode, même si on peut regretter les nuisances induites.

  3. AH j’ai compris au passage pourquoi lesbus étaient désormais bleus et non plus verts en IDF… c’est… (et puis non le commentaire est in utile).

  4. Beau panorama des actions et initiatives. Cependant, je regrette (encore et toujours) le manque de visibilité des ateliers d’auto réparation de vélo participatifs et solidaires du réseau national de l’ Heureux Cyclage. Ces initiatives magnifiques qui poussent comme du chiendent un peu partout sont malheureusement encore les enfants pauvres du vélo. ..

  5. Force est de constater que la France est à la ramasse sur le vélo . Vivant à Tokyo , tout le monde possède un vélo. Le vélo électrique est plebiscite par les jeunes pour aller au lycée , les jeunes cadres pour aller travailler les grands mères pour faire leur courses et évidemment toutes les mamans possèdent leur vélo avec un ou deux sièges enfants pour la vie de tous les jours. Ils ont aussi leur vélo électrique en libre service plébiscité par Uber eats d ailleurs. Mais tout le monde s’en moque (c’est vrai c’est bizarre non?). Et évidemment les hipsters ont leurs super vélos. Le fait est que l on roule sur les trottoirs , c’est toléré et moins dangereux. Tous les vélos sont immatriculés également. Le vélo c’est la vie en fait. Et le vélo électrique c’est tellement génial !

    1. La guerre c’est la paix, la liberté c’est l’esclavage, un cyclomoteur électrique est un « vélo à assistance ». Ouin ouin, je veux vivre à Disneyland et faire du manège pour aller au travail.

  6. Est-il normal de référencer sur le site du Monde ce blog écologiste militant ? On attend du journal des analyses un tant soit peu objective, pas de relayer des perspectives biaisées.

  7. Bravo pour ce résumé de la situation!
    Je suis la seule élue d’une liste écologiste, à Bethune. Evidemment, je demande des vélos et des trottoirs à chaque conseil municipal. Je suis épuisée par les différentes excuses ou retard que l’on prétexte pour ne pas créer d’infrastructures pour le vélo. Comme vous le dites dans cet article cela n’empêche pas le Maire de parler d’un plan vélo pour la Ville.

  8. 4% de déplacements à vélo après confinement, 20% des « vélos » vendus sont en réalité des cyclomoteurs électriques, le tout pour des déplacements de moins de 5 kms dans 60% des cas… C’est désespérant de médiocrité paresseuse. On en hausserait les épaules si les conséquences sanitaires et environnementales n’étaient pas si dommageables.

    1. Ahaha faites vos 10kms de trajets tous les jours en fixie en ramenant vos courses le soir et on verra combien de jours vous tiendrez !
      Vive le vélo à assistance électrique

      1. Ahahah, se plaindre de 10kms matin et soir, nous tenons une belle paresseuse. Par ailleurs, il existe un saut technologique qui a dû vous échapper : le dérailleur.

      2. Il y a un juste milieu entre le fixie et le VAE !

        Selon les (in)capacités et surtout l’infrastructure, le vélo, non assisté est pertinent jusqu’à une vingtaine de km (je l’ai fait à plus de 40 ans). Cela ne veut pas dire que le VAE est inutile, mais clairement un bon nombre d’utilisateurs de VAE n’en ont pas besoin au vu de leur pratique.

    2. Ce qui est désespérant de médiocrité paresseuse ce serait plutôt les parapluies de 2 tonnes qui servent à aller chercher deux croissants à 200 mètres.

  9. Sans doute en avez-vous fait mention; je ne l’ai pas relevé dans votre bilan : L’implantation en Haut de France et dans l’Avesnois, des premieres extensions du réseau des points noeuds d’origine limbourgeoise et qui couvre maintenant la totalité de la région Vlaanderen, d’une large partie de la Wallonie etc… Une formule très efficace pour propulser l’usage du vélo dans les « territoires ruraux » à moindre cout.
    J’en parle à l’encant lorsque je séjourne en Deux Sèvres, province aux réseaux de voies vicinales et communales très diversifié, prêt à baliser.

    1. Merci pour cette information.
      Je ne sais pas si les « noeuds » numérotés (explications ici https://www.visitlimburg.be/fr/le-limbourg-velo) sont une solution très efficace pour développer le vélo à la campagne dans un pays, la France, où la culture du vélo est bien moins ancrée qu’en Flandre. Et où, lorsqu’on se déplace à vélo à la campagne, on est considéré systématiquement comme illégitime.
      OR

  10. Vous auriez pu mentionner l’essor des plateformes virtuelles (Zwift, Rouvy etc.) et hometrainers (Tacx, Wahoo) + effirts des clubs qui offrent plusieurs modeles pour la pratiqur (sportive, conviviale)

    1. Laurent, toute évolution débute au cœur des villes. pas que les gens soient meilleurs mais il est normal de concentrer l’apport technologique, social ou intellectuel dans les endroits les plus denses. L’électricité, le téléphone, la fibre et maintenant le vélo en sont les exemples les plus concrets.

      D’un point de vue philosophique, sortir de la ville peut être assimilé à un voyage dans le passé de la même manière que de sortir de la campagne c’est aller dans le futur.

      Reste que dans un environnement plus dense, les voitures sont obligatoirement mieux canalisées ce qui induit un comportement plus conscient de l’autre, plus « urbain » donc plus évolué, moins plouc pour reprendre un buzz récent

  11. Merci pour cet article utile, et bien sûr merci pour les citations. L’ascenseur sera renvoyé, de bon coeur car cet article est utile, dans un prochain article de … bilan de l’année vu depuis mon blog !

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