13 octobre 2022
Vue d'un rorquale dans la mer, presque en surface, avec un cargo au deuxième plan
Adobestock
Afin de limiter le risque de collision des cétacés avec les navires dans le Nord-Ouest de la Méditerranée, la France et les autres pays concernés souhaitent faire reconnaître par l’Organisation Maritime Internationale une Zone Maritime Particulièrement Vulnérable. L'étude préparatoire réalisée par le Cerema dressant un premier état de l’art concernant le risque de collisions avec les grands cachalots et les rorquals communs, a contribué à alimenter le dossier de demande de désignation d'une zone maritime particulièrement vulnérable (ZMPV), déposé en septembre 2022 par l'Espagne, la France, l'Italie et la principauté de Monaco. Il sera examiné en décembre.

Face à l’importance des collisions entre les bateaux de plus en plus nombreux circulant en Méditerranée et les grands cétacés, notamment les rorquals et grands cachalots, quatre pays du bassin méditerranéen (la France, l’Espagne, l’Italie et Monaco), ont demandé auprès de l’Organisation Maritime Internationale la création d’une Zone Maritime Particulièrement Vulnérable.

Cette disposition permettrait d’envisager des mesures de protection des cétacés telles que la réduction de la vitesse des navires.

 

Un croisement des données de trafic et de présence des cétacés 

carte de la zone d'étude, au bord du littoral de PACA
Carte de la zone d'étude

Dans ce cadre, le ministère en charge de l’environnement a fait appel au Cerema pour réaliser un premier état des lieux de la situation en Méditerranée Nord occidentale, sur la base des derniers travaux scientifiques et données disponibles pour la zone étudiée..

L’étude du Cerema croise les informations sur le trafic maritime (données AIS (Automatic Identification System) des navires) et sur les observations des cétacés réalisées sur l‘espace méditerranéen correspondant à l’Aire importante pour les mammifères marins (AIMM) identifiée par un groupe de travail piloté par l’UICN, étendue à la limite orientale du sanctuaire Pelagos et incluant le corridor de migration des cétacés vers l’Espagne, qui est également une aire protégée. Cet espace constitue en effet un habitat préférentiel pour les cétacés et de nombreuses autres espèces dont ils dépendent (céphalopodes, plancton, etc.).

Par leur grande taille, deux espèces de cétacés sont particulièrement vulnérables au risque de collision dans cette zone: les rorquals communs et les grands cachalots. L’étude des animaux échoués sur les côtes a montré notamment que 22,5% des rorquals échoués ont été victimes de collisions, une proportion similaire pour les autres espèces de cétacés, ce qui en fait la première cause de mortalité liée à l’homme.

 

un indice de probabilité de collision

Des cartographies prédictives de la répartition des rorquals et des cachalots dans ce périmètre ont été réalisées à partir des données issues de campagnes d’observation, et montrent leur forte présence à proximité des côtes françaises, surtout pour les rorquals.

Une cartographie du trafic maritime dans cet espace qui est l’un des plus fréquentés au monde en particulier par les paquebots, a aussi été réalisée à partir de données issues de travaux antérieurs impulsés par le WWF. Ce travail a permis de calculer pour le rorqual un indice de probabilité qu’un cétacé croise un navire sur la zone d’études, le "near miss event"(NME). 

 Cet indice a montré que :

  • Le nombre théorique de situations de collisions est de 700 en hiver et 2000 en été,
  • Les différences saisonnières proviennent principalement de la variabilité du nombre de navires fréquentant la zone, qui double en été par rapport à l'hiver,
  • Les navires à passagers et les cargos présentent le risque cumulé de collision le plus important (84% de NME en hiver, et 72% en été. Ce taux diminue non pas parce que le risque diminue pour ces types de navires, mais plutôt parce que la proportion de ces navires au sein de la flotte globale diminue en été, notamment du fait d’une activité de plaisance plus soutenue).

Ces éléments justifient la proposition de créer une Zone maritime particulièrement vulnérable.

Une série de mesures possibles pour réduire les collisions est présentée dans le document, telles que l’adoption d’un système de signalement des navires, la réduction de la vitesse qui permet d’éviter beaucoup de collisions graves, la mise en place de dispositifs d’observation/détection des cétacés pour prévenir les navires de passage…

 

Vers une meilleure protection des grands cétacés en Méditerranée 

Face au risque de collision pour ces deux espèces classées respectivement vulnérables et menacées d'extinction par l’Union internationale de conservation de la nature, l'Espagne, la France, l'Italie et la principauté de Monaco ont déposé le 8 septembre 2022 auprès de l'Organisation Maritime Internationale (OMI) un dossier de demande de désignation d'une zone maritime particulièrement vulnérable (ZMPV) dans le nord-ouest de la Méditerranée. Ce projet a fait l’objet d’annonces du Président de la République à deux reprises : lors du One Planet Summit de janvier 2021 (il fait partie du Plan méditerranée exemplaire 2030) et lors du One Ocean Summit à Brest en février 2022.

Le dossier fera l'objet d'un examen lors de la 79e session du comité de protection de l’environnement marin (MEPC en Anglais) de l’Organisation maritime internationale (MEPC-79, 12-16 décembre 2022 à Londres). Il propose la création d’une ZMPV dans une zone bien délimitée s'étendant des eaux espagnoles (couvrant l'aire marine protégée du couloir de migration des cétacés) aux eaux italiennes (mer de Ligurie), et incluant le littoral méditerranéen français et monégasque (englobant ainsi le sanctuaire Pelagos).

 

cARTE DE LA ZONE CONCERNée
Carte de la zone concernée - Crédit : Shom