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Journée contre la précarité énergétique : les associations mobilisent et pointent des insuffisances

La première "Journée contre la précarité énergétique" aura lieu le 10 novembre à l'initiative de vingt associations. Présentant cet événement qui sera décliné localement, celles-ci ont rappelé certains chiffres témoignant de l'ampleur de cet enjeu à la fois social et environnemental et de préciser leur position sur les mesures récentes annoncées par le gouvernement.

Pas moins de vingt associations(*) se sont regroupées pour lancer la première "Journée contre la précarité énergétique", qui se tiendra le 10 novembre. Présentée le 4 novembre, cette journée a vocation à devenir un rendez-vous récurrent, face à un phénomène certes ancien, mais dont la brutale hausse des prix de l'énergie met en évidence l'impact sur les ménages les plus fragiles. Pour les associations à l'origine de cette journée, soutenues par les ministères de la Santé et du Logement, "cette situation n'est pas une fatalité" : "Sur le terrain et partout en France, les associations, les collectivités, les services de l'État, les entreprises se mobilisent pour venir à bout de l'exclusion énergétique. Mais il faut faire mieux et chacun peut agir à son échelle !".

Douze millions de français directement concernés

L'une des originalités de cette journée est de mêler étroitement le volet social et le volet environnemental. Lors de la conférence de presse présentant la journée, les représentants des associations présents à la tribune témoignaient de ce rapprochement : Christophe Robert (fondation Abbé-Pierre, à l'origine de la démarche), Anne Bringault (Réseau Action Climat), Jean-Pierre Goudard (Cler, Réseau pour la transition énergétique) et Vincent Legrand (Dorémi).
La journée du 10 novembre va se décliner en plus de 120 événements locaux, organisés à l'initiative d'associations, de collectivités ou d'entreprises : tables rondes, ateliers, "balades thermiques", visites de chantier de rénovation performante, publication d'une étude sur le service public de la rénovation (par la Fondation Abbé Pierre), colloque national à Lille le 9 novembre sur "Les 10 ans du Grenelle de l'environnement : Bilan & perspectives" (quatrième colloque de l'Observatoire national de la précarité énergétique), webinaire...
La Journée sera l'occasion de rappeler un certain nombre de chiffres qui mettent en évidence l'ampleur du problème. Ainsi, 12 millions de Français – soit 5,6 millions de ménages – souffrent du froid chez eux ou peinent à payer leurs factures d'énergie et 53% des ménages restreignent leur consommation d'énergie pour en diminuer le coût. De même, 12% des Français affichent un taux d'effort trop important (plus de 8% de leurs revenus) pour assumer leur facture énergétique. Enfin, 671.546 ménages ont connu l'intervention d'un fournisseur d'énergie en 2019, à la suite à d'impayés (dont environ 280.000 ont subi une coupure d'électricité), soit une augmentation de 17% par rapport à 2018.

Satisfaction sur les mesures et critiques convergentes

Au-delà du rappel de ces chiffres – et des drames humains qui se cachent derrière – et la présentation du programme du 10 novembre, la conférence de presse a aussi été l'occasion de préciser la position des associations sur un certain nombre de questions d'actualité. Ainsi, les associations présentes se félicitent des mesures récentes annoncées par le gouvernement, notamment sur la rapide montée en charge de MaPrimeRénov' et sur la mise en place du service public France Rénov'. Pour Christophe Robert, par exemple, "l'Etat et les collectivités locales ont agi, mais pas assez". De même, il y a "de bonnes choses dans la loi Climat & Résilience, mais les échéances restent trop lointaines". Quant au dimensionnement du "bouclier énergétique" (le gel de certains tarifs et la prime de 100 euros), il est jugé largement insuffisant, Jean-Pierre Goudard, co-président du Cler, estimant le besoin à 700 euros pour les ménages les plus modestes.
Cette question de l'insuffisante concentration des aides sur les publics les plus fragiles revient avec insistance. Pour les associations, il faudrait en effet mettre davantage de moyens sur les passoires thermiques, dont le nombre officiel – 4,8 millions de logements – serait fortement sous-évalué par rapport aux réalités qui remontent du terrain.

Trop de dispersion et pas assez de rénovations performantes

Autre constat unanimement partagé : la complexité et le manque de lisibilité du dispositif et des intervenants, même si la mise en place de France Rénov et de Mon Accompagnateur Rénov' doivent contribuer à améliorer les choses. Le Cler s'inquiète toutefois de la possible ouverture de l'accompagnement à des acteurs privés et toutes les associations plaident pour un renforcement du réseau des accompagnateurs Faire et Anah, qui compte aujourd'hui 1.000 personnes, "en nombre insuffisant et mal réparties sur le territoire".
Autre reproche récurrent : insuffisamment ciblées sur le plan social, les aides le sont aussi sur le plan environnemental. Selon Dorémi, entreprise solidaire engagée dans la rénovation énergétique, "les dispositifs mis en place ne prennent pas assez en compte la rénovation globale, la seule efficace". En outre, le système fait qu'il est financièrement plus intéressant de procéder à plusieurs petites rénovations successives plutôt que de procéder à une rénovation performante. Même si la définition de la rénovation performante, qui manquait jusqu'alors, est désormais définie dans la loi Climat & Résilience, seuls environ 30.000 logements feraient l'objet d'une rénovation performante chaque année. Un jugement que n'est pas loin de partager le tout récent rapport du comité d'évaluation du plan de relance. Selon lui en effet, le soutien apporté par le plan n'a pas forcément ciblé les projets les plus efficients du point de vue des économies d'énergie à long terme (voir notre article du 2 novembre 2021).

(*) Amorce, Le Cler, Compagnons bâtisseurs, Dorémi, Energie solidaire, fondation Abbé-Pierre, fondation Schneider-Electric, Greenpeace, Habitat et Humanisme, Hope, Negawatt, Observatoire national de la précarité énergétique, plan Bâtiment durable, réseau Rappel, Rénovons !, réseau Eco habitat, Secours catholique, Soliha, Stop exclusion énergétique.

 

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