« Au Cerema, nous avons le changement climatique optimiste », Pascal Berteaud, directeur général

Ingénierie -

L'établissement public va être copiloté par les collectivités, dont il accompagne les projets d'infrastructures et d'aménagement.

 

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« Au Cerema, nous avons le changement climatique optimiste », Pascal Berteaud, directeur général
Pascal Berteaud, directeur général du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema).

A quelle logique répond la transformation du statut du Cerema, inscrit dans le projet de loi 3DS qui a fait l'objet d'un accord en commission mixte paritaire le 31 janvier dernier ?

Nous nous préparons à cette nouvelle mutation après trois années de métamorphose. Une entité unique est née de l'agglomération de 11 structures, dont certaines étaient elles-mêmes issues d'une agrégation précédente. Désormais, chacune de nos implantations regroupe l'ensemble de nos domaines d'expertise. Les deux tiers des sujets que nous traitons relèvent des compétences des collectivités territoriales. Mais pour mobiliser le Cerema, ces dernières doivent suivre des procédures lourdes : monter un dossier peut prendre jusqu'à six mois pour un mois de mise en œuvre. D'où l'idée de pousser la logique jusqu'au bout en plaçant les relations du Cerema avec les collectivités sous l'égide du fameux modèle « in-house » : c'est le sens du projet de loi, qui fait du Cerema un établissement public à la fois local et national. Une fois le texte adopté, l'année 2022 devrait être consacrée à la mise en place du nouveau modèle et à l'adhésion des collectivités, pour une mise en œuvre en 2023.

Combien coûtera l'adhésion au Cerema, et avec quels bénéfices ?

Nous prenons comme référence les agences techniques départementales. L'adhésion s'y élève en général entre 20 centimes et 1 euro par habitant. Compte tenu des territoires couverts, ce sera beaucoup moins pour le Cerema. L'adhésion donnera accès gratuitement aux services de diffusion et d'animation des connaissances. En particulier, les adhérents bénéficieront de notre future plateforme Expertise Territoires, que nous comptons lancer courant 2022 ainsi que de quelques jours d'expertise gratuite. Si les besoins vont au-delà, le Cerema facturera ses études, comme le font les agences d'urbanisme.

Ces prestations payantes seront compensées par des subventions pour les collectivités les plus petites. Déjà en cours d'expérimentation avec l'Agence nationale de la cohésion des territoires, ce modèle retrouve le fonctionnement des anciennes directions départementales de l'équipement, qui n'intervenaient pas non plus gratuitement.

Pensez-vous qu'avec le relais des collectivités, le Cerema parviendra à stabiliser ses moyens ?

En trois ans, la réorganisation nous a conduits à écarter les deux tiers des sujets sur lesquels travaillaient les entités qui ont constitué le Centre. Cela a entraîné la suppression de 300 postes et la transformation profonde de 700 autres.

Au terme de ce processus nécessaire, les 26 implantations réparties sur le territoire métropolitain, et désormais en outre-mer, emploient 2 400 personnes, contre 4 000 en 2005 pour les entités préexistantes, dont personne ne s'était vraiment occupé pendant quarante ans. Avec cet effectif, nous pouvons tenir… Chaque jour, je constate avec joie que l'expertise est toujours là, à un haut niveau, avec des équipes motivées. Dans la sphère du ministère de la Transition écologique, le Cerema reste l'un des seuls lieux où de jeunes diplômés peuvent exercer le métier qu'ils ont appris.

Des inquiétudes persistent, notamment sur la perte de compétences de vos laboratoires routiers qui constituent une pièce maîtresse de la sécurité des infrastructures…

Quand bien même cette activité a été profondément rationalisée, la route fait partie des 22 secteurs de compétences conservés par le Cerema. Les choses sont claires. Mais je comprends ces inquiétudes. C'est à mon sens auprès des parlementaires comme du gouvernement qu'elles doivent s'exprimer, et insister sur les limites atteintes en termes de diminution des moyens. On ne travaille pas de la même manière à 2 400 qu'à 4 000, ce qui nous amène à mobiliser des trésors d'imagination ! Mais difficile d'être des magiciens, même si chacun de nos agents fait preuve d'une grande résilience professionnelle.

Le programme Ponts, intégré au plan de relance, sert-il de démonstrateur des services que vous dispensez auprès des petites communes ?

Destiné à diagnostiquer les ouvrages, ce programme totalement gratuit sert en effet d'accélérateur pour sensibiliser une cible potentielle de 18 000 communes. Après sollicitation, seuls 1 % des maires avaient répondu favorablement à notre proposition, ce qui révèle leur difficulté à faire face aux flux d'informations. Finalement, en passant par les associations de maires et les services de l'Etat, nous en avons intéressé près de 12 000. L'Etat leur apporte un service vital : un pont défectueux peut entraîner un détour de 50 km pour une distance à parcourir de 300 m à l'origine, et une grande partie des ouvrages communaux approchent de leur fin de vie.

Nous avons œuvré pour que ce grand sujet, méconnu faute de diagnostic, soit mis au jour ! En aval, je n'ai pas de doute : les financements viendront lorsque les carnets de santé des ponts auront mis en évidence des désordres. La trentaine de bureaux d'études retenus après appels d'offres sont déjà à pied d'œuvre.

« Notre expertise doit bénéficier à l'Etat et aux collectivités, mais aussi au secteur concurrentiel, dans le champ de la recherche et de l'innovation. »

La transition écologique domine vos contributions à France Relance. Y voyez-vous un fil conducteur de votre action ?

Oui, l'adaptation au changement climatique nous sert de boussole. Attendre sans rien faire conduirait à la catastrophe. Mais au Cerema, nous avons le changement climatique optimiste, car si les territoires s'y mettent, ils peuvent s'adapter.

Y compris les territoires du littoral ?

Les projections établies par le Cerema à l'horizon 2100 mettent en évidence l'engloutissement de plusieurs dizaines de milliers de logements : on n'est plus dans l'épaisseur du trait. Je ne me prononcerai pas sur le débat entre l'Etat et les collectivités concernées, à propos de la prise en charge des études prospectives à l'échelle des cellules hydro-sédimentaires.

Il y a des oppositions, et nous essayons de pousser un maximum d'études intéressant les uns et les autres, pour que des données partagées viennent nourrir le débat politique avec des garanties scientifiques et techniques. Il n'y a rien de pire que les oppositions où chacun envoie ses chiffres à la figure de l'autre.

Qu'attendez-vous de la labellisation Institut Carnot dont bénéficie votre projet Clim'adapt ?

C'est un moyen très important pour embarquer les entreprises dans nos travaux. L'expertise du Cerema doit bénéficier à la nation, c'est-à-dire à l'Etat et aux collectivités, mais aussi au secteur concurrentiel, dans le champ de la recherche et de l'innovation. Fin 2019, la labellisation consacre l'efficacité de notre accompagnement, pour aider les entreprises à mettre au point des solutions, sur la période 2020-2023. Après la crise du Covid, la réflexion porte sur l'association de nouveaux partenaires à cette démarche, afin d'apporter un service complet dans le domaine du climat.

En complément de l'Institut Carnot qui s'adresse à des PME-PMI structurées, l'incubateur CeremaLab lancé en 2020 soutient les start-up, avec un succès qui dépasse nos espérances.

Plus de 120 dossiers ont été déposés suite à notre premier appel à candidatures, là où nous en attendions entre 15 et 20. Il en va de même pour les appels à projets régionaux, comme en témoigne la trentaine de propositions, rien que pour la région Grand Est, en particulier sur les thèmes de la mobilité et des services numériques.

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