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Etats-Unis

L’administration Biden soutient le statut de salarié pour les travailleurs indépendants du numérique

La déclaration du secrétaire américain au Travail, Marty Walsh, qui souhaite que les employés des plateformes soient considérés comme des salariés, déstabilise les cours de l’action de Uber, Lyft ou DoorDash.
par AFP et Justine Daniel
publié le 30 avril 2021 à 16h32

«Dans de nombreux cas, les travailleurs des plateformes devraient être considérés comme des salariés.». Cette prise de position du secrétaire au Travail américain, Marty Walsh, dans une interview à l’agence de presse Reuters, a provoqué des remous à la bourse de New York parmi les entreprises de l’économie de plateforme, jeudi après-midi. Le cours de l’action d’Uber a chuté de près de 6%. Son concurrent dans le secteur des services de transports Lyft a perdu 10% et DoorDash, start-up spécialisée dans la livraison de repas, 7,6%.

«Dans certains cas, [les travailleurs] sont traités respectueusement, dans d’autres, ils ne le sont pas et je pense qu’il faut de la cohérence à tous les niveaux», a détaillé le Secrétaire d’Etat, mandaté par Joe Biden pour améliorer la protection des travailleurs et détricoter des législations adoptées par son prédécesseur. «Ces boîtes dégagent des profits et des revenus et je ne leur en fais pas grief, car c’est un principe fondamental aux Etats-Unis. Mais, on veut aussi s’assurer que ce succès ruisselle jusqu’aux travailleurs.»

Classification erronée

Est-ce un signal que l’administration Biden se prépare à réguler les conditions de travail entretenues par les plateformes numériques ? Celles-ci génèrent des revenus via une plateforme en ligne qui met en relations fournisseurs et acheteurs de biens et services (repas, service de transport, etc.) et récupèrent une commission.

En se présentant comme un intermédiaire, les plateformes refusent de salarier chauffeurs et livreurs, soumis au statut précaire de travailleur indépendant qui ne permet pas de bénéficier de l’assurance chômage ou des congés parentaux et maladie. Une étude des économistes Diana Farrell, Fiona Greig and Amar Hamoudi (2018) citée par l’Organisation internationale du travail (OIT), a estimé que 4,5% de la population active américaine a gagné des revenus en travaillant pour des plateformes digitales.

«Il est évident que l’exploitation des travailleurs indépendants du fait d’une classification erronée doit cesser», a réagi l’organisation Gig Workers Rising qui défend les conditions de travail des employés de plateforme. Le ministre du Travail prévoit dans les prochains mois d’organiser des discussions avec les entreprises qui les emploient. Mais l’ancien dirigeant du puissant Conseil des métiers du bâtiment et de la construction qui défend ces travailleurs, risque de se confronter à un intense lobbying de la part des entreprises américaines de cette économie de plateformes.

Proposition 22

En novembre dernier, Uber, Lyft, DoorDash et d’autres entreprises similaires avaient dépensé plus de 200 millions de dollars dans une campagne pour faire adopter en Californie une mesure consacrant le statut de travailleur indépendant. La «proposition 22», soumise au vote des citoyens californiens lors de la présidentielle de novembre, prévoit de créer un fonds commun à ces entreprises afin de permettre à leurs travailleurs de bénéficier d’une assurance maladie et de revenus minimums, sans pour autant remettre en question leur indépendance.

Adoptée, la proposition a annulé une loi votée en septembre 2019 par le parlement qui obligeait Uber, Lyft et consorts à considérer leurs travailleurs comme des employés. Les Etats sont toutefois de plus en plus enclins à réguler cette économie, en imposant petit à petit leur contribution à l’assurance chômage, à l’instar de l’Etat de New York et du New Jersey. Durant la pandémie, un programme fédéral a d’ailleurs rendu éligible à l’assurance chômage les travailleurs indépendants non couverts.

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