Il y a d’abord cet étudiant en sciences qui, pour payer son loyer, était livreur à vélo. Sans revenus depuis le confinement, il survit grâce à l’aide alimentaire de l’association lyonnaise Gaelis, qui distribue 850 colis par semaine aux étudiants en grande difficulté. Il y a aussi Britany, une jeune femme de 21 ans qui habite à Meaux, dans sa famille, à cinq avec le seul salaire de sa mère. Sans travail depuis son départ de l’école à 19 ans, elle avait enfin réussi à décrocher un entretien pour un travail dans la vente. Tout s’est arrêté avec la crise sanitaire.

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Elle espère cependant rebondir en signant un contrat de couturière de masques dans un chantier d’insertion. Il y a encore Sacha, un ancien enfant placé de 18 ans et demi qui, après avoir quitté son foyer pour l’armée, puis l’armée pour la rue, errait dans diverses villes de France avec un compagnon d’infortune. Au début du confinement, il vivait dans un garage du sud de la France jusqu’à ce que l’Adepape 13, une association d’anciens enfants placés, le mette à l’abri dans un hôtel. Mais pour combien de temps ?

Un jeune sur cinq sous le seuil de pauvreté en France

Étudiants isolés, jeunes sans famille ou grandissant dans des familles pauvres… Les visages de la jeunesse dite précaire sont multiples. En France, un jeune de 18 à 29 ans sur cinq vit sous le seuil de pauvreté, selon l’Insee. Il faut dire que les moins de 25 ans, sauf s’ils ont travaillé à temps plein ou s’ils sont parents isolés, n’ont pas droit au RSA. En les privant des restaurants universitaires, des structures qui leur venaient en aide ou de leurs petits boulots, la crise sanitaire les a souvent enfoncés un peu plus dans la précarité.

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Après avoir fait de la jeunesse la cible prioritaire de son plan pauvreté, difficile, pour le gouvernement, de ne pas leur venir en aide. Mais il a d’abord ciblé les étudiants. Début avril, le ministère de l’enseignement supérieur a débloqué 10 millions d’euros pour renforcer les aides spécifiques d’urgence attribuées par les Crous. Il a aussi permis aux universités de recourir à la « Contribution de vie étudiante et de campus », une taxe acquittée par les étudiants pour soutenir ceux ayant perdu un travail ou un stage rémunéré, et qui ont besoin d’équipement informatique ou d’aide alimentaire.

Le 13 avril, Emmanuel Macron a ensuite annoncé « une aide exceptionnelle aux familles les plus modestes », qui ne concerne que très marginalement les jeunes, ainsi qu’un dispositif pour « les étudiants les plus précaires vivant parfois loin de leur famille, en particulier lorsque celles-ci viennent d’outre-mer ». Toutefois, deux semaines plus tard, cette annonce tarde à se concrétiser. Le 23 avril, la ministre des Outre-mer, Annick Girardin, a indiqué à 20 Minutes qu’une enveloppe de 250 000 € serait débloquée pour renforcer les moyens d’accompagnement des associations et que les étudiants ultramarins bénéficieraient d’une aide financière, encore à définir.

Selon nos informations, le gouvernement a pris conscience de la nécessité d’aider aussi les jeunes précaires non étudiants mais cherche le bon moyen de le faire. « C’est en cours de travail, mais effectivement, nous penchons en faveur d’une aide qui engloberait la précarité des jeunes en général, étudiants ou pas », confirmait-on vendredi au cabinet de Christelle Dubos, la secrétaire d’État chargée de la lutte contre la pauvreté.

L’Unef plaide pour une aide à tous les étudiants

Reste à identifier la bonne cible et le bon montant. Chez les étudiants, si un sur deux travaille, seuls 712 000 sont boursiers. À l’Unef (l’Union nationale des étudiants de France), on plaide « pour une aide accessible à tous les étudiants, avec un minimum de 560 € tout au long du confinement et une hausse des bourses ensuite », explique Madji Chaarana, vice-président. Au-delà des étudiants, « on compte entre 1,2 et 2 millions de jeunes qui ne sont ni en emploi ni en formation, estime Antoine Dulin, président de la commission insertion et jeunesse au Conseil économique, social et environnemental (Cese). Si on enlève ceux qui ont un soutien parental, je pense que quelques centaines de milliers de jeunes non étudiants pourront toucher cette aide ».