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Coronavirus : l'exécutif en quête d'un scénario pour le déconfinement

L'épidémie de coronavirus ne cesse de déjouer les pronostics, avec un pic des passages en réanimation qui s'éloigne. Ce point haut devrait survenir quand même en avril en Ile-de-France. Les pouvoirs publics savent qu'il ne faut pas attendre et réfléchissent déjà à la façon dont le confinement pourra être levé. Sans grandes certitudes.

Avec le coronavirus, les prédictions de remplissage des salles de r�éanimation se sont révélées inférieures à la réalité.
Avec le coronavirus, les prédictions de remplissage des salles de réanimation se sont révélées inférieures à la réalité. (SEBASTIEN BOZON/AFP)

Par Solveig Godeluck

Publié le 2 avr. 2020 à 18:50Mis à jour le 2 avr. 2020 à 18:51

Face au coronavirus , les pouvoirs publics et les établissements de santé ont appris à encaisser les mauvaises nouvelles, car l'épidémie est encore plus forte qu'on ne le pensait. Ainsi, le week-end dernier, le gouvernement a dû relever en catastrophe son objectif d'ouverture de lits de réanimation. Néanmoins, c'est maintenant qu'il faut anticiper la sortie de crise pour éviter une rechute. Avec une grande question : comment faire pour lever le confinement ?

Le Premier ministre, Edouard Philippe, a expliqué mercredi devant l'Assemblée nationale qu'il espérait pouvoir présenter une stratégie de déconfinement « dans la semaine, dans les jours qui viennent ». Elle ne pourra cependant être mise en oeuvre que lorsque les entrées en réanimation reflueront. Selon nos informations, le Conseil scientifique a créé un groupe de travail comprenant des médecins et des économistes tel que l'universitaire bordelais Jérôme Wittwer pour plancher sur le sujet.

Ce déconfinement n'aura probablement pas lieu « en une fois, partout et pour tout le monde », a prévenu Edouard Philippe. Et il sera risqué. « L'expérience du Hubei, qui n'était pas le confinement de toute la Chine, n'est pas reproductible ici. Il n'y a pas de méthode de déconfinement », a-t-il averti. Le contrôle social en Chine est plus fort que jamais. On trace les déplacements de chacun, on prend la température des employés, on garde son masque au bureau.

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Libérer d'abord les moins de 65 ans

Pour Martin Blachier, médecin de santé publique et dirigeant de Public Health Expertise, la seule façon valable de sortir du confinement serait de « libérer » d'abord les moins de 65 ans, à partir du 15 avril, puis les seniors. Ainsi, les populations les moins vulnérables au virus pourront s'immuniser et protéger les plus fragiles, qui représentent 25 % du total. « Si jamais vous relâchez tout le monde le 30 avril, vous aurez 80.000 morts et une saturation des lits de réanimation. Avec un déconfinement progressif par âges, ce sera 12.000 à 15.000 morts », a-t-il calculé.

D'autres stratégies ont été évoquées, par exemple un confinement alterné - deux semaines à l'arrêt, une semaine de liberté. Les régions les plus sinistrées pourraient mettre plus de temps à se déconfiner.

Enfin, les réflexions portent sur le dépistage de la population, qui devra être systématisé dans certains lieux - Ehpad, prisons, hôpitaux… - et sur le traçage des personnes susceptibles d'être infectées via les smartphones, qui ne peut pas être rendu obligatoire dans le cadre législatif actuel.

Autant dire que sur le terrain, on n'en est pas là. « Envisager la sortie ? On compte les sacs mortuaires et les chambres froides. De toute façon, on peut anticiper tout ce qu'on veut, c'est toujours plus que ce qu'on croit », soupire un responsable de santé en Ile-de-France, la région la plus touchée par l'épidémie après le Grand Est.

Des scénarios plus noirs que prévu

Selon un document confidentiel réalisé par les services de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, depuis le 29 mars, la réalité est pire que la projection la plus sombre . Le groupe hospitalier s'attend désormais, au mieux, à ce que l'Ile-de-France atteigne le pic le 6 avril, avec 2.400 patients hospitalisés en détresse respiratoire. « Si la France suit un scénario à l'italienne avec un plateau d'une durée de 10 jours, les besoins en lits seront plus grands, et sur une durée plus longue », précise ce document.

A vrai dire, on peine à faire des projections tant qu' on ne mesure pas l'efficacité du confinement , censé faire baisser les entrées en réanimation en deux ou trois semaines. Un confinement réussi doit faire tomber le taux de transmission de la maladie par chaque porteur du virus de trois personnes à moins d'une. Si ce taux passe à 1 en Ile-de-France, les 2.500 lits de réanimation de la région afficheront complet entre le 10 avril et le 5 mai, prévoyait il y a quelques jours le modélisateur Simon Cauchemez, de l'Institut Pasteur. Il faut donc faire mieux car le système de santé souffre, poussé à ses limites. Si par malheur le taux de transmission ne baissait qu'à 1,2, il faudrait alors plus de 4.000 lits de réanimation, qui n'existent pas.

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>>> La France face à l'épidémie de coronavirus. Quelles ont été les différentes étapes de l'alerte ? Quelle est la situation épidémiologique au jour le jour ? Quelles sont les mesures décidées par le gouvernement pour limiter la propagation de la pandémie ? Pour soutenir l'économie ? Réponses ici dans le dossier spécial des « Echos ».

Solveig Godeluck

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