Menu
Libération
Facture

Dans les centres de vaccination, les médecins désormais rémunérés au forfait

La pandémie de Covid-19 en Francedossier
Pour mettre fin aux dérives liées à la tarification à l’acte, la Cnam a modifié ce vendredi le dispositif de rémunération des professionnels libéraux qui interviennent dans les vaccinodromes.
par Nathalie Raulin
publié le 16 avril 2021 à 15h05

Mettre un terme aux abus sans froisser une profession indispensable pour mener la campagne de vaccination tambour battant. Contrainte de tenir les deux bouts de l’omelette, c’est officiellement sous couvert de «simplification» que la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam) a annoncé la modification à compter de ce vendredi du système de rémunération des «professionnels de santé libéraux intervenant au sein des centres de vaccination». Soit la suppression de la possibilité de «facturer à l’acte la prise en charge de chaque patient vacciné». Désormais, les médecins libéraux volontaires pour piquer en centre seront payés au forfait, à raison de 420 euros la vacation de quatre heures ou 105 euros de l’heure s’ils restent présents moins longtemps.

Cadences infernales

En réalité, l’Assurance maladie a décidé de mettre le holà à des pratiques choquantes. Certains médecins libéraux avaient commencé à confondre centres de vaccination et poule aux œufs d’or. Dès le 1er avril, le Canard enchaîné avait relevé le hiatus existant entre rémunération à l’acte et au forfait. A raison de 20 vaccinations par heure, un médecin stakhanoviste payé à l’acte pouvait engranger jusqu’à 2 000 euros par vacation en semaine, sans compter les 5,40 euros par patient alloués pour saisir leur dossier médical dans le fichier national de la vaccination Vaccin Covid. Un calcul théorique selon certains responsables syndicaux, persuadés de l’impossibilité d’atteindre un tel rythme de vaccination.

C’était là manquer d’esprit pratique. Car en centre de vaccination, le travail en binôme autorise bel et bien des cadences infernales : au médecin, la préconsultation et le traitement administratif, à l’infirmière la piqûre. Selon une information de France 3 Paca, le dimanche 21 mars au centre de vaccination du Val-de-l’Arc à Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône), un praticien a ainsi enchaîné trois vacations de 8 heures à 20 heures, engrangeant du coup 9 000 euros pour une journée de travail… Dans ce centre comme dans plusieurs autres de la région, près d’un médecin sur deux avait fait le choix de la rémunération à l’acte. De quoi laisser craindre que la mobilisation des médecins libéraux ne tourne au pillage en règle des caisses de la Sécu.

«Une brèche contraire à l’esprit»

Informée de ces dérives, l’agence régionale de santé de Provence-Alpes-Côte d’Azur a alerté la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) des Bouches-du-Rhône et le ministère de la Santé. La décision nationale de siffler la fin de la récré a suivi. Même les syndicats de médecins n’y trouvent rien à redire. «Nous n’avions jamais réclamé que les vacations dans les centres de vaccination soient rémunérées à l’acte», affirme le docteur Jacques Battistoni, président du syndicat de médecins généralistes MG France : «Cela se justifie en cabinet, car les médecins doivent identifier les patients éligibles aux vaccins, les contacter et dégager des créneaux de vaccination sur leur planning. En centre, c’est différent. Il s’agit d’un travail d’équipe peu individualisable. Certains se sont engouffrés dans une brèche contraire à l’esprit de ce qui avait été mis en place. Une clarification était nécessaire.»

Pour aller plus loin :

Dans la même rubrique