Réforme des retraites : Edouard Philippe lance la «conférence de financement»

Les partenaires sociaux et le gouvernement entament ce jeudi trois mois de discussions qui s’annoncent difficiles. En cause : l’équilibre financier des retraites pour 2022-2027.

 Edouard Philippe et les partenaires sociaux, ici le10 janvier, se retrouvent ce jeudi pour ouvrir la « conférence de financement ».
Edouard Philippe et les partenaires sociaux, ici le10 janvier, se retrouvent ce jeudi pour ouvrir la « conférence de financement ». AFP/CHARLES PLATIAU

    Journée importante pour le gouvernement et son projet de réforme des retraites. Ce jeudi à 15 heures aura lieu le lancement de la « conférence de financement » entre l'Etat et les organisations syndicales (patronales et salariées) en présence du Premier ministre Edouard Philippe au Palais d'Iéna (Paris XVIe), à deux encablures du Trocadéro, là où siège habituellement le Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE).

    Pour sortir du blocage sur la question d'un « âge pivot » à 64 ans, un système de bonus-malus que le gouvernement voulait instaurer dès 2022 pour les générations proches de la retraite, le patron de la CFDT, Laurent Berger, a proposé début janvier la tenue d'une « conférence de financement », à condition que le gouvernement retire ce point litigieux de son projet de loi. Idée retenue par l'exécutif, qui posa à son tour une condition : ce round de discussions — rebaptisée « conférence des financeurs » et auquel va participer la Cour des comptes — doit être bouclé fin avril et non cet été, comme le souhaitait la CFDT.

    Le calendrier est donc serré : les partenaires sociaux ont trois mois pour trouver comment équilibrer le régime de retraites pour la période 2022-2027. Soit 12 milliards d'euros à trouver par an, sachant que la France consacre chaque année environ 320 milliards d'euros au service des pensions.

    La CFDT réclame des avancées sociales

    Ce mercredi, la CFDT, seul syndicat avec l'Unsa à soutenir le principe de la retraite par points, a fait connaître ses priorités. « Il faut d'abord qu'on réponde aux exigences de justice sociale, c'est une condition sine qua non pour avancer dans la conférence de financement », a martelé Laurent Berger lors d'une conférence de presse. Quelles sont ces « exigences » ? « Pénibilité, retraite progressive, minimum contributif et transitions pour les agents publics », a-t-il énuméré. Pour faire évoluer le projet de loi de la réforme qui « en l'état ne [lui] convient pas », la CFDT a d'ailleurs fait parvenir aux députés de tous bords, qui entament l'examen du texte en commission la semaine prochaine, une quarantaine d'amendements.

    Sur la pénibilité par exemple, la CFDT propose une « reconnaissance collective » des métiers (déménageurs, couvreurs, bûcherons, etc.) qui serait faite par les partenaires sociaux des branches ou par l'administration en cas d'absence d'accord. Celle-ci ouvrirait droit à un départ anticipé deux ans plus tôt. Un « point fondamental » aux yeux du syndicat réformiste. Ses autres « exigences » concernent le minimum de pension à 100 % du smic, une meilleure prise en compte des périodes de chômage, la retraite progressive ou encore une gouvernance du système plus autonome. Une fois ces points avalisés par l'exécutif, la CFDT se dit prête à proposer son « cocktail de mesures » financières qui impliquera aussi « les employeurs publics et privés ».

    Pas de hausse des cotisations pour le Medef

    Principal opposant à la réforme des retraites avec la CFE-CGC, Solidaires et plusieurs professions indépendantes (avocats, experts-comptables, etc.), la CGT a assuré qu'elle participerait à la conférence de financement. Avec un objectif : « Expliquer comment améliorer [le] système actuel », selon Philippe Martinez, son numéro un, qui participera ce jeudi à une « retraite au flambeau » organisée à Perpignan, histoire d'entretenir la flamme de la contestation.

    Sans surprise, il y aura sans doute peu à attendre de la part des opposants à la réforme concernant le financement des retraites d'ici à 2027. Quant au patronat, côté Medef, il a annoncé qu'il allait s'engager « pleinement dans la conférence de financement », tout en réitérant sa ligne rouge : pas de hausse des cotisations qui augmenterait le coût du travail.

    Le gouvernement est sur la même ligne et Edouard Philippe l'a réaffirmé récemment, dans un entretien au journal la Croix : « J'ai toujours dit qu'il me semblait impossible de ramener notre système de retraite à l'équilibre sans une mesure d'âge. […] Mais si les partenaires sociaux s'accordent sur un cocktail de mesures, y compris une mesure d'âge différente de l'âge pivot, je la prendrai. » Pour les organisations réformistes, CFDT et Unsa en tête, la voie risque d'être (très) étroite.