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Sophie Cluzel, secrétaire d'Etat : "Je veux remettre les personnes handicapées en situation de travail"

INTERVIEW - Contestée par les associations, qui ont récemment quitté la table des concertations sur le revenu universel d'activité, la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, Sophie Cluzel, défend le bilan du gouvernement en matière de handicap. Avant la présentation du plan d'Emmanuel Macron mardi, elle détaille ses priorités.

Anne-Charlotte Dusseaulx etEmmanuelle Souffi , Mis à jour le
Brigitte Macron, Sophie Cluzel et le personnel du Café Joyeux, où la cuisine et le service sont assurés par des personnes en situation de handicap.
Brigitte Macron, Sophie Cluzel et le personnel du Café Joyeux, où la cuisine et le service sont assurés par des personnes en situation de handicap. © Gilles Bassignac/Divergence

Ecole, travail, numéro unique... mardi, Emmanuel Macron annoncera son plan pour les personnes en situation de handicap. Sophie Cluzel, secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées, détaille dans Le Journal du Dimanche les axes de travail du gouvernement et défend son bilan. Trois priorités ressortent : "la scolarisation des enfants handicapés", "le travail" et la simplification des démarches". Face aux associations inquiètes d'une éventuelle disparition de l'allocation adulte handicapé, elle assure que "aucune décision quant à l'inclusion éventuelle [de l'AAH] dans le RUA n'est prise et ne le sera avant juillet".

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Les associations attendent ­beaucoup de la Conférence ­nationale sur le handicap (CNH) de mardi. Comment ne pas les décevoir?
Cette ­Conférence nationale du handicap se déroule en milieu de ­quinquennat, elle est donc très attendue. Les précédentes ayant souvent eu lieu à la fin, elles ­n'engageaient que les gouvernements suivants… Elle est aussi élargie : 450 personnes, dont ­beaucoup issues de la société civile, des chefs d'entreprise signataires du manifeste pour l'inclusion, des médias signataires de la charte CSA, des élus, des présidents de ­conseils départementaux seront présents. Le handicap touche un ­Français sur cinq. C'est l'affaire de tous.

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Le nombre d'élèves en attente d'un accompagnant a été divisé par deux à la rentrée 2019 par rapport à 2018

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Quelles seront les priorités du gouvernement pour l'acte II du quinquennat?
Notre méthode porte ses fruits. Avec ­l'Éducation ­nationale, nous avons engagé une révolution culturelle pour que la scolarisation des enfants handicapés ne soit plus incantatoire, mais bien réelle. Je ne dis pas que tout est abouti, c'est évident, mais la dynamique est enclenchée : le nombre d'élèves en attente d'un accompagnant a été divisé par deux à la rentrée 2019 par rapport à 2018. Mon ­mantra, c'est aussi le travail. Nous ne ­voulons plus, par exemple, de cette errance des ­demandeurs ­d'emploi handicapés baladés d'un guichet à l'autre. Ils sont plus de ­500.000 et leur taux de chômage est deux fois plus élevé! Nous avons les outils, il nous faut maintenant des résultats ­concrets pour les personnes.

Dans les Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), les dossiers s'accumulent et un appel à manifester a été lancé mardi…
Ces guichets cristallisent les frustrations, alors que la simplification des démarches et la ­réduction des ­délais est au cœur de nos priorités. Les droits à vie que nous avons créés devraient ­alléger le traitement ­administratif des MDPH. Depuis le 1er janvier 2019, vous n'avez plus besoin ­d'aller chez le médecin tous les trois ans pour prouver votre ­handicap s'il est irréversible. Pour autant, cette mesure est appliquée de façon inégale sur le territoire. Fin décembre, 25% des demandes de renouvellement de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) ont débouché sur un octroi à vie, c'est insuffisant. Mais en plus, il s'agit d'une moyenne : cela va de 2% dans certains départements à 60% dans d'autres. Ce n'est pas acceptable.

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Nous avons des délais qui explosent et des situations ubuesques! Il faut s'attaquer urgemment à ce ­problème

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Des familles dénoncent les délais de réponse. Que leur dites-vous?
Dans la loi, c'est quatre mois et nous en sommes parfois très loin. Nous avons des délais qui explosent et des situations ubuesques! Il faut s'attaquer urgemment à ce ­problème. Par ailleurs, l'absence de remontées statistiques régulières et ­officielles est indigne de notre pays. Comme si on s'était résigné aux listes d'attente à la MDPH, dans les établissements médico-sociaux… Je dis "stop"! Ça n'était pas la priorité des gouvernements précédents. Mais c'est la mienne! Nous aurons fin 2020 un système d'information unique qui nous permettra d'objectiver les situations : nous pourrons savoir ce qui est notifié aux personnes, dans quels délais et quels sont réellement les besoins non couverts, afin de pouvoir agir plus précisément là où se posent les problèmes.

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Une entreprise seule ne saura pas faire si elle n'a pas d'experts pour l'accompagner

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Comment diminuer le taux de chômage des personnes handicapées?
Le quota actuel (6%) date de 1987 et n'est pas respecté. Être uniquement coercitif ne fonctionne pas. Une entreprise seule ne saura pas faire si elle n'a pas d'experts pour l'accompagner. À peu près la moitié des bénéficiaires d'un dispositif d'emploi accompagné, qui permet d'avoir un professionnel du handicap auprès de l'entreprise, basculent vers un emploi pérenne. C'est que ça marche. Il faut aussi s'appuyer sur les dispositifs existants. Aujourd'hui, 120.000 personnes sont accueillies dans un établissement et service d'aide par le travail (Esat) ; 35.000 sont salariées d'une entreprise adaptée, l'objectif étant d'arriver à plus de 70.000 d'ici la fin du quinquennat. Nous investissons pour cela 500 millions d'euros.

Des associations ont quitté les ­concertations sur le revenu ­universel d'activité (RUA). L'AAH va-t-elle disparaître?
Ça n'est pas du tout le deal de départ! Son budget sera sanctuarisé, il n'y aura pas de ­conditionnalité de l'aide à la reprise du travail et l'individualisation en fonction de la pathologie existera toujours. Cela a été donné comme garantie dès le départ. Aucune décision quant à l'inclusion éventuelle dans le RUA n'est prise et ne le sera avant juillet. Mon ­leitmotiv est de remettre les personnes ­handicapées en situation de ­travail, quand elles le souhaitent, de les former, les accompagner, et qu'il y ait un gain indiscutable à la reprise d'activité.

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