Sophie Cluzel, secrétaire d'Etat : "Je veux remettre les personnes handicapées en situation de travail"
INTERVIEW - Contestée par les associations, qui ont récemment quitté la table des concertations sur le revenu universel d'activité, la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, Sophie Cluzel, défend le bilan du gouvernement en matière de handicap. Avant la présentation du plan d'Emmanuel Macron mardi, elle détaille ses priorités.
Ecole, travail, numéro unique... mardi, Emmanuel Macron annoncera son plan pour les personnes en situation de handicap. Sophie Cluzel, secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées, détaille dans Le Journal du Dimanche les axes de travail du gouvernement et défend son bilan. Trois priorités ressortent : "la scolarisation des enfants handicapés", "le travail" et la simplification des démarches". Face aux associations inquiètes d'une éventuelle disparition de l'allocation adulte handicapé, elle assure que "aucune décision quant à l'inclusion éventuelle [de l'AAH] dans le RUA n'est prise et ne le sera avant juillet".
Lire aussi - L'alerte de 47 associations sur le handicap : "Il est temps de taper du poing sur la table"
Les associations attendent beaucoup de la Conférence nationale sur le handicap (CNH) de mardi. Comment ne pas les décevoir?
Cette Conférence nationale du handicap se déroule en milieu de quinquennat, elle est donc très attendue. Les précédentes ayant souvent eu lieu à la fin, elles n'engageaient que les gouvernements suivants… Elle est aussi élargie : 450 personnes, dont beaucoup issues de la société civile, des chefs d'entreprise signataires du manifeste pour l'inclusion, des médias signataires de la charte CSA, des élus, des présidents de conseils départementaux seront présents. Le handicap touche un Français sur cinq. C'est l'affaire de tous.
"Le nombre d'élèves en attente d'un accompagnant a été divisé par deux à la rentrée 2019 par rapport à 2018
"
Quelles seront les priorités du gouvernement pour l'acte II du quinquennat?
Notre méthode porte ses fruits. Avec l'Éducation nationale, nous avons engagé une révolution culturelle pour que la scolarisation des enfants handicapés ne soit plus incantatoire, mais bien réelle. Je ne dis pas que tout est abouti, c'est évident, mais la dynamique est enclenchée : le nombre d'élèves en attente d'un accompagnant a été divisé par deux à la rentrée 2019 par rapport à 2018. Mon mantra, c'est aussi le travail. Nous ne voulons plus, par exemple, de cette errance des demandeurs d'emploi handicapés baladés d'un guichet à l'autre. Ils sont plus de 500.000 et leur taux de chômage est deux fois plus élevé! Nous avons les outils, il nous faut maintenant des résultats concrets pour les personnes.
Dans les Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), les dossiers s'accumulent et un appel à manifester a été lancé mardi…
Ces guichets cristallisent les frustrations, alors que la simplification des démarches et la réduction des délais est au cœur de nos priorités. Les droits à vie que nous avons créés devraient alléger le traitement administratif des MDPH. Depuis le 1er janvier 2019, vous n'avez plus besoin d'aller chez le médecin tous les trois ans pour prouver votre handicap s'il est irréversible. Pour autant, cette mesure est appliquée de façon inégale sur le territoire. Fin décembre, 25% des demandes de renouvellement de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) ont débouché sur un octroi à vie, c'est insuffisant. Mais en plus, il s'agit d'une moyenne : cela va de 2% dans certains départements à 60% dans d'autres. Ce n'est pas acceptable.
"Nous avons des délais qui explosent et des situations ubuesques! Il faut s'attaquer urgemment à ce problème
"
Des familles dénoncent les délais de réponse. Que leur dites-vous?
Dans la loi, c'est quatre mois et nous en sommes parfois très loin. Nous avons des délais qui explosent et des situations ubuesques! Il faut s'attaquer urgemment à ce problème. Par ailleurs, l'absence de remontées statistiques régulières et officielles est indigne de notre pays. Comme si on s'était résigné aux listes d'attente à la MDPH, dans les établissements médico-sociaux… Je dis "stop"! Ça n'était pas la priorité des gouvernements précédents. Mais c'est la mienne! Nous aurons fin 2020 un système d'information unique qui nous permettra d'objectiver les situations : nous pourrons savoir ce qui est notifié aux personnes, dans quels délais et quels sont réellement les besoins non couverts, afin de pouvoir agir plus précisément là où se posent les problèmes.
"Une entreprise seule ne saura pas faire si elle n'a pas d'experts pour l'accompagner
"
Comment diminuer le taux de chômage des personnes handicapées?
Le quota actuel (6%) date de 1987 et n'est pas respecté. Être uniquement coercitif ne fonctionne pas. Une entreprise seule ne saura pas faire si elle n'a pas d'experts pour l'accompagner. À peu près la moitié des bénéficiaires d'un dispositif d'emploi accompagné, qui permet d'avoir un professionnel du handicap auprès de l'entreprise, basculent vers un emploi pérenne. C'est que ça marche. Il faut aussi s'appuyer sur les dispositifs existants. Aujourd'hui, 120.000 personnes sont accueillies dans un établissement et service d'aide par le travail (Esat) ; 35.000 sont salariées d'une entreprise adaptée, l'objectif étant d'arriver à plus de 70.000 d'ici la fin du quinquennat. Nous investissons pour cela 500 millions d'euros.
Des associations ont quitté les concertations sur le revenu universel d'activité (RUA). L'AAH va-t-elle disparaître?
Ça n'est pas du tout le deal de départ! Son budget sera sanctuarisé, il n'y aura pas de conditionnalité de l'aide à la reprise du travail et l'individualisation en fonction de la pathologie existera toujours. Cela a été donné comme garantie dès le départ. Aucune décision quant à l'inclusion éventuelle dans le RUA n'est prise et ne le sera avant juillet. Mon leitmotiv est de remettre les personnes handicapées en situation de travail, quand elles le souhaitent, de les former, les accompagner, et qu'il y ait un gain indiscutable à la reprise d'activité.
30 ans de la mort du professeur Jérôme Lejeune : une vie consacrée à ses patients
Il y a trente ans mourait le professeur Jérôme Lejeune, père de la génétique moderne. Généticien et médecin, il a consacré sa vie à ses patients qu’on appelait alors « mongoliens », dont il découvrit la cause du handicap : la trisomie 21.
Institut Jérôme Lejeune : la recherche au service des porteurs de trisomie 21
SCIENCE. Au cœur de Paris, l’Institut Jérôme Lejeune poursuit inlassablement ses recherches sur la trisomie 21. Présentation d'un établissement de santé précurseur.
L’Institut Jérôme Lejeune, spécialisé dans la trisomie 21 : « Nous pratiquons une médecine profondément holistique »
L’Institut Jérôme Lejeune propose un suivi complet des patients porteurs de trisomie 21, tout en alliant une activité de recherche. Actuellement, 3 000 patients y sont accompagnés, par des médecins spécialisés. À l'occasion de la journée mondiale de la trisomie 21, entretien avec Clotilde Mircher, chef de service de la consultation.
Handicap : « Être aidant, c’est du 24 heures sur 24 »
ACCOMPAGNER. À proximité de Lyon, une « maison de répit » propose d’épauler les aidants de personnes handicapées, en prévention d’un surmenage. Une vie au service de l’autre où beaucoup s’oublient.
Forme Olympique, par Céline Géraud - Florian Jouanny : le vélo à la force des bras
PARACYCLISME. Devenu tétraplégique après un accident de ski puis médaillé d’or de handbike aux Jeux de Tokyo, le Français impressionne.