Retraites : les experts-comptables se mettent dans les pas des avocats
Mécontents de voir leur caisse autonome absorbée par le futur régime universel de retraite, les experts-comptables reviennent à la charge pour obtenir des aménagements. Ils contestent les simulations du gouvernement dans l'étude d'impact du projet de loi.
Les négociations avec les avocats aiguisent les demandes d'autres professions. Mécontents de voir leur caisse autonome absorbée par le régime universel de retraite, les experts-comptables reviennent à la charge pour obtenir des aménagements . Le dossier, jusqu'ici géré par des syndicats de la profession, l'Ifec et ECF, vient d'être repris en main par l'Ordre. « Nous avons écrit au Premier ministre en début d'année, mais n'avons pas été entendus jusqu'ici », regrette Charles-René Tandé, son président, dans un entretien aux « Echos ». La profession devra attendre le mois d'avril pour être reçue.
Comme les avocats, les professionnels du chiffre possèdent leur caisse autonome, largement excédentaire. Leur régime propose une souplesse dans les cotisations, notamment en début de carrière, propre à l'activité d'un indépendant qui doit se constituer une clientèle.
Il est régi par un « âge pivot » de 65 ans, en dessous duquel les départs sont pénalisés par un malus. Son rendement, de 8,7 % est bien supérieur à celui attendu dans le régime universel, de 5 %. D'où la crainte que, pour des cotisations plus élevées, les pensions soient moins généreuses. « Pourquoi vouloir changer quelque chose qui fonctionne ? », interpelle Charles-René Tandé.
Pensions plus élevées
L'étude d'impact du projet de loi sur les retraites montre que les pensions des experts-comptables seraient nettement plus élevées dans le régime universel. Un professionnel qui commencerait sa carrière à 40.000 euros de rémunération en 2025 percevrait une retraite de 41.707 euros dans le système universel, contre 27.932 euros dans le système actuel.
L'Ordre conteste cette évaluation et veut mieux comprendre comment le gouvernement a fait ses calculs. « Nous pensons que l'inflation est prise en compte dans un cas, mais pas dans l'autre, ce qui fausse toutes les comparaisons », explique Charles-René Tandé.
Retraite par capitalisation
Les experts-comptables, dont certains affichent de hautes rémunérations, attirent l'attention sur l'absence de prestation pour les cotisations au-delà de 120.000 euros de rémunération. Le gouvernement considère qu'après la mise en place du régime universel, les hauts salaires pourront se constituer une retraite par capitalisation, d'autant que l'accès aux plans d'épargne retraite a été facilité avec la loi Pacte. Les experts-comptables argumentent que, dans ce cas, il faudrait accroître l'enveloppe déductible du revenu imposable et de la base retenue pour les cotisations.
Toute la question est de savoir comment cette profession, habituellement discrète, pourra se faire entendre. Elle n'a pas les mêmes moyens de pression que les avocats, dont la grève a provoqué un encombrement des tribunaux qui mettra des mois à se résorber. Certains ont lancé un appel à la « grève des comptes de campagne » mais qui ne fait pas l'unanimité dans la profession.
Ingrid Feuerstein