En moyenne, il faut cinq minutes de marche à un Rennais pour aller faire ses courses, contre trois minutes à pied pour un Lillois et quatre minutes pour un Bordelais.
La « ville du quart d’heure » s’est imposée dans certains programmes pour les élections municipales, mais d’où part-on ? La Gazette, dans le cadre de son enquête sur ce concept, a établi un état des lieux dans les plus grandes villes de France, celles comptant plus de 200 000 habitants. Avec comme objectif de répondre à la question : quel est le temps moyen de marche à pied des habitants de ces villes pour accéder à des équipements de la vie quotidienne ?
La « ville du quart d’heure », c’est un concept développé par Carlos Moreno : six grandes fonctions sociales – se loger et produire dignement, accéder aux soins, s’approvisionner, apprendre et s’épanouir – doivent être accessibles en un quart d’heure à pied ou à vélo depuis n’importe quel point de la ville. Dans le travail que nous avons réalisé, nous avons retenu comme critère 15 minutes à pied.
Comment nous avons fait
Nous avons privilégié la comparaison entre villes à la précision des calculs. Nous avons choisi la base des équipements de l’Insee, malgré quelques manques. Dans cette base, nous avons pris :
- les commerces (épiceries, supermarchés, hypermarchés),
- les écoles maternelles et primaires, les espaces sportifs (stades et gymnases),
- les piscines,
- les cinémas,
- les agences Pôle emploi.
Les commissariats de police et gendarmeries n’ont pas été conservés dans notre analyse car les données étaient incomplètes.
Nous aurions souhaité ajouter à notre calcul les espaces verts ou les bibliothèques municipales, mais nous n’avons trouvé aucune base de données convenable.
Nous avons calculé la durée d’un trajet à pied depuis 150 points choisis au hasard dans l’ensemble des sous-quartiers des villes étudiées – les IRIS définis par l’INSEE – avec l’équipement le plus proche.
Le calcul des temps de parcours est réalisé grâce à Open Street Map, qui simule pour chacun le chemin le plus rapide à pied, comme lors de l’utilisation d’un GPS. Voilà ci-dessous le résultat pour Paris (les autres cartes se trouvent en fin d’article).
La forte densité de Paris en fait une ville très accessible et la ville du quart d’heure semble déjà là. Ces bons chiffres cachent cependant quelques disparités entre quartiers et certains équipements n’ont pas été analysés.
Pour atteindre l’objectif dans les faits, il faut être sûr de n’oublier personne : « La ville du quart d’heure doit être valable pour tous », des plus jeunes aux plus âgés, explique Carine Rolland, adjointe à la maire de Paris chargée de la ville du quart d’heure.
Nous avons également établi une moyenne pondérée de ces durées en fonction de la population de chaque IRIS pour déterminer des temps de trajet moyens, par ville et par catégorie pour ainsi mieux les comparer. Faute de pouvoir correctement analyser le trajet vers le lieu de travail, nous avons mesuré la part des habitants se rendant à pied au travail, à partir des données collectées par l’Insee.
Enfin, pour mesurer le chemin restant à parcourir pour atteindre cet objectif de la ville du quart d’heure, nous avons mesuré la part de la population vivant à plus de quinze minutes à pied de ces différents équipements.
L’accès aux équipements, ville par ville
Cliquez sur chaque image pour la voir en plus grande résolution ; nous avons réalisé ces cartes pour
Diagnostic temporel
Dès 2014 à Rennes la grille de lecture du territoire s’est basée sur le temps : la carte réalisée et publiée ci-dessus s’intéresse à la question des temps d’accès aux commerces et services. L’actualisation de ces travaux est d’ailleurs en cours. De nombreuses méthodologies de diagnostic temporels ont été réfléchies depuis plusieurs années, notamment sous l’impulsion de l’association Tempo territorial.
Pour répondre aux interrogations de la Métropole Aix-Marseille-Provence sur la lecture publique, le cabinet d’études datactivist a de son côté travaillé en plusieurs étapes, en commençant par identifier les données souhaitées et existantes. Un travail autour de cartes isochrones – qui mettent en avant les zones accessibles dans des durées similaires – a été mené et l’ambition est d’équiper les bibliothèques de la métropole avec les données utiles à leur propre diagnostic. Le travail, encore en cours, devrait être présenté aux élus de la métropole au début de l’année prochaine.
Références
Le script en R qui a permis le calcul de ces durées de trajet.
Cet article fait partie du Dossier
Les territoriaux imaginent le monde d'après
Sommaire du dossier
- Un chemin pour le monde d’après
- La ville du quart d’heure à la recherche du temps perdu
- « Les DGS du XXIè siècle doivent être transgressifs »
- Quel temps d’accès moyen aux équipements et aux commerces dans les grandes villes ?
- Péréquation : une réforme attendue pour calmer le jeu
- Le manifeste de l’ADT-INET pour réussir la transition territoriale
- Vers un nouveau contrat social et environnemental
- Forte de ses atouts, la ruralité fait campagne
- Ces collectivités qui disent non au retour en force de la voiture
- Des acheteurs réalistes pour la commande publique de demain
- Ces acteurs locaux qui prônent un choc de décentralisation
- « C’est la continuité des services qui nous mobilise, plutôt que l’idée du monde d’après »
- Le numérique éducatif revient sur le devant de la scène pour lutter contre les inégalités
- Et si le changement climatique était enfin pris au sérieux ?
- La démocratie participative voit plus grand
- Les juristes territoriaux rêvent d’un autre monde
- Chargé de mission « résilience » : anticiper les chocs, capter les signaux faibles, c’est son métier
- Le numérique, un impératif pour absolument tous les agents
- Tourner la page du confinement, mais en gardant le meilleur
- La haute fonction publique plaide pour plus de souplesse et d’écoute par les politiques
- Les plateformes de mise en relation au secours des circuits courts alimentaires
- Si les juristes territoriaux avaient carte blanche, que changeraient-ils ?
- Un numérique accessible à tous et respectueux de l’environnement, bientôt labellisé
- Travail social : l’« aller vers » prime dans la relation à l’usager
- Le plan communal de sauvegarde, le couteau suisse anticrises
- La santé, fil rouge du plan local d’urbanisme
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- Quand un agrégateur de contenus devient vecteur de lien culturel
Thèmes abordés