Congé paternité porté à 30 jours : vrai changement, ou demi-mesure ?

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Congé paternité porté à 30 jours : vrai changement, ou demi-mesure ?

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Le gouvernement souhaite faire passer le congé paternité de onze à trente jours. Il pourrait aussi le rendre obligatoire.
Le gouvernement souhaite faire passer le congé paternité de onze à trente jours. Il pourrait aussi le rendre obligatoire.
© Radio France - 6PA

Sibeth Ndiaye, Marlène Schiappa, Adrien Taquet : ce week-end, trois ministres ont de concert dit leur volonté d'allonger le congé paternité, de 11 jours à un mois. Un allongement demandé de façon récurrente par de nombreux papas et des associations féministes, mais souvent de manière plus ambitieuse encore.

"À titre personnel, je suis très favorable à ce qu’il y ait une extension du congé paternité." Invitée de France 3 le 21 juin dans l'émission "Dimanche en politique", Sibeth Ndiaye s'est dite favorable au passage à 30 jours du congé paternité, contre onze actuellement. La porte-parole du gouvernement réagissait à la tribune d'un collectif de papas publiée le jour-même sur le site du Huffington Post, qui réclame cet allongement, à un mois minimum.

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Dans la foulée, sa collègue au gouvernement, la secrétaire d'État à l'égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, a partagé sur Twitter la tribune du Huffington Post, et a apporté son "soutien au congé paternité d'un mois. Le gouvernement y travaille", assure-t-elle Début juin, elle avait déjà affirmé à l'AFP qu'elle souhaitait "que l'on inscrive dans la loi l'allongement du congé paternité à un mois".

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Une revendication d'abord féministe

La revendication ne date pas d'hier. Tribunes, articles, études : l'allongement du congé paternité est régulièrement réclamé ces dernières années. En 2017 déjà, une pétition sur le sujet lancée par le magazine féministe Causette avait recueilli plus de 50.000 signatures. Il y a un an quasiment jour pour jour, le collectif "Pour une parentalité féministe" publiait un appel dans le Monde intitulé : "la réforme du congé paternité est une absolue nécessité". 

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Juin 2020 voit donc fleurir le mot-dièse #1moisminimum sur les réseaux sociaux, lancé par le collectif de papas à l'origine de la tribune du 21 juin dans le Huffington Post, dans laquelle ils veulent avant tout affirmer leur rôle dans ce combat, pour ne pas laisser les femmes seules :

"En tant que pères, nous pensons que nous avons un grand rôle à jouer. Nous constatons avec regret que la revendication d’un congé prolongé des hommes est bien souvent portée par les femmes. Plus actives, plus militantes, elles sont au premier rang de la mobilisation. Ne devrions-nous pas nous aussi nous exprimer davantage ?"

Cet allongement du congé paternité, il est en effet porté de longue date d'abord par les associations féministes, pour qui il est un point essentiel pour aller vers l'égalité entre les femmes et les hommes. La mesure permettrait des progrès significatifs en matière de répartition des tâches au sein du couple : d'après le Haut Conseil de la famille, les femmes prennent en charge les deux tiers du temps parental. Il serait aussi une réponse sur le plan de l'égalité professionnelle, la naissance d'un enfant étant trop souvent un frein dans la progression de carrière des femmes.

Et il n'y a pas que les organisation militantes qui le disent. En 2018, ces mêmes points sont soulignés dans un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas), qui préconise, pour qu'il soit vraiment efficace, de passer le congé paternité de 11 jours à au moins trois semaines.

30 jours, est-ce suffisant ?

Le gouvernement semble donc prêt à faire passer de 11 à 30 jours ce congé paternité (que certains voudraient rebaptiser congé de "parentalité", pour inclure aussi les familles homoparentales). Un pas vers plus d'égalité, d'autant que l'idée de rendre obligatoire ce congé semble faire son chemin au sein du gouvernement. Le secrétaire d'État chargé de la Protection de l'enfance Adrien Taquet estime "qu’il faut allonger le congé paternité, mais aussi le rendre obligatoire pour lutter contre les inégalités sociales". Trop de pères ont peur de prendre l'intégralité de leur congé parental aujourd'hui. L'obligation pour l'employé et donc pour l'employeur permettrait de répondre à cette crainte, alors que moins de la moitié des pères en CDD prennent leur congé, contre 80% des pères en CDI.  Cette obligation fait aussi partie des recommandations du rapport de l'Igas en 2018. Aujourd'hui, seul le congé de naissance, d'une durée de trois jours, est obligatoire.

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Mais pour beaucoup, cet allongement à 30 jours et l'éventuel caractère obligatoire ne suffirait pas à combler les inégalités qui existent à ce sujet entre les hommes et les femmes. La France resterait d'ailleurs très en retard sur nombre de ses voisins européens : le congé paternité est de trois mois en Norvège et en Islande, 112 jours en Espagne d'ici l'année prochaine, sans parler de l'Autriche, où il est d'un an, ou des 480 jours offerts en Suède. 

Le collectif "Pour une parentalité féministe" demande par exemple à ce que le congé pour le deuxième parent soit porté à égalité avec celui de la mère, soit 16 semaines possibles, dont 8 obligatoires. Une revendication que souhaitent porter certains partis politiques comme le PS et la France Insoumise, qui pourraient déposer des propositions de loi en ce sens dans les mois à venir. Mais pas sûr que le gouvernement soit séduit par l'idée d'aller au-delà des 30 jours. L'alignement du congé du deuxième parent sur la durée obligatoire du congé maternité, soit 8 semaines, couterait au moins un milliard d'euros par an au régime général de l'Assurance maladie.

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