EXPERIMENTATIONUne étude vante les purificateurs d’air contre la pollution en classe

Paris : Une étude vante les purificateurs d’air contre la pollution dans les salles de classe

EXPERIMENTATIONL’étude menée par l’association Respire dans deux écoles du 9e arrondissement à Paris affirme que les purificateurs permettent de diminuer de 20 à 30 % la pollution aux particules dans les salles de classe
Des enfants dans une salle de classe à Paris. (Illustration)
Des enfants dans une salle de classe à Paris. (Illustration) - CHAMUSSY/SIPA
Aude Lorriaux

Aude Lorriaux

L'essentiel

  • L’étude menée par l’association Respire a été menée dans deux classes d’une école maternelle du 9e arrondissement.
  • Pour Tony Renucci, directeur par intérim de Respire, « cette étude confirme que les purificateurs d’air sont des dispositifs utiles et complémentaires à des mesures de lutte contre la pollution de l’air ».
  • Concernant la propagation du Covid-19, des chercheurs se montrent prudents sur l’efficacité des purificateurs d’air.

Pour lutter contre la pollution aux particules qui s’insinue dans les salles de classe et bâtiments publics, faut-il installer des purificateurs d’air ? C’est ce qu’affirme une étude de l’association Respire, en partenariat avec la maire du 9e arrondissement, Delphine Bürkli et en lien avec des fabricants. Selon cette étude menée par Olivier Blond, ancien directeur de Respire désormais candidat aux régionales en Ile-de-France sur la liste de Valérie Pécresse, les purificateurs permettent de diminuer de 20 à 30 % la pollution aux particules.

Pour ce travail, deux classes de maternelle du 9e arrondissement ont été équipées de purificateurs et de capteurs d’air. La qualité de l’air a été mesurée pendant deux semaines de test. La première semaine, la classe A n’avait pas d’épurateur d’air et la classe B avait un épurateur d’air allumé. La deuxième semaine, la classe A avait un épurateur d’air allumé et la classe B n’avait pas d’épurateur d’air. Une différence de concentration de particules a été trouvée de l’ordre de 18,6 % la première semaine, et de 29,5 % la deuxième semaine dans la classe qui disposait d’un purificateur allumé.

Efficaces contre le Covid-19 ?

Pour Tony Renucci, directeur par intérim de l’association Respire, « cette étude confirme que les purificateurs d’air sont des dispositifs utiles et complémentaires à des mesures de lutte contre la pollution de l’air ». Étaient également installés des capteurs de CO2 qui indiquaient par un petit voyant passant à l’orange puis au rouge la concentration de CO2, signalant à l’enseignant qu’il faut aérer la pièce. Ensemble, ces dispositifs « permettent probablement de lutter contre la propagation du Covid-19 dans les établissements scolaires », affirme Respire, citant une étude de l’Inserm qui a montré que les purificateurs pouvaient supprimer 99,9 % des virus.

Contacté par 20 Minutes, Manuel Rosa Calatrava, directeur de recherche à l’Inserm qui a coordonné l’étude citée, se montre prudent : « Je ne connais pas les spécificités techniques des épurateurs de cette société. Leurs marqueurs ce sont des particules physiques qui ont une taille de 2,5 micromètres. C’est un paramètre de référence dans le domaine de la qualité de l’air intérieur, mais ne présage en rien en ce qui concerne les performances contre les virus respiratoires, qui ont une taille de l’ordre de 0,2 micromètre. C’est une bonne chose d’avoir évalué un épurateur in situ, mais en aucun cas on ne peut dire que cet épurateur sera efficace sur des particules virales infectieuses sans que cela soit testé expérimentalement avec du virus SARS-CoV-2. »

En novembre, l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) mettait d’ailleurs en garde contre certains dispositifs dits « anti-Covid-19 » et précisait que seuls les dispositifs équipés de filtres HEPA de classe minimale H13 « permettent d’arrêter efficacement les aérosols susceptibles de véhiculer le virus ». Ce qui est le cas des machines de Natéosanté testées dans l’étude, selon Olivier Blond.

Pas une solution « magique »

Par ailleurs, les purificateurs d’air ne peuvent en aucun cas se substituer à d’autres mesures plus efficaces, rappelle Gaëlle Guyot, chercheuse experte sur les questions de ventilation au Cerema (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement) : « Les scientifiques s’accordent là-dessus, les premières mesures à mettre en œuvre c’est de renouveler l’air dans les bâtiments, que ce soit par des dispositifs de ventilation ou en ouvrant les fenêtres. Ensuite il faut réduire les sources d’émission dans l’air : réduire le nombre de personnes dans les salles, limiter les émissions liées aux matériaux de construction, aux produits d’entretien, et réduire la pollution extérieure. Une fois qu’on a mis en place ces mesures-là, si c’est insuffisant, les purificateurs peuvent être un complément », prévient la chercheuse.

Un constat auquel souscrit Tony Renucci : « Les purificateurs d’air doivent être vus comme un complément. Ce n’est pas parce qu’on met des purificateurs qu’on doit continuer à construire des écoles aux abords des routes. Il ne faut pas que cela devienne une excuse pour dire "il y a un purificateur, tout est réglé", ça ne doit pas se substituer à des mesures de piétonnisation. »

Une expérimentation à Saint-Ouen, la ville de Paris réticente

Respire veut désormais « amplifier le dispositif à d’autres écoles et salles de classe » et annonce une expérimentation à Saint-Ouen. La mairie de Paris, quant à elle, n’emboîtera pas le pas. Contactée par 20 Minutes, l’adjointe à la santé publique et environnementale Anne Souyris précise que la collectivité a « fait le choix de capteurs d’air, ou capteurs de CO2 » et que les « purificateurs d’air ne sont pas validés scientifiquement », hormis, donc, celui examiné par le laboratoire de l’Inserm à Lyon.


Notre dossier sur la pollution de l'air

L’adjointe craint aussi que ces engins poussent « à ne pas ouvrir les fenêtres », alors qu’on sait que l’ouverture des fenêtres aide à lutter contre le coronavirus. « Il faut se méfier des actes magiques, tout le monde a envie de se débarrasser de la pollution mais pour l’instant ce n’est pas prouvé », estime l’élue. Et de mettre en avant sa propre étude, menée en ce moment même avec Airparif, le CNRS et Centrale supelec, qui doit évaluer les capteurs de CO2 et dont les résultats sont attendus en juin.

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