Au moins 287 millions d’euros de fraude à l’Assurance maladie en 2019

Selon le directeur général de la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam), la fraude identifiée est surtout le fait des professionnels de santé et de filières organisées.

 Les démarches frauduleuses des professionnels de santé ne représentent que 20 % des cas, mais elles pèsent 135,1 millions d’euros. (Illustration)
Les démarches frauduleuses des professionnels de santé ne représentent que 20 % des cas, mais elles pèsent 135,1 millions d’euros. (Illustration) LP/ Philippe Lavieille

    « Au 31 décembre 2019, il y avait en France 58,4 millions de cartes Vitale en circulation pour 59 millions d'habitants de plus de 16 ans. La question des cartes Vitale n'est pas un marqueur de fraude », a tranché ce mardi Nicolas Revel, directeur de la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam), devant la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur la fraude aux prestations sociales.

    On est loin du surplus de 2,6 millions de cartes en circulation, selon l'estimation évoquée en février dernier devant la même commission. La polémique née alors pointait le risque de bénéficiaires installés à l'étranger se faisant payer des prestations indues.

    Dans les faits, tous les bénéficiaires potentiels n'en font pas la demande. « Il y a des personnes qui peuvent ne pas avoir été recensées par l'Insee, comme les étudiants étrangers, les retraités vivant à l'étranger, les assurés de la caisse des Français de l'étranger, les détachés restant salariés en France, des personnes qui ont quitté le territoire sans le signaler… », explique-t-on au siège de l'assurance maladie pour justifier ce différentiel.

    2,7 millions de cartes Vitale détruites en 2019

    En 15 ans, 44 millions de cartes Vitale ont été supprimées car beaucoup avaient été données aux mêmes personnes par leurs différents régimes d'affiliation. « Encore en 2019, le régime général en a supprimé 2,7 millions pour cause de décès de l'assuré, départ à l'étranger… Et 100 000 ont été détruites car leurs bénéficiaires, contactés pour vérifier leur résidence en France, n'ont jamais répondu », a souligné le directeur de la Cnam, qui précise que « ces cartes n'étaient à l'origine que de 0,023 % des feuilles de soins ». Explication : « souvent des gens perdent leur carte, en demandent une nouvelle, retrouvent l'ancienne et s'en servent ».

    Quant à la vraie fraude, la plus importante, elle concerne moins les assurés que les « offreurs de soins ». « En 2019 nous avons identifié 287 millions d'euros de fraude et les dispositifs de contrôle ont permis d'éviter le paiement de 200 millions d'euros », détaille le directeur de l'Assurance maladie. L'an dernier, les 1650 agents affectés à la lutte contre la fraude et les indus ont vérifié « 13 millions de factures, 23000 enquêtes ont été ouvertes à la suite d'un préjudice constaté, et 8800 actions en contentieux ont été ouvertes, contre 5500 en 2014 ».

    La fraude des professionnels représente 135,1 millions d'euros

    Interrogée, la Caisse nationale d'assurance maladie nous a fourni le détail de cette fraude. Celle émanant des assurés représente 51 % des arnaques, mais seulement 21 % du préjudice financier. En revanche, les activités fautives des professionnels de santé et établissements ne représentent que 20 % des cas, mais avec 135,1 millions d'euros, elles représentent 48 % du préjudice total. Parmi ces acteurs 48 % sont des professionnels de santé (médecins, pharmaciens, infirmières libérales, kinés, transporteurs) et 31 % des établissements de soins où la tarification à l'activité (T2A) a souvent été à l'origine de surfacturations.

    Les limiers de la Cnam ont identifié aussi des « groupes organisés » sur Internet, diffusant des pratiques illicites : arrêts de travail fictifs ou encore facturation à l'Assurance maladie de médicaments qui finiront dans d'autres pays… Selon Nicolas Revel, « chiffrer la fraude est impossible, son ampleur apparaît au fur et à mesure que nous la découvrons ».