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Dépendance : la réforme n'aura pas lieu en 2020

Annoncé à l'origine pour début 2019, le projet de loi pour l'autonomie est de nouveau reporté. Une décision qui désespère les professionnels, mais qui inquiète également certains députés de la majorité, qui ont réclamé au Premier ministre Jean Castex une accélération du calendrier, en vain. 

Emmanuelle Souffi , Mis à jour le
Les professionnels du grand âge veulent un nouveau texte sur la dépendance.
Les professionnels du grand âge veulent un nouveau texte sur la dépendance. © JEFF PACHOUD-POOL/SIPA

L'impatience a laissé place à l'agacement. Depuis deux ans, tous les professionnels du grand âge attendent un nouveau texte sur la dépendance, mais celui-ci ne cesse d'être repoussé. Annoncée pour début 2019, puis pour juillet dernier et enfin pour janvier prochain, cette réforme, qu'Emmanuel Macron souhaite mettre à son actif et que son propre camp réclame depuis le début du quinquennat, va connaître un énième report. "Il n'y aura pas de projet de loi d'ici à la fin de l'année car le travail n'est pas abouti", annonce Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'Autonomie.

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Six rapports sont pourtant déjà sur sa table, fruit d'un an et demi de concertations. "Soit plus de 500 propositions", s'étrangle l'ancien député socialiste Jérôme Guedj, qui a lui-même mené pour le gouvernement une mission sur l'isolement. Une série de consultations devait démarrer à la rentrée sur quatre thèmes : aides à domicile, métiers, territoires, établissements. Mais elles aussi ont été remises à plus tard. "Il semble visiblement plus important de présenter une loi sur le séparatisme que sur le grand âge", tacle Luc Broussy, directeur du Mensuel des maisons de retraite.

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"Il y a toujours plus urgent"

Début août, Emmanuel Macron avait pourtant insisté sur l'importance d'un tel chantier alors que le nombre de Français dépendants ­devrait doubler chaque année jusqu'en 2030. Mais le chef de l'Etat se laisse encore du temps. Afin de boucler son mandat sur une dernière réforme consensuelle et de rééquilibrer son bilan? "Il y a toujours plus urgent que le sort des personnes âgées, qui ne font jamais partie des priorités, déplore Pascal Champvert, président de l'Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA). Or cette absence de réforme est responsable des décès liés au Covid, des 3.000 morts par an de la canicule et des 10.000 de la grippe." Les élus de la majorité, pourtant, y tiennent. Plusieurs députés, dont Agnès ­Firmin-Le Bodo (Agir) et Cyrille Isaac-Sibille (MoDem), ont récemment écrit au Premier ministre pour réclamer une accélération du calendrier. "À la fin de la législature", a répondu Jean Castex. Ce qui ne les a pas rassurés.

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Lire aussi - Dépendance, cette réforme qui se fait attendre

La création, cet été, d'une cinquième branche de la Sécurité ­sociale (après la maladie, la vieillesse, la santé au travail et les ­retraites) avait pourtant été saluée. Mais la question du financement de ce nouveau risque demeure entière : ce n'est qu'en 2024 que la caisse d'amortissement de la dette sociale lui cédera 0,15 point de CSG, soit 2,3 milliards d'euros par an. D'ici là, elle aura besoin de 3 à 6 milliards. Olivier Véran, le ministre de la Santé, n'a pour l'heure promis qu'un milliard de plus dans le cadre du prochain budget de la Sécu. ­Jérôme Guedj se désole de ce manque de moyens : "C'est une branche factice ! Il faut la financer."

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Les professionnels réclament des aides à l'embauche

Rendu mardi, le rapport de ­Laurent Vachey, l'inspecteur général des finances chargé de trouver des pistes de financement, suggère une série de prélèvements sur les retraités ou des réductions d'avantages fiscaux, qui passent très mal. Certaines de ses préconisations pourraient se retrouver dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2021. Mais ce sont surtout des aides pour embaucher et revaloriser les filières de formation que réclament les professionnels, qui peinent à recruter. "Le sujet des métiers est la pierre angulaire, estime ­Dominique Libault, président du Haut Conseil du financement de la protection sociale et auteur d'un rapport unanimement salué. Sans ça, les beaux projets n'auront pas beaucoup de sens." La dernière réforme sociale du quinquennat attendra encore.

Le congé pour les aidants se fait attendre. Presque un an après l'annonce de la création d'un congé indemnisé de trois mois pour les aidants qui soutiennent un proche âgé, malade ou handicapé, la mesure n'existe que sur le papier. Le décret d'application, qui doit préciser ses conditions et son montant, n'est toujours pas paru. Cet été, plusieurs députés s'en sont émus. Ministre chargée de l'Autonomie, Brigitte ­Bourguignon a promis un texte ce mois-ci et une entrée en vigueur en octobre. Le 9 septembre, la Caisse nationale d'allocations familiales a donné un avis favorable au projet de décret qui prévoit de fixer le montant de l'allocation journalière à 52,08 euros si l'aidant est une personne isolée et à 43,83 euros s'il est en couple. Près de 11 millions de Français accompagnent un parent ou un enfant dépendant. Beaucoup disposent de faibles ressources car ils ont dû cesser de travailler pour consacrer du temps à leur proche. 

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