DROITSPourquoi seulement 1,7 % des salariés ont utilisé leur CPF en 2018 ?

Pourquoi le compte personnel de formation n’a-t-il été utilisé que par 1,7 % des salariés du privé en 2018 ?

DROITSPar ailleurs, 2,2 % des demandeurs d’emploi se sont formés en mobilisant leur compte personnel de formation la même année
Le compte personnel de formation est utilisable tout au long de la carrière.
Le compte personnel de formation est utilisable tout au long de la carrière. - J. Mars / JDD / Sipa
Catherine Abou El Khair

Catherine Abou El Khair

L'essentiel

  • En 2018, le taux de recours au compte personnel de formation était de 1,7 % parmi les salariés du privé, indique une étude publiée ce mercredi par la Dares.
  • De 2015 à 2018, 900.000 formations ont été suivies en utilisant les droits acquis dans ce compte, créé en 2014.
  • De nombreux actifs disposent de crédits qu’ils n’utilisent pas, constate notamment la Caisse des dépôts et des consignations, opérateur du CPF.

Avec sa nouvelle appli, le gouvernement arrivera-t-il à faire décoller le compte personnel de formation ? Des chiffres publiés aujourd’hui par la Dares, l’institut statistique du ministère du Travail, montrent l’ampleur de la tâche. Car trois ans après son lancement, en 2015, le compte personnel de formation n’a été utilisé, en 2018, que par 1,7 % des salariés du privé. Autant dire une part très faible des actifs.

La démocratisation de ce CPF, aussi un objectif du gouvernement, constitue un autre challenge. Les diplômés du supérieur sont en effet majoritaires parmi les utilisateurs de ce compte, alors qu’ils sont minoritaires par rapport à l’ensemble des salariés ; 2,7 % des cadres et professions intellectuelles supérieures ont utilisé leur CPF, contre 2,3 % des employés, 1,1 % des professions intermédiaires et 1 % des ouvriers. Ingénieurs, cadres et agents de maîtrise profitent notamment de ces droits pour suivre des formations en langues, les plus mobilisées dans le cadre du CPF, avant les formations en informatique, qui arrivent en deuxième position.

Moins représentés, les publics moins qualifiés consomment aussi malgré tout des formations telles que le Caces (certificat d’aptitudes et à la conduite en sécurité) ou le permis B. En 2018, 11,7 % des formations concernaient le transport, la manutention et le magasinage pour les salariés. Celles-ci étaient aussi les plus fréquemment suivies parmi les demandeurs d’emploi. Globalement, 2,1 % des personnes inscrites à Pôle emploi en 2018 ont aussi utilisé leur CPF.

Un CPF vaguement connu

Depuis 2015, en cumulé, 900.000 formations ont été suivies à travers le compte personnel de formation dans le secteur privé, et 614.000 par les demandeurs d’emploi. C’est peu, si l’on rapporte ce chiffre aux 29,7 millions d’actifs en France en 2017. Et ce alors même que l’outil doit permettre à ses titulaires d’être davantage « acteurs » de leur formation professionnelle.

Le CPF est plutôt connu : 57 % des Français déclarent être au courant de son existence, selon un sondage publié début février par le site d’information spécialisé Centre Inffo. Mais 81 % des sondés attendent aussi d’être davantage renseignés sur ce compte et ses modalités d’utilisation, selon ce même baromètre. L’autre problème est que 75 % des sondés déclarent ne pas connaître le montant de leurs droits, autrefois crédités en heures de formation (24 heures par an) et désormais convertis en euros (500 euros par an, 800 euros pour les salariés peu ou pas qualifiés, les personnes handicapées).

D’importants montants inutilisés

Ignorant leurs droits ou n’en voyant pas l’intérêt, de nombreux Français n’ont pas activé leur compte personnel de formation. Et ce malgré des montants de droits disponibles qui ne sont pas négligeables. Dans une étude également publiée ce mercredi, la Caisse des dépôts estime à 2.000 euros en moyenne la somme potentiellement mobilisable par les salariés à la fin octobre 2019.

Et pour cause : en plus des droits « CPF » disponibles depuis 2015, la majorité des salariés n’a pas reporté ses droits accumulés dans le cadre du DIF (droit individuel à la formation), qui existait jusqu’en 2015. Plus de 1,3 million de salariés aurait même atteint le maximum de leurs droits CPF comme DIF, soit un total de 3.240 euros non utilisés.

Formations longues plus rares

Avec de tels stocks, rien d’étonnant, donc, à ce que les formations en langues, informatique et transports soient les plus utilisées dans le cadre du CPF. Leur montant moyen est en effet proche ou inférieur à 2.000 euros, selon l’étude de la Caisse des dépôts, qui livre des données sur leurs coûts.

Pour pouvoir s’offrir des formations plus onéreuses, généralement diplômantes, le CPF ne suffit pas. Il faut alors obtenir le cofinancement de son entreprise ou d’un opérateur de compétences (Opco), mais aussi avoir l’autorisation de son employeur pour les suivre, lorsque celles-ci ont lieu durant le temps de travail. D’où un nombre relativement faible (moins de 10.000 par catégorie) de formations financées via le CPF dans des domaines tels que le commerce, la finance, les ressources humaines, la comptabilité, ou encore le travail social… Là où pour la seule année 2018, 150.000 formations en langues ont été suivies grâce au CPF.

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