Covid-19

Le Brésil forcé de mettre en place un programme social d’urgence inédit

12 min

Pour affronter la crise sanitaire sociale, le président Jair Bolsonaro a dû, sous la pression du Congrès, mettre en œuvre des aides sociales qui feront date.

9 juillet 2020. Jeune villageoise du Mato Grosso dont le frère a été emporté par le coronavirus. Face au virus qui a décimé 150 000 Brésiliens et à la crise sociale qui s'en est suivie, le gouvernement a décidé de débloquer une aide sociale exceptionnelle. PHOTO : Mads Nissen/Politiken/PANOS-REA

Quelque 150 000 morts de la Covid-19 pour 207 millions d’habitants au 11 octobre, un produit intérieur brut (PIB) en recul de 5,9 % au premier puis de 11,4 % au deuxième trimestre 2020, selon l’IBGE, l’Insee brésilien, une monnaie, le réal, qui a perdu en moins d’une année 50 % de sa valeur par rapport au dollar… l’économie brésilienne, frappée par une crise intense en 2017-2018 dont elle ne s’était pas encore remise, reçoit…

 

Quelque 150 000 morts de la Covid-19 pour 207 millions d’habitants au 11 octobre1, un produit intérieur brut (PIB) en recul de 5,9 % au premier puis de 11,4 % au deuxième trimestre 2020, selon l’IBGE, l’Insee brésilien, une monnaie, le réal, qui a perdu en moins d’une année 50 % de sa valeur par rapport au dollar… l’économie brésilienne, frappée par une crise intense en 2017-2018 dont elle ne s’était pas encore remise, reçoit un coup de massue de plus avec les effets économiques du confinement entamé en mars.

Ouverture de ligne de crédit à taux zéro pour les entreprises, garantie de prêt, prise en charge d’une partie des salaires en cas de diminution forcée du temps de travail, renflouement des Etats brésiliens, exsangues et en manque cruel de trésorerie, injections de liquidités pour stabiliser le système bancaire... le train de mesures anti-crise du néo-libéral ministre de l’Economie Paulo Guèdes, fidèle disciple de Milton Friedman, n’a surpris personne tant est admise l’intervention de l’Etat, assureur en dernier ressort des entreprises privées en économie de marché.

Un programme social taille XXL

En revanche, la surprise, de taille, est venue de la décision, imposée par les circonstances et sous la pression d’une majorité hétéroclite au Congrès, d’allouer une aide directe provisoire (AU) aux 40 millions de travailleurs informels, aux chômeurs non officiels ainsi qu’aux familles pauvres. Cette aide est d’une ampleur jamais connue eu égard à son montant : 58 % du salaire minimum par personne avec une limite à deux bénéficiaires par foyer, et 116 % pour une femme cheffe de famille ou célibataire avec enfant). Elle est bien plus généreuse que les traditionnels programmes sociaux du pays, dont la célèbre Bolsa Família – allocation sous condition de ressources versée à environ 11 millions de familles pauvres, symbole des années Lula.

La surprise, de taille, est venue de la décision d’allouer une aide directe provisoire (AU) aux 40 millions de travailleurs informels, aux chômeurs non officiels ainsi qu’aux familles pauvres

Inédite aussi pour la largeur de son spectre : 68 millions de bénéficiaires, soit 75 % de la population active et 42 % des foyers brésiliens, selon l’IBGE. Cette ampleur s’explique par l’absence de critères sélectifs à l’entrée, à l’exception d’un âge plancher de 18 ans et d’un plafond de ressources fixé respectivement à 50 et 300 % du salaire minimum par individu ou par foyer. Même les personnes absentes des registres sociaux, ou dépourvues de compte bancaire demeuraient éligibles en créant, via l’application dédiée, un compte digital provisoire.

Un savoir-faire dans la mise en œuvre des programmes sociaux

Trente jours après l’entrée en vigueur de la loi, l’application mobile simplifiée déployée par la banque publique Caixa Econômica, intermédiaire financier de l’Etat pour l’occasion, croisait déjà automatiquement les données de 50 millions de Brésiliens avec celles de l’administration sociale et des services des impôts (Receita Federal), et initiait dans la foulée le versement de la première tranche de l’AU. Cette performance, pour un pays dit émergent, quinze fois plus grand que la France, est une preuve du savoir-faire du pays dans la mise en œuvre des grands programmes sociaux depuis celle de la Bolsa Família en 2004.

Malgré tout, compte tenu de l’envergure du programme, les administrations mobilisées dans l’urgence n’ont pas su éviter des défaillances dont celle d’avoir poussé 6 millions de possibles bénéficiaires à faire appel à l’aide juridictionnelle d’Etat (Defensoria Pública da União), ou bien encore d’avoir provoqué d’importantes files d’attente aux portes des agences et des points relais (Lotéricas) de la Caixa Econômica, en pleine pandémie.

Un effort budgétaire très important

Dans cette affaire, il va sans dire que ce gouvernement, pourtant élu sur la base d’un programme économique austéritaire, a joué contre nature le rôle de grand dépensier keynésien. L’AU, renouvelée une première fois en juillet puis une seconde fois avec une décote de 50 % soit cinq mensualités à 600 réals brésiliens (90 euros) et quatre à 300 (45 euros), aura coûté à son extinction à la fin décembre de cette année, 254 milliards de réals (38 milliards d’euros), le nécessaire pour financer pas moins de neuf années de Bolsa Família, selon une estimation du ministère de la Citoyenneté, soit le plus vaste programme d’aide sociale d’Amérique latine.

Une telle aide directe aux ménages de 3,5 points de PIB, équivaudrait en France à une injection, en dix mois, de 73 milliards d’euros !

Une telle aide directe aux ménages de 3,5 points de PIB, équivaudrait en France à une injection, en dix mois, de 73 milliards d’euros ! Un temps évoqué par le gouvernement, le financement du programme par création monétaire a finalement été écarté tout comme une hausse des impôts, notamment sur les ménages les plus aisés (l’impôt réel sur les dividendes est de 3 % au Brésil), chasse gardée électorale du Président. En optant pour l’émission en masse de bons du Trésor, le gouvernement a donc fait le choix de laisser filer la dette publique.

Un impact social et économique quasi immédiat

Avec 76 % de l’argent effectivement fléché vers les strates sociales et les familles les plus précaires (gagnant moins de 654 réals par mois, soit 98 euros), les effets sociaux de l’AU ne se sont pas fait attendre. Dès juillet, une étude de la fondation Getulio Vargas pointait la sortie, entre juin et juillet, de 1,9 million de Brésiliens de l’extrême pauvreté estimée à 3,2 % de la population (familles dont le revenu par tête mensuel est inférieur à 154 réals, environ 30 euros), un niveau jamais atteint depuis 1976, année de la mise en œuvre du relevé statistique.

Plus généralement, les familles modestes comprenant nombre de travailleurs informels (coiffeurs, vendeurs ambulants, esthéticiens, réparateurs en tout genre...) ont vu leurs revenus augmenter de plus de 100 % pour celles des deux premiers déciles et en moyenne de 24 %, l’AU faisant plus que compenser les pertes liées aux mesures de confinement.

L’impact macroéconomique de l’AU sur la conjoncture apparaît tout aussi spectaculaire. En jouant le rôle de principal stabilisateur de la demande interne en temps de confinement, l’AU a permis au Brésil d’éviter le pire. Cet effet doit à l’ampleur du choc et aux caractéristiques des bénéficiaires, peu enclins à épargner ou à privilégier l’achat de produits importés plus sophistiqués et onéreux.

L’AU, circulant activement dans l’économie réelle, pourrait contribuer positivement à hauteur de 2,58 % au PIB du Brésil en 2020 et de 6,58 % dans les Etats plus modestes du Nord et du Nordeste

Selon Ecio Costa et Marcelo Freire, économistes à l’Université fédérale du Pernambouc à Recife, l’AU, circulant activement dans l’économie réelle, pourrait ainsi contribuer positivement à hauteur de 2,58 % au PIB du Brésil en 2020 et de 6,58 % dans les Etats plus modestes du Nord et du Nordeste. Ce qui a amené début octobre le FMI à fortement réviser à la baisse ses prévisions de récession pour le pays en 2020 de 9,1 % à 5,8 %.

L’AU est prévue pour durer jusqu’à la fin décembre seulement. Mais les économistes redoutent déjà les effets délétères que son arrêt définitif pourrait avoir sur la reprise de l’activité en 2021. Sans parler des enjeux politiques, dont le président Bolsonaro a bien conscience, c’est pourquoi il fait déjà planer le doute sur le maintien de l’AU jusqu’en juin 2021. Car l’AU, au-delà des considérations socio-économiques, a peut-être initié un mouvement de recomposition électorale qui pourrait peser lourd dans la perspective des élections présidentielles de 2022.

Un gain saisissant de popularité

En effet, depuis son entrée en fonction en janvier 2019 et jusqu’en juin 2020, l’impopularité du président Jair Bolsonaro n’a cessé de progresser – son taux de réprobation passant de 30 %, trois mois après sa prise de fonction en mars 2019, à 44 % en juin 2020 – au détriment des opinions neutres.

Toutefois, tandis que la Covid-19 a infecté plus 3 millions de personnes parmi lesquelles 100 000 sont décédées, le sondage réalisé en août dernier révèle un net renversement de tendance. La proportion d’insatisfaits régresse globalement de 10 points en l’espace de deux mois, au profit des opinions neutres et positives, à parts égales, qui atteignent respectivement 27 % et 37 %. Une embellie confirmée en septembre dans une étude réalisée par l’IBOPE, selon laquelle le Président recueille 40 % d’avis positifs contre 29 % de négatifs.

Les gains sont particulièrement notables dans le Nordeste (56,5 millions d’habitants, soit 27 % de la population nationale), seule région du pays qui lors de l’élection présidentielle de 2018 avait affiché sa très nette préférence pour le candidat rival de Bolsonaro, Fernando Haddad, intronisé par Lula, lui octroyant une très large victoire avec près de 70 % des voix, contre 45 % en moyenne nationale. On ne peut manquer d’observer la concomitance entre cette forte régression de l’insatisfaction et la progressive libération de l’AU à partir de la fin avril qui a particulièrement profité au Nordeste, où le taux d’informalité atteint 44,4 % de la population occupée en août (contre 33,9 % en moyenne nationale).

Le Nordeste est aussi, avec le Nord, la région qui présente les plus fortes proportions de domiciles dont l’un des résidents bénéficie de l’AU, respectivement 59,1 % et 61 %, contre 43,9 % pour l’ensemble du Brésil.

La réduction de l’insatisfaction nordestine doit également être rapprochée de la série de visites entreprises par Jair Bolsonaro dès le mois de juin dans plusieurs Etats de la région, où il a inauguré divers ouvrages d’infrastructure, tout en annonçant des investissements locaux en provenance du gouvernement fédéral. Soigneusement mises en scène et médiatisées, ces visites ressemblaient à s’y méprendre à des tournées électoralo-religieuses où des foules en liesse de fidèles venaient accueillir le messie (son second prénom est Messias) à sa descente d’avion.

… mais pour combien de temps ?

Il serait néanmoins hasardeux de conclure que les électeurs du Nordeste, après avoir tourné le dos au candidat Bolsonaro en 2017, se sont désormais ralliés durablement à leur Président. Bien que l’AU ait été prolongée à deux reprises, il a déjà été annoncé et maintes fois répété, même si le Président fait planer le doute, que son versement ne saurait perdurer au-delà de décembre, pour des raisons budgétaires. Si tel était le cas, l’arrêt de l’AU cumulé aux effets de la crise économique, d’ailleurs amorcée bien avant la crise sanitaire, va se faire durement sentir en début d’année prochaine.

Qui plus est, certains groupes de la coalition qui avait porté Bolsonaro au pouvoir en 2018 et dont les intérêts et valeurs étaient assez hétérogènes, pourraient le contraindre d’en finir avec ses largesses sur le plan social. Outre les militaires et les évangéliques – dont l’adhésion au chef de l’Etat reposait avant tout sur la défense de valeurs conservatrices, religieuses et/ou nationalistes –, de nombreux secteurs du patronat et des investisseurs, partisans d’un Etat minimal, avaient apporté leur soutien essentiellement dans l’espoir de voir mener à terme des réformes libérales qui, selon eux, tardent encore à venir.

Certains groupes de la coalition qui avait porté Bolsonaro au pouvoir en 2018 et dont les intérêts et valeurs étaient assez hétérogènes, pourraient le contraindre d’en finir avec ses largesses sur le plan social

Ils sont représentés au gouvernement par Paulo Guedes, un des piliers de la victoire de Bolsonaro et actuel ministre de l’Economie, dont le portefeuille recouvre également les Finances, le Plan, le Travail et enfin l’Industrie et le Commerce extérieur, domaines auparavant répartis entre plusieurs ministères. Or, Paulo Guedes a vu d’un mauvais œil l’implantation, puis le renouvellement de l’AU, allant jusqu’à brandir le spectre de la destitution du Président, procédure autorisée par un amendement constitutionnel voté en 2016 au cas où les dépenses publiques augmenteraient à un rythme supérieur à celui de l’inflation.

Jair Bolsonaro se trouve donc pris dans une injonction contradictoire. D’une part, respecter la contention de dépenses publiques mise à mal avec l’AU, afin de ménager les milieux d’affaires qui ont misé sur sa candidature dès 2018 en échange d’une large délégation des questions économiques à Paulo Guedes. D’autre part, garantir sa réélection en 2022, opération qui nécessite d’étendre son électorat pour remplacer les classes moyennes qui l’avaient aussi porté au pouvoir en 2018, et dont une partie l’a lâché au cours de la première année de son mandat.

A ce titre l’AU peut s’avérer être un instrument d’une efficacité redoutable, comme l’a été en son temps le programme Bolsa Família pour le maintien au pouvoir du Parti des travailleurs.

Il est pour l’instant difficile de prévoir les arbitrages que l’actuel Président fera dans les prochains mois. Jair Bolsonaro a acquis et démontré au cours de sa longue trajectoire, un certain pragmatisme, changeant huit fois d’affiliation politique au gré des opportunités que lui offraient les différents partis auxquels il adhérait.

La politique est d’ailleurs devenue au fil des années et des naissances, une affaire de famille : trois de ses enfants exercent des mandats électoraux à différentes échelles de pouvoir – l’aîné est sénateur, le second conseiller municipal et le troisième député fédéral – et sont en outre activement engagés dans la promotion et, le cas échéant, la défense de la carrière paternelle, notamment sur le web. La création en novembre 2019 d’un parti politique autour de la figure de Bolsonaro, dont la vice-présidence serait assurée par l’un des fils, vient parachever l’entreprise familiale. L’APB, ou Alliance Pour le Brésil, a un nom opportunément suggestif qui évoque l’alliance fondatrice d’une communauté : familiale, religieuse et nationale.

Christine Jacquet est professeure de sociologie à l’Université fédérale du Sergipe (UFS) au Brésil. Julien Dourgnon est économiste et consultant.

 

  • 1. Selon le Conseil des Secrétariats à la Santé (Conselho Nacional dos Secretários de Saúde)

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Commentaires (18)
julien D 29/10/2020
....D'ailleurs le programme a fait l'objet d'une réévaluation des dossiers en septembre avec un gros nettoyage dans la base des bénéficiaires. Mais dans l'ensemble, je maintiens : ce programme a bien rempli son office. Enfin, une chose est assez certaine, la hausse des prix qui n'est pas générale ( au contraire malgré la hausse du prix des importations, l'inflation est exceptionnellement modérée pour un pays comme le Brésil depuis 2014) et concerne surtout le riz, l'huile de soja,....
Thierry 30/10/2020
Je ne vous parle pas d'une inflation depuis 2014, je parle d'une flambée des prix ces derniers mois touchant les prix de la construction et des produits alimentaires. J'ai donné des exemples, j'en ai d'autres parce que je vis sur place. Et c'est sur place que j'ai pu constater les dérives d'un programme qui a mal été ciblé, quoique vous en disiez, et a constitué un excès de la masse monétaire qui s'est investi principalement dans la construction.
Thierry 30/10/2020
https://www.correiobraziliense.com.br/app/noticia/economia/2020/07/11/internas_economia,871282/mp-investiga-quem-fraudou-auxilio-emergencial-5-6-mil-brasilienses-na.shtml et il en est de même dans tous les états. Ici ce sont 2000 fonctionnaires publics de l'AMAPA qui ont touché l'auxilio emergencial. La forme de ce blog ne se prêtant pas bien à un débat, je vous suggère qu'on en fasse un billet sur lequel il sera plus facile d'échanger nos arguments. thierry@vitis.fr
Thierry 30/10/2020
Pardon, je voulais parler d'un blog et non d'un billet pour pouvoir échanger librement et sans la contrainte du nombre de mots. J'ai d'ailleurs demandé à un de mes copains du forum d'AE qui vit à Rio et avec qui je ne suis pas toujours d'accord de bien vouloir intervenir ici. J'espère qu'il acceptera. Voudriez-vous avoir la gentillesse de transférer votre article sur un blog ? Merci
Julien D 29/10/2020
...la viande de boeuf ne provient pas d'une augmentation de la demande interne. Selon toute vraisemblance, les producteurs exportateurs dont les contrats sont libellés pour la plupart en dollar, font tout pour orienter la production plutôt vers les marchés externes plus lucratifs pour ensuite convertir leurs revenus en reais. Mais l'idée que l'auxilio emergencial ait crée un excès de monnaie à l'origine de l'inflation n'est pas du tout vérifiée.
Thierry 30/10/2020
Que l'auxilio émergencial ne soit pas à la base de l'inflation actuel est une possibilité, mais dans ce cas, imaginez un autre scénario. En tout état de cause c'est bien cette raison qu'a évoquée le vice président le Gal Mourao, en expliquant que cette accès d'inflation était du à un excès de la demande. Je vous rappelle aussi que l'inflation du fait d'un excès de la masse monétaire a bien été théorisé par quelques économistes et non des moindres comme Milton Friedman je crois.
Thierry 30/10/2020
Le problème de la viande de bœuf que vous évoquez a déja sévi en Argentine et obligé le gouvernement du moment à menacer de légiférer pour obtenir un respect de la demande du marché intérieur. Mais il n'y a pas que la viande que le Bresil exporte et il est exportateur net, ce qui relativise le pb de la faiblesse de sa monnaie.
Julien D 29/10/2020
...la viande de boeuf ne provient pas d'une augmentation de la demande interne. Selon toute vraisemblance, les producteurs exportateurs dont les contrats sont libellés pour la plupart en dollar, font tout pour orienter la production plutôt vers les marchés externes plus lucratifs pour ensuite convertir leurs revenus en reais. Mais l'idée que l'auxilio emergencial ait crée un excès de monnaie à l'origine de l'inflation n'est pas du tout vérifiée.
Thierry 28/10/2020
Vivant au Brésil, je vais me permettre un autre coup d'oeil que celui des auteurs. D'abord c'est Bolsonaro qui a poussé à l'auxilio emergencial, tordant le bras à Guedes et non le congrès. Ensuite Maia, Randolfe et d'autres congressistes, motivés par leur réélection, ont voulu pousser Bolsonaro à maintenir le même montant de manière complètement irresponsable alors que le pays subit une poussée de l'inflation du fait de cette aide d'urgence mal ciblée.
Julien Dourgnon 29/10/2020
Bonjour Thierry. Merci pour vos commentaires. Les auteurs, les deux vivent au Brésil et l'un depuis 24 ans ! Ceci étant même en vivant au Brésil, on a pas forcément de justes analyses sur le Brésil. Concernant l'initiative de l'auxilio, vous vous trompez: la première initiative d'auxilio vient du congrès et était non chiffré et présenté au gît, lequel a finalement accepté l'idée et à proposer 200 reais. Le congrès a riposté avec un contre projet à 500.
Thierry 30/10/2020
Effectivement vous avez raison. https://pt.wikipedia.org/wiki/Aux%C3%ADlio_emergencial. C'est quand même mieux quand on cite pour contredire :o). Mais néanmoins ce n'est pas si clair, parce qu'en fait Bolsonaro a bel et bien appuyé ce projet, y compris contre les limitations que voulait imposer Guedes et ne s'est pas privé d'en revendiquer lui aussi le mérite. https://www.nexojornal.com.br/expresso/2020/06/12/Como-o-governo-se-apropria-da-cria%C3%A7%C3%A3o-do-aux%C3%ADlio-emergencial.
Thierry 30/10/2020
Vous pourrez aussi remarquer que c'est bien Bolsonaro qui est à la baguette sur le projet de renda cidada, qui devrait constituer un revenu de base et remplacer la bola familia. Pour ma part, je ne valide pas le projet de revenu de base, suivant les citriques de Louis Maurin et préférant voir respecter le droit au travail déterminé dans notre constitution et si mes souvenirs sont bons dans la DDH.
Thierry 28/10/2020
Cette aide d'urgence était indispensable à tous ceux qui se sont retrouvés sans travail et sans ressource, mais le Brésil ayant un très mauvais flicage fiscal de ses citoyens, du fait de la taille de son secteur informel, les autorités ont été incapables de cibler qui avait réellement besoin de cette aide. Au point qu'ici dans l'Amapa ce sont plus de deux mille fonctionnaires qui l'ont touchée, du fait d'une erreur administrative, paraît-il... alors qu'il fallait en faire la demande express.
Thierry 28/10/2020
En clair nombre de Brésiliens ont triché quand nombre de pauvres incapables de se démerder avec les difficultés de l'inscription n'ont pas pu toucher l'aide. Le résultat, c'est que cet argent disponible, en sus d'un temps libre disponible du fait des fermetures sanitaires, a fait exploser la construction et donc mécaniquement en bonne spéculation les prix de la construction, au point que ici la police Federale a lancé une enquête, soupçonnant des malversations, qui évidemment n'a pas abouti.
Thierry 28/10/2020
En réaction, tout s'est enchainé, comdab et les prix de l'alimentaire ont bondi 53% pour le riz, 25% pour la mozarela et tout à l'avenant. Donc la réalité à craindre est en fait la vieille gueule de bois que vont prendre les pauvres au mois de janvier sans auxilio emergencial mais avec un salaire minimum à 1000 reais ( moins de 200€) alors que les prix explosent et que le travail risque de manquer. Je parie sur une inflation de fait à 20% sur un an...mais c'est au doigt mouillé...
Thierry 28/10/2020
Quant au fait que le real, géré par la banque centrale et non par les marchés, ait tant baissé, je pense qu'il faut relativiser parce que le Bresil est exportateur net et que cette baisse semble lui bénéficier en fait. Mais je me trompe peut-être. En tout état de cause exportations et importations sont en baisse par rapport à l'année dernière ce qui contredit l'argument du gouvernement que ce seraient des exportations trop importantes qui auraient provoqué l'inflation.
franco 28/10/2020
Peut-on conclure avec ce récit que la pauvreté est une option politique? D'où sort tout cet argent dont les politiques d'austérité niaient l'existence? La dette publique devenant une planche à billets n'est il pas la l'argument qui manquait pour conclure la dégringolade de la théorie économique libérale, après celui du plein-emploi et la masse monétaire vs inflation, rien ne tient debout.
Thierry 28/10/2020
Bonjour Franco. Créer de la monnaie est facile avec une banque centrale. Le pb est que cette création de monnaie est limitée par la confiance des agents économiques, ce qui permet aux USA et à l'Europe une création quasi illimitée de monnaie du fait de la confiance dans le dollar et l'euro, et limitée aussi par le risque d'inflation du fait d'un excédent de la masse monétaire et sur lequel je reviens dans le commentaire que je vais faire sur le billet.
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