Initiatives locales et paroles d'acteurs
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La méthanisation agricole, du déchet au biogaz

La méthanisation agricole, du déchet au biogaz | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it
La méthanisation est une technologie de dégradation contrôlée des matières organiques qui produit du biogaz et un résidu appelé digestat, utilisé comme fertilisant et amendement. Elle intéresse le milieu agricole en raison de la disponibilité dans les exploitations de matières transformables comme les déjections d’élevage, résidus de cultures, déchets verts. En 2019, on comptait plus de 600 unités de méthanisation de différentes puissances. Elle répond à plusieurs enjeux actuels, notamment ceux de production d’énergies renouvelables, de valorisation des déchets agricoles, et d’économie circulaire. 

C’est donc une réalité qui s’ancre progressivement, au point qu’il existe une Association des Agriculteurs Méthaniseurs de France qui regroupe plus de 322 adhérents. L’AAMF fait entre autres actions remonter les besoins de terrain pour piloter des unités de méthanisation puisque, en l’absence de formation spécifique, les premiers agriculteurs méthaniseurs se sont formés au fur et à mesure, en échangeant entre eux, en s’inspirant d’exemples étrangers pas forcément très adaptés… 

« J’avais déjà fait des enquêtes auprès des agriculteurs méthaniseurs en Dordogne pour savoir quelles étaient les spécificités de ce métier, donc j’avais déjà un point d’accroche dans la méthanisation » précise Carine Dumas-Larfeil formatrice au CFPPA de la Dordogne. « J’ai également rencontré un collègue de Bar-le-Duc qui proposait déjà un diplôme universitaire en méthanisation, mais plus axé bureau d’études. Par la suite la profession s’est rapprochée de nous, et nous avons travaillé tous ensemble sur un projet de formation plus pratique. » 

Cette démarche a été un travail de longue haleine. Les partenaires ont recensé les besoins de la profession dans une note d’opportunité fournie au ministère de l’Agriculture, qui de son côté a réalisé des enquêtes. Au final, début 2019, le Certificat de Spécialisation Responsable d’Unité de Méthanisation Agricole a été créé. « Au CFPPA de la Dordogne, avec d’autres centres de formation (Bar-le-Duc, les Herbiers, Laval, Montbrison), nous avons décidé de le mettre en place. Nous faisons partie du groupe de travail formation de l’AAMF, et nous travaillons en réseau pour quadriller la France au moins par grandes régions. » 

Le responsable d’unité de méthanisation agricole est un nouveau métier aux compétences très spécifiques. Selon l’installation, il doit vérifier différents paramètres tout au long de la journée, effectuer des opérations programmées, surveiller l’alimentation du digesteur. Mais cette activité n’est pas forcément à temps plein au sein d’une exploitation, même si une présence est requise. « En Dordogne ce sont plutôt des petites unités, avec un ou deux agriculteurs. Après il existe d’autres formes d’installations, avec des unités un peu excentrées par rapport aux exploitations qui apportent de la matière. Dans ce cas, il y a quelqu’un qui est là à temps plein pour gérer les transports, les intrants, et gérer le côté administratif. » 

Grâce au soutien du Fonds Régional pour l’Innovation dans la Formation (FRIF), le CFPPA s’est fixé plusieurs objectifs : développer le partenariat avec la profession, élaborer des formations en situation de travail, construire des outils en lien avec des situations professionnelles. « Nos partenariats et notre réseau étaient déjà conséquents, mais nous avons continué à le développer en participant partout en France à des salons, à des formations, des journées techniques, etc. Le premier objectif, c’est le développement du partenariat qui vise également à trouver des lieux de stages et de visites, prendre contact avec des intervenants professionnels. On développe aussi les réseaux sociaux, où on fait connaître la formation. » 

Deuxième axe, former les stagiaires en situation de travail. Le CFPPA de la Dordogne dispose sur site d’une exploitation agricole, d’un atelier de transformation et d’une unité de méthanisation, où les stagiaires peuvent se rendre pour observer et travailler. C’est de là que les formateurs tirent les situations de travail à faire pratiquer aux apprenants. Troisième action, la construction d’outils en regard de situations professionnelles. Des outils de pilotage, des études de cas qui peuvent être faites lors des visites, qui pourront être travaillées ensuite en centre et venir abonder une banque de données. 

La formation elle-même est organisée en 3 blocs de compétences : gérer les flux d'entrée et de sortie, assurer le fonctionnement du digesteur, piloter l'unité de méthanisation. Chaque bloc comprend des périodes de 4 semaines en centre, et des périodes de 6 semaines en entreprise. Cette alternance favorise le retour d’expérience compte tenu de la diversité des unités de méthanisation et des process, etc. 

« Nos stagiaires ont des profils agricoles, électrotechniques et mécaniques. Nous demandons un diplôme agricole ou une année d’expérience en agriculture. Ensuite nous complétons soit l’aspect agricole, soit l’aspect maintenance. Nous avons fait une information collective auprès de demandeurs d’emploi, je pense qu’à cause de ses différentes contraintes (horaires, extérieur, astreintes, etc.), et pour éviter les mauvaises surprises, il faut qu’ils aient déjà évolué dans un contexte agricole. » 

A cette date, une première promotion de 3 personnes a terminé sa formation en septembre. Une autre est en cours, avec 7 stagiaires. Le CFPPA a prévu une session par an, mais ce chiffre pourrait augmenter en fonction des demandes. « Notre problème est de trouver des candidats. La formation est assez longue, 12 semaines en centre et 18 en entreprise. C’est un nouveau métier et la méthanisation agricole n’est pas encore très connue. Surtout en Nouvelle-Aquitaine où il n’y a pas forcément beaucoup d’unités par rapport à d’autres régions. Les professionnels formés doivent aussi accepter de bouger, de se rendre là où sont les installations et les projets. »
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La voie du micro

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Le Rocher de Palmer est une salle de spectacle située à Cenon. Elle est labellisée Scène de Musiques Actuelles (SMAC) et développe des actions sur la métropole Bordelaise. Parmi elles, le projet OPUS, financé par l’appel à projets régional « Mobilisation vers la formation » et soutenu par le Fonds Social Européen. François Friquet, responsable des dispositifs d’accompagnement, est chargé de son suivi

 

En quoi consiste Opus ?

C’est d’abord le prolongement d’un dispositif existant. Voilà 10 ans que nous développons une action qui s'appelle « le forum du rocher », deux sessions par an de formations gratuites de 2 mois, avec des intervenants professionnels, sur la découverte des outils numériques, la photo, la vidéo, le graphisme, le web. Pour nous c’est un prétexte pour remettre des personnes sur des rails, leur montrer qu’autour des métiers artistiques, il y en a plein d’autres qui gravitent. Le forum s’adresse à des jeunes ou moins jeunes, prioritairement des habitants des quartiers prioritaires de la ville puisque le rocher de Palmer est situé dans un QPV.

 

Notre idée était de revenir aux fondamentaux, de partir des choses que nous savons faire, c’est-à-dire utiliser la musique, plus particulièrement le hip hop, comme outil de médiation et de rencontre de personnes qu'on ne croise pas par d'autres biais. C’est comme ça que le projet Opus est né. En parallèle de la formation, nous avons un espace de coworking ouvert aux habitants du quartier qui peuvent venir y travailler, quel que soit leur projet. Pas forcément développer une activité artistique ou culturelle, mais chercher un emploi, discuter avec d’autres gens, bénéficier gratuitement de formations courtes qu'on leur propose.

 

Dans quels termes le présentez-vous ?

Le pitch d'Opus, que nous avons voulu rendre le plus clair possible, c'est « identifier et mobiliser des jeunes par la culture hip-hop et les outils de communication numérique, dans le but de les accompagner vers l'emploi la formation et leurs projets professionnels. » Il se découpe en 5 étapes : identification, mobilisation, orientation, formation et accompagnement.

 

Comment avez-vous pensé l’action ? 

C’est surtout une action de remobilisation. Avant même la mobilisation, il y a une étape de rencontre avec les publics. Nous avons pris le parti de travailler dès le démarrage avec un artiste reconnu qui s'appelle DJ Vex. On l'implique dans toutes les dimensions du projet, le repérage, la formation, le volet insertion. Il est un peu notre porte d'entrée. Concrètement, en pied d'immeuble, c’est lui qui crée la connexion avec les jeunes, c'est vraiment un point important. On ne tient pas de discours particulier. On se présente aux jeunes, on prend contact, on les invite à venir au Rocher, on crée un lien de confiance. Dans un premier temps, on est surtout dans l'écoute. La formation, c’est l’étape d’après. L’idée n'est pas de dire aux jeunes que l’on croise qu’ils seront tous des futurs artistes. Pour nous, c'est un prétexte pour leur montrer qu’il y a plein de métiers autour du secteur culturel et artistique et pour tirer des fils, voir quelles sont leurs autres compétences, leurs autres envies.

 

Quel est le déroulement de la formation ?

Depuis maintenant deux ans, nous proposons deux sessions annuelles. Leur durée est de deux mois, à raison de cinq jours par semaine de 35 heures. Pour nous, c’est un travail constant de leur faire respecter des horaires, leur apprendre à travailler en groupe, à prendre la parole et donner leur avis en public. On leur parle aussi de l'intérêt de s'inscrire à la mission locale et à France Travail, même s’ils ne cherchent pas de boulot. En fonction de leur situation, on leur dit qu’ils peuvent faire une formation, un service civique ou un stage. On veut leur montrer le champ des possibles, qu'ils ne connaissent pas forcément. Les jeunes sortent avec un certificat de compétences, Ils ont un carnet pédagogique qui cible bien les objectifs de chaque module.

 

Vous n’êtes pas un acteur « naturel » de l’insertion, comment avez-vous procédé ?

Au démarrage il y a 10 ans, ce n’était pas évident de se connecter avec les missions locales, Pôle emploi, qui ne nous repéraient pas forcément comme un lieu ressource ou un opérateur de formation et d’accompagnement. Au bout de 4 ou 5 ans, grâce à ces prescripteurs, on touchait effectivement des personnes en décrochage issues des quartiers. Mais on n’accrochait pas celles qui ne sont pas, ou plus, dans les missions locales, voire ne sont plus dans les centres sociaux non plus, parce que ça ne colle pas pour plein de raisons.

 

 

Quel est le rôle de vos partenaires ?

Ils nous aident dans la phase d’identification, qui peut être très chronophage. Notre but ce n’est pas de faire à leur place le travail des structures de proximité, les associations, le centre social, qui sont actifs dans les quartiers. On est plutôt co-organisateur.

 

Une des autres clés, c'est le temps long. Les choses mettent du temps à se faire. De plus, il nous faut essayer d'éviter, dans la mesure du possible, de faire du quantitatif et d'être dans un temps plus individuel. On ne peut pas accompagner 40 personnes à la fois, c'est impossible. Cependant, on peut en accompagner 40 ou 50 sur l'année si on prend le temps et qu'on s’adapte au rythme de chacun.

 

Selon vous, que faudrait-il améliorer dans le rapport avec ces publics ?

Avec dix années d'expérience, on commence à être un peu plus aguerris sur ces questions d'accompagnement. Aujourd’hui, on est acteur culturel, mais aussi un acteur social et un acteur de l'insertion. Pour nous, le levier c’est de faire évoluer les compétences transverses. L’approche culturelle et artistique a toute sa place pour apporter des solutions. Notre approche, c’est de se dire comment, depuis notre place, nous pouvons contribuer à ce que des personnes soient accompagnées, aient suffisamment confiance en elles pour valoriser et développer leurs compétences. Je crois que c'est ça qui est le plus important dans notre projet, peu importe que l’on passe par la musique, le théâtre, l’insertion ou la formation.

 

*   *   *   *   *

 

Le projet Opus a essaimé à d’autres lieux en Nouvelle-Aquitaine, le caféMusic' à Mont-de-Marsan et l’Ampli à Billère, près de Pau. Le plus récent est la Sirène, L’Espace Musiques Actuelles de l’Agglomération de La Rochelle dont Sandrine Brenans est la médiatrice culturelle.

 

A la Sirène, nous avons officiellement démarré le projet opus le 1er décembre 2023, sur les 3 QPV et les zones rurales à revitaliser de l’agglomération rochelaise. Avec la même approche que celle du Rocher de Palmer, c’est-à-dire un repérage en pied d'immeuble, une phase d'identification, de mobilisation etc. L’année dernière, le plus gros travail a été de tisser un réseau. Le jour du lancement, une cinquantaine de partenaires étaient présents, des acteurs publics, culturels, sociaux. C’était l’occasion de leur dire que sans eux, nous étions incapables de monter ce projet. Je pense que ce discours leur a plu, ça se fait en belle énergie, en toute confiance, chacun restant dans son rôle. On s’est rendu compte que les acteurs locaux sont vraiment dans l'attente qu'on propose des actions, qu'on les soutienne sur le montage de projets. Sur les QPV, certains nous soutiennent et ont envie de faire des choses, peut être en essayant de croiser les 3 quartiers.

 

Avec les jeunes, nous essayons de comprendre où ils en sont, quelles sont leurs compétences, pourquoi ça a bloqué dans leur vie, dans leur parcours scolaire, dans leur vie professionnelle, puisque certains ont déjà eu quelques expériences. La question c'est vraiment comment peut-on les aider, avec de la formation ou un accompagnement ? Ceux qui veulent s'orienter dans la musique, on peut leur faire rencontrer des gens. L’idée c'est qu'ils puissent continuer à nous contacter, de disposer ici d’un lieu où ils peuvent trouver des ressources.  

 

La volonté de la direction était aussi d'accueillir des « open mics » (ou scènes ouvertes) à la Sirène pour que les jeunes prennent l'habitude de rencontrer le lieu. Puis d’en organiser dans les quartiers. On en a organisé un avec le soutien du Rocher de Palmer et de DJ Vex, qui nous font profiter de leurs retours d'expérience. Nous avons aussi des ateliers d’une semaine où une dizaine de jeunes travaillent sur un clip, de la vidéo, du traitement photo, un site web, etc. Ils rencontrent tous les midis une personne de l’organisme de formation Insup qui vient parler avec eux d'insertion et de formation. Ensuite, des stagiaires de l'équipe partent en formation numérique au rocher de Palmer pendant deux mois.  Notre projet à terme, c’est d’avoir notre propre cycle, peut-être en 2025.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

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De l'insertion dans les métiers des services à la personne

De l'insertion dans les métiers des services à la personne | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Form’Aqui est un centre de formation basé à Bruges depuis 2017, dont Julien Castang est le directeur. Il intervient dans le champ des métiers des services à la personne. Il a été financé par le Fonds Régional d’Innovation dans la Formation (FRIF) pour son projet baptisé « valoriser et pérenniser les actions pour l'emploi dans le service à la personne par le maintien de la dynamique partenariale ». 

 

D’où vient votre projet ?

Depuis plusieurs années, nous faisons partie d’un groupe de travail sur les métiers des services à la personne et de l'aide à domicile, notamment composé des prescripteurs et de quelques employeurs, sur un territoire qui inclut les communes du nord de Bordeaux jusqu'à Mérignac. Dans ce cadre, nous avons été sollicités pour monter des chantiers formation insertion (CFI), qu’on a baptisé « trouver sa voie dans un métier local et solidaire », pour les publics éloignés de ces emplois et/ou bénéficiaires du RSA.

 

Les deux premiers ont été concluants, et pour le 3e, nous avions un objectif un peu plus ambitieux, faire pareil en moins de temps. Nous voulions aussi intégrer beaucoup plus de numérique. Il fallait qu'on change un peu les habitudes, que l’on prépare un nouveau planning, un nouveau déroulé, en impliquant les prescripteurs en amont et les employeurs pendant, et après, l'action de formation. C’est à ce moment-là que la Région Nouvelle-Aquitaine nous a parlé du FRIF.

 

Vos actions concernaient des métiers en particulier ? 

Les chantiers portaient sur le titre professionnel d'assistant de vie aux familles (ADVF), avec un programme adapté à un public très éloigné de l'emploi, confronté à des freins périphériques. C’était un ADVF classique avec une très forte proximité et un accompagnement socioprofessionnel en tripartite, avec le référent et le financeur. Ce qui avait plu à notre groupe de travail c'est que mon équipe issue du terrain est en CDI, donc stable. Ce qui fait qu’un stagiaire a le même responsable, le même référent, le même accompagnant du début à la fin. Pour nous, en termes de gestion et de communication c’est aussi bien plus facile d’être dans une équipe stable.

 

Sur la 3e action, on est parti sur un temps plus court, 470 heures au lieu de 760. L'idée c'était de diminuer la partie technique pour y rajouter beaucoup de mobilité, de théâtre, toutes ces actions qui permettent de reprendre confiance en soi. Puisque les stagiaires ne faisaient pas l’ensemble du titre, les employeurs étaient inquiets de leur niveau de compétence sur le terrain. De leur côté, les prescripteurs ne comprenaient pas s’il s’agissait d’une action de remobilisation, ou de pré qualification. On a eu besoin de recréer une dynamique, de leur présenter le projet et de les convaincre. C’est ce que le FRIF a permis.

 

Vous avez fixé des prérequis pour les stagiaires ?

Pas de prérequis sauf un casier vierge, la capacité de travailler, etc. Il faut juste que la personne ait envie. On lui présente les modalités, et si elle accepte, on lui fait confiance. Ensuite c'est à elle de montrer qu’on ne s’est pas trompé. Si elle ne maîtrise pas le français à l'écrit ou à l'oral, je la fais évaluer par mon collègue du FLE qui me signale ce dont elle aurait besoin.

 

Ce n’est pas au public d’avoir la capacité de faire une formation, c'est à l’organisme de lui rendre accessible. La seule chose que le public doit faire, c'est de suivre la formation et passer l'examen. Pour le reste c'est à nous de lui faciliter la vie, de le préparer à réussir l’entrée en emploi. Le titre pro est facile à travailler, il est bien cloisonné, on peut décider de ne viser qu’un CCP, ou la moitié d'un. Donc on est sur ce besoin qui va au-delà du titre. L'idée c'est de mobiliser le public par des actions de remobilisation. Et là, ça fonctionne.

 

Comment avez-vous commencé l’action ?  

On a débuté en janvier 2023 avec 6 stagiaires, l’objectif étant d’en accueillir 15 en tout. Nous avons découpé le contenu en modules, avec des fils rouges qui peuvent être, par exemple, le théâtre ou une action spécifique sur la mobilité. Sur ce titre pro, j’ai 7 entrées possibles. C’était un pari financier en ce sens qu’il ne faut pas craindre de mobiliser beaucoup au début, les formateurs, les salles, même quand on n’a pas le compte de stagiaires. Qu’il y en ait 5 ou 15, c’est finalement presque le même coût. Même s’ils ne sont que 5 au début, ils ont droit à leur entrée et à la même qualité que s’ils sont 15. Nous sommes en entrées sorties permanentes, un formateur supplémentaire assure la rentrée pendant que les autres sont en cours. Puis on crée le lien entre les nouveaux et les anciens, en utilisant le théâtre par exemple. Les sorties c'est pareil, il suffit juste d'accompagner et de suivre sachant que nous visons soit l'emploi, soit la poursuite de parcours.

 

Quelle organisation avez-vous choisie pour ce public ?  

C’est la partie la plus facile. On s’adapte. S’ils ne peuvent pas être là à 09h00, on commence à 09h30. S’ils doivent aller chercher leurs enfants à l’école à 16h30, on termine à 16h00. Nous ne faisons pas cours le mercredi. Sur les CFI on faisait 09h30-16h30 par exemple. En plus la journée commence avec un petit déjeuner, un moment sympathique. Le plus difficile c'est vraiment l'employeur derrière, parce que lui va avoir besoin de les faire travailler en soirée, avant 9 h, le week-end, etc. La vraie plus-value de nos actions de formation sur ces publics n'est pas de les faire venir, ça on sait faire. C'est vraiment de les accompagner à l'emploi. Pendant le temps de formation, on travaille avec la personne pour qu'elle puisse s'organiser, parce que se libérer du temps est souvent une question d'organisation.

 

Comment abordez-vous la question des freins périphériques ?

Pour la mobilité, nous avons créé notre auto-école sociale et solidaire « Mobincub », en partie financée par nos actions de formation, avec 2 moniteurs sensibilisés au public demandeur d’emploi, FLE, etc. Nous avons des taux de réussite excellents. Le stagiaire ne paye parfois rien du tout car Mobincub possède la certification Qualiopi, donc il peut utiliser son CPF quand il en a.  Il y a aussi le problème de la garde d'enfant, pour lequel nous sommes en train de mettre en place une solution avec un de nos partenaires. Le centre participera financièrement pour permettre aux stagiaires de venir en formation ou d’aller travailler.

 

Autre frein, celui des repas. Depuis 4 ans maintenant nous offrons le petit déjeuner, et on constate que certains n’ont pas de quoi déjeuner. Nous sommes trop petits pour avoir une cantine, donc nous venons de créer une autre entreprise, de livraison de plats. Ainsi nous pouvons proposer des repas sains et équilibrés à 12€, avec 3€ à la charge du stagiaire.

 

Enfin, nous avons une accompagnatrice socioprofessionnelle à temps plein à Form’aqui permettant de suivre les personnes, en lien avec les prescripteurs, dont le besoin est identifié en amont ou durant la formation. C’est un vrai plus, Delphine Kra est notre ASP dédiée à cette mission.

 

Quel est le rôle des employeurs ? 

Tous les employeurs avec qui nous travaillons ont signé une charte avec Form’Aqui, dans laquelle ils s’engagent à accueillir des personnes même s’ils ne peuvent peut-être pas travailler le weekend ou le soir. Pour que ça marche, il faut les accompagner et les former. Mais aussi leur ouvrir le centre et leur donner la possibilité d’utiliser l’outil RH que nous sommes finalement. Chaque semaine, j'ai 2 ou 3 employeurs qui viennent ici parce qu’ils ont besoin de rencontrer le groupe. Il faut recréer ce lien là avec le public, avec leur manager…

 

Nous, les employeurs et moi-même, regrettons qu’ailleurs la plupart du temps sur ces actions là les employeurs ne soient pas suffisamment associés. C’est quand même eux qui signent le contrat de travail à la fin. Notre réseau compte un peu plus de 110 structures employeurs. C’est ce qui fait notre force, nous sommes connectés à l'emploi, je ne pense pas qu'on puisse avoir faux.

 

Vous leur demandez de s’engager sur quoi ?

Nous attendons d’eux qu’ils s’engagent pour de bon, pas de faire des promesses. Les formatrices et formateurs sont préparés à diagnostiquer le bon employeur pour le bon stagiaire, et à créer entre eux un lien de confiance dès la formation. C’est par exemple important qu’il y ait un véritable tutorat. Je leur demande aussi qu’ils s'engagent à rencontrer le groupe pendant les cours, parce qu'en fait nous constatons que les stagiaires ont une représentation un peu déformée, idéalisée, des employeurs. C’est important de pouvoir démystifier ça, par la présence, par l'accompagnement. Parce qu’au bout, il y a tout de même un être humain qui s’engage dans une nouvelle aventure, ce n’est pas anodin.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

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Entreposage en mode virtuel

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Quelle est l’innovation que vous avez expérimentée en Nouvelle-Aquitaine ?

Le projet a démarré initialement fin 2021, et son développement a pris environ 2 ans avec des équipes d'ingénierie pédagogique et des experts-métiers. Nous en sommes à la 3e phase, celle du déploiement national. En Nouvelle-Aquitaine, l’idée était d’expérimenter progressivement avec nos apprentis la création d’un environnement logistique en réalité virtuelle sur les 14 sites AFTRAL de la Région. Ce nouvel outil se destine aux formations logistiques accessibles en apprentissage mais nous avons la volonté de le déployer aussi pour nos publics en formation continue, notamment inscrits sur les parcours PRF et/ou HSP.

 

Ce projet s’inscrit dans le champ de la transformation et de l'hybridation des formations. Nous disposons déjà de simulateurs pour les métiers de la conduite (voir article…). Nous voulions ouvrir le champ de l’innovation pédagogique à destination de nos apprenants en logistique, en intégrant de la réalité virtuelle sur des modules travaillés à partir des référentiels des titres professionnels. Nos équipes ont ainsi répertorié l'ensemble des champs de compétences transversaux et plus particulièrement ceux concernant la sécurité.

 

En quoi consiste l’outil ?

Le dispositif de réalité virtuelle développé permet à plusieurs personnes, chacune avec un casque, d’interagir dans une halle logistique modélisée à partir d’un site d'une entreprise du territoire. Généralement, dans nos centres AFTRAL, ces espaces font 500 à 1000 m². Ici, nous pouvons avoir 7 à 8 000 m² de terrain de jeu, nous sommes immergés totalement dans une entreprise logistique que l’on peut visualiser. Les métiers de la logistique sont associés à environnements très contraints, par la sécurité, le matériel, parfois pour des raisons de place tout simplement. Donc il nous faut trouver des solutions et l’expérience virtuelle en fait partie. En plus cela désengorge les plateaux techniques dans nos centres.

 

C’est vraiment un outil pédagogique utilisé en présentiel qui vient compléter les outils de nos équipes de formateurs. Nous avons besoin d’être à proximité des apprentis pour ancrer les savoirs et travailler les situations qu'ils n’ont pas encore rencontrées en entreprise. Par exemple, un apprenant en bac pro logistique qui n'est pas encore allé en entreprise, cela lui permet de vraiment s'immerger dans un hall logistique avant de se confronter à la réalité.

 

Quels sont les métiers concernés ?

Le préparateur de commande, l'agent magasinier, le cariste, pour les niveaux infra bac, et le bac pro logistique. Nous sommes vraiment partis de l'identification des compétences de ces formations et nous sommes allés chercher la prise en compte de la sécurité pour l'utilisation des chariots, comment on prépare et emballe des commandes, le stockage et le déstockage, le réapprovisionnement et l’inventaire. C’est un outil techniquement accessible, et il nous permet d’aborder les premiers niveaux de compétences des référentiels concernés.

 

Comment sont abordées les compétences ?

A partir de ces compétences, l'équipe d'ingénierie a identifié dix scénarios, qui incluent la découverte de l’entreprise, les différentes opérations et les flux logistiques. Les scénarios sont déployés au fur et à mesure du parcours pour chaque typologie de compétence. Nous sommes vraiment dans un serious game, qui utilise tous les codes du gaming. Les utilisateurs se testent, se chronomètrent, s'orientent dans les espaces. Nous insistons beaucoup sur l’aspect sécurité, sur le contrôle et l’utilisation d’un chariot élévateur, les indicateurs de sécurité. Nous pouvons aussi intégrer des anomalies comme un marquage qui n'a pas été fait. L’utilisateur ne peut pas rentrer dans la halle virtuelle sans avoir mis ses équipements de sécurité, c’est vraiment une simulation.

 

L’outil apporte quoi de nouveau ?

La nouveauté sur cet outil, c'est que nous voulions aller chercher la coactivité. Aujourd’hui, sur un plateau technique logistique AFTRAL, pour des raisons de sécurité, nous ne pouvons pas faire évoluer en même temps des chauffeurs, des préparateurs de commandes, des agents magasiniers et des caristes. Le dispositif permet de les faire travailler ensemble, leur montrer les répercussions que peut avoir une action sur celles des autres dans l'environnement professionnel. Avec les scénarios, les formateurs ont la possibilité de déclencher des aléas, des incidents, qu’il faut résoudre à 2 ou 3 dans le même espace virtuel.

 

Combien d’heures les apprenants passent-ils sur le simulateur ?

En fonction des organisations, c’est de l’ordre de 4 à 5 heures sur l'ensemble d’un parcours, ce qui représente environ 30 minutes par séance. L’utilisateur vit une situation avec le casque, puis va débriefer avec le formateur et le groupe. Nous l'utilisons vraiment en complément du reste de la formation. C’est un outil qui permet de prendre le temps, de revenir sur des situations professionnelles particulières, de vérifier l’acquisition des compétences, de les approfondir, ce qui n’est pas toujours possible directement sur les plateaux techniques. Mettre ses équipements de protection individuelle, se diriger dans la halle, organiser sa tournée avec son chariot. Tout cela, ce sont des gestes professionnels qui prennent du temps. Et qui prennent du temps aussi dans la réalité.

 

Quelle est selon vous la juste place de la simulation dans un processus d’apprentissage ?

Pour nous, l'immersif n'est pas un gadget. Nous vérifions à chaque fois qu’il apporte un plus à nos apprenants, quels qu'ils soient. Cela doit les aider à ancrer les savoirs parce qu’ils vont pouvoir répéter les exercices. Aujourd’hui, nous n’apprenons plus de la même manière. Les personnes qui viennent dans nos centres, ont besoin de se tester, elles ont besoin d'acquérir des gestes métiers en situation, ce que nous pouvons faire sur nos plateaux techniques de mise en situation. En plus du savoir livré par le formateur, ils viennent chercher de la pratique. Mais pour les raisons évoquées précédemment, contraintes d’espace ou de sécurité, nos plateaux ne sont pas disponibles en permanence. Grâce à la halle logistique virtuelle, les apprenants vont pouvoir mettre encore plus en pratique. Cet outil en réalité virtuelle, vient compléter nos pratiques pédagogiques et devient indispensable pour nos apprenants, à la fois pour accompagner leur montée en compétence, et augmenter leur engagement en formation. Cela fait partie des méthodes que nous essayons de déployer au maximum.

 

Quels sont les effets sur les apprenants ?

Nous avons constaté que les apprenants sont plus motivés parce qu’ils vivent une expérience avec des interactions différentes pendant leur formation. Ils partagent leurs idées, l'organisation de la session, etc. Avec ce dispositif, nous pouvons plus facilement adapter et individualiser les parcours. Un jeune qui rencontre des difficultés dans la spatialisation va pouvoir répéter un scénario. Nous pouvons aussi travailler sur les soft skills comme la gestion du temps avec les flux logistiques, la résolution de problèmes comme les retards, des produits manquants, la prise de décision immédiate, la gestion du stress…

 

Qu’en pensent les formateurs ?

Je pense qu'il y a un vrai changement qui est en train de s'opérer au niveau de l'approche pédagogique. Même si à AFTRAL, nous sommes plutôt reconnus sur la partie immersive, il y a toujours une phase d’appropriation à mener avec nos équipes pédagogiques. Certains formateurs étaient réticents au départ, notamment sur la performance de l'outil ou sa prise en main technique. Aujourd'hui, ils l’utilisent au quotidien en complément de leurs supports de cours « classiques », dans chacun de nos sites en Nouvelle-Aquitaine. Et ils en sont vraiment très satisfaits.

 

Pour le moment, je pense qu'il y a encore des disparités de pratique. C'est aujourd'hui le rôle des équipes d'ingénierie de guider les formateurs dans la prise en main de ces outils. C’était important qu’Evol’Job, un cabinet bordelais de conception d’ingénierie pédagogique, accompagne les équipes et leur explique comment elles peuvent intégrer de l’immersif dans leur formation.

 

La pédagogie immersive devient incontournable pour AFTRAL, c'est vraiment une transformation dans la construction de nos parcours pédagogiques. Cela nous donne la possibilité d’intégrer des méthodes qui permettent d'engager autrement les jeunes, de les motiver différemment et puis, au-delà, d’améliorer leur projection dans un environnement professionnel en perpétuel évolution.

 

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

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A l'écoute des situations d'illettrisme

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Le centre social « Lo Solan » de Mourenx propose depuis des années des modules de formation de base à destination des publics Français Langue Etrangère (FLE) ou en situation d’illettrisme. Après s’être doté d’un « bus numérique » pour porter son offre de services sur l’ensemble de son territoire (voir notre article https://sco.lt/7eJR1U), « Lo Solan » a mis en place l’action « Tendre l’O.RE.ILLE », financée par l'appel à projets régional « innover contre l'illettrisme ».

 

En quoi consiste « Tendre l’O.RE.ILLE »?

Avec « Tendre l’O.RE.ILLE », notre but était surtout de capter et de mieux accompagner les publics en situation d'illettrisme, souvent invisibles, de les rendre plus autonomes. Il fait suite à un premier projet «#inclusion numérique mobilisation et programme Lo Solan» de 2021, avec notre bus numérique qui existe toujours. À l’époque nous avions pu compter sur l'implication et la forte mobilisation de nos partenaires, auxquels nous avions notamment proposé des journées de sensibilisation au repérage des personnes en situation d’illettrisme.

 

Quel bilan avez-vous tiré de votre première action ?

Lors du premier appel à projets, en tant qu’organisme de formation, nous avons accueilli des personnes sur le parcours 1 de l’HSP (Habilitation de Service Public) sur l’illettrisme et l’illectronisme. Et on s'est rendu compte que certains partenaires pouvaient faire des amalgames entre le FLE et l’illettrisme et par conséquent avaient besoin d’être formés pour mieux repérer les publics en situation d’illettrisme. Nous avions une dizaine de personnes sur l'année, ce qui était très peu alors qu’on se doute bien que sur notre territoire, il y a de nombreuses personnes en situation d’illettrisme qui passent au travers des mailles du filet.

 

Qui sont vos partenaires ?

Le centre social de la Pépinière à Pau a répondu aux mêmes appels à projet. Nous avons mis en évidence des actions communes, notamment autour de la formation des acteurs, puisqu'on a proposé des formations similaires auprès des professionnels, des partenaires, conseillers en insertion professionnelle, sous forme d’actions de sensibilisation et des échanges de pratiques. Cela nous a permis d'intervenir sur un territoire élargi et de façon concertée entre les deux territoires. On a également mis en place des séances destinées aux bénévoles, parce qu'il y en a beaucoup qui interviennent auprès des publics en proposant de l'accompagnement individualisé.

 

« Tendre l’O.RE.ILLE » est un projet de formation ou un projet d'accompagnement ?

C’est surtout un projet d'animation du réseau auprès de tous les acteurs, de formation et de sensibilisation des partenaires, ainsi que de repérage et d’accompagnement des publics en situation d’illettrisme. Le but est de maintenir une dynamique partenariale et une animation de réseau pour que la thématique de l’illettrisme reste toujours attrayante. C'est pour ça que, pour ce projet, nous avons voulu partir de la base constituée avec les acteurs socioprofessionnels, Pôle emploi, le PLIE, la mission locale, le Département des Pyrénées-Atlantiques avec le SDSEI « Pays des Gaves », les acteurs du monde associatif et du social, tout le réseau France services, les conseillers numériques avec la Fibre 64, ainsi que la fédération départementale des centres sociaux. Bien entendu, il y a également un accompagnement individuel de réapprentissage qui se réalise avec des bénévoles, le repérage des publics et la mise en place d'actions innovantes en matière de formation (accès aux droits, renforcement des compétences professionnelles en lien avec le numérique…).

 

Quel type de parcours suit une personne avec « Tendre l’O.RE.ILLE » ?

Les actions de formation première marche nécessite de travailler en amont avec les structures partenaires et les publics repérés. Concernant la personne, on la prévient, on travaille avec elle sur le fait qu’elle peut être accompagnée. Pour cela, nous avons mis en place un groupe de bénévoles qui a été formé et sensibilisé à l'illettrisme, en partenariat avec le Centre Ressources Illettrisme Analphabétisme Nouvelle-Aquitaine (CRIA-NA). C’est le CRIA-NA qui a assuré cette sensibilisation en lien avec nous, qui dispense la formation et opère les échanges de pratiques avec les partenaires. Ainsi les personnes sont accueillies et accompagnées en individuel ; tout leur parcours s’établit au contact des bénévoles qui apportent une écoute différente et proche des situations vécues. Donc, dès le départ, on met en place ce principe, on voit comment ça fonctionne et ça évolue vraiment avec la personne et son accompagnateur. Et finalement on leur propose d’entrer dans un groupe, mais pour cela, il faut nécessairement du temps.  

 

Quel rôle jouent exactement ces bénévoles ?

La particularité des personnes en situation d’illettrisme, c'est qu'elles ont quasi toutes été en situation d'échec scolaire et ont eu un rapport douloureux avec l’école. Repartir dans un dispositif classique, avec un tableau où suivre des cours est souvent impossible pour elles. Donc on leur propose de commencer par rencontrer un(e) bénévole avec qui elles peuvent parler des sujets qui les intéressent. Le fait d’installer une relation de confiance permet d’engager un travail avec elles. C’est un préalable nécessaire.  Progressivement, il y a un lien affectif qui se crée. On fait plusieurs mois d’accompagnement en individuel, et on peut leur proposer ensuite, pour les valoriser, de les associer à une autre personne pour lui expliquer comment elles ont démarré, leur donner des astuces, etc.

 

Sur l’aspect repérage avez-vous mis en place des actions particulières ?

Les personnes en situation d'illettrisme, c'est un public particulier qui a été scolarisé en France jusqu'à l'âge de 16 ans. Il n’est pas évident pour des professionnels, qui ne sont pas formés à l'illettrisme, de se dire qu'une personne qui a été scolarisée, qui peut même avoir un CAP BEP, qui a souvent son permis de conduire, a des difficultés avec la lecture et l'écriture. Surtout que les personnes en situation d'illettrisme développent beaucoup d'autres compétences à côté et savent masquer leurs difficultés.  

 

Donc l'idée c'est de les aborder par des biais indirects, des thèmes comme la santé, l'accès aux droits, des voies de contournement pour essayer de recréer une relation. La culture numérique est un très bon support, c'est moins compliqué de dire qu’on a du mal à se servir de l’informatique que d’avouer qu’on ne sait pas lire. Donc on se sert beaucoup du numérique pour repérer et accompagner les publics.

 

On sait aussi qu’il y a un travail à effectuer pour optimiser des passerelles entre nos structures, SIAE, organismes de formation, centres sociaux. Nous pouvons nous appuyer sur les outils du CRIA et nous construisons aussi des outils spécifiques. Par exemple, nos collègues conseillers France services disposent de petits indicateurs autour des pièces administratives qui leur permettent de détecter les situations d’illettrisme dans les différents publics qu’elles accueillent au quotidien.

 

Que considérez-vous comme une sortie positive ?

À partir du moment où l’on a répondu à la demande d’une personne, à son projet de départ, par exemple d'arriver à être plus à l'aise avec l'écriture, d'arriver à lire le journal, de trouver un emploi, c’est pour nous très positif… Sur l’HSP socle de compétences, nous avons des objectifs et il faut un nombre minimum de stagiaires pour engager des sessions. Mais sur le projet illettrisme, ça ne fonctionne pas comme ça, même si nous devons renseigner des données quantitatives et qualitatives.

 

Pour donner un ordre d'idée, la première année où nous avons répondu sur le parcours 1, on a reçu 7 personnes sur l’année. 3 ans après, et le déploiement de « Tendre l’O.RE.ILLE », nous en sommes à 24 personnes, dont 18 qui sur l’HSP et 4 qui sont suivies par des bénévoles. Pour avoir ces résultats, c'est un travail de longue haleine.

 

Selon vous, que faudrait-il améliorer ?

Nous pensons qu’aujourd’hui, les professionnels font bien mieux la différence entre une personne en situation d'illettrisme et une personne FLE même si certains partenaires sont encore dans la confusion des publics. Les prescripteurs orientent mieux, connaissent mieux les caractéristiques de ce public, son isolement, et la honte que certaines personnes ressentent par rapport à leur situation, ainsi que leurs stratégies de contournement.

 

Cela dit, il est important de poursuivre la formation des acteurs et des bénévoles, ça reste un travail qui s’établit sur du long terme. Si l’on veut continuer à agir de façon efficace pour ce public, il faut poursuivre notre effort de sensibilisation et de formation des acteurs. Et puis trouver les moyens de répercuter cette dynamique sur les zones blanches du département. Dans nos perspectives de travail, il y a également le développement de notre réseau. La lutte contre l’illettrisme ne peut pas rester le souci de spécialistes, cela doit être l'affaire de tous. L’offre de dispositifs et de formations adaptés est conséquente et nécessaire, mais ce que l'on constate sur l'ensemble des territoires, c’est que toutes les personnes concernées ne s'en saisissent pas forcément. L’enjeu reste la mise en adéquation entre l'offre et les besoins.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

 

 

 

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La prévention spécialisée au service de l'insertion professionnelle

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L’Association Départementale pour la Sauvegarde de l’Enfant à l’Adulte de la Vienne (ADSEA 86) intervient dans le champ de la protection de l’enfance et dans celui de l’insertion sociale et professionnelle. Son pôle Prévention, dont Emmanuel Delestre est directeur, anime depuis 2020 une action baptisée "De l’oisiveté de la rue au travail », lauréate du PIC Repérer et Mobiliser les Publics Invisibles (RMPI).

 

Comment avez-vous créé « De l’oisiveté de la rue au travail » ?

C'est en 2019 que nous avons entamé un travail avec la mission locale de Châtellerault et de Poitiers. Nous avons commencé à monter un dossier ensemble, avant que l’Association Régionale des Missions Locales ne dépose son propre projet. De notre côté, nous avons présenté le nôtre, puisqu’il n'était pas interdit de partir seul. Et nous avons été retenus. Notre proposition était de travailler à partir des quartiers pour accrocher et remobiliser les jeunes, en renforçant la prévention spécialisée sur les territoires de Poitiers, de Châtellerault et d’Angoulême.

 

Quel est le profil de votre public ?

Dans ces villes, les éducateurs de prévention spécialisée sont implantés sur tous les quartiers prioritaires. Ils s’adressent aux 16-25 ans. Avec le PIC, le public est celui des 16-29 ans, sans formation, sans emploi, sans stage (les NEET) sortis des radars. Etant donné que nous étions déjà en lien avec des publics sur ces territoires, disposer d’un poste de plus nous permettait d'aller plus loin et de mettre un focus sur ce public en rupture.

 

Quel était votre objectif de départ ?

Notre parti pris était de nous appuyer sur notre dispositif existant. Nous ne voulions pas créer un poste spécifique PIC qui aurait rencontré l’incompréhension des jeunes et risquait de dénaturer l’action des éducateurs déjà en place. Concrètement, nous voulions éviter de faire une distinction entre ces professionnels. Les jeunes sont extrêmement prudents vis-à-vis de l'adulte et en défiance par rapport aux institutions. Je pense qu’ils n’auraient pas compris pourquoi un troisième éducateur arrivait avec une mission différente. Donc nous avons constitué une équipe de 3 éducateurs en leur demandant d’élargir leur champ d’intervention jusqu’à 29 ans.

 

Quelle est votre approche ?

Les jeunes en rupture, les décrocheurs en voie de marginalisation, les gens qui ont connu une succession d'échecs, sont dans une forme de rejet des intervenants. L'idée de monter un groupe, par exemple, c'est déjà toute une affaire. Pour arriver à les remobiliser, il faut créer un lien de confiance. Et pour ça, il faut avoir des éducateurs en poste sur ces quartiers. Le nouvel intervenant PIC a pu s’appuyer sur ce lien de confiance ce qui lui a fait gagner plusieurs mois représentant une forte plus-value. Notre action passe ensuite par des petits riens, par les centres d’intérêt des jeunes afin de les amener là où on veut. On parle de leur quotidien, de leurs difficultés, c'est vraiment un art de l'ordinaire. C'est un travail qui prend énormément de temps. Pour ça, nous disposons de quelques outils.

 

Quels sont ces outils ?

En premier lieu, nous avons les chantiers éducatifs, qui sont un très bon support de remobilisation. Dans ce cadre, on propose un travail aux jeunes, qui va d'une demi-journée à plusieurs jours. Nous travaillons en partenariat avec des associations intermédiaires, la SATE 86 à Poitiers, Action Emploi à Châtellerault ou AISD’EMPLOI à Angoulême, qui se chargent d’éditer les contrats à durée déterminée d’usage, des déclarations URSSAF et de verser le salaire aux jeunes.  L’encadrement est assuré par les éducateurs de la prévention spécialisée qui travaillant aux côtés des jeunes. C'est un dispositif que nous avons beaucoup utilisé dans le cadre du PIC. Petit à petit, en fonction de ce qu'ils nous disent de leurs difficultés, de ce qu'ils veulent faire, on les éprouve à partir du chantier éducatif qu’on peut ouvrir à partir de 16 ans.

 

Nous avons aussi eu recours à « Explore l'Europe » à Angoulême, un dispositif qui permet à des groupes de monter un projet pour faire un séjour dans un pays de l’UEE. Quand on fait des projets européens avec les jeunes, ils passent physiquement des frontières géographiques mais aussi psychologiquement par le fait de s’ouvrir sur le monde et d’autres cultures, favorisant l’altérité. Pour finir, ils bénéficient également des accompagnements des missions locales, ou d’autres structures en fonction de leurs problématiques.

 

Selon vous, quels effets ont les chantiers éducatifs ?

Avant de rejoindre un chantier, il faut que l’éducateur sente que le jeune est prêt, ne serait-ce que pour y travailler une demi-journée.  Avant ça, il faut souvent qu’il refasse ses papiers, son cv, sa carte vitale, avoir un RIB pour se faire payer, etc. Avec ces éléments, on peut voir si le jeune est déjà dans une dynamique de remobilisation. Une fois qu'il est inscrit à l'association intermédiaire, encore faut-il qu’il vienne. Pour que ça marche, il y a tout le lien de confiance à créer entre lui et l'éducateur, ça prend de nombreuses semaines. L'avantage des éducateurs qui étaient déjà sur le terrain c'est que parfois ils ont vécu des séjours ou des sorties avec ces jeunes, ce qui leur a permis d’en repérer certains en amont. Le chantier éducatif est aussi un bon outil pour ceux qui vivent des parcours extrêmement chaotiques, y compris avec de la prison.

 

Au démarrage, vous étiez-vous fixé un objectif en nombre de jeunes accompagnés ?

Un peu moins de 300 sur 4 ans. Fin 2023, on en était à environ 140 jeunes. Nous avions misé sur 110 la première année, mais comme l’action a commencé début 2020, nous ne sommes arrivés qu’à la moitié. Compte tenu de la situation sanitaire, les sorties à la journée, les activités en petits groupes, tout cela a été très compliqué. Nous avons gardé des liens avec eux pendant toute cette période.  C'est un suivi souvent sur des mois parce qu'ils partent de loin, et il y a un travail à faire sur leurs papiers, leur vie quotidienne, leur remobilisation, etc.  Tout cela est très chronophage.

 

Nous avions mal anticipé ce côté chronophage. En fait, pour travailler auprès des invisibles, 4 ans c'est court. Il faut créer un lien avec eux, il ne suffit pas de leur proposer un dispositif. Cela prend des semaines, des mois, il faut arriver à se faire accepter sur le territoire. C’est l’avantage de la prévention spécialisée, elle évite d’être trop intrusif.

 

Vous savez quand un parcours commence, mais en moyenne combien de temps dure-t-il ?

C'est un peu le système des tamis. Le premier, ce sont les maisons de quartier, l’éducation nationale, etc.  Nous sommes le deuxième tamis, avec un maillage un peu plus serré. Il y a toute une partie des jeunes que l'on connaît vers 11-12 ans, plus on intervient tôt, plus on arrive à agir sur leurs problématiques. Et puis le troisième tamis, ce sont tous les jeunes qui sont passés à travers. C'est ceux-là qui vont demander le plus de temps de mobilisation, pour les amener à faire des démarches un peu autonomes, par exemple appeler un médecin, s’inscrire pour passer leur permis de conduire, trouver les ressources pour le financer. A un moment donné les choses s'enclenchent, permis, santé, prendre plus soin de soi. Petit à petit, ces jeunes s’autonomisent et reprennent leur place dans le jeu social. Mais les parcours peuvent durer 10 ans. Certains jeunes passent par la case prison, et quand ils sortent, ils reviennent nous voir pour participer à un chantier par exemple. C'est très aléatoire. Mais il y a toute la partie où on va devoir le soutenir, le tirer, et cette dernière est très chronophage.

 

Vous semblez insister sur l’importance du temps dans le cadre de vos actions, qu’en est-il ?

On ne mesure pas assez le temps nécessaire pour accompagner ces jeunes. En matière de dispositifs tout existe aujourd’hui. Le vrai problème, ce sont les marches qu'il faut gravir pour que les jeunes se sentent suffisamment autonomes, qu’ils aient envie de progresser. C'est notre métier d’effectuer ce travail. Le principe de « l’aller vers » est un peu galvaudé en ce moment. Mais aller vers des gens n'est déjà pas simple, aller vers des jeunes en rupture, ça demande un vrai savoir-faire pour être accepté.

 

Selon moi, le métier est devenu plus difficile avec la dématérialisation, la situation des jeunes qui est plus compliquée sur le plan administratif. Et puis il y a des diminutions de moyens partout. Le métier est devenu plus dur aussi au niveau éthique et personnel, on se fatigue plus vite. Je suis content que nous arrivions à garder les éducateurs. Nous connaissons des problèmes de recrutement comme tout le secteur social et médico-social, problème d’attractivité des métiers, même si nous sommes pour le moment encore quelque peu épargnés. Le milieu ouvert attire toujours, mais nous arrivons à la limite.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

 

 

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Des envies aux projets

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Le CPA Lathus est un Centre de Plein Air et de formations situé à Lathus-Saint-Rémy (Sud Vienne). Parmi ses nombreuses activités, il propose le dispositif « Osez, lancez-vous », dont Alice Polo est la coordinatrice. « Osez, lancez-vous » a été retenu fin 2022 par l’appel à projets régional « Mobilisation vers la formation. »

 

Pouvez-vous nous présenter votre action ?

« Osez, lancez-vous » est le prolongement de l’action « dynamisons les résignés ruraux » (voir notre article du 25 novembre 2021 https://sco.lt/7eJR1U), qui était déjà une aide pour sortir de l'isolement et aller vers l'emploi, destinée à des personnes qui ont besoin d'un accompagnement spécifique avant d'intégrer un emploi. On a souhaité garder le même cap en faisant des améliorations sur certains axes, notamment la mobilité et la santé, pour que ça corresponde au mieux au public espéré. Nous avons aussi souhaité faire plus d’accompagnements individuels. Pour Osez lancez-vous, on est sur une logique progressive. Comme les personnes avaient du mal à reprendre un rythme très important dès le début de l’action, on est parti sur le principe de 5 semaines à 2 jours de présence, puis 5 semaines à 3 jours, enfin 5 semaines à 4 jours.

 

Quel est son objet ?

Pendant environ 3 mois, l’idée est d'appréhender et d’explorer les acteurs du territoire, dans les domaines de la santé, de la mobilité, du travail. C’est aussi créer des projets comme intégrer une association (par exemple un club de couture, de sport…), ou se lancer dans une formation, voire rejoindre un chantier d'insertion pour ceux qui sont prêts à reprendre petit à petit une activité. Le tout est fait de manière très progressive, pour avoir le temps de réaliser ces projets. Et surtout l’équipe vise l’individualisation de chaque parcours.

 

Quel est votre public ?

Le public très large, de 16 à 67 ans. Ce sont des personnes très isolées et très éloignées de l'emploi et de la formation, notamment à cause du Covid. On a aussi un public qui a connu des traumatismes importants (violences conjugales, harcèlement, etc.) ou qui souffrent de certaines phobies sociales, la peur de foule, des troubles psychologiques, et qui n'arrivent pas à vivre en collectif.

 

Avec les réformes des retraites, des personnes ont besoin d’échanger ou de travailler encore quelques semestres, ne serait-ce que pour toucher une retraite convenable. À partir de 16 ans, on touche des décrocheurs qui ne peuvent pas, ou ne veulent absolument pas, retourner dans le système scolaire. Nous essayons de leur redonner l'envie de se réinsérer professionnellement et socialement. Géographiquement, ce sont des personnes de la Communauté de Communes Vienne et Gartempe (CCVG).

 

Comment trouvez-vous vos participants ?

Des personnes candidatent sur notre chantier d’insertion pour travailler, mais lors du premier entretien nous constatons qu’elles ne sont pas encore prêtes, donc nous leur proposons ce dispositif. Nous avons également nos partenaires (la mission locale Centre et Sud Vienne, Pôle Emploi de Montmorillon, Le Centre d’Information et d’Orientation), qui nous orientent des personnes pour les positionner sur l’action. Et le bouche-à-oreille fonctionne bien. Mais la plupart du temps c’est notre service qui trouve les personnes, par la pratique de ces différentes activités, des ateliers sur les savoirs de base par exemple.

 

Comment vous leur présentez l’action ?

La première question c'est, de quoi avez-vous envie ? Puis quels sont vos besoins ? Le plus souvent la réponse est la suivante : je veux retrouver une vie sociale, une vie professionnelle. Je leur décris le dispositif, leur explique que tout sera basé sur leurs besoins. Ça donne une projection positive de la suite. Mais je n’utilise pas de discours type. Tenir le même discours pour toutes les personnes ça aurait moins d'effet parce que les traumatismes, les causes d'isolement, les vécus ne sont pas les mêmes. En tout cas j’écoute, et après j’adapte mon discours.

 

Comment sont vos groupes ?   

On aurait aimé accueillir 16 personnes sur nos deux sessions, on est un peu en deçà de ce qu'on avait visé. On a une grande mixité en âge. Ça favorise énormément les échanges et les partages d’expériences. Du coup, les savoir-faire et les expériences de chacun sont valorisés. C’est très important qu'ils s'écoutent sans se juger. Les plus âgés sont poussés à apporter leur expérience aux plus jeunes, et inversement on attend d’un jeune de 18 ans qu’il aide les plus âgés à utiliser les réseaux sociaux par exemple.

 

Quelle est globalement votre approche ?

On met un point d’honneur à ce que ça ne soit pas scolaire, parce que c’est souvent ça qui fait peur. On essaie de ne pas rester enfermés dans une salle. Nous proposons des activités variées, motivantes et enrichissantes. Les bénéficiaires pratiquent des activités sportives comme l’escalade (pour vaincre des peurs et apporter de l’aide à l’autre) ou d’aller visiter un musée. En fait, sans s’en rendre compte, les personnes reprennent confiance en eux et travaillent sur leur employabilité. Elles vont s’apercevoir qu’elles sont capables de réaliser telle ou telle chose, d’échanger avec la personne qui leur a organisé la visite, de poser des questions, de s’intéresser.

 

Le premier module de 5 semaines est basée sur la découverte du groupe, sur les prémices des différents projets individuels et collectifs et sur la confiance en soi principalement. Pour le deuxième, on va plutôt être sur des activités d'expression c'est-à-dire oser parler et écrire, et sur les visites nécessaires, (par exemple à l’AFPA ou dans d’autres organismes de formation). Le dernier module est consacré aux immersions parce que les personnes sont un peu plus capables d'appeler ou de démarcher elles-mêmes. On organise différentes visites, à la CCVG, à la Maison Départementale des Solidarités, au CCAS, au tribunal, dans des associations socio-culturelles comme les MJC… Tout simplement pour leur faire découvrir ce qui les entoure.

 

À quel moment commencez-vous à parler de projet professionnel ?

On n'a aucun tabou, on en parle dès le début. Mais le mot professionnel fait peur, c'est certain. On est très transparent en leur disant que l'objectif de ce dispositif c'est d’abord de faire naître un projet, qu'il soit professionnel ou pas. L’idée c'est de dédramatiser, d'expliquer qu’on peut avoir plusieurs projets professionnels dans une vie, qu’on peut en changer. On l’aborde sous l’angle des appétences, des goûts de chaque personne. Est-ce que j'aime les animaux ? Est-ce que j'aime travailler avec mes mains ? Faire de la peinture ou plutôt du bois ? En fait, on cherche à dégager un projet par le biais des envies des gens, sans qu’ils s’en rendent vraiment compte.

 

Que se passe-t-il à la fin des 4 mois ?

Notre objectif, c'est que la personne sorte en emploi, en formation ou qu’elle ait réalisé un des objectifs qu’elle s’était fixée. On ne veut pas se focaliser sur l’emploi ou la formation, parce qu'une personne peut simplement avoir comme but de reprendre une vie sociale, ça c’est aussi une sortie positive. Parfois, on a des sorties négatives, avec aucun objectif réalisé et des abandons. Dans ce cas, on essaye de maintenir quand même un contact assez régulier par téléphone, on réoriente vers un autre partenaire. On essaie en tout cas de ne pas les laisser seuls dans la nature. C’est la personne qui est actrice de sa vie.

 

Pour la suite, que faudrait-il améliorer selon vous ?

Nous rencontrons des difficultés à mobiliser des personnes qui auraient pourtant besoin de cet accompagnement. Il faudrait arriver à mettre tous les acteurs locaux ensemble pour aller les chercher, donc je dirais une mobilisation territoriale plus importante. On s’est amélioré, je pense qu'une fois qu'on aura réalisé les deux sessions (la dernière se termine en mars), on pourra faire un bilan un peu plus précis de ce qui a marché ou pas en fonction des types de personnalités et des activités proposées.

 

Pour nous, la thématique principale reste la reprise de confiance. C'est vraiment notre ligne de conduite et ce qu'on a envie de produire sur le territoire, tout en sachant qu'on a déjà au sein du CPA Lathus des actions très thématiques, notamment nos formations en animation. Avec « Osez, lancez-vous », on avait envie de cette ouverture qui laisse place à plein de possibilités. On y met ce qui nous semble pertinent pour les individus, c'est un choix de notre association d’éducation populaire.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

 

 

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La coopérative des coopains

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KPA LA Rochelle est une association qui fait partie du réseau national KPA-Cité. Elle accompagne les jeunes de 16 à 25 ans à construire leur avenir par l'exploration entrepreneuriale et l’entrepreneuriat collectif. C’est dans le cadre d’un consortium que le réseau KPA-Cité a répondu à l'appel à projet du PIC 100% inclusion.

 

Présentez-nous KPA La Rochelle.

KPA La Rochelle c’est une association qui porte différents parcours. Le parcours la Fusée, un parcours destiné aux porteurs de tous types de projets, qui est comme une pré incubation. Pendant quelques semaines, les participants se retrouvent chaque mercredi soir pour faire avancer leur projet. Nous avons aussi le parcours Osmose, de janvier à juin, qui est une formation de 6 mois pendant laquelle des jeunes de 16 à 25 ans vont apprendre à gérer une entreprise, à faire des devis, des factures et réalisent des prestations. Pendant cette période, ils font également des stages en entreprise, et travaillent sur leur projet de vie au CFA de Lagord, pour mieux se découvrir.

 

Plus récemment, RestoKoop, ouvert en septembre, qui est co porté par Horizon habitat jeunes et par l'URHAJ. L'idée c'est que 5 jeunes participent, pendant 6 mois, à tous les aspects de la gestion d’un restaurant. Ils n’ont pas forcément vocation à devenir cuisinier, l’activité leur permet surtout d’acquérir certaines compétences, un rythme, des horaires, une posture professionnelle et une plus grande confiance. Et puis la coopérative « Les Coopains à bord » issue du programme Kpa-cité qui est le parcours qui a donné naissance à l’association il y a 5 ans, et par lequel nous avons répondu à l’appel à projet du PIC  100 % inclusion.

 

En quoi consiste Les Coopains à Bord ?

Les Coopains à bord est une coopérative jeunesse de services. Le programme vient du Canada. Son principe est de regrouper des jeunes pendant les vacances d’été, afin qu’ils proposent des services aux habitants des quartiers. Ils apprennent à gérer ensemble une entreprise coopérative et à proposer des prestations rémunérées. Après une première expérience menée ici, les jeunes et les accompagnateurs se sont dit que ce serait une bonne idée de continuer toute l'année. C’est comme ça qu’est née la coopérative les Coopains à Bord.

 

La particularité de KPA La Rochelle, c'est que nous nous adressons aux 16-25 ans, principalement des jeunes déscolarisés des quartiers prioritaires. Alors qu’ailleurs dans le réseau KPA-cité, notamment à Lille, c’est plutôt pour un public adulte. Soit ils sont déjà inscrits à la mission locale, soit nous faisons en sorte qu’ils les soient. Pour participer, ils signent un Contrat d'Appui au Projet d'Entreprise (CAPE) porté par l’association KPA La Rochelle.

  

Comment trouvez-vous les jeunes ?

Nous mobilisons tous nos partenaires, et nous allons à la rencontre des jeunes sur le territoire. On organise plusieurs réunions d'informations pour les jeunes, qui peuvent s’engager sur la base du volontariat. Nos partenaires connaissent le programme et nous les informons régulièrement. De toute façon, rien ne peut se faire sans les partenaires.

 

Nous accueillons une douzaine de candidats par groupe. En tout cas on a la capacité d’en accompagner une douzaine en même temps. Après, au cours de l’année, on en accompagne beaucoup plus. Aux Coopains à bord, ils viennent le mercredi après-midi donc ça permet aux jeunes scolarisés d’être là, ainsi que pendant toutes les vacances scolaires.

 

A quoi les jeunes s’engagent-ils ?

À tout moment les jeunes peuvent rejoindre la coopérative Les Coopains à Bord. L'idée c'est qu'ils viennent découvrir si elle correspond à leurs besoins. Ensuite on leur demande de prendre un véritable investissement, on veut leur inculquer cette notion d'engagement. Quand un jeune décide que c’est le bon moment, on signe un CAPE d’une durée de 2 mois à un an, renouvelable. C'est aussi une façon pour que les jeunes se sentent impliqués dans un projet. Nous on souhaite qu'ils s'engagent de 6 mois à un an, mais on ne les garde pas à tout prix.

 

Comment trouvez-vous vos clients ?

L'association a 5 ans d'existence maintenant, nous avons beaucoup de clients fidèles qui nous connaissent. Je pense notamment à la ville, à la SCIC TEO, aux Francofolies avec qui nous avons un partenariat depuis longtemps. Il y a toujours un moment dans l'année où nous menons plusieurs de démarchages, ça aussi c'est un apprentissage pour les jeunes. Les groupes évoluent, ils ont des capacités, des envies, des appétences différentes. Si on identifie que, par exemple, dans le groupe il y a beaucoup de d'intérêt pour l'audiovisuel, peut être que nous allons va prendre un temps pour aller démarcher des clients dans ce secteur.

 

De quel type sont vos prestations ?

Les prestations proposées par les Coopains sont multiservices. Notre objectif c'est que les jeunes découvrent des activités différentes, avec des entreprises et des partenaires différents. C’est pour eux une façon de mieux se connaître, découvrirent ce qu'ils aiment faire. On veut conserver cette ouverture, donc on ne se spécialise pas. Aux Francofolies par exemple c'était l'accueil et l’orientation des flux des publics, de la distribution de goodies, du ramassage des gobelets pour les mettre dans les bons bacs à tri, etc. A la guinguette du Gabut, c'était l’installation et la désinstallation du site, des tables des chaises, le tri des poubelles.

 

On ne s’interdit pas d'intervenir dans des domaines très différents. Il y en a plein que nous n’avons pas encore exploré. Par exemple les vêtements de seconde main. J'ai récemment rencontré une entrepreneuse qui travaille dans ce domaine-là, et qui aurait peut-être des besoins ponctuels pour du tri.  A voir si peut intéresser les jeunes.

 

En pratique, ça se passe comment ?

Le mercredi après-midi, il y a un temps collectif. Ensemble, les Coopains prennent connaissance des courriels reçus, regardent s'il y a des demandes de prestation. Ils vérifient qu’il y a tous les détails nécessaires pour répondre, dates, horaires, nature de la demande, etc. Sinon, on appelle le client. Ensuite ils décident d’y aller ou pas. Si tout est calé, ils envoient un devis et organisent la prestation. Ce ne sont pas forcément les mêmes qui contactent le client, établissent le devis, font la prestation ou préparent les factures. Ça dépend des disponibilités et des envies des uns et des autres. L’important c’est qu’ils soient tous au courant, qu’ils aient tous la même information. Potentiellement toutes les personnes qui ont participé à la réunion du mercredi peuvent intervenir d'une manière ou d'une autre sur la même prestation.

 

Quel est le rôle des accompagnateurs ?

Nous faisons le lien dans le sens où on s'assure auprès du client qu'il a bien compris le cadre d'intervention, le public qui va venir.  Evidemment on s’assure que les jeunes soient en sécurité, pas que physiquement, mais aussi dans le sens du cadre dans lequel ils vont évoluer, pour qu'ils se sentent en assurance et en autonomie. C’est nous qui définissons ce cadre, surtout quand il y a des mineurs. Notre règle, c’est que les jeunes n’agissent pas seuls. Ils sont toujours au minimum en binôme. C’est important pour la prise de confiance. Parfois les clients ont besoin de plusieurs personnes, la prestation dépend du besoin et de la demande.

 

Vous effectuez un suivi après la sortie de l’action ?

C’est quelque chose qu'on aimerait bien mettre en place. Pour l’instant nous préparons la sortie des jeunes, c’est très important. On les aide à prendre conscience des compétences qu'ils ont acquises, avec des temps d'entretien individuel, des ateliers CV, etc. Et surtout, comme nous sommes très ancrés dans un maillage local, nous sommes en lien avec les conseillers de la mission locale, pour essayer de s’assurer qu’il y aura une suite pour eux. En revanche il n’y a pas de suivi à 6 mois.

 

On a pour projet de créer une communauté des anciens, parce qu'il y a une vraie fierté d'appartenance et beaucoup de liens qui se créent entre les différents parcours. En général, au-delà d'un an, on sent qu'ils ont appris ce qu'ils avaient à apprendre. Les derniers mois de leur présence, ils peuvent jouer le rôle des plus anciens qui vont former les nouveaux arrivants. C'est intéressant en termes de transmission entre eux. Et puis souvent au bout d'un an, ils partent vers d'autres horizons, nous souhaitons que ce soit un tremplin vers de nouveaux projets.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine : https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

 

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Handi Num, le numérique pour tous

Handi Num, le numérique pour tous | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Le 400 est un tiers lieu numérique basé à Brive, qui a bénéficié du label « fabrique de territoires". »  Il comprend notamment un pôle coworking de location de bureaux partagés, et une activité de médiation numérique et de formation à laquelle est attaché le projet Handi Num. Handi Num est notamment financé par le Fonds Régional d'Innovation pour la Formation (FRIF), l’Etat, et l’Agefiph.

 

D’où vient le projet Handi Num ?

L’idée centrale du 400 est de recevoir toute personne qui le souhaite. C’est ce que nous appelons l'accueil inconditionnel. C'est dans cet esprit qu'est né le projet Handi Num, qui se situe entre le monde du handicap et le monde du numérique. En fait, dans le cadre de notre activité de médiation numérique, nous avons été sollicités par des personnes en situation de handicap, notamment qui présentaient des troubles du spectre autistique. Comme nous n’avions pas vraiment de connaissance sur ce type de handicap, il nous a semblé qu’il était important d’acquérir certaines compétences, afin d’assurer notre objectif d’un accueil pour tous les publics.

 

Nous avons échangé avec différentes structures et constaté qu’il n’existait pas vraiment de formation destinée aux conseillers et médiateurs numériques avec un volet sensibilisation au handicap. D’ailleurs, de l’avis général de ceux que nous avons interviewés, très peu de temps est consacré aux publics spécifiques dans le cadre de leur formation.

 

En quoi consiste-t-il ?

Nous avons présenté au FRIF une feuille de route en quatre étapes : analyse de l'existant et recueil des besoins, création de modules, expérimentation et ajustement, diffusion. Notre but premier était d’élaborer des modules de formation, puis de les tester et de les ajuster auprès des conseillers et médiateurs numériques, et peut-être plus largement pour les formateurs, les référents handicaps, etc.

 

L’objectif global, c'est vraiment de favoriser l'accès à l’autonomie numérique à tous publics. Donc aussi aux personnes en situation de handicap. Pour ça, nous avons mis en en place des ateliers numériques inclusifs expérimentaux. Mais avant, nous avons produit des modules de formation pour les conseillers et les médiateurs numériques, de manière qu'ils soient équipés, sensibilisés, qu'ils aient quelques repères, parce que leur travail ne consiste pas à être expert du handicap. C’est une acculturation à l'écosystème de la personne en situation de handicap que l’on vise, parce que beaucoup ne savent pas ce qu’est la MDPH, quel est le rôle de Cap emploi, etc. Il nous semblait important de donner cette connaissance aux conseillers, afin qu’ils puissent faire appel à ces acteurs ou leur passer le relais si nécessaire.

 

Comment se déroule la formation ? 

Elle commence par un module socle d’une journée sur la sensibilisation au handicap en général. Elle se poursuit par 4 modules thématiques, un par demi-journée et par type de handicap (auditif, visuel, cognitif, troubles du spectre autistique), avec chaque fois un expert, une association ou une structure reconnue pour ce handicap particulier. On a longtemps débattu sur ce point, notamment sur le risque qui pouvait exister de discriminer ou stigmatiser en procédant ainsi. Mais sur le plan pédagogique, il était plus simple d’utiliser cette clé d'entrée.

 

Quelle a été votre approche dans la mise en place ?

Très vite nous avons travaillé avec un comité de pilotage et un comité technique, en commençant par diffuser des questionnaires auprès de toutes les parties prenantes. Notre approche consiste plutôt à renforcer ce que font les conseillers dans leur activité quotidienne, avec n'importe quel public, pour y injecter de la sensibilisation aux handicaps et de la connaissance des acteurs. Au départ, nous avons décidé de dédier la formation aux conseillers numériques. Les formations sont facilement transférables à des formateurs ou des référents handicap.

 

Selon vous, qu’est-ce qui manque le plus à un médiateur numérique ?

Notre état des lieux a montré qu’il n’existait pas vraiment de solutions spécifiques adaptées, en dehors du matériel du stagiaire et de la sollicitation au cas par cas pour adapter son parcours, dans les organismes pour l'accès à l'emploi et à la formation. Notre but était de renforcer la confiance que les médiateurs ont dans leurs compétences pour s'adapter à tous publics. Nous avons aussi travaillé avec eux, en organisant des groupes de concertation entre eux et les publics. D’ailleurs ceux qui ont participé à Handi Num n'avaient pas forcément, au départ, une idée très précise de ce qu'ils venaient chercher. Au fur et à mesure de nos échanges, ils ont contribué à mieux structurer le contenu. Ce qu’ils ont tous dit, c’est combien ils se sentaient seuls pour accompagner les personnes en situation de handicap et combien cette formation les a aidés.

 

Et pour les publics ?

Pour les personnes en situation de handicap le numérique a été une révolution, par exemple pour les sourds parce que grâce à lui ils peuvent communiquer en langue des signes. Il participe à la fois de la lutte contre l'isolement, de la capacité pour tout citoyen de disposer d’un droit à l'information et à gérer ses espaces personnels, faire ses déclarations d'impôts, ses démarches administratives. C’est aussi un des prérequis pour suivre une formation et accéder à un emploi de nos jours. Certaines personnes en situation de handicap nous ont dit que les approches spécialisées par rapport au handicap ne leur convenaient pas toujours, elles veulent évoluer dans un monde où il y a des gens de toutes sortes, handicapés ou pas. Elles veulent pouvoir faire les mêmes choses que tout le monde.

 

Avez-rencontré des difficultés et si oui, de quelle nature ?

Nous avons passé 6 mois à essayer de nous comprendre avec les partenaires. En fait, le monde du handicap n’est pas différent des autres. Il y a des prés carrés, des peurs, de la concurrence, ça a pris beaucoup de temps pour lever ces difficultés de dialogue et pour concrétiser quelque chose d'opérationnel, se mettre d'accord sur la ligne de conduite qu'on allait adopter collectivement. Certaines structures n'étaient pas forcément prêtes ou n'avaient pas de réponse en local. Les conseillers avaient aussi un peu peur de poser des questions dérangeantes ou qui pouvaient être perçues comme inquisitrices. Notre enjeu c’était de les libérer, de faciliter le dialogue, pour qu’ils adoptent une posture naturelle au regard de la relation humaine.

 

Maintenant nous devons travailler sur la suite, peut-être dans le cadre d’un consortium. Il nous faut un financement, mais nous avons envie d’élargir, nous pensons qu’un budget plus global nous aidera à poursuivre et développer Handi Num, nous donner des capacités d’attractivité supplémentaires.

 

 

 

 

Le projet Handi Num rassemble différents types d'acteurs, les institutionnels avec l’Etat, la Région, le Département de la Corrèze, l'agglomération et la ville de Brive, des services publics comme la CAF et la CPAM, et des prescripteurs, Pôle emploi, Cap emploi, mission locale. Il y a aussi le Greta, Hubikoop (le Hub territorial pour un numérique inclusif en Nouvelle-Aquitaine), le CRFH (centre régional de ressources pour la formation) et des associations représentatives des différents types de de handicap (AUTONOMIA, APF, ADAPEI, APAJH UNADEV, URAPEDA). Le 400 pilote Handi Num en lien avec l'ensemble de ces partenaires.

 

Pour en savoir plus, consultez la chaîne Youtube du 400 ICI.

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Un projet pour apprendre les projets

Un projet pour apprendre les projets | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Marine Raffini est depuis peu directrice de la mission locale des Landes. Avant cela, elle était responsable du projet Territoires 100% solutions, lauréat du PIC Repérer et Mobiliser les Publics Invisibles (RMPI).

 

En quoi consiste Territoires 100% solutions ?

Nous avons démarré cette action en septembre 2020 de manière expérimentale, et nous avons souhaité la poursuivre. L’interrogation de départ était, est-ce que les dispositifs proposés aux jeunes sont réellement adaptés à leurs besoins et difficultés ? Nous avons pensé qu’il pouvait être intéressant de monter une action ayant pour objectif de créer un collectif à l'échelle d'un bassin de vie. Nous avons choisi les communautés de communes comme échelle. Notre idée c’était aussi d’intégrer les jeunes dans une démarche de projet pour imaginer des actions et ensuite les mettre en place. L’objectif est de leur faire découvrir leur environnement socioculturel et socio-économique, les ancrer sur le territoire et les faire monter en compétences pour que ça leur serve dans leurs projets personnels.

 

Quel est son principe ?

Territoire 100% solutions, c’est vraiment apprendre sans avoir l'impression d'apprendre. C’est travailler sur la conception d’un réseau d’entraide, entre jeunes, mais aussi avec les décideurs locaux. Le but c’est d’apprendre à élaborer un projet, apprendre à gérer le budget, à chercher les partenaires utiles, etc.

 

Comment avez-vous procédé pour le mettre en place ?

Nous sommes partis à la rencontre des associations sportives, des comités des fêtes, des acteurs de terrain qui pouvaient nous indiquer des jeunes potentiellement intéressés. Lors de la première étape du projet, nous avons réalisé un diagnostic approfondi du territoire, pour évaluer les réalités vécues par les jeunes et leurs perceptions. Nous avons élaboré un questionnaire et nous sommes allés à leur rencontre. C’est dans ce cadre-là que nous avons rencontré les premiers candidats qui, ensuite, en ont contacté d’autres avec notre accompagnement.

 

Une fois le premier groupe constitué, nous avons fait une réunion collective. Les participants se sont mis d'accord sur la manière dont ils voulaient s’organiser et arriver à l’objectif de faciliter leur insertion. Par exemple, pour la première expérimentation qui se déroulait sur un territoire très rural, ils ont décidé de se voir toutes les semaines avec une alternance présentiel/visio. Ils ont aussi convenu que les rencontres se feraient à chaque fois dans des communes différentes et que j’irais chercher ceux qui n'était pas mobiles. Ils n’étaient tout de même pas en autonomie totale. J'étais là pour les orienter et les alerter sur la faisabilité de leurs idées.

 

Quel est le profil des participants ?

Nous n’avons pas ciblé des profils particuliers, nous voulions surtout trouver des complémentarités entre chacun pour constituer un groupe pertinent d’une douzaine de jeunes, qui puisse aller le plus loin possible. On souhaitait qu’il soit représentatif et composé d’individus qui pouvaient s’apporter mutuellement des choses, qu’ils soient déjà impliqués dans l’associatif ou en retrait de la vie sociale. Notre objectif était de faire se rencontrer des jeunes qui parfois habitent près les uns des autres mais ne se seraient pas nécessairement rencontrés sans le projet.

 

Comment se déroule le projet ?

Nous avons mené l'expérience sur un premier territoire, qui s'est avérée plutôt concluante. Ensuite, nous avons décidé de répondre à l'appel à projet RMPI pour la déployer sur trois nouveaux territoires. A chaque fois, l’action durait entre 10 et 14 mois, découpés en quatre temps. D’abord, le diagnostic et le repérage des premiers jeunes. Le deuxième, l’élaboration des actions. Et le troisième temps, l’expérimentation des actions. Ce sont les deux temps forts, où les jeunes allaient notamment à la rencontre des acteurs locaux et des partenaires. Enfin le dernier, le bilan et l'évaluation, que ce soit collectif ou individuel, le territoire, les actions.

 

A quoi s’engageaient les jeunes ?

Nous avons demandé aux jeunes s’ils souhaitaient formaliser leur engagement, par exemple pour leur employeur. A l'unanimité, ils ont souhaité qu’il n’y ait pas de formalisation de leur implication. Cela nous a permis d’avoir une certaine souplesse, qui permettait à certains jeunes de rejoindre le projet alors qu'il était déjà entamé. Il y avait aussi des passerelles avec les dispositifs les plus classiques de la mission locale, comme le CEJ.

 

En ce qui concerne les sorties, pour nous le plus important c’est que le jeune ait gagné confiance en lui, qu’il soit monté en compétence et devenu plus à l'aise pour poursuivre sa démarche professionnelle. Certains ont continué à être accompagnés de manière individuelle à l'issue du projet, d'autres ont trouvé un emploi grâce au partenariat et à la rencontre avec les acteurs locaux. D’autres encore ont poursuivi leurs études.

 

De quelle nature étaient les actions ?

Nous avons été assez étonnés par le pragmatisme des jeunes, qui savaient bien faire la part entre ce qui était possible et ce qui ne l’était pas. Et surtout par la cohérence entre ce qu’ils souhaitaient, et ce que les élus de territoire avaient pu imaginer. Très souvent ça se recoupait, ça a été une vraie surprise pour les élus. Ce qui nous a marqué également, c’est que dans chaque groupe, les jeunes ont eu le réflexe d'aller regarder ce qui faisait dans des territoires similaires, de chercher des bonnes idées et des bonnes pratiques plutôt que de partir du principe d’inventer quelque chose de nouveau.

 

Quelques exemples ?

Il y a eu beaucoup de propositions sur le logement et la mobilité qui sont ressorties, notamment dans les territoires. Par exemple, pouvoir aller habiter chez des personnes âgées seules. Ou encore d'avoir chacun leur habitation dans un même bâtiment avec tous les services à proximité. On avait conscience que c'était compliqué, que nous n’allions pas construire comme ça un bâtiment avec des appartements, mais on s’est dit qu’il faudrait aller voir un bailleur social pour des logements en rénovation. Aujourd'hui, ce qu'on teste de manière expérimentale, c'est d'avoir 3 logements fléchés pour les jeunes, situés à 200 mètres de la maison France services, avec une voiture partagée à disposition. Comme une sorte d’espace de répit et de tremplin pour l'insertion des jeunes qui y résident, avec un accompagnement renforcé à la mission locale répondant à tous les freins qu’ils peuvent rencontrer. C’est quelque chose qu’on teste sur le premier territoire et qu'on aimerait développer sur l'ensemble des départements si ça fonctionne.

 

Quel rôle jouent les élus et décideurs locaux ?

Nous les avons informés depuis le début, on leur présentait territoires 100% solution comme une offre de service complémentaire. Nous sommes intervenus sur leur territoire en concertation avec eux, parce que proposer de actions c'est très bien, mais il faut qu’elles soient suivies d'effets, dans une dynamique commune avec les décisionnaires locaux. Donc les actions se sont faites sur chaque territoire avec un engagement de leur part à réaliser celles qui relèveraient de leurs compétences. C’est vrai qu’ils partaient d’une page blanche, et que nous leur demandions de s’engager à mener des actions dont ils n'avaient pas encore connaissance. C’était forcément un peu déboussolant. En revanche, ce qui les intéressait, c'était d’avoir un contact direct avec les membres du groupe, et de disposer d’un état des lieux approfondi de la situation des jeunes sur leur territoire et de leurs attentes. Particulièrement là où il y a un véritable exode de ce public.

 

Est-ce que le projet a fait évoluer vos pratiques habituelles ?

Derrière ce projet, notre idée était d'interroger les pratiques de la mission locale, et de renforcer nos actions hors les murs, d'aller à la rencontre des jeunes et de créer vraiment une dynamique collective à la fois pour eux et pour les territoires. Aujourd’hui la question c’est, est-ce qu’on poursuit le projet de la même manière sur d'autres territoires, ou d’une manière différente avec ce que nous avons appris de ce projet ?

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine : https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

 

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Parcool, le « journal fait par vous et pour vous »

Parcool, le « journal fait par vous et pour vous » | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Marilyn Bissat est coordinatrice et formatrice à l’association 3s (Périgueux). Elle est à l’origine de l’action Parcool, financée par l’appel à projets régional « Mobilisation vers la formation ».

 

D’où vient votre action Parcool ?

En tant que structure d'insertion par l'activité économique nous constatons que, avant l'emploi, l’étape formation est souvent manquante. On s’est demandé comment donner de l’appétence pour l'apprentissage. Nous avons imaginé Parcool, comme « parcours-cool », sous la forme d’ateliers dont le but est de créer un journal.  Cette idée du journal, je l'avais déjà eue par ailleurs, je me suis dit qu’on pourrait la transposer. Tout s’est fait en équipe, je ne pouvais pas mener cette action toute seule. Notre idée, c’était aussi d’évaluer les compétences au niveau du français, sur la présentation quand on va interviewer les personnes, la mobilité. En fait toutes les problématiques auxquelles des personnes éloignées de l'emploi sont confrontées.

 

Pourquoi avoir choisi la forme papier pour ce support ?

Je voulais qu’il y ait un travail de réflexion effectué en salle, qu’il y ait comme une corrélation avec la formation. Ecrire, ça veut dire qu’on se réunit, on se regroupe autour d’une table, on échange, on s’entraide. En fait, tout ce qui se pratique en formation. Et pour nous, il était important de pouvoir toucher un objet, posséder quelque chose de tangible. Un blog c'est très bien, mais on ne l'a pas entre les mains. Et puis l'idée, c'était aussi d'aller à la rencontre des gens pour le distribuer dans la boîte aux lettres. Le premier exemplaire a été tiré à 1500 exemplaires, puis distribué aux partenaires et sur les QPV de Périgueux.

 

Comment se déroulent vos ateliers ?

Le rythme c’est tous les mardis après-midi, pendant environ 3 mois. Entre 12 et 14 séances pour aboutir à un produit prêt à partir en impression. Pour les articles, nous avons 4 thématiques :  emploi, société, « bon pour la planète » et sports-loisirs-culture. Dans un groupe de 8, ça fait un binôme par rubrique. A la fin de chaque atelier, mes deux consœurs et moi, on les félicite sur tout ce qu’ils ont mis en œuvre. Nous faisons en sorte qu’à chaque fois ils pensent être à 100% à l’origine de tout. On surjoue un peu la valorisation des compétences. Mais l’important, c’est le regard des autres participants. La prise de confiance, elle se fait au sein du groupe, en fonction de la façon dont ils se positionnent les uns par rapport aux autres. Finalement, chacun a réussi à trouver une place importante à chaque fois. Ils ont donné autant qu'ils ont reçu.

 

Combien de participants par groupe ? 

Dans l’idéal, ce sont des groupes entre 8 et 10 personnes. Même si notre premier groupe ne comptait que deux participants. Entre la première information et le début de l’action, on essaie d'aller vite, parce qu’avec les personnes susceptibles de rentrer sur le dispositif, c'est à l'instant T. Sinon on les perd. Elles viennent vers nous parce qu’elles ont entendu parler de l’action, après avoir vu nos affiches ou notre site internet. Notre but est de vérifier si on peut aller chercher des gens sans forcément qu’ils soient orientés. Pour l’instant, nous avons eu des profils très différents, de 24 à 52 ans, une majorité de femmes.

 

Avez-vous établi des prérequis ?

Aucun prérequis. Il faut juste qu’on arrive à se comprendre un minimum, même si c’est en anglais. Après il peut y avoir des traducteurs. Par exemple, un jeune homme a écrit un texte en arabe, qu’il a fait traduire en anglais par un ami, que nous avons repassé ensuite en français. On se rend bien compte qu’il peut y avoir de l’appréhension, parce que les gens ne sont pas forcément à l’aise avec la rédaction, avec le français, certains ont beaucoup de difficultés à s’exprimer. Ils arrivent à compenser, à trouver des subterfuges plus qu’ingénieux. Pour le premier numéro, nous n’avions que deux participants avec un faible niveau scolaire.  A la fin du dispositif, l’un est parti en remise à niveau en français, l’autre en cours de FLE. Plusieurs autres veulent aller se former sur le numérique, la mise en pages, etc. Donc on a la preuve que ça a marché.

 

Quel rôle jouez-vous dans les ateliers ?

Notre rôle c’est d’essayer de les faire réfléchir. Plus ils sont nombreux, plus c’est simple, c’est l'intelligence collective qui fait le travail. Sur le deuxième numéro, ça s'est fait assez naturellement par rapport à leur personnalité et à leurs goûts. Le journal ressemble à ce qu’ils veulent en faire. Les participants du premier numéro ont rajouté un sous-titre : « le journal fait par vous et pour vous ». Ils choisissent le format, dépliant 3 volets ou un 8 pages en A5. Tout ça, ils l’ont réfléchi ensemble. Nous sommes des facilitateurs de réflexion. On organise des votes aussi, pour choisir la mise en pages, la présentation, les couleurs, de manière que tout le monde valide le projet.

 

Quels sont vos objectifs ? 

La participation aux ateliers permet de créer du lien social, de redonner aux participants un peu de confiance en eux. Souvent c’est ça qui leur manque. Et sans confiance on ne va nulle part. Les compétences, ils en ont énormément, mais ils ne s'en rendent pas compte. Leur objectif personnel, c'est d'aller au bout de leur article. Et si possible jusqu’à la distribution, qui est l’aboutissement de la démarche. J’étais présente à la distribution dans les QPV, les participants ont étaient très fiers de montrer le journal aux habitants, expliquer la démarche. On a même pu évaluer leurs capacités relationnelles, au point qu’une personne s’est découvert un intérêt pour le contact, et elle va entrer en formation d'accueil et secrétariat.

 

Quand on présente le dispositif à de nouvelles personnes, on leur rappelle le cadre, en précisant qu’il n’y a pas d’obligation pour elles de partir en formation à l’issue. Lors des ateliers, on évalue leurs compétences, on parle de leurs   difficultés, et on leur fait passer le message qu’elles pourraient les combler par une formation ou par d'autres moyens. On le fait vraiment de manière progressive, et on commence toujours par les qualités, ce qu’ils sont capables de faire. Parfois c’est juste le fait d’avoir été assidu, d’être venu à chaque atelier.

 

Avez-vous rencontré des difficultés, des surprises ?

Dans nos premiers ateliers, on s'est rendu compte que les gens ne s'écoutaient pas les uns les autres. Donc pour la suite, mon objectif est de proposer des petits ateliers sur la communication et l’écoute active, sous forme de séances de 30 à 45 minutes. Sinon, je ne m'attendais pas à ce que ce soit aussi chronophage. On a beau être trois animatrices, ça revient vite, il faut prendre le temps de se concerter. Autre chose que je n’avais pas mesuré, c'est la richesse des échanges entre personnes qui viennent d'horizons très différents, qui arrivent à s'entendre, à s'écouter, à se comprendre, et finalement à faire un groupe. Certains participants du numéro 2 veulent continuer sur le 3e numéro. Ils disent que ça leur apporte beaucoup. Un autre a créé le blog de Parcool, ça fait aussi partie des choses surprenantes.

 

Est-ce que vous allez transférer certaines choses dans vos pratiques habituelles ?

Avec ces ateliers, on se rend bien compte que l'accompagnement dans un bureau, en face à face, c'est complètement dépassé. Il y a deux mois, on a commencé à essayer le collectif dans le cadre de l’accompagnement. On va continuer l'année prochaine, parce que les échanges entre les salariés, c’est extraordinaire. On aimerait garder ce principe de petit journal pour l’association, même si on ne fait qu’un semestriel, parce que l’effet sur l'estime et la confiance que les personnes prennent en elles c'est spectaculaire. Si c'était à refaire, je le referais avec grand plaisir, même en sachant les difficultés auxquelles on a été confrontés.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine : https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

 

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La Prépa compétences de l’IRFREP

La Prépa compétences de l’IRFREP | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Philippe Rondinaud est chargé de relations entreprises à l’IRFREP, organisme de formation professionnelle présent sur toute la Nouvelle-Aquitaine. Début 2022, le réseau a mis en place des Prépas apprentissage dans chaque centre, un dispositif porté par la Ligue de l’Enseignement.

 

Quelle est l’approche IRFREP pour ce dispositif ?

Pour cette prépa apprentissage, chaque IRFREP, chaque établissement, était dans l'obligation d'accompagner un certain nombre de jeunes, avec un concept un peu novateur puisque nous avons travaillé avec des open badges. Présenter cette application aux jeunes nous a aidé à capter notre public. 

 

Notre idée c'était de mettre en avant l'individu, c'est à dire faire émerger les compétences de chacun et s'appuyer dessus pour l’orienter. Nous n’avions pas d'idées préconçues par rapport à l'objectif. Avant la Prépa, nous animions un dispositif régional baptisé « passerelle vers l'emploi », qui avait bien fonctionné pour un public un peu similaire. On s'est dit qu’on allait repartir dans le même esprit.

 

Qu’avez-vous fait pour promouvoir le dispositif ?

Au début, il a vraiment fallu prendre mon bâton de pèlerin. Je suis allé voir tous les comités de quartier, les centres d’action sociale, les CIJ, les MJC, le comité olympique, Pôle emploi. Aujourd’hui j'ai une permanence une fois par mois à la mission locale. On envoie un courriel à tous les conseillers pour les informer du démarrage d’une session, avec la fiche produit, et je me déplace pour faire des informations collectives. Aujourd'hui, je peux dire que ça fonctionne bien, mais ça n'a pas toujours été le cas. J’ai fait également une campagne d'affichage dans toutes les mairies et publié des communiqués dans les journaux municipaux.

 

Comment identifiez-vous vos candidats ?

Nos partenaires nous envoient des jeunes, et je mets un point d'honneur à les recevoir un par un. Mais il n’y a pas de prescription au sens réglementaire du terme. Ils passent tous par une réunion d’information collective où on leur explique l’ensemble du dispositif. Je leur parle aussi de laïcité, de handicap, parce qu’il faut qu’ils s'attendent à croiser des gens de toutes origines, de toutes conditions. Je les préviens qu’on ne veut pas de grossophobie, d'homophobie, etc. C'est une phase d'approche obligatoire. On finit toujours les réunions par un temps d’échange, parfois avec des anciens stagiaires qui viennent témoigner. Et je leur donne un petit flyer à remplir pour ceux qui le veulent. Une fois qu'ils ont validé leur candidature, je leur envoie un courriel pour confirmer leur inscription.

 

Notre public QPV de 16 à 29 ans est très éloigné de l'emploi et de l'apprentissage, même pour certains de toute scolarité de base. Je pense que ces jeunes n’ont pas été informés des possibilités qui s’offrent à eux, tout simplement. Lorsqu’on leur présente le dispositif, quand on leur parle simplement de la Prépa apprentissage et de ce qu'ils peuvent faire après, ils boivent littéralement nos paroles.

 

Les groupes sont constitués de quelle manière ? 

On avait 3 groupes en même temps sur des départements différents, 10 jeunes au maximum. En moyenne, ils sont plutôt 8 participants. On a toujours un seul groupe par centre de formation au même moment. Actuellement on a un groupe sur la Charente, un en Charente-Maritime, un en Deux-Sèvres. Une fois qu'ils sont en centre, les jeunes font preuve d’une bonne assiduité, on en perd très peu. S’ils arrêtent, c'est parce qu’ils ont été « captés » lors d'un stage et qu’ils sont embauchés en CDD ou en CDI. Pour nous, c’est une sortie positive. L’essentiel c’est vraiment que ces jeunes trouvent leur voie.

 

Quel est le principe de fonctionnement de votre Prépa ?

Nous avons opté pour des parcours de 3 mois et demi, qui incluent deux périodes de stage en entreprise. Les participants commencent par 3 semaines en centre. Ensuite, ils partent pour 15 jours de stage, puis encore 3 semaines en centre. A leur retour, on effectue un débrief sur ce qu’ils ont fait en entreprise, on ajuste leur CV.  Ce qu’on veut surtout, c’est qu’ils échangent entre eux, qu’ils parlent de ce qui a fonctionné ou pas, ce qui leur a plu ou pas. Ensuite ils repartent pour une deuxième période de stage de 15 jours, et puis ils reviennent au centre jusqu'au bilan final.

 

Notre programme comprend aussi tout ce qui est technique de recherche d'emploi, des ateliers d'éloquence pour leur redonner un peu confiance. Nous avons également un parcours urbain encadré par la formatrice. C’est l’occasion de détecter des compétences comportementales, de voir qui va prendre le leadership. En fait aujourd'hui vous dites à quelqu'un « tu es intelligent », il ne vous croit pas. Mais si vous lui dites « tu as beaucoup de compétences », ça lui parle un petit peu plus. Parce que, autant on va pouvoir mettre des mots sur les compétences, autant on ne pourra pas en mettre sur l'intelligence.

 

Comment se fait le choix des stages ?

L’idéal c’est que les jeunes découvrent des choses nouvelles. Certains préfèrent aller vers un milieu qu’ils connaissent déjà, ça les rassure. Sinon, pour l’essentiel, ce sont des stages d’observation. Mais il faut que ce soit de l'observation active, ce n’est pas un stage de 3e. Si le contact est bon avec le jeune, et que pour l’entreprise il y a possibilité d'un emploi ou d'un apprentissage, on y retourne et on valide.

 

Quelle est la nature de votre intervention ?

Nous laissons chaque jeune choisir ce qu'il a envie de faire. Même si on est malgré tout obligés de lui dire qu’il ne peut pas tout envisager, surtout s’il est mineur. On l’accompagne dans son projet, mais il faut que ça vienne de lui. Si on veut le mobiliser sur quelque chose, il ne faut rien lui imposer. Ça c'est l'idée première.

 

La question que je leur pose c'est « qu'est-ce que tu aimes ? Tu préfères la musique ? La cuisine ? Le foot ? »  Je ne leur parle pas projet, parce que souvent ils s'interdisent de réfléchir dans ces termes, parfois à cause de leur environnement familial. On leur dit toujours de ne pas se mettre d’obstacles eux-mêmes, et que s’ils veulent être marionnettiste, on fera en sorte de leur trouver un stage de marionnettiste.

 

Que se passe-t-il après la Prépa ?

J’effectue un suivi de chaque jeune pendant 6 mois. Tous les mois je les appelle, d’abord pour prendre des nouvelles, ensuite pour savoir s'ils ont bien intégré leur formation, ou pour leur faire passer des propositions d’emploi. Eventuellement, si ça s'est mal passé avec leur tuteur ou leur maître d'apprentissage, je les réoriente sur autre chose. Le plus souvent, ils poursuivent leur projet. Et même s’ils ont changé de voie, ils restent en contact entre eux et ils se passent des informations. Je pense qu’ils adhèrent maintenant à la vie professionnelle. Après les avoir mis sur une rampe de lancement, je suis là pour les redynamiser, faire une petite piqûre de rappel pour leur confirmer qu’on est toujours derrière eux.

 

Qu’envisagez-vous pour la suite ?

C'est un dispositif qui fonctionne, et qui devrait être reconduit en 2024. Quand tout le monde est satisfait, que ce soient les jeunes, les prescripteurs, les formateurs, la structure, c'est qu’il répond bien à un besoin.

 

Dans les pistes d’amélioration, je pense qu’on devrait plus communiquer autour de l'intérêt que peut avoir une entreprise à accepter un stagiaire.  C'est vrai pour la Prépa, c'est vrai pour les titres professionnels, c'est vrai pour tout en réalité. Je pense qu'il y a vraiment un travail de promotion à engager. On fait beaucoup pour l’apprentissage, mais sur la Prépa on est un peu en deçà. On est face à une situation paradoxale, parce qu'aujourd'hui les entreprises viennent quasiment directement en centre de formation pour recruter mais, d'un autre côté, elles ne veulent pas prendre des jeunes en stage.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine : https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

 

 

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Reprendre confiance pour se remettre en mouvement

Reprendre confiance pour se remettre en mouvement | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Sandrine Toudic, Valérie Jourdan et Séverine Ménard sont conseillères en insertion professionnelle à l’Espace Mosaïque, le centre socio-culturel de Courçon (Charente-Maritime). Elles animent le dispositif Mobilis’action, un parcours de remobilisation destiné à tous les publics qui ont besoin de reprendre confiance en eux. Mobilis’action est financé par l’appel à projets régional « Mobilisation vers la formation ».

 

D’où vient Mobilis’action ?

Nous avions une action précédente qui s’appelait ODAS (voir notre article ), et nous avons souhaité reprendre une partie de son contenu en y apportant certaines modifications. C'est comme ça qu'est né Mobilis’action. L'idée principale est qu’il fallait proposer un parcours d'ateliers, plutôt que de faire tous les ateliers en même temps et au même moment, de les mobiliser progressivement.

 

Quel est son principe ?

Pendant le premier mois, on s'appuie sur des ateliers pour enclencher des changements. On fait appel à des supports comme les jeux de rôle, l'activité physique, la gestion des émotions et du stress. Et puis de l'art thérapie, qui consiste à créer une sorte de carnet de bord à base de collages, de textes, un support de développement personnel. Dans une deuxième phase, on est sur « j'expérimente », avec des ateliers autour de l'image de soi, le numérique et puis toujours l'art thérapie et le sport. Et la dernière phase, c’est plutôt « j'ose aller vers » avec de la création musicale, des visites d'entreprises et de plateaux de formation, des immersions, du bénévolat.

 

Les trois phases sont réparties sur 4 mois, à raison d'environ 2 jours et demi par semaine. Nous intervenons pour introduire de la réflexion sur le projet professionnel, sur les compétences, sur la valorisation de parcours, la connaissance de soi, les différents domaines d’activité, etc. Au démarrage, nous proposons aux participants de réfléchir ensemble sur des règles de vie du groupe : prévenir en cas d’absence, respecter la parole des autres, oser parler sans être jugé. Les règles sont coconstruites, elles ne sont pas imposées. Le but est de former un collectif qui prenne en compte l'individualité de chacun.

 

Quel est votre public ?

Notre public présente des vulnérabilités en matière de santé, d'isolement, de confiance en soi. C’est pour ça que l’objectif du projet est vraiment de restaurer l'estime de soi. Dans le premier groupe, constitué en début d'année, nous avons eu 8 personnes de 26 à plus de 50 ans, sur une quinzaine orientées par nos partenaires, qui ont assisté à notre réunion d’information collective.

 

8 personnes, c’est le bon format pour qu'il y ait de l’écoute, des échanges et la mise en confiance nécessaires. Puisqu’on travaille sur l'estime de soi, les émotions, ça nécessite qu'on puisse être assez disponibles et que l’effectif soit assez réduit pour permettre de se livrer plus facilement. Nous avons constitué un deuxième groupe en septembre.

 

En matière de public, vous constatez des spécificités sur votre territoire ? 

Depuis quelques années, nous avons un public qui a subi de l'épuisement professionnel et qui se retrouve complètement démuni dans sa recherche d'emploi, de formation ou de réorientation. L'isolement et le manque de mobilité ajoutent à sa détresse professionnelle. Nous sommes en secteur rural, et les principaux bassins d'emploi sont à plus d'une demi-heure de route. Après 20 ans d’activité de notre association, on découvre toujours des profils différents, des nouvelles personnes qui n'avaient jamais franchi la porte du centre social.

 

Quel est le travail que vous effectuez sur le projet professionnel ?

Nous avons des ateliers autour de la recherche de projets, l'emploi, dès le début du parcours. On aborde la question sous l’angle des centres d'intérêt, des valeurs de la personne, leurs compétences et leurs qualités. Dans le groupe, nous avons des questionnements du genre « qu'est-ce que je peux faire de ma vie ? », « je n’ai plus forcément confiance à l'entreprise, car j’y ai vécu des expériences et des moments très difficiles, allant jusqu’à un burn-out », ou « je n’ai pas d'expérience du tout. » Le sujet central est toujours « qu'est-ce que je peux faire de ma vie professionnelle ? ». C’est un problème que se posent même les diplômés que nous avons, qui interrogent le sens et l’utilité de leur formation.

 

Nous travaillons autour de la connaissance de soi, du territoire, de leur bassin de vie. Petit à petit, on aborde des notions d'emploi, de formation et de compétences. Le jeu de rôle, par exemple, consiste à se créer un personnage fictif avec lequel ils font des choses qu’ils n’arrivent pas forcément encore à réaliser dans la vie.

 

Quel est l’objectif à l’issue des 4 mois ?

L’objectif final, c’est déjà se sentir mieux, de lever leurs peurs et leurs freins face aux réalités de l’emploi et de la formation. C’est important d’être dans l'accueil et la bienveillance. Même si on parle tout de suite de projets professionnels, on ne leur met pas de pression pour ne pas engendrer de peurs supplémentaires. La pression, ils se la mettent suffisamment tout seuls. Pour eux, c’est déjà difficile de faire ce pas, de venir régulièrement, de respecter des horaires, de jouer le jeu et de faire confiance. Mais ils ont un objectif et face au groupe, ils sentent qu’ils se doivent d'être présents.

 

Pour nous, ce qui est positif c'est aussi de voir leur transformation ne serait-ce que physique, c’est-à-dire s’apprêter, prendre soin de soi et faire attention à son image, oser prendre la parole en groupe, sortir de son domicile, se socialiser.

 

Qu’avez-vous constaté que vous n’aviez pas anticipé ?

Beaucoup de personnes nous disent que grâce à cette action, elles ont repris confiance, elles ont pu oser faire des choses. C’est toujours étonnant qu’un projet comme celui-ci puisse avoir autant d'impact psychologique chez les gens. Et des résultats sur leur socialisation. Il y a vraiment une émulation dès le départ, une solidarité au quotidien, et c'est ce qui les a maintenus tout le long, parce qu’en dehors ils continuent à vivre leurs difficultés propres.

 

Les participants ne se seraient probablement pas rencontrés dans d'autres contextes. Ils ont vraiment créé quelque chose de l'ordre d'un soutien collectif. En passant par Mobilis’action, les publics sont prêts à se poser des questions sur leur avenir professionnel, tenter de nouvelles expériences en allant faire des enquêtes métier, des immersions dans des secteurs d'activité auxquels ils n’auraient pas pensé. Avant, ils ne le faisaient pas, peut-être par méconnaissance.

 

Pensez-vous qu’il faudrait apporter des améliorations à votre dispositif, et si oui lesquelles ?

Il faudrait peut-être, après l’action, organiser un atelier avec le groupe tous les mois, peut-être pendant 6 mois, pour continuer à animer leur temps collectif. C’est une source d'angoisse pour eux, surtout les plus fragiles, parce que tant qu’ils sont dans le dispositif, ils suivent un certain rythme, ils sont redynamisés, ils ont envie d'aller de l'avant, et la dynamique retombe brutalement. Ils seraient partants pour que nous organisions des temps réguliers après l’action, pour que sa fin soit moins brusque.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine : https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

 

 

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Le sport au service de l’apprentissage des savoir-être

Le sport au service de l’apprentissage des savoir-être | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Hugo Lanvers est directeur de Sport Emploi, association créée en 2005 à Floirac par Jean Trillo, ancien international du XV de France, qui voulait s’appuyer sur les valeurs du sport pour mobiliser les jeunes en difficulté d'insertion. Aujourd’hui, Sport Emploi travaille sur l'impact social du sport. Son cœur d'action reste l'insertion professionnelle, mais elle intervient aussi sur d'autres champs comme l'éducation, la cohésion sociale, la santé, le bien-être. Son projet Mobi’Sport est financé par l’appel à projets régional « Mobilisation vers la formation ».

 

D’où vient le programme Mobi’Sport ?

Mobi’Sport a été créé en s'appuyant sur la pédagogie que nous avions mise en place il y a 10 ans pour le dispositif « AVI passeport », en partenariat avec l'IUT de Bordeaux. AVI passeport fonctionne bien, sa pédagogie est pertinente, elle a vraiment un impact sur le public. Mais son accès est un peu restrictif, puisqu'il impose des prérequis scolaires, au moins un niveau terminale. Nous avons réfléchi à un programme qui puisse répondre aux besoins d'un public plus étendu. Nous avons créé Mobi’sport en 2021, comme un parcours de remobilisation du public, d’une durée d’un mois. Nous en sommes à la troisième année, à raison de 3 sessions par an pour des groupes jusqu'à 20 participants.

 

En quoi consiste-t-il ?

Mobi’Sport est un programme de remobilisation par le sport et de travail sur les savoir-être. L'idée c'est qu'ensuite, les personnes puissent trouver un projet, quel qu'il soit, pas seulement un projet professionnel. Et on ne cible pas de secteurs en particulier. Le sport est notre support principal, mais nous proposons différents types d'ateliers d'accompagnement socioprofessionnel. Par exemple sur la prise de parole, du théâtre, du conseil en image, la connaissance de soi ou les techniques de recherche d'emploi.

 

A quels publics est-il ouvert ?

On ne ferme la porte à personne. Il y a toujours une problématique de départ, ce sont des gens éloignés de l'emploi ou de la formation, à des degrés divers. Nous avons surtout des participants de 16 à 30 ans, quelques-uns plus âgés. Le côté intergénérationnel est intéressant pour la remobilisation, en particulier pour les plus jeunes. Il a un vrai impact sur leur façon de se comporter. Les profils sont assez variés, nous avons des personnes très isolées qui ont juste envie de retrouver des interactions sociales, d’autres qui ont déjà une idée précise de leur projet professionnel, mais qui ont encore quelques freins sur lesquels il faut travailler, des questions d’addiction parfois. Souvent, c’est un problème au niveau de la posture, et ça ne passe pas toujours avec les employeurs.

 

Comment trouvez-vous les participants ?

Certains nous sont envoyés sur prescription. Nous travaillons beaucoup avec la mission locale des Hauts de Garonne, Pôle emploi, des partenaires associatifs, les CCAS, la Maison Départementale des Solidarités. A côté de ça, nous faisons des réunions d'information collective. Et nous avons développé des actions de proximité, notamment le projet « sport impact » qui consiste à organiser des séances de sport gratuites en pied d’immeuble. Cela nous permet de nous ancrer sur le territoire et d'être identifiés par les habitants. Le bouche-à-oreille fonctionne bien, les gens savent ce qu'on propose, ils viennent aussi par ce biais-là.

 

Avant l’entrée dans le programme, nous faisons toujours des entretiens individuels, pour vérifier si Mobi’Sport est pertinent pour la personne, si c’est adapté à sa problématique. On évite d’accepter des gens qui viennent juste pour se défouler, mais qui n’ont pas de besoins par ailleurs. Pour nous, le projet professionnel est un véritable objectif, même si le parcours ne dure qu’un mois.

 

Quel est l’apport particulier de l’approche par le sport ?

Le sport c'est le respect des règles, une notion de cadre qui est très importante et dont les jeunes ont vraiment besoin.  Pendant un mois, ils viennent tous les jours à 9 heures, du lundi au vendredi, ce qui nous permet d'installer ce cadre. On insiste beaucoup sur la ponctualité. La différence par rapport à un dispositif classique, c’est l'utilisation du sport, qui se fait moins à la mission locale, et la densité du programme qui crée une vraie dynamique. L'équipe est différente aussi, puisque nous avons surtout des éducateurs sportifs, ainsi qu’une conseillère en insertion professionnelle.

 

Exigez-vous des prérequis en sport ?

On va avoir tout type de profil, il y en a qui ne font que très peu de sport et ça se passe très bien, puisque les ateliers sont aménagés pour intégrer tout le monde. Le seul prérequis, c’est d’avoir un certificat médical d’aptitude à la pratique sportive. Certains nous disent que le sport, ça n’est pas trop leur truc. Le programme les attire, mais ils se demandent s’ils vont être au niveau. On leur explique qu’on ne cherche pas la performance.  

 

Comment s’organise une journée type ?

D’abord le sport le matin. Chaque jour, nous travaillons sur une compétence, des savoir être attendus par les entreprises, indispensables pour un emploi ou une formation. Par exemple, on va faire une séance de foot-communication avec des ateliers construits pour que les groupes abordent les différentes formes de communication et progressent presque de façon inconsciente. Nous travaillons aussi sur l'autonomie, la persévérance, le respect des règles, la proactivité, etc. L'après-midi, les différentes activités sont en lien avec ce qui a été travaillé le matin.

 

Dans notre équipe pédagogique, les éducateurs sportifs font le lien avec la conseillère en insertion sur le parcours de chaque participant, en signalant ce qu’ils ont observé le matin. Par exemple un jeune un peu renfermé, qui a tendance à ne pas trop s’exprimer en entretien, mais qui pendant les séances de sport va révéler des qualités de leader, qui va aider les membres de son équipe. Nous travaillons avec ces éléments, on cherche à faire prendre conscience au jeune que c’est quelque chose qu’il peut valoriser.

 

Que faites-vous spécifiquement par rapport au projet professionnel ?

Nous abordons le sujet tout de suite parce que c'est une réalité, on n’a pas peur de leur faire peur. Quand la confiance est instaurée, les jeunes arrivent à en parler assez librement. Le sport a aussi ce côté cohésion de groupe qui permet de créer un lien de confiance. Je trouve qu'on arrive assez bien à parler avec eux de projet professionnel. Les participants sont très bienveillants entre eux, ils se livrent plus facilement, ils arrivent à dire des choses très personnelles.

 

Tout au long du mois nous leur proposons des découvertes métiers et des visites d'entreprises, dans plein de secteurs différents, parfois des secteurs vers lesquels ils ne se tourneraient pas. Mais c'est important de les ouvrir sur ce qu’ils ne connaissent pas. On fait en sorte que le jeune se pose des questions sur lui-même, sur ses caractéristiques, sur ce qui lui plaît. En face, on regarde ce qu'il y a sur le marché, quel secteur, quelles possibilités, il faut prendre le temps. Notre slogan cette année, c’est « du temps pour moi et mes projets ».

 

Que considérez-vous comme une sortie positive ?

Une sortie positive se traduit principalement par l’intégration en emploi, en formation ou dans un parcours d’accompagnement. Pour autant, nous attachons aussi beaucoup d’importance à l’évolution des comportements lors de la remobilisation. Certains jeunes peuvent être particulièrement renfermés au début, difficiles d’accès. Si nous les voyons évoluer dans leur posture professionnelle, leur rapport aux autres, leur capacité à se conformer au cadre mis en place, c’est gagné. Ça a d'autant plus de valeur que nous en accueillons certains qui, non seulement sont très éloignés de l'emploi, mais aussi du système de manière générale.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine : https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

 

 

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De la valorisation en insertion

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L’entreprise d’insertion Asmaco, pour ASsociation MAtériaux COnfluent, est née en 2022 d’une rencontre fortuite, un déjeuner au cours duquel est évoqué un problème rencontré par un grand distributeur, Cdiscount. Il concernait leurs produits refusés à la livraison, retournés après avoir été déballés, ou dont l’emballage était endommagé. Seule solution à l’époque, revendre la marchandise à vils prix à des soldeurs. Mais l’entreprise avait la conviction qu’il était possible de pousser bien plus loin le niveau de valorisation, et que ces produits avaient plus de valeur que ce qui en était tiré.

 

Pour Thomas Pinet, directeur général du Groupement d’Insertion du Confluent (GIC), c’était l’occasion de proposer une nouvelle approche à l’entreprise. « Nous les avons rencontrés pendant une journée pour évoquer le projet. A l’issue, nous avons décidé de tenter l’expérience. Deux mois plus tard, nous avions le local, le premier salarié, la demande d'agrément était faite pour avoir le conventionnement en tant qu’entreprise d'insertion. Et puis c'était parti. C'est un peu notre raison d'être dans l'Insertion par l’Activité Economique, de créer des modèles alternatifs, et de répondre à des sujets que l'économie classique ne sait pas traiter. »

 

« L’entreprise ne connaissait pas l’IAE, notre discours a été simple : retenez ce qu'on fait, que vous trouvez bien, pas besoin que vous deveniez des pros de l'IAE pour qu'on puisse travailler ensemble. En plus de ça, la seule chose qui nous intéresse, c'est de créer de l'emploi non délocalisable, en insertion. Vous avez un problème, nous avons la capacité de vous proposer un modèle un peu innovant et structurant, faites-nous confiance et on aura quelque chose de plus vertueux demain. »

 

Le GIC a choisi de créer une nouvelle association à part entière, intégrée au groupement. Activité principale d’Asmaco, recevoir des meubles neufs, jamais montés, si besoins retapés au sein d’un véritable atelier de menuiserie entièrement équipé. Tous les types de meubles peuvent être pris en main, du gros dressing d'angle à la chaise, en passant par le lit, le canapé, la commode ou la table. En moyenne, 90% des produits sont ainsi valorisés, bien au-dessus des 60% initialement évalués pour équilibrer le budget prévisionnel demandé par la DDEETS.

 

Contrôle qualité

 

Choix a été fait, dans un premier temps, de monter tous les meubles reçus, afin d’apprendre à repérer ce qui fonctionne ou pas, d’être capable de contrôler l’état d’un carton. « Aujourd’hui, nous avons deux schémas de fonctionnement. D’abord, nous vérifions si le produit est complet. S’il n'a aucun défaut, on ne le monte pas. Mais à partir du moment où il manque de la visserie, qu’il a un coin cassé, là on va l’assembler, reprendre ce qui est nécessaire. Aujourd’hui, nous sommes plutôt à 70% des meubles montés. » Pour ce faire, Asmaco a intégré des compétences nouvelles, en la personne d’une encadrante technique menuiserie, en capacité de retaper les meubles.

 

Pour organiser le flux sortant, la solution le Bon coin s’est avérée la plus efficace. Les meubles sont pris en photo, les annonces mises en ligne par une personne en insertion chargée de les actualiser régulièrement. Grâce à ce process, tous les produits partent en moins de 30 jours. Les ventes se font en direct à l’atelier, sur le site d'Aiguillon (Lot-et-Garonne). Pas d'expédition, afin d’éviter d’avoir à gérer des problèmes de logistique. Le prix des meubles est inférieur de 30% à ceux affichés sur le site de Cdiscount. Les bénéficiaires du RSA, les primo arrivants, les personnes en situation de violences conjugales, les salariés des structures d'insertion du département, ont droit à 20% de remise additionnels.

 

Asmaco maîtrise désormais les flux entrants et les flux sortants. Sa priorité actuelle est de trouver un volume conséquent de marchandises à valoriser, afin de poursuivre son développement. « Notre partenaire était prêt à nous accompagner étape par étape, sur une expérimentation de 12 à 18 mois. Il nous a vraiment accordé du temps. Pendant plus d'un an, ils nous ont livré gratuitement les produits pour que l’on construise le modèle, qu’on le teste, que l’on consolide aussi nos apports financiers avant d'aller un peu plus loin. Nous avons pu choisir le rythme et la nature des livraisons. Aujourd’hui, nous avons la capacité d’absorber 40 produits par semaine. Si nous voulons aller au-delà, il faudra sans doute embaucher et nous agrandir. Mais nous avons encore un peu de marge là-dessus. »

 

La structure compte 3 personnes, qui ont toutes suivi les formations Caces et sauveteur secouriste du travail. Une réflexion est en cours sur l’intérêt de leur faire suivre également la formation d’agent valoriste proposée par le Cluster Economie circulaire et valorisation des matériaux recyclables à Damazan. « C’est le tronc commun sur lequel on peut ajouter des formations individuelles, en fonction des projets professionnels de chacun, plutôt autour des métiers de la logistique. Mais si certains sont bons sur la partie menuiserie, pourquoi pas basculer sur des formations de menuisier si cela peut répondre à des besoins. »

 

Respecter l'esprit IAE

 

Thomas Pinet estime que pour que le modèle réussisse, il faut qu’il atteigne un volume d’activité suffisant. Mais pas trop pour que la structure ne soit pas confrontée à un dilemme, qu’elle n’ait pas à faire un choix entre les produits à valoriser et ceux qui seront jetés à la benne. « Nous devons respecter nos indicateurs : les 90% de valorisation, pas d'ouverture le samedi, pas d'horaire de magasin, pas d’expédition. Ce sont eux eux qui garantissent qu'on n'est pas sur le secteur marchand et concurrentiel. C’est notre raison d'être, ce qui fait que nous ne sommes pas une structure comme les autres, qui pratique vraiment l'insertion sociale, sans chercher la rentabilité. »

 

A terme le modèle économique reposera sur l’achat de produits plutôt que sur la récupération. C’est déjà en partie le cas aujourd’hui. « Pour moi la garantie que le modèle perdure, c’est d'aller chercher le flux entrant, parce qu’on a constaté que tout se vendait. Pour la suite, nous allons essayer de développer notre modèle avec d'autres acteurs pour essayer de récupérer et revaloriser tout ce qui peut l’être. Nous avons eu des premiers échanges avec Conforama, pour diversifier nos partenaires, ne pas dépendre que d’un seul. Il y a aussi beaucoup d’appels à projets sur le réemploi, comme la mobilité il y a 10 ans. Mais je pense qu'il ne faut pas dépasser les 20% de financement public. »

 

Asmaco envisage que son exemple soit dupliqué un peu partout en France. Mais elle n’a pas vocation à s’occuper elle-même de cet essaimage. Elle peut en revanche identifier des acteurs qui auront la capacité de le faire. Elle ouvre d’ailleurs ses portes à d’autres structures qui viennent passer une ou deux journées sur place pour en savoir plus sur le fonctionnement et repartir avec des pistes de travail.

 

« Ce n'est pas notre rôle d’installer des Asmaco partout dans l’Hexagone. Je ne connais pas les autres territoires, je n’ai pas d’ancrage sur place, je ne sais pas qui fait quoi. Arriver de nulle part alors qu’il y a peut-être déjà des gens qui ont déjà la même activité, ça n’a ni queue ni tête. Les structures qui sont venues nous voir de Marseille ou de Rouen, des structures d'insertion également, ont été contactées par Cdiscount, toutes avec le projet de s’inspirer de notre expérience et de l’adapter à leurs réalités locales. »

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L’E2C Limousin ouvre ses portes

L’E2C Limousin ouvre ses portes | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Depuis une quinzaine d'années, en plus de ses activités de formation classiques, le CFPPA Les Vaseix-Bellac développe une filière insertion et cordonne des actions sur l'accompagnement au projet professionnel et à la remise à niveau. Dans le cadre d'une analyse des dispositifs existants, le centre avait constaté qu'il n'existait pas d’Ecole de la 2e Chance (E2C) en Limousin. Alors que, pour Annie Demay, responsable développement, le concept correspondait exactement aux valeurs du centre. « Nous avons l’expérience de dispositifs comme Socle de Compétences, Amorce de parcours, PAIR (Intégration Professionnelle des Réfugiés)… et on a créé une formation appelée Equilibre, qui aide les personnes à reprendre confiance en elles, en utilisant des pédagogies innovantes comme l'équimédiation, une conseillère en image, une sophrologue, une psychologue, etc. »

 

L’E2C est donc apparue comme une suite logique du travail engagé en réponse aux besoins du territoire, de disposer d’un service de proximité pour accompagner les demandeurs d'emploi vers la formation qualifiante ou l’emploi. La réflexion initiale s’est poursuivie avec le réseau national des E2C, des visites de plusieurs autres écoles en (Châtellerault, Nevers) pour échanger et s’inspirer de leurs expériences.

 

Ce travail préparatoire s’est concrétisé à l’occasion d’un appel à manifestation d'intérêt lancé au printemps 2023*, donnant lieu à la création de la nouvelle école. Il s’agit d’une entité juridique à part, qui bénéficiera de l'ensemble des supports et des centres techniques du CFPPA. Deux sites sont prévus, un en Haute-Vienne au Vaseix, l’autre en Creuse à La Souterraine où l’école sera située dans les locaux de la maison de l'emploi de la formation, qui accueille déjà tous les acteurs locaux.

 

 « Nous avons une roseraie, un atelier maraîchage, une forêt domaniale dans laquelle les jeunes vont pouvoir faire du sport, un centre équestre pour faire de l'équimédiation, un pôle économie sociale et familial pour travailler, par exemple, sur des notions mathématiques par le biais de recettes de cuisine. Avec notre théâtre de verdure nous pourrons non seulement faire du théâtre, mais aussi des cours de français en extérieur. On est vraiment dans un cadre verdoyant aux portes de Limoges, une bulle à part dans laquelle on va permettre aux jeunes de se reconstruire. Nous avons beaucoup réfléchi aux façons de leur proposer quelque chose de différent du système scolaire dans lequel ils ont vécu. »

 

Des conditions idéales pour tous

 

« Nous avons l'expérience de l’insertion, de l’apprentissage, de la formation pour adultes. Nous connaissons bien les publics, notamment les différentes formes de handicaps, les troubles dys (dyslexie, dyspraxie, les difficultés de concentration, etc. » Le centre a aménagé chaque lieu pour qu'il ne ressemble pas à une salle de cours, en allant jusqu’à faire réaliser, par un chantier d'insertion, des meubles à l’allure « domestique », afin de mettre à l’aise les apprenants. Ils sont complétés par un matériel propre à faciliter la concentration.

 

Pour lancer l’activité, les premières entrées se sont faites en groupe début mars. Les intégrations suivantes s’effectueront petit à petit en entrées sorties permanentes, pour un objectif d’une centaine de jeunes en 2024. Le parcours moyen dure 7 à 8 mois, 4 mois pour les plus courts. Mais certains jeunes pourront être accompagnés jusqu’à 18 mois. La première étape est un mois d’intégration, suivi par le parcours de formation proprement dit. Lors de cette intégration, les jeunes découvrent une diversité d'ateliers, et sont positionnés en fonction de leurs envies et de leur projet professionnel, aidés en cela par une conseillère en insertion sociale et professionnelle, à temps complet sur le dispositif. Ils pourront ainsi bénéficier d’un parcours à la carte.

 

Le programme prévoit 30 heures par semaine, à l’exception du mardi après-midi consacré aux démarches administratives, et du vendredi matin afin que les prescripteurs viennent rencontrer les jeunes et faire un suivi avec eux. Pour mettre à jour leur dossiers, ils sont en autonomie, mais le centre leur donne des consignes de travail sur leur recherche de stage, les bilans de santé, les démarches CAF et France travail, etc. « Avec notre équipe pédagogique nous avons construit et planifié un ensemble d'ateliers, par exemple de remise à niveau en français, en mathématiques, de travail en collectif, des objectifs personnels. »

 

Les stages en entreprise représentent 40% de l’ensemble. La pédagogie repose beaucoup sur les expériences et les compétences acquises lors de ces périodes. La Ligue de l'enseignement s’occupera du sport et de la partie laïcité, et des intervenants extérieurs viendront animer des ateliers dans différents domaines : des chefs d'entreprise pour la création d'entreprise, une conseillère en image, un kinésiologue, des bilans de santé avec le CRESLI (Centre Régional d'Examens de Santé du Limousin), un atelier graphe pour aborder la dimension culturelle mais aussi scientifique (recherches, application de la peinture, etc.). Rien n’est figé, en fonction des besoins, de nouveaux ateliers peuvent être créés et leur contenu modifié à tout moment.

 

Reprendre confiance en soi

 

L’E2C du Vaseix s’adresse aux publics des quartiers prioritaires, des jeunes de 16 à 25 ans (jusqu'à 30 ans pour les bénéficiaires du RSA ou RQTH), qui ont totalement perdu confiance en eux, soit en raison de problèmes scolaires, de problèmes relationnels ou familiaux. La majorité d’entre eux ne devraient pas connaître de problèmes de mobilité, puisque le centre est à proximité du réseau de transport en commun de Limoges. Le site de La Souterraine, en centre-ville est lui aussi facilement accessible. « On aimerait pouvoir rendre le service disponible à tous les jeunes qui habitent en territoire rural, mais pour l'instant ça ne sera pas le cas. »

 

« Nous organisons des informations collectives, ou on se déplace dans les quartiers pour présenter le dispositif. C’est à ce moment que l’on vérifie si les jeunes adhèrent ou pas. En général, leur conseiller leur en a déjà parlé, mais ils peuvent avoir besoin d’informations complémentaires. Ensuite, on fait un entretien individuel avec un responsable de formation et une secrétaire administrative pour passer en revue leur situation, lister les premiers freins à l'intégration en formation.  C'est un public très volatil, si on ne les intègre pas dans les 72 heures, ils sont perdus. »

 

Pour l’instant, les garçons sont majoritaires. Mais le centre ambitionne d’atteindre la parité. « On sait que les filles ont les mêmes besoins, mais ont tendance à les cacher. Elles intègrent moins les dispositifs, elles essaient de se débrouiller seules. Il va falloir faire attention à communiquer spécifiquement pour le public féminin. Il faut aller vers elles, plus que vers les garçons, dans les associations sportives et culturelles qu’elles fréquentent, utiliser les réseaux sociaux, et sensibiliser les prescripteurs. »

 

« Ce que nous voulons pour l'école c'est travailler main dans la main avec nos partenaires, que le jeune ne soit pas baladé d'un dispositif ou d'une structure à l'autre. Nous proposons le fil rouge et le prescripteur peut l'accompagner tout au long de de la formation. Notre objectif, c'est d'être un maximum sur l'individualisation. Nous ferons des projets collectifs mais il n’y aura pas d'entrée date à date. »

 

L’E2C des Vaseix n’est pas encore labellisée. Pour obtenir cette reconnaissance, elle doit d’abord faire ses preuves, notamment en accueillant une cinquantaine d’apprenants. Un audit de labellisation interviendra en avril, à l’issue duquel elle disposera d’un logo personnalisé et pourra afficher officiellement son appartenance au réseau national.

 

 

* Etat, Région Nouvelle-Aquitaine, FSE, Département de la Creuse, Communauté Urbaine de Limoges Métropole, Communauté de Communes du Pays Sostranien, Communauté d’agglomération du Grand Guéret.

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Mécanique au féminin, l'outil AFEST

Mécanique au féminin, l'outil AFEST | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

EVOLPRO est un laboratoire d’innovation sociale pas comme les autres, ne serait-ce que parce qu’il ne se positionne pas dans le champ concurrentiel. Son crédo est le développement du pouvoir d'agir, l'éducation populaire, l’accès de tous aux dispositifs de droit commun. « Notre cœur d'activité, c'est d'accompagner les professionnels, tous les acteurs dont l'activité a un impact sur d'autres, » précise Olivier Chabot, secrétaire général d’EVOLPRO. « Parmi eux, il y a les structures d'insertion, les organismes de formation, les métiers du conseil et de l'accompagnement, les métiers du sport, le métier du soin, les syndicalistes, les ressources humaines. »

 

C’est dans ce cadre que l’organisme a été contacté en 2023 par une structure d’insertion, Apreva 47, qui envisageait de mettre en place une Action de Formation en Situation de Travail (AFEST) au sein d’un de ses garages solidaires. Avec dans l’idée de développer la mixité, d’accueillir des femmes dans un milieu très masculin, celui de la mécanique. La réponse d’EVOLPRO, architecte de cette action, s’est faite à plusieurs niveaux. D’abord sur le principe de démontrer que tout est possible avec un accompagnement de qualité.

 

Et puisque le garage solidaire est situé en QPV, l’action s’adresse à des femmes issues de ces quartiers. Ce sera l’occasion de sensibiliser le garage à la question de la neutralité de genre. De plus, comme le métier évolue avec les enjeux de transition énergétique, ce sujet sera également pris en compte. « Notre plus-value, elle est là-dessus. Cette vision holistique des choses, très large. On ne s’enferme pas dans une catégorie, dans une case comme c’est trop souvent le cas. »

 

Parier sur un potentiel

 

EVOLPRO travaille étroitement avec le GPV rive droite dans le cadre de la cité de l'emploi, à Bassens, Cenon, Floirac et Lormont où est situé le garage. Aller chercher des femmes issues des QPV pour les accompagner dans une structure d'insertion, c’est une façon de démontrer le potentiel des habitants et des habitantes de ces territoires. « On ne peut pas réduire les gens à des catégories et à des cases liées aux politiques de la ville. On ne nie pas les difficultés, au contraire. On a affaire à des personnes qui ont des parcours singuliers, qu’il faut prendre en compte à partir de leur potentialité. »

 

La formation baptisée « Femmes et mécanique » se déroulera entre début mars et début juillet. Elle mobilisera un groupe d’une dizaine de femmes qui rencontrent des obstacles en matière de mobilité et de garde d’enfants. Leur profil, être demandeuse d'emploi de longue durée issues des QPV de la métropole de Bordeaux, savoir s’exprimer et comprendre oralement le français, idéalement être titulaire du permis B, ne pas avoir de contre-indication médicale liées aux métiers de la mécanique, être disponible, volontaire et capable de s’engager dans une action collective. Le système sera adapté à leurs besoins et contraintes.

 

« Nous ne sommes pas des consultants, ce qui nous intéresse c'est vraiment de faire bouger les choses. Il faut expérimenter de nouvelles pratiques, de nouvelles façons de penser le monde. On s'est beaucoup intéressé aux tiers lieux, qui défendent une façon de travailler autrement. Nous, on défend une façon d'accompagner autrement, pour démontrer que d'autres modèles sont possibles. C’est pour ça que nous menons tous nos projets en partenariat, on essaie d'aller chercher des structures qui partagent nos valeurs, ce qui ne se résume pas à gagner de l'argent. »

 

La mise en place d’une AFEST réclame une ingénierie pédagogique très structurée. Son principal intérêt étant de faciliter des parcours, notamment pour des personnes éloignées de l'emploi à qui la formation peut faire peur. EVOLPRO aurait pu s'en tenir à simplement appliquer le référentiel de mécanicien polyvalent, mais il a décidé d’y intégrer la certification Cléa. « Il existe un enjeu autour de la lutte contre l'illettrisme, et dans la reprise de confiance en soi. Avec Cléa c’est l’assurance de sortir de l’action avec au moins un diplôme, d’identifier certaines difficultés comme la maitrise du français, le travail en équipe, la posture d'apprendre à apprendre, etc. C'est redonner de l'espoir et se projeter dans l’avenir. » 

 

« De manière globale, nous n’avons pas une vision adéquationniste de la formation. Les compétences ne sont pas juste un verre vide à remplir. Nous privilégions plutôt l’image du silex sur un fétu de paille. Je fais partir un feu, et après je souffle dessus. On commence par faire des étincelles, l'accompagnement consiste ensuite à entretenir ces feux. »

 

L’accompagnement concerne également les hommes qui travaillent déjà dans le garage, qui n’ont pas forcément l'habitude de côtoyer des femmes dans leur quotidien professionnel. Travailler sur la mixité dans un métier traditionnellement masculin est un chantier en soi, qui nécessite un acte volontariste. EVOLPRO a fait appel au CIDFF Gironde pour animer des ateliers de sensibilisation. De plus, lorsqu’il s’agit de convaincre un public de partir en formation, on multiplie les difficultés. « Le fait de découvrir un métier en l’apprenant dans une situation de travail, d’évoluer au quotidien dans un environnement de travail, optimise les chances de réussite. En même temps, ça permet de dédramatiser, de démystifier tout l'aspect formation. L’AFEST peut être sécurisante et facilitante justement parce qu’elle ne se déroule pas dans un organisme de formation. »

 

Un programme adapté 

 

Le programme « Femmes et mécanique » dure 14 semaines, à l’exception du mercredi. Il comprend une phase de découverte des métiers et l’apprentissage des compétences techniques nécessaires pour réaliser toutes les actions de préparation d’un véhicule, diagnostiquer une panne, être capable de communiquer en situation professionnelle auprès des fournisseurs, etc. S'agissant de Cléa, les sessions, animées par l’organisme Retravailler Sud-Ouest, seront délocalisées dans un organisme de formation, afin d’habituer progressivement les participantes à entrer dans un cadre de formation plus classique.

 

« Pour nous l’insertion, c’est vraiment accéder au droit commun, mais pas de force. Il y a deux façons de faire rentrer un cube dans un trou rond, soit on gomme les coins du cube et on en fait une boule, soit on agrandit le trou. Ce que nous voulons c’est arriver petit à petit à ce que la formation s'adapte aux besoins des gens. Nous travaillons beaucoup sur la notion d'appétence, qu’il nous semble importante à valoriser. Mais on ne veut pas se limiter à la projection vers un métier, on veut ouvrir les possibles. Quelqu’un qui vient faire cette formation peut reprendre confiance, retrouver de l’espoir en l’avenir personnel et professionnel, valoriser des compétences sur son CV, etc. »

 

A l’issue de la formation, les participantes pourront envisager de continuer sur un parcours d'insertion, de formation, ou un emploi dans les métiers où les connaissances et compétences en mécanique peuvent être un plus, comme le transport ou la livraison. Plus largement, l’objectif est de leur donner les moyens de reprendre leur vie en main.

 

« Au-delà du modèle économique, nous voulons absolument démarrer l’action. Même s'il n’y avait que 2 ou 3 candidates, si ça répond à des appétences, que ça permet de redonner de l'espoir, il faut y aller. Notre ambition est de changer le monde. Mais on sait qu'on ne va pas le changer comme ça, que ça peut faire peur. Il faut s'autoriser à être utopique, sans être arrogant. On est plus nombreux qu’on le croit à partager cette approche mais, souvent, le système impose aux opérateurs de faire les choses chacun de leur côté. »

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L’AFEST comme solution de recrutement pour le secteur médico-social

L’AFEST comme solution de recrutement pour le secteur médico-social | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Le Groupement d'Employeurs Médico-social de la Creuse (GEMS 23) existe depuis 2016. Il compte aujourd’hui une cinquantaine de salariés et plus de 25 structures adhérentes représentant une soixantaine d'établissements de tailles diverses. Son cœur de métier est la mise à disposition d’accompagnants éducatifs et sociaux, d’aides-soignants, de surveillants de nuit, d’agents de nettoyage, dans le cadre de remplacements prévisibles ou d’urgence. En 2023, cela représente 66 000 heures de mise à disposition, environ 50 équivalents temps plein par mois.

 

Dans le cadre de ses différentes actions, dont la formation, le groupement fait face à des problématiques de repérage et de recrutement que connait l’ensemble du secteur médico-social. Ces difficultés ont été le point de départ d’une réflexion sur la recherche de dispositifs permettant de répondre à ces besoins. L’AFEST ((Action de Formation En Situation de Travail) faisait partie des hypothèses. D’autant qu’elle pouvait potentiellement apporter une réponse à la question du déficit de personnes diplômées ou certifiées pour alimenter les écoles. De ce fait, le GEMS a présenté un dossier à l’appel à projets régional sur l’AFEST, qui a été retenu fin 2022.

 

« L’AFEST nous plaisait de par sa proportion 70% en entreprise, 30% en actions de formation, » explique Fabien Devillechabrolle, chargé de développement. « Cet équilibre est intéressant pour les profils que nous visons, essentiellement des demandeurs d'emploi, que nous voulons amener vers un bloc de compétences assez large. » En l’occurrence, le bloc de compétences est celui de maîtresse de maison, qui permet d’inclure différents profils pour aller vers une certification, ou vers des métiers comme agent de nettoyage ou surveillant de nuit.

 

Capter les futurs salariés

 

Parmi d’autres dispositifs, l’AFEST a été retenue en raison du fait qu’elle permet de « capter » des personnes plus ou moins éloignées de l'emploi, de les rendre employables. Et le cas échéant de les emmener vers des formations certifiées et diplômantes, comme celles d’AES ou d’aide-soignant. Pour Nathalie Lefebvre, coordonnatrice du GEMS, « il fallait trouver un système qui nous permette de trouver des capitaux pour les former. Les autres dispositifs n’offrent pas cette possibilité d'aller immédiatement dans l'entreprise pour prendre la mesure des différentes tâches à réaliser. Ainsi qu’un apport théorique adapté aux publics dont beaucoup ne sont pas du métier, pas formés, et que nous pourrons amener au métier petit à petit, avec un accompagnement en doublon pour réapprendre le rythme du travail. Puis pour les mettre à disposition dans les établissements. »

 

Tous les CV réunis doivent être validés par la Région afin de vérifier leur compatibilité avec les critères d'éligibilité de l'action (niveau de formation infra bac, zone de revitalisation rurale ou QPV, éventuellement demandeurs d'emploi). Aucun prérequis sur l'origine sociale et socioprofessionnelle, contrairement aux établissements qui ont des exigences d'efficacité immédiate. « Sur le principe, nous recevons tout le monde, même des gens qui peuvent être extrêmement loin de nos apprenants habituels, ce qui permet d'ouvrir l’action à des profils inattendus. »

 

Les candidats se présentent parfois sur prescription, mais le groupement a effectué son propre repérage en participant à des événementiels, des salons organisés par ses partenaires. « Pour la détection des candidats nous fonctionnons assez différemment des collègues organismes de formation qui recrutent uniquement pour l’AFEST. Après avis de la Région, nous validons avec les candidats s'ils veulent suivre la formation. » Parmi les personnes rencontrées, beaucoup ne savent rien du secteur, sont en reconversion ou cherchent à travailler, quel que soit l’emploi.

 

De plus, le métier de maîtresse de maison est très peu connu. « Nous leur expliquons que ce métier se situe à la frontière entre l'entretien et l'éducatif, qu’il fait partie de l'équipe éducative de façon pleine et entière. Souvent ils sont intéressés. Autant surveillant de nuit ou accompagnant éducatif et social, ils ont une petite idée, autant maitresse de maison est pour eux une vraie découverte. »

 

Le déroulé pédagogique a été élaboré avec le CFA de la CCI de la Creuse. Il comporte plusieurs grandes phases en commençant par la prise en compte du contexte d'intervention, la présentation des établissements, des agents de service à domicile, de différents métiers, les types de handicaps, leurs causes et leurs effets possibles, le développement psychomoteur, etc. Suivent notamment la qualité et la sécurité du cadre de vie, ou encore l’élaboration de son identité professionnelle. Les enseignements théoriques alternent avec les périodes en entreprise, au sein des structures adhérentes du groupement.

 

Pousser à la découverte des métiers

 

Les structures d’accueil ont toutes signé une lettre d’engagement avant le dépôt du projet. Elles doivent disposer d’un référent AFEST et d’une personne compétente pour accompagner au plus près les stagiaires. La volonté du groupement est que chacun d’entre eux essaie au moins deux environnements professionnels. « Nous restons vigilants quant à la capacité de la personne à s’adapter à la structure, en tenant compte de leurs goûts, leurs appétences, leurs compétences. L’idée est d’éviter de perdre des gens s’ils n’arrivent pas à s’y adapter, parce que parfois ça ne fonctionne pas. Certains iront plus facilement vers le soin, d’autres vers l’éducatif. Cela dit, nous tenons vraiment à leur faire essayer des structures sur lesquelles ils n’ont pas envie d'aller au départ, pour les aider à sortir des représentations parfois faussées. »

 

A l’issue de la formation, en cas de réussite, les stagiaires obtiennent la certification de maître/maîtresse de maison et peuvent idéalement évoluer dans toutes les structures. Si les besoins sont plutôt sur des postes d'aide-soignante ou d’AES, ils peuvent être intégrés en tant que « faisant fonction », l'idée étant vraiment de les amener à ce qu’ils poursuivent leur formation et qu’ils travaillent en Creuse.

 

Avec la première promotion AFEST qui a commencé en janvier pour un groupe de 8 apprenants, 2024 est une année d’expérimentation. A terme, l'objectif est de mettre en place un pôle territorial de coopérations économique au niveau départemental, une organisation qui permettra de coordonner et répondre à des appels à projets de grande ampleur. Ses adhérents, le GEMS, le GIEQ en cours de création, les tiers lieux, la communauté 360 en Creuse, les instances institutionnelles, disposeraient d’un outil pour faciliter les échanges, mutualiser les services, et déployer plus facilement des actions de la filière médico-sociale à l’échelle du département.

 

« Concrètement, nous pourrons par exemple répondre à une AFEST de façon beaucoup plus importante, afin de la déployer dans plusieurs types de structures. C'est l'une des voies qui permettront peut-être de coordonner et de faciliter tout ce qui fonctionne déjà dans le territoire. On s'aperçoit qu'il y a pléthore de dispositifs, que chacun travaille à sa façon, à son rythme, réalise parfois des actions exceptionnelles, mais dans son propre établissement ou dans sa propre association, sans forcément partager, échanger et déployer chez les autres ce qui fonctionne. »

 

 

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Formation petite reine

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L’Institut National du Cycle et du Motocycle (INCM) est un organisme de formation de branche, spécialisé dans les métiers du deux-roues, moto, vélo et mobilité électrique. Depuis une trentaine d'années, sa mission principale est d'accompagner les entreprises en répondant à leurs besoins en recrutement, par le biais de formations en alternance, de la formation de demandeurs d'emploi ou de personnes en reconversion. Son siège et site principal est situé au Bourget. L’INCM mène également des actions de promotion des métiers et des filières de formation.

 

« Après la crise COVID, on s'est rapidement rendu compte qu'il y avait des besoins exprimés sur le territoire national pour permettre le développement de la mobilité décarbonée. Tant sur la partie vente que la partie réparation entretien maintenance et location de vélo » explique Sabrina Kockenpoo, directrice. « Nous orientons notre stratégie en fonction de ce que les professionnels en activité ressentent sur le terrain et nous font remonter. »

 

Depuis 2019, l’organisme ouvre progressivement des antennes dans différentes régions, à commencer par l’Occitanie avec une implantation à Beauzelle, transférée depuis à Toulouse.  « On s'est rapidement rendu compte que la formation vélo doit être au cœur de la ville pour être pertinente, aussi bien pour les stagiaires que pour les entreprises. » Ont suivi les antennes de Lyon, Nantes et, fin 2022, La Rochelle. En Nouvelle-Aquitaine, une offre de formation existait à Bordeaux, mais trop éloignée pour répondre aux besoins du bassin de La Rochelle, la ville motrice en matière de développement du vélo depuis des années, notamment sur les flottes de deux-roues en libre-service.

 

Partir des besoins des entreprises

 

Chaque implantation est précédée d’un travail d’étude mené localement pour connaître le besoin des entreprises et s'assurer qu’il est bien réel. La Rochelle et les villes limitrophes comptent une soixantaine d'entreprises de location, d'entretien, de maintenance et de réparation vélo, qui ne disposaient pas de l'offre de formation nécessaire. « Nous avons travaillé avec le CFA de la Chambre de Métiers et de l’Artisanat de Lagord qui a un grand projet de développement de pôle automobile. Nous avons ouvert en novembre 2022 une antenne à échelle humaine, un local de 175 m2 situé à proximité du port de plaisance, de l’université et de la vie étudiante. »

 

Objectif de la nouvelle structure, proposer des formations en entretien et maintenance réparation cycle. Sa caractéristique est d’être modulable pour permettre de dispenser des formations longues ou de plus courte durée, pour un public demandeur d'emploi ou en reconversion professionnelle qui a besoin de se former rapidement pour s'insérer. Sont également proposés des modules de 2 ou 3 jours destinés aux professionnels qui souhaitent se spécialiser dans telle ou telle compétence.

 

« On est plutôt sur de la dentelle, notre objectif n'est pas d'inonder le marché parce que ça n'aurait pas de sens mais d’accompagner les entreprises dans le maintien et développement des compétences. L'aspect commercial est important, mais ce n’est pas la première demande sur le bassin, il s’agit essentiellement de réparation, en tous cas pour le moment. » Un formateur est présent en permanence, c’est le référent de l’INCM La Rochelle. Il est soutenu par les équipes administratives, éducatives et pédagogiques de l’IDF. Et un collègue, qui n’est pas toujours le même, est envoyé depuis Le Bourget quand il y a 2 groupes à accompagner.

 

« Il y a quelques années la formation vélo était liée à la moto. Les personnes se formaient en CAP ou en Bac avec une dominante moto, et quelques heures dédiées au vélo. Auparavant les besoins étaient assez confidentiels, néanmoins les entreprises de la branche des services d'automobiles et de la mobilité avaient tout de même un besoin. C’est pour ça que plusieurs certifications de branche ont été créées par l’ANFA qui répondent aux exigences des entreprises et qui intègrent les évolutions technologiques (VAE, connectivité, …), le service client et l’organisation atelier »

 

Les publics visés sont assez hétérogènes. Des jeunes sortant de classe de 3e, ainsi que des plus âgés qui ont déjà cherché une orientation et qui reviennent à un métier technique, des demandeurs d'emploi ou des adultes en reconversion professionnelle. Tous passent la même certification mécanicien cycle, mais avec des modalités différentes, soit en 12 mois pour un contrat en alternance, soit pendant 3 mois et demi de manière continue avec un stage en entreprise de 2 à 3 semaines. A l’issue de la formation, nombreux sont ceux qui ont des projets de création ou de reprise d'entreprise. Le centre de La Rochelle peut prendre en charge deux groupes de 12 apprenants de manière simultanée, avec chaque année une session en alternance, et deux sessions demandeurs d'emploi et reconversion professionnelle.

 

« L’objectif de la formation est d’accompagner les apprenants à intervenir sur une diversité de vélos qu’ils soient, musculaires, à assistance électrique, des VTC ou VTT, du vélo de ville, etc. Ils sont essentiellement préparés lors de leur formation au montage, préparation et l'assemblage d'un vélo et l’organisation et après-vente en atelier. »

 

Nouvelles technologies, nouvelles compétences

 

« Il est indispensable de disposer de la compétence technique pour intervenir, réparer et entretenir un vélo. Ils sont confrontés à différents matériaux, différentes technologies comme le changement de vitesse par Bluetooth par exemple, toutes ces nouvelles options qui sont plutôt attractives pour le cycliste nécessitent des connaissances très fines et une approche client adaptée et différente. Il est indispensable que le futur mécanicien cycles permette au client de circuler également en toute sécurité. »

 

Aujourd’hui les besoins sont réels, parce que les activités liées à la maintenance sur un vélo sont plus en plus complexes. En conséquence, il faut disposer des compétences adaptées aux matériels disponibles sur le marché. Mais le secteur connaît un tassement au niveau de la production et des ventes, après un engouement certain observé à la sortie de la crise sanitaire.  

 

Sur le secteur de La Rochelle, le caractère saisonnier de l’activité est assez poussé. Les loueurs sont nombreux, une spécificité que l’on retrouve sur la côte Ouest et la façade atlantique. Ces loueurs ont des besoins qui se renouvellent chaque année, l’activité est beaucoup plus réduite entre novembre et mars, ce qui n’est pas le cas sauf dans des villes qui connaissent un véritable dynamique autour du vélo, comme Lyon, Lille ou Paris.

 

Autre modalité d’intervention pour l’INCM, celle d'atelier éphémère. Une formation autour du vélo nécessite un certain nombre d'équipements, mais l’ensemble peut prendre place dans une salle classique, il n’y a aucune nécessité qu’il s’agisse d’un atelier spécialisé. Autrement dit, un espace d’une centaine de m2 est suffisant. « Nous arrivons en début de semaine avec l'ensemble du matériel, on installe six postes de travail, ce qui nous permet d'avoir une douzaine de stagiaires. Et on démonte tout à l’issue. Ce fonctionnement offre une souplesse certaine, de pouvoir aller là où le besoin est présent, sans forcément ouvrir une antenne. »

 

Le formateur entretient des contacts réguliers avec les entreprises par le biais d'une campagne téléphonique en début de formation, puis par des visites en entreprise au cours du cursus. Le rôle des entreprises est de former, mais elles participent également directement à l’évaluation et à l’accompagnement des apprenants, notamment lors de la période de stage.

 

Sur la Nouvelle-Aquitaine, la volonté est de proposer une offre de formation raisonnable et adaptée à la demande des entreprises du Vélo. « Notre stratégie est différente de celle de l’Ile-de-France où il y a un besoin très développé. Sur La Rochelle, on adapte notre offre à la demande. Aujourd’hui sur le vélo, 80% des candidats qui obtiennent leur certification sont en emploi à l'issue de la formation, mais pas forcément dans leur entreprise formatrice. L’autre particularité de ce public, c’est qu’il est assez volatile. L’INCM accompagne également les entreprises à proposer des actions de fidélisation de leurs collaborateurs. »

 

 

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La Forge, transformer ses acquis en compétences

La Forge, transformer ses acquis en compétences | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

« En 2019, j’étais adjointe de direction à la mission locale de Bordeaux » explique Marylène Costa. « Et je constatais que nous avions des actions pour lesquelles on avait beaucoup de mal à mobiliser des jeunes. A un moment, il faut admettre que quelque chose ne fonctionne pas. Et qu’il faut sûrement chercher de notre côté, que ça ne peut pas simplement être le manque de motivation des gens qui n’auraient pas envie de travailler. »

 

Certains citoyens ne poussent pas la porte de la mission locale ou de Pôle emploi. Plus généralement, nombreuses sont les personnes qui ne recourent pas au droit public auquel elles ont pourtant droit. Autre constatation, plus on s’approche des quartiers populaires, plus ces phénomènes grandissent. Taux de chômage élevé, déscolarisation, précarité des femmes au travail, dont beaucoup sont prises dans des schémas monoparentaux.

 

« Avec Yolande Panneels, du cabinet Axe et Cible, on se rendait compte qu'il y avait des personnes qui n'étaient pas informées, qui n'adhéraient pas du tout aux dispositifs, qui refusaient complètement le fait, par exemple, de bénéficier du RSA et de se faire contrôler par un système qu’elles ne connaissaient pas. Nous avons alors travaillé ensemble à un un projet que l’on a présenté à la Région Nouvelle-Aquitaine. En fait, une page blanche avec 3 idées fortes, que nous avons essayé de défendre en partant du principe que ce document devait être écrit par les bénéficiaires eux-mêmes. »

 

Première intention, l'idée d'être présent sur les territoires, de faire du « aller vers », d’intervenir sans trop avoir la volonté de vendre un produit d'insertion. Deuxième principe, inviter les personnes à participer à un collectif pour fabriquer un projet ensemble. « On leur disait, on prend votre besoin comme il est, ici et maintenant, on ne le tord pas, on ne le transforme pas. On a décidé d'accompagner les personnes comme elles le souhaitent, soit en individuel, soit en collectif, ou encore dans un café, sans se donner de limites quant aux modalités. » Troisième intention, travailler au développement des compétences de chacun en s’appuyant sur les notions d'entraide et de pair-aidance.

 

S'appuyer sur les pairs

 

« La pair-aidance, je suis allée la chercher du côté de la santé mentale, parce qu’aujourd’hui ça n'existe pas dans l'insertion professionnelle telle qu’elle est. J’ai voulu voir si ça pouvait marcher sur du vécu expérientiel, comment réparer des personnes en insertion. On y arrive aujourd'hui parce qu'on a une multi culturalité dans les projets. Et que nous utilisons l’outil de l’âge, un senior qui va presque accompagner un jeune, ça se fait un peu naturellement. Mais c'était véritablement ambitieux de se reposer sur le pouvoir d'agir et la pair-aidance. »

 

En pratique, le projet était de créer une association ou une entreprise solidaire basée sur un collectif, une sorte de tiers-lieu vivant, sans idée de refaire une structure de service public. Son but, recueillir le besoin, l'accompagner et le ramener vers le droit commun si nécessaire. Son démarrage remonte à début 2021, avec le recrutement de deux médiateurs développeurs. De mars à octobre, la nouvelle équipe a déambulé au sein des 21 quartiers politiques de la ville situés en Gironde. Elle est partie à la rencontre des habitants, des partenaires potentiels, des associations, etc. En fonction de l’accueil reçu, parfois des coups de cœur, elle a établi une cartographie des quartiers sur lesquels elle voulait intervenir.

 

 « Pour attirer les gens et leur proposer de nous rencontrer, on utilisait des brise-glace, comme un goûter en bas d'immeuble, un jeu de cartes, ou encore une invitation à participer à un atelier cuisine. On partait d'une proposition qui n’avait rien à voir avec le besoin d’emploi formation. Nous voulions d’abord échanger avec les personnes, leur demander comment elles trouvaient leur quartier, si elles avaient envie de changer. »

 

Pour choisir ses territoires d’action, l’équipe se donnait comme principal critère le besoin les habitants, sans jamais chercher à forcer sa présence. Si leur réponse, ou celle des acteurs locaux, était qu’ils n’avaient besoin de rien, elle n’insistait pas. Parfois les acteurs se sont dit partants pour tester quelque chose ensemble. «

À ce moment-là, nous n’avions pas de communication, on voulait rester nous-mêmes un peu invisibles, parce que nous voulions en quelque sorte rester à égalité avec les personnes rencontrées. Nous sommes restés là où on se sentait bien. Maintenant il y a des gens qui nous appellent depuis Coutras, Sainte-Foy-la-Grande, Villenave-d’Ornon, parce qu’un besoin s'est fait sentir. »

 

La Forge a été créée officiellement en septembre 2021 par un consortium coordonné par Axe et Cible*. Elle a ensuite pris ses quartiers au sein de la résidence Habitats Jeunes Le Levain à Bordeaux. Sa première action a été de constituer un collectif en sollicitant les 10 missions locales de la Gironde pour trouver de jeunes ambassadeurs qui iraient faire sa promotion. « Au départ, on a constitué un premier collectif d’une quinzaine de jeunes issus de mission locale, de service civique et de formation professionnelle « amorce de parcours. » Deux ans plus tard, certaines d’entre eux sont encore avec nous dans le collectif, à tricoter le programme. La logique du pair à pair c'était vraiment notre idée de départ, un jeune parle avec un jeune. »

 

Le collectif avant tout

 

Aujourd’hui, la Forge des compétences se présente toujours comme un collectif ouvert à tous, à partir de 16 ans. Elle propose un programme d’ateliers « animés pas toutes et tous » autour de l’écoute, de la cuisine, de l’image, du sport. Sa différence fondamentale avec d'autres accompagnants sociaux, c'est son accueil et le libre arbitre. Plutôt qu’un accueil classique, avec des questions, un diagnostic, tout un processus parfois un peu lourd, chaque personne est invitée à venir quand elle veut, à son rythme, pour donner autant qu’elle reçoit, dans l’entraide et le respect mutuel. Porte d’entrée idéale, tous les jeudis après-midi se tient la « fabrique à solutions », sorte d’outil révélateur des potentiels, qui fonctionne sur la base de l’intelligence collective.

 

« La notion de communauté, de collectif, de démocratie participative est très importante pour la transmission. Même si nous n’oublions pas de prendre en considération l’individu à l’intérieur du collectif. Il y a aussi la question du « non-sachant » qui peut se résumer ainsi : finalement qui suis-je pour penser à la place de l'autre ? Nous travaillons beaucoup la question de la représentation, ma vérité n'est pas la même que la tienne. »

 

Ce sont les premiers « forgeronnes et forgerons » qui ont baptisé eux-mêmes leur collectif, une forge où se fabriquent des compétences au regard du vécu expérientiel de chacun. Car chaque participant, à partir de ses expériences, de son parcours, peut y transformer ses acquis en compétences s’il le veut, les « forger », que ce soit un savoir, un savoir-être, un « soft skill ». « Ces compétences sont reconnues au fur et à mesure, donc on travaille sur une cartographie des compétences des personnes.

À partir de questions simples, en quoi es-tu compétent ? Si on part du principe que tu es très fort en quelque chose, ce serait quoi ? Quel super héros serais-tu ? A partir de cette cartographie, le prétexte est d’aller vers l'emploi ou la formation qui correspond le mieux. »

 

« Depuis le début, nous avons beaucoup évolué dans nos postures. Je crois qu'on a gagné en humilité, parce que le public est là, on est avec lui, on fait partie de ce public. Pour la suite, l'idée avec Axe et Cible, que j’ai rejoint en juin 2023 en tant que responsable de développement, c’est que la forge devienne une entreprise d'économie sociale et solidaire. J'aime bien travailler avec les bénéficiaires aussi sur leur emploi au sein de l’ESS. Mon modèle prochain pour 2024-25, c’est une réponse à appel à projet sur le Contrat Engagement Jeunes - Jeunes en Rupture (CEJ-JR), pour travailler sur des territoires sinistrés. »

 

 

 

 

* La "Forge des Compétences" est financée par la Région Nouvelle-Aquitaine (AAP « Mobilisation vers la formation ») et par le PIC 100% Inclusion (La Fabrique de remobilisation). Porté par le cabinet Axe-Et-Cible, le consortium rassemble la mission locale de Bordeaux, Habitats Jeunes Le Levain, le Pôle Territorial de Coopération Jeunesse de Bordeaux Nord, AKSIS et AFEC. Et pour la recherche action, Marie-Hélène Doublet, maitre de conférences associée, université de Tours et Nathalie Mondain, professeur agrégée, université d'Ottawa.

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Découvrir l’entreprise micro à la main

Découvrir l’entreprise micro à la main | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Proposer à des jeunes de « désacraliser » la rencontre avec des employeurs en les transformant un temps en petits reporters, c’est la proposition de « réalise ton parcours », une action menée en 2021 par le pôle vie sociale et engagement de la mission locale de la Creuse. Public concerné, les jeunes de 16 à 25 ans, résidents de QPV, sans autre prérequis particulier.

 

Le principe de cette action est notamment de leur apprendre à mener une interview et à s'intéresser aux entreprises du territoire, puis de prendre contact avec les elles, de convenir d'un rendez-vous et de réaliser une interview filmée. Interviennent ensuite les étapes de montage vidéo, de diffusion et de communication. « Tout au long du projet nous nous sommes appuyés sur 2 partenaires médias et culturels, » précise Rébecca Rolland, responsable du pôle vie sociale et engagement. « L’association Radio Pays de Guéret, qui est intervenue sur la partie initiation à l’interview, la recherche d’information sur Internet. Et l’association Télé Guéret Vision (TGV) qui a formé nos jeunes sur la partie technique audiovisuelle, la captation, le son, les réglages lumière, le montage. »

 

À partir d’un panel d’une dizaine de portraits de recruteurs, les jeunes ont procédé à une sélection de 3 entreprises, sur la base de leur appétence et de leurs affinités. Ils ont été accompagnés dans les entreprises pour réaliser les interviews, à chaque fois consacrées à un métier en particulier. Les interviews sont programmées en fonction de la disponibilité des entreprises, ainsi que des intervenants numériques associatifs et des jeunes. Les questions sont communiquées à l’avance aux professionnels. Ils rejoignaient ensuite les locaux de la mission locale pour s’occuper de la partie montage, toujours avec l'appui de TGV, afin d’aboutir à des vidéos type reportage de 4 à 5 minutes.

 

Acte 2

 

Devant la mobilisation et l’implication des participants, la mission locale a décidé de poursuivre l’action pour un acte 2. « En lien avec la déléguée à la préfecture de la Creuse sur les questions politiques de la ville, nous nous sommes dit que nous touchions du doigt quelque chose. La vidéo fonctionne bien avec ce public-là. Nous avons alors proposé à la Région sur le volet politique de la ville et à l'Etat en local, de reconduire l'action sous sa forme « réalise ton parcours -acte 2 » ».

 

Dans ce cas, il était question de se tourner vers des entreprises signataires du pacte du contrat de ville, et de réduire la durée de la deuxième version de l’action de 4 mois à 3 semaines, en raison de la volatilité du public pour lequel l'urgence absolue est la formation et l'emploi. À l’occasion d’une réunion d’information collective, le projet a été présenté dans ses grandes lignes. Il se voulait ouvert aux suggestions des jeunes, ajusté le cas échéant aux besoins qu’ils expriment, afin que les jeunes en soient pleinement parties prenantes. L’information collective permet de lister les candidats potentiellement intéressés, de lever certaines réticences et doutes, mais surtout d’aborder les questions d’organisation, ou comment se rendre disponible pendant 3 semaines, comment se déplacer, etc.

 

« Au pôle vie sociale, nous avons vraiment à cœur de confirmer qu’aucun détail logistique ne vienne entraver les rendez-vous et ateliers programmés. Par SMS, réseaux sociaux, disponibilité jusque très tard en soirée, on recadre vraiment tout en proposant des solutions alternatives, du covoiturage, etc. Ce sont des heures de travail mais c'est ce qui fait qu'entre un nombre d’inscrits à un projet et un nombre de jeunes présents, nous avons très peu d'écart. Nous faisons du cousu main, du cas par cas, ce qui implique aussi qu'on n’adresse pas seulement un message générique aux jeunes, sinon ça ne fonctionnerait pas. »

 

L’acte 2 a été mis place début 2023, avec un groupe d’une dizaine de jeunes identifiés par les conseillers de la mission locale ou d’autres partenaires. Les jeunes étaient encadrés pendant des journées entières, ce qui nécessitait de recourir à des techniques d'animation particulières pour les garder concentrés sur des choses assez techniques.

 

« Les entreprises signataires du pacte ne sont pas si nombreuses que cela en Creuse. Nous avons bien affiné le nombre de celles vers lesquelles on se tournerait. Notre mission principale était de faire découvrir le territoire, le bassin économique et son tissu d'entreprises, pour que les jeunes fassent le lien avec leur recherche d'emploi en cours ou à venir. Ensuite, ils ont fait leur choix en fonction de leur projets professionnel et personnel. »  Les entreprises retenues étaient accessibles sans formation, proposaient des contrats d'intérim qui pouvaient éventuellement être des portes d'entrée vers l’emploi. Une située en centre-ville de Guéret, une en bordure de la commune limitrophe, la dernière à une quinzaine de kilomètres. À l’issue de l’action, l’objectif n’était pas une sortie immédiate vers l’emploi pour tous les jeunes. Mais plutôt qu’ils retiennent l’idée que les entreprises visitées pourraient les accueillir dès que leur projet professionnel est plus avancé.

 

La nécessaire implication des jeunes

 

La mission locale a pris également soin de se tourner vers des recruteurs bienveillants, qui feraient bon accueil aux candidats. Pour le reste, l’acte 2 s’est déroulé sur le même schéma que l’acte 1, avec les mêmes partenaires : initiation à la réalisation d’interviews, prise de contact avec les entreprises, tournages, montage et diffusion. « Sur les deux sessions, nous avons eu pas mal de jeunes bénéficiant d'un contrat d'intégration républicaine. Et beaucoup de femmes. La féminisation des groupes était une de nos volontés, mais je pensais qu'il serait plus difficile que ça de les attirer. Il s’avère qu’elles sont très craintives s’il s’agit d’être devant la caméra, mais très volontaires pour être derrière. »

 

Plus généralement, les actions proposées par le pôle vie sociale nécessitent une forte adhésion de la part des jeunes. Ses outils principaux sont l'accès à la culture, au sport, aux chantiers participatifs ou encore la mobilité européenne, sous forme de séjours individuels ou collectifs. En majorité, ils viennent par curiosité, parce qu’ils ont confiance dans le fait qu'ils vont apprendre quelque chose. Il est parfois la meilleure porte d'entrée pour ceux qui ne sont pas sortis de leur domicile depuis des mois. C’est un bon moyen de les accrocher avec « l'institution ». Pour assurer le succès de « réalise ton parcours », il est également nécessaire d’entretenir une très bonne communication interne auprès des conseillers qui sont les principaux prescripteurs. C'est leur expertise qui prime dans le choix des participants.

 

C’est pourquoi la première présentation du projet s’adresse aux conseillers de la mission locale. « Les actions de remobilisation ne suffisent pas toujours pour entrer en formation ou en emploi. Nos collègues s'appuient sur nous pour que nous trouvions le moyen de faire sortir un jeune de chez lui. Ils nous signalent le cas échéant les points de vigilance sur lesquels nous devons faire porter notre attention. »

 

« Pour la suite, nous tenons à conserver l'intervention de professionnels. Nous souhaitons que les jeunes travaillent à leurs côtés. Donc nous sommes toujours en recherche de financement, ne serait-ce que pour payer les factures correspondantes. Cette année nous sommes plutôt sur un projet au long cours, autour d’un club photo, toujours avec différents intervenants extérieurs. Le thème de cet hiver ne sera pas la vidéo mais la photo. »

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Les ateliers de l’avenir, la nouvelle formule Ikigai

Les ateliers de l’avenir, la nouvelle formule Ikigai | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Depuis plusieurs années, l’association Ikigai anime « l’école du samedi » (voir notre article du 8 juillet 2021 - https://sco.lt/6N80I4 ), à destination de jeunes issus de réseau d’éducation prioritaire. Son principe, découvrir des métiers sous forme ludique, chaque samedi matin, grâce à la rencontre avec des professionnels. En 2022, cette action a connu un véritable changement, puisque « les ateliers de l'avenir » se déroulent désormais sur le temps scolaire, directement dans des classes de primaire et de collège. Mêmes publics, même principe de découverte des métiers par le jeu, mais dix fois plus de jeunes impliqués.

 

Pour Florian Machayekhi, directeur d’Ikigai, le changement permet un meilleur ciblage des jeunes accompagnés puisque si l’école du samedi fonctionnait sur le principe du volontarisme, aujourd’hui tous les élèves touchés évoluent forcément en REP, alors qu’auparavant, certains à leur entrée en 6e partaient vers des collèges hors secteur. « C’est la cité éducative de Cenon qui nous a contacté pour voir ce qu'on pouvait faire avec eux sur temps scolaire. Elle était intéressée pour renforcer ses activités un peu différentes, ainsi que pour agir sur cette question de l’évitement du collège de secteur. Il y avait aussi le fait que l'on ne touchait pas forcément les jeunes en risque de décrochage, puisque ce n’était pas forcément ceux qui s’inscrivaient volontairement pour venir régulièrement le samedi matin. »

 

Pendant un temps les deux formules ont été menées en parallèle, le samedi matin sur Bordeaux et les classes de CM2 à Cenon. Mais en 2023, l’association a décidé de passer entièrement sur le temps scolaire. « Nous avons abandonné la formule du samedi un peu à contre cœur, mais on ne pouvait pas jouer sur tous les tableaux. Donc on se concentre maintenant sur les interventions en classe, qui ont montré toute leur pertinence, avec un très bon retour de la part de la Cité, des enseignants, des intervenants et des élèves. » 

 

Un accompagnement sur plusieurs années

 

Une expérimentation s’est déroulée au premier semestre 2023, dans les classes de CM2 des six écoles de la Cité éducative. Depuis la rentrée, l’action concerne aussi les 6e de ses deux collèges, dans une logique d’accompagnement sur plusieurs années, du CM2 à la terminale via différentes méthodes. Les ateliers d’une durée d’environ deux heures, se déroulent le plus souvent le vendredi après-midi. L’idée générale est que chaque élève participe à six ateliers par an en CM2, 6e et 5e, et qu’ensuite il se concentre sur son stage à venir.  Pour l’aider, Ikigai a mis en place un module pour entamer sa réflexion dès la classe de 4e et trouver son stage sans attendre sa rentrée en 3e. 

 

A Cenon, les ateliers de l’avenir vont concerner 500 jeunes en 2023, la moitié de CM2, l’autre moitié dans ses deux collèges. Si l'orientation reste la finalité, l’objectif premier d’Ikigai est l’accrochage scolaire et la motivation d’aller à l'école. Derrière la découverte des métiers, il y a la construction de confiance en soi et dans l'avenir, qu’il est important de réaliser dès les « petites » classes. Car l’association constate une sorte d’auto censure de la part des élèves. Certains veulent devenir médecin, mais dès leur entrée en collège se disent qu’ils n’y arriveront pas, parce que personne n'a été médecin dans leur famille ou qu’ils n’auront pas le niveau.

 

Plus les années passent, plus cette autocensure est importante, et se vérifie lors du stage de 3e, souvent choisi par défaut. « Notre rôle c’est de garder les portes très ouvertes, pour ne pas qu'elles se referment comme c’est le cas actuellement. Nous voulons leur montrer que le champ des possibles est très large, c'est aussi pour ça que nous agissons avant que les questions d’orientation « pure » entrent en ligne de compte. » Si les ateliers sont consacrés à la présentation des métiers, on y aborde des questions plus profondes : c'est quoi réussir sa vie ? réussir ses études ? Quel est l'objectif des études ?

 

« Nous essayons d’impliquer les équipes éducatives autant que possible. Certains enseignants étaient très demandeurs dentrée, d’autres plus sceptiques sur la formule, considérant notamment que leurs élèves étaient trop jeunes. Mais ils se sont laissé convaincre par le fait que les ateliers ne sont pas axés orientation, mais plutôt sur les compétences, et les connaissances. » Pour les mobiliser, Ikigai a élaboré des kits pédagogiques de manière à faire des liens entre les ateliers et les notions abordées dans le programme scolaire. Et pour faire en sorte que les intervenants soient le cas échéant choisis en fonction des projets pédagogiques prévus en cours d’année. D’où le principe de créer une sorte de petit comité de pilotage associant les différentes parties prenantes, afin de ne pas leur imposer une solution toute faite, dont ils ne s’empareraient pas. 

 

La venue des professionnels permet de faire le lien entre théorie et pratique, et d’aider les professeurs dans leurs enseignements quotidiens. Ainsi la venue d’une infirmière est prétexte à parler des dosages de produits et des conversions, ou celle d’un architecte pour aborder les échelles, notions importantes dans beaucoup d’activités.

 

Susciter les échanges et la curiosité

 

Les intervenants viennent bénévolement, 2 à 3 fois par an, pour présenter les réalités de leur métier, dans le cadre d’un atelier construit avec l’association qui s’occupe de la dimension ludique. Tous les métiers sont potentiellement présentés, manuels ou plus intellectuels, valorisés ou pas. Tout est dans la manière de les présenter. « La nouvelle formule leur plaît, ils sont contents de venir dans les classes de primaire et de collège. Nous n’attendions pas un tel engouement de leur part. Les professionnels ressentent une nouvelle dynamique en classe, avec la présence de l’enseignant et le fait que les élèves se connaissent. Cela facilite l’interaction et la curiosité, même si les rencontres sont moins fréquentes quavant. Initialement on pensait justement qu'on allait peut-être avoir des soucis avec des jeunes qui n’avaient pas choisi de venir. Mais il y a vraiment cet effet de groupe que nous n’attendions pas du tout à vrai dire. »

 

Après l’expérimentation, la volonté d’Ikigai est de poursuivre l’accompagnement sur le long terme, d’assurer une continuité qui permet de construire chaque parcours de découverte métiers et de découverte de soi, afin que le jeune arrive au moment des grandes décisions d'orientation avec une bonne idée de ce qui est possible et de ce qu’il peut envisager. « En CM2 et 6e on plante des graines, c'est très bien. Mais ce qui est important ce sont les résultats concrets sur plusieurs années. Cette dimension de long terme a toujours été au cœur de l'association donc on a vraiment comme objectif de le poursuivre malgré cette formule sur le temps scolaire. On ne veut pas perdre cette qualité en termes d'accompagnement. »

 

Dans ses projets en cours, Ikigai est en phase de développement d’une plateforme numérique qui permettra de relier les jeunes avec l'association mais aussi entre eux. L’augmentation des effectifs change nécessairement la nature du suivi. Les contacts individuels seront maintenus, mais de façon moins personnalisée. La plateforme fournira aux jeunes des outils pour qu’ils soient en partie autonomes sur les questions d'orientation et la découverte des métiers.

 

« On aimait beaucoup la formule du samedi, elle avait du sens, mais les places étaient limitées. Il était dommage de refuser des jeunes motivés. Les élèves des réseaux d'éducation prioritaire sont en très grand nombre et ils ont souvent des caractéristiques communes en termes de difficultés à s'orienter ou à trouver du sens à l'école. Nous essayons d'apporter notre part de solutions à leurs problèmes. Tous les accompagner, c'est une question de temps et de moyens. » 

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Opération métiers du « prendre soin »

Opération métiers du « prendre soin » | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

L’idée d’organiser un rallye des métiers de l'aide à domicile remonte à 2016. Le Gérontopôle Nouvelle Aquitaine, à l’époque sous le nom d’Autonom’Lab, a initialement lancé ce principe en Haute-Vienne, avant de l’essaimer dans plusieurs départements. C’est en s’inspirant de ce modèle et de sa méthodologie, que l’association bordelaise 3ie organise depuis 2019 un rallye des métiers de l’aide à la personne avec le soutien de la Région Nouvelle-Aquitaine. Les premières éditions se sont déroulées en Charente, en Dordogne, puis sur Bordeaux Métropole. La prochaine aura lieu en Sud Gironde fin novembre.

 

« Nous nous basons sur un socle similaire, sur lequel nous avons ajouté notre touche, » précise Florence Connangle, directrice de 3ie. « Nous sommes partis de la problématique qui concerne particulièrement la ruralité, celle de la difficulté de recrutement dans le secteur du médicosocial et des métiers de l'aide à la personne. C’est pour ça que nous avons d’abord choisi d’intervenir en Charente et en Dordogne. »

 

L’approche initiale de l’association consistait à organiser des ateliers en fédérant un certain nombre d'acteurs locaux, organismes de formation, structures d'emploi, prescripteurs, etc. Elle voulait également mener elle-même des actions de valorisation des métiers. Elle a ainsi développé plusieurs outils, à commencer par un escape game, en collaboration avec le Gérontopôle NA, l’AG2R La Mondiale et Cap Métiers, une mise en situation qui propose à des demandeurs d'emploi ou des jeunes d’enquêter au domicile d'une personne âgée disparue, qu’ils doivent retrouver en 45 minutes à l’aide d’un certain nombre d’indices. Tout au long du jeu, les participants découvrent les différentes facettes des métiers du « prendre soin ».

 

Montrer les parcours

 

Autre support, un film qui raconte l'histoire d'une personne arrivant par hasard dans le secteur. En 8 minutes, on la voit débuter en tant qu’agent de service hospitalier en ehpad, suivre une formation d’accompagnant éducatif et social, devenir aide-soignante et référente santé qualité de vie au travail. A la fin du film, la personne, devenue âgée, est accompagnée par un auxiliaire de vie auquel elle raconte son parcours professionnel. « L'idée, c'était aussi de faire valoir qu’on est tous à la veille d'être une personne qui aura besoin d’aide. Pour moi, cette sensibilisation sociale est indispensable, dire qu’il faut qu'on se mobilise sur le fait que le prendre soin c'est aussi nous, demain. »

 

Dans un autre registre, un simulateur de vieillissement pour que les publics comprennent mieux la problématique de dépendance sensorielle et fonctionnelle. Et puis un casque 3D qui permet des visites virtuelles de domiciles, ou de structures médico-sociales et de soins. Dans tous les supports, il y a au moins un professionnel masculin. Car même si les hommes sont plus nombreux qu’avant, les métiers restent très majoritairement féminins. « Si on arrêtait de caricaturer le soin comme essentiellement une sorte de valeur maternelle, et qu’on faisait valoir qu'on est sur des vraies compétences professionnelles, cela motivera plus de messieurs à rejoindre notre secteur. » 

 

Tous ces ateliers, construits progressivement, sont animés par l’association au cours du rallye. Ils viennent compléter les témoignages de professionnels, les visites d'établissement, les circuits de découverte des métiers. « En décembre dernier, nous avons aussi écrit une chanson. Pour l’écrire, nous avons travaillé avec des jeunes de l’EPIDE, des professionnels et des personnes âgées de l'ehpad de Terre-Nègre, où nos locaux sont situés. Elle est aujourd'hui utilisée pour briser la glace avec les groupes, pour libérer la parole et favoriser l'expression des préjugés que nous pouvons tous avoir. C’est un moyen de créer du lien et de favoriser l'échange avant les ateliers. »

 

Les ateliers proposés présentent l’intérêt de faire travailler ensemble des gens qui ne se connaissent pas, le travail en équipe étant une caractéristique majeure des métiers de la santé et du prendre soin. Ils font également découvrir l’importance de l’observation, celle de savoir déceler chez une personne ce qui a changé d’un jour à l’autre. Ce sont des compétences, des savoir-être, qui passent inaperçus mais qui démontrent la polyvalence nécessaire à la pratique professionnelle.  

 

L’édition en Sud-Gironde se déroulera pendant une semaine, du 27 novembre au 01 décembre, avec les communautés de communes du Réolais en Sud-Gironde, du Bazadais, de Convergence Garonne (Podensac) et du Sud Gironde (Langon). La manifestation, voulue par le Pôle Sud Gironde avec le soutien de BAAM (plateforme girondine des métiers de l’autonomie) et de 3ie, s’organise autour d’une action centrale et des ateliers dans les locaux de différentes structures d’aide à domicile, d’organismes de formation, d’ehpad.  « On travaille beaucoup avec le Pôle Sud Gironde qui fédère les acteurs de son réseau. On est sur une logique qui évolue vers de la co construction avec les intervenants locaux. Et nous sommes dans l'optique d'aller plutôt vers les demandeurs d'emploi, c’est pour ça qu’il est important d’avoir des actions délocalisées, au plus proche des publics, sinon ils ne se déplacent pas. »

 

« Pour nous, c’est un véritable avantage de s’appuyer sur des structures qui fédèrent autour d'elles les acteurs du territoire, sans que nous devions faire des démarches auprès de chacun d’eux. C'est plus efficace. En Charente et en Dordogne, nous avons déployé beaucoup d’énergie pour les mobiliser parce qu’il s’agissait de territoires que nous connaissions mal. Je pense qu’il est indispensable de faire avec des professionnels locaux, qui disposent du réseau et des contacts. Et de se rendre au plus proche des publics et des employeurs. Aujourd'hui nous sommes plus dans une logique de co portage, de soutien aux actions territoriales plutôt que d’en être à l’initiative. »

 

Attirer les adultes et les plus jeunes

 

L’association veut également dépasser la démarche du rallye, afin de répondre ponctuellement aux sollicitations de partenaires. Elle estime n’avoir aucune véritable vocation à faire de l'événementiel, et préfère jouer son rôle de laboratoire d’innovations, d’élaboration de propositions créatives et de valorisation de ses retours d'expérience. Elle entend désormais privilégier l'animation de ses ateliers et multiplier les démarches de transfert de ses outils.

 

Au départ, les animations s’adressaient plutôt à un public adulte, des demandeurs d'emploi qui ont besoin d'accéder à un travail rapidement avec des formations assez courtes, et qui préfèrent découvrir les choses de façon ludique plutôt que lors de réunions d'information rébarbatives. Mais ils restent difficiles à toucher, y compris par les prescripteurs. Les forums ont aussi montré l’intérêt porté par les collégiens et lycéens. Ainsi, 3ie a été sollicité par un collège en Dordogne. « L'escape game plaît aussi au public jeune, évidemment. A cet âge, ils ne sont pas employables directement, mais c'est pour nous l’occasion de planter une petite graine pour alimenter leurs projets professionnels à terme. »

 

Pour l’association, un des enjeux est désormais de redonner de la fierté aux professionnels et l’envie de parler en bien de ce qu'ils font, afin d’améliorer l'image du secteur et de motiver des candidats pour y venir et y rester. Mais la crise sanitaire est passée par là. Au regard des nouveaux arbitrages faits par les gens entre vie privée et vie professionnelle, les métiers qui impliquent de travailler un week-end sur deux, les jours fériés, en horaires décalés, ne font pas rêver a priori. Surtout sans les compensations financières qui pourraient attirer des candidats. Et puis subsistent les problèmes de mobilité, de garde d’enfants, etc. Tout cela n’aide pas à susciter des vocations.

 

« Pour la suite, on peut toujours améliorer nos outils, en créer de nouveaux, mais si les professionnels ne créent pas le bouche-à-oreille positif qu'on peut escompter, nous prenons le risque de vendre du rêve aux gens qui vont ensuite découvrir des réalités de terrain qui peuvent être parfois tout autres. Pour dépasser la notion d'attractivité, il reste un vrai travail à effectuer en interne dans les structures pour une reconnaissance des fonctions, des rôles, des difficultés. Ça relève du domaine managérial, qui fera que les équipes actuelles se sentiront bien et adopteront cette attitude de présentation de leurs activités sous un jour favorable. »

 

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Quand l’entreprise franchit les portes du collège

Quand l’entreprise franchit les portes du collège | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

« Les Entreprises Pour la Cité » (LEPC) existe depuis près de 40 ans. L’association a été fondée par Claude Bébéar, PDG d’AXA, sur le postulat que le monde n’irait pas mieux si les entreprises ne menaient pas une véritable politique d’engagement social et sociétal. Elle fédère aujourd’hui environ 150 entreprises dans toute la France, et compte une trentaine de salariés basés à Paris et dans 7 antennes situées sur tout le territoire.

 

Chaque antenne a pour mission d’animer un réseau d’entreprises sur son territoire et d’y déployer l’approche nationale en tenant compte des enjeux et besoins locaux. « A Bordeaux, nous avons environ 25 entreprises actives dans le réseau », précise Julia Wasykula, directrice de l’antenne Nouvelle-Aquitaine. « Nous les accompagnons en organisant des temps d’échanges et de témoignages sur nos thématiques, des cafés de rentrée, des webinaires, des conférences, dans le cadre de ce qu’on appelle notre « vie de réseau ». Nous les mobilisons aussi sur des actions concrètes, pour engager leurs collaborateurs dans la ligne de leur politique de mécénat de compétences. Nous sommes également organisme de formation, nous leur proposons quelques formations sur des sujets comme « recruter sans discriminer », « manager la diversité », etc. »

 

L’association travaille sur 3 thématiques principales, à savoir l’égalité des chances dans l’éducation et l’inclusion numérique, l’accès à l’emploi et la diversité dans l’entreprise, le mécénat et les engagements citoyens. Parmi les actions menées tout au long de l'année, l’association a développé le programme Innov’Avenir en 2016, financé entre autres par la Région Nouvelle-Aquitaine en « soutien aux actions de développement en QPV ». Il a été conçu pour faire découvrir aux jeunes le monde du travail de demain, avec une attention particulière accordée au numérique.

 

Les métiers en classe

 

« En Nouvelle-Aquitaine, nous développons surtout la dimension de découverte professionnelle du programme. Nous avons plusieurs formats d'actions en classes de collège principalement sur les 4e et 3e, où nous mettons en place des séances de 2 heures avec trois professionnels d'entreprises différentes, pour parler des codes de l'entreprise avec les élèves de classes de 3e générale et 4e SEGPA avant leur stage, ou pour évoquer le poids des stéréotypes de genre dans l'orientation et de la mixité des métiers auprès des classes de 4e. »

 

Dans le réseau LEPC, l’équipe de Bordeaux, constituée de deux salariées, intervient dans les classes avec des collaborateurs et collaboratrices des entreprises membres du réseau. Chaque entreprise reçoit le calendrier de la vingtaine d’interventions annuelles, charge à elles d’y inscrire les salariés participants, qui seront contactés en amont pour leur présenter le déroulé et leur rôle sur la séance. Les classes concernées sont des 4e et 3e de collèges de Pessac et de Mérignac, établissements situés en QPV.

 

Autre modalité introduite plus récemment, l’action « Des pros dans ta classe » Le principe cette fois est de constituer des binômes de collaborateurs issus d’une même entreprise ou de deux entreprises différentes, et les associer à une classe et un professeur, afin qu’ils puissent intervenir en toute autonomie dans les classes Ce « trinôme » choisit deux ou trois thématiques, auxquelles seront formées les salariés par les équipes de LEPC, qui seront abordées avec les élèves à travers plusieurs interventions durant de l’année scolaire. Certains peuvent aussi se saisir d’un seul thème, qu’ils iront animer dans plusieurs classes d’un même niveau.

 

« Cette formule nous permet de ne plus être physiquement présents avec les professionnels, et donc de proposer plus d’actions. Cela va nous permettre aussi de sortir de notre territoire habituel. L’année dernière, nous avons constitué huit binômes que nous avons mis en relation avec les collèges. Nous les avons formés en visio au contenu de la séance, aux techniques d'animation, aux thématiques retenues, aux choses à savoir quand on intervient devant des collégiens. Nous sommes vigilants sur ce point, afin que les salariés, dont ça n’est pas le métier, maitrisent les messages à diffuser et n’utilisent pas un langage trop technique. Le bilan est extrêmement positif. Ça demande du temps de préparation et de coordination, mais en termes de volume d'actions déployées, on y gagne beaucoup. »

 

« Avec ce projet « Des pros dans ta classe » nous avons voulu vraiment mettre les professeurs au cœur du dispositif. Parce que plus ils sont engagés sur l'action, plus les élèves sont impliqués et contents de voir revenir les professionnels. C’est un vrai lien qui se crée et les jeunes s’attachent à eux, progressivement ils osent plus se livrer, profitent vraiment du moment pour leur poser des questions, se nourrir de leur parcours, les découvrir en tant que personne. » L'objectif en Nouvelle-Aquitaine est de doubler le nombre de binômes pour l’année scolaire 2023-2024, de mobiliser plus d'entreprises et de nouveaux établissements en cherchant à s'étendre, d’abord sur la métropole, mais également dans la région. Quatre binômes devraient intervenir cette année sur les villes de Limoges, Poitiers, Angoulême et Pau.

 

L’association fait aussi en sorte que les salariés valorisent leur engagement, qu’ils passent un moment agréable et qui fasse sens. Elle veut jouer ce rôle d’intermédiaire entre les entreprises, les élèves et les équipes éducatives. Elle ambitionne de permettre à deux mondes, qui ne se connaissent pas toujours, de se rencontrer et de communiquer avec la garantie d’un contenu de qualité, une pédagogie, une approche ludique. Et puis les professionnels ont aussi l’occasion de déconstruire leur stéréotype sur le lieu d'habitation, sur le niveau social, sur l'origine des élèves. Face à eux, ils ont des classes très mixtes.

 

L’objectif des entreprises membres, est de transmettre certains messages aux jeunes qui en seraient le plus éloignés. Le but est de permettre aux jeunes de se projeter dans le monde du travail, de leur montrer qu'ils y ont leur place, et que d’avoir un projet professionnel ne consiste pas juste à « trouver du boulot ». Afin de présenter l'orientation professionnelle et le monde du travail comme quelque chose de positif, l’association s’appuie sur des salariés en tant que « rôles modèles », pour dire aux jeunes l'importance d'avoir une orientation choisie et pas subie. Des ateliers sur « la connaissance de soi » sont également proposés, qui permettent de questionner les élèves sur ce qu’ils aiment, ce qui les anime, une démarche parfois nouvelle pour des élèves à qui la question n’a jamais été posée.

 

Apprendre l'égalité filles-garçons

 

« Les entreprises nous disent aussi qu'elles sont heureuses de rencontrer les salariés de demain, de comprendre leurs aspirations.  Certains jeunes n'ont pas les codes de l'entreprise parce qu’ils n’ont pas forcément « d'adulte référence » autour d'eux. Pour beaucoup, le stage de 3e est le premier contact avec l’entreprise. Notre rôle est de répondre à leurs interrogations et à leurs inquiétudes, et de les aider à ce que cette première expérience se passe bien. Sur les sujets qu'on aborde, on sait que les choix se font dès la sortie du collège, en particulier sur les orientations en voie professionnelle ou technologique. En première, c’est parfois trop tard, les élèves ont déjà écarté des secteurs d’activité entiers de leur réflexion. »

 

Exemple avec les sujets autour de l’égalité filles-garçons. Pour essayer de faire découvrir des métiers techniques aux jeunes filles, et plus largement de déconstruire les représentations des élèves sur les métiers, l’association aborde le sujet par les catalogues de jouets et les représentations qu’ils véhiculent. Elle cherche à faire prendre conscience aux élèves que, dès l'enfance, la société attribue des rôles, les filles plutôt dans le soin et des activités « d'intérieur », les garçons dans des activités d'extérieur, concrètes. Avec de telles représentations, les jeunes ne s’autorisent pas à s’intéresser à des choses qu’ils aiment, parce qu’elles seraient un peu différentes de la norme, et cela influence leurs projections professionnelles.

 

Il y a aussi l'influence de l’entourage, même des professeurs. « On leur explique qu'en fait, ils ont l'impression de faire des choix qui sont les leurs, mais qu’ils sont parfois conditionnés par des stéréotypes et des représentations. On s'appuie beaucoup sur les rôles modèles des professionnels, des femmes qui ont fait des choix en première intention qu'elles ont regretté ensuite. Ces témoignages-là sont importants. Voire une femme développeuse en informatique, ça leur montre que c'est possible, que le numérique n’est pas juste un truc de geeks. »

 

« Nous sommes conscients que ce n’est pas en deux heures qu'on va faire évoluer les choses, le discours des parents est quand même la clé et le guide de ces décisions. Mais je suis convaincue que nos séances permettent de planter une petite graine.  Je constate une évolution globale quand même, et une meilleure connaissance des métiers du digital par les filles par exemple. »

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La voiture, vecteur de mobilité et de solidarité

La voiture, vecteur de mobilité et de solidarité | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

APREVA 47 est à la fois garage et loueur social. L’association fait de la location et de la réparation de véhicules pour toute personne vivant en dessous du seuil de pauvreté, dans le cadre d'un maintien ou retour à l'emploi. Pour 2 euros par jour, un bénéficiaire peut emprunter une voiture, assurance comprise et kilométrage illimité, pour se rendre sur son lieu de travail ou de formation. Il peut aussi l’utiliser pour tous ses besoins quotidiens, à l’exception d’éventuels départs en vacances.

 

« Nous sommes le premier loueur social de France » précise Thomas Pinet, directeur général. « Entre le Lot-et-Garonne et la Gironde, nous réalisons 30 000 journées de location par an, pour une centaine de véhicules qui sillonnent les départements quotidiennement. » Autre particularité, les véhicules, uniquement des voitures thermiques, qui constituent le parc disponible sont tous issus de dons. Dons faits par les entreprises comme ENEDIS au début, aujourd’hui plutôt par des particuliers, à raison d’une trentaine par an.  

 

Parmi ses projets, l’association, qui possède deux garages en Lot-et-Garonne (Aiguillon, Agen) et un en Gironde (Lormont), avait eu l’idée de créer des « unités mobiles de garage » pour aller au contact de la population, développer du « aller vers », offrir une solution de mécanique légère de proximité sur des territoires reculés. Trois unités ont été déployées dans les Quartiers Politique de la Ville du Libournais et de Bordeaux métropole.  

 

Mécanique à domicile

 

Dans la pratique, un mécanicien intervenait pour effectuer des réparations de mécanique légère « en pied d’immeuble » : échange de pneus, plaquettes, vidange, etc.  Mais il est très vite apparu que les besoins étaient beaucoup plus poussés. « En réalité, les publics les plus précaires, ne se rendent pas chez le garagiste pour faire une simple vidange. C’est qu’ils ont attendu, attendu, trop attendu, au point que leur véhicule a subi des dégâts parfois importants. Ils n’ont pas toujours la capacité à financer les réparations. »  

 

Problème, un mécanicien « volant » n'est pas équipé pour réaliser des opérations « lourdes » sur un parking ou dans un petit local improvisé. Avec un coût annuel de 40 000 euros par garage mobile, le modèle n’a pas été facile à mettre en place. Et pour en assurer la pérennité, il était impossible de se reposer uniquement sur la prestation mécanique. Seul moyen de le faire perdurer, que le salaire du mécanicien soit pris en charge à 100% par des aides publiques. Autrement dit, accepter que cet outil ait avant tout une vocation sociale.

 

Illustration des problèmes de financement, les devis gratuits étaient établis pour les personnes qui devaient ensuite prendre en charge le coût de l’intervention. Mais l’association s’est rendu compte qu’elle faisait beaucoup de diagnostics et peu de réparations sur les véhicules, tout simplement parce qu’il était ensuite moins cher de les faire réaliser par un ami ou une connaissance, au noir, plutôt que de les régler à l’association. « Nous avons pris le parti d'arrêter ces garages mobiles, et de réfléchir différemment, à une échelle plus raisonnable. D’autant que notre offre ne pouvait pas s’aligner économiquement sur les grandes surfaces automobiles, par exemple pour les vidanges. Aujourd’hui, nous sommes toujours sur le modèle du mécanicien mobile, mais qui se déplace pour faire de la prévention et de la pédagogie plutôt que de la réparation. »

 

La nouvelle approche consiste à travailler en amont des problématiques, au lieu d’intervenir pour réparer les dégâts, sur la base de trois grandes thématiques : l'entretien quotidien de son véhicule (usure des pneus, des plaquettes, niveau d'huile, etc.), les pièges à éviter quand j'achète mon véhicule, parce que les escroqueries sont nombreuses pour des véhicules proposés à 1 500 euros sans contrôle technique. Le troisième sujet est lié au projet de Zone à Faibles Emissions à Bordeaux. Il s’agit de faire de la prévention, afin d’éviter que des gens s'endettent en achetant une voiture qui ne pourra plus, à terme, circuler sur une grande partie de la métropole.

 

« Là où c'est toujours un peu compliqué, c'est que nos actions s'adressent à une minorité. Les solutions qu'il faudrait mettre en place ne sont financièrement pas rentables, par exemple des modes de transport en commun durables et pérennes. Dans nos territoires, la plupart des gens n’ont aucun moyen de mobilité à l'exception de la voiture. Nous devons apporter des solutions sur mesure, de la dentelle, mais elles engendrent quand même des coûts. Il faut arriver à jongler, trouver des équilibres en permanence. » 

 

L’accès aux services d’APREVA se fait sur prescription d’un acteur du social ou de l'emploi qui oriente les demandeurs sur le site Internet de l’association, que ce soit pour une location ou une réparation. Pour louer un véhicule, il faut produire un contrat de travail ou une convocation en formation, et un justificatif de ressources. Un outil de suivi permet de répertorier toutes les demandes, les prescripteurs, le profil des bénéficiaires, leur situation, etc. ce qui permet d’établir des statistiques précises. Prochaine étape, implémenter une enquête post location pour savoir comment les personnes auraient pu faire sans la location, afin de disposer d’une sorte d’observatoire de l’activité.

 

APREVA est également atelier et chantier d'insertion. Elle forme ainsi des personnes au métier de mécanicien. La volonté initiale était de créer le cercle plus vertueux possible. Quand une voiture est donnée à l’association, elle est retapée dans ses ateliers, par des personnes en cours de formation, sur un parcours de 2 ans en AFEST. Pour effectuer des périodes de mise en situation professionnelle, elles sont accueillies au sein d’un réseau de partenaires.

 

Pérenniser l'action 

 

L’association limite son parc à une centaine de véhicules, dans le but de sécuriser son renouvellement et de ne pas se mettre en difficulté. Car plus de véhicules, c’est aussi plus de personnel pour les gérer, sans la garantie que le flux de dons se maintienne. « Notre mission, avant même d'aider les gens, c'est de pouvoir se maintenir aussi longtemps que le besoin existe. Si nous aidons 2 000 personnes mais que dans 3 ans, nous mettons la clé sous la porte, cela voudrait dire que notre modèle n’est pas pérenne et efficace pour le territoire. Parfois il nous faut refuser des offres, n’accepter que ce que nous avons la capacité de traiter. »

 

Parmi les solutions envisageables, récupérer des voitures tout juste éligibles à la prime à la conversion, ce qui permettrait d’écarter les véhicules les plus polluants au profit de plus récents. Mais la législation ne le prévoit pas. Pourtant, cette formule présenterait plusieurs vertus, notamment en matière de sécurité routière et d’impact environnemental.

 

« Notre prochain projet consiste à devenir une entreprise d’insertion de « rétrofit », de transformation de véhicule thermique en électrique. Pour moi, l'électrique va être la fracture sociale de demain. Dans les groupes de concertation sur les ZFE, j’ai constaté que la dimension sociale était totalement exclue du débat. L’analyse est très froide et mathématique : les véhicules les plus polluants, c’est 3% du parc. Donc l’interdiction ne concernera que 3% d’utilisateurs, ce qui est considéré comme peu. » 

 

« J’ai rappelé que si les gens utilisent des voitures très polluantes ce n’est pas par militantisme anti écologique, mais leur en retirer l’usage revient à leur mettre la tête sous l’eau, alors qu’ils ont déjà des problématiques d’emploi, de logement, de santé, de malnutrition, etc. Si on veut un système plus solidaire, une société plus juste, il faut faire des compromis. Nos publics ne sont pas ceux qui polluent le plus, tout simplement parce qu’ils se déplacent moins. Mais le risque c’est qu’ils soient tout de même les plus pénalisés par les ZFE. »

 

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Sud-Gironde, la piste GEIQ

Sud-Gironde, la piste GEIQ | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Le projet CLIQ SG, pour "Comité local insertion qualification Sud Gironde", tient son origine d'une reconversion professionnelle. En 2021, Nicolas Jaudard était alors travailleur social. Il avait choisi de s’orienter vers un master de sociologie en « Intervention et innovation sociale », dans la perspective de développer des initiatives de coopération entre acteurs à l’échelle d’un territoire. « J’ai proposé à quelques structures du Sud-Gironde de travailler éventuellement sur un projet dans le cadre de ce master pendant 2 ans. J’ai tout de suite été contacté par la mission locale de Langon. »

 

A l’époque, la mission locale faisait le constat que beaucoup de jeunes accompagnés vers l'emploi, dans le cadre de dispositifs existants ou de structures d’insertion, n’arrivaient pas jusqu'aux entreprises. Et ce, malgré les besoins. « On m’a proposé d’aller « faire le tour des popotes » et d’établir un diagnostic. On m’a demandé d'étudier un peu plus particulièrement les territoires Zéro chômeurs longue durée, et quelle serait leur pertinence pour le Sud-Gironde. Ou une régie territoriale, qui fait partie des réponses envisageables en milieu rural. Ou encore, un Groupement d'Employeurs pour l'Insertion et la Qualification (GEIQ), sachant qu’il en existait un à la Réole, le GEIQ Val de Garonne, un des plus anciens de France, mais qui a fermé quand son directeur est parti à la retraite. La mission locale travaillait en partenariat avec lui, et sa disparition a laissé un vide. »

 

Pourquoi ce lien avec les entreprises ne se fait pas ? Quel est le chaînon manquant ? Y-a-t-il besoin de valoriser les métiers ? Quelles relations entre, d’un côté, les différents acteurs qui accompagnent les publics, et les entreprises de l’autre ? Malgré la présence de SIAE, des missions locales, Pôle emploi, la rencontre ne se fait pas, ou pas suffisamment. Ce qui aboutit à des jeunes qui vivent des problématiques d'isolement, d’addictions, de manque de mobilité, etc. Alors que des entreprises, à proximité, sont prêtes à les embaucher et à les former. « J’ai passé la première année de mon master à rencontrer l'ensemble des acteurs, les conseillers Pôle emploi et mission locale, les SIAE, le Département, la DEETS, les ESAT, tous ceux qui, de près ou de loin, travaillent sur l'insertion professionnelle. Ainsi que les clubs d'entreprises, afin d’aller chercher le point de vue des entrepreneurs sur ces questions. »

 

Le choix entre trois options

 

Ce travail de prospection a débouché au printemps 2022, sur un rapport évoquant les problématiques du territoire, les secteurs en tension, sur les différents acteurs locaux et leurs relations. Au chapitre des hypothèses, trois options étaient présentées : le territoire zéro chômeurs, la régie territoriale, le groupement d’employeurs. « Les différences portaient sur le fait qu’un territoire zéro chômeurs ou une régie territoriale nécessitent une mobilisation politique extrêmement forte sur le long terme. Après réflexion, la solution la plus pertinente semblait être la constitution d’un nouveau GEIQ notamment parce que c'est un modèle porté par les entreprises. »

 

Le territoire de Sud Gironde est marqué par des freins à l’emploi relativement classiques mais très présents. Santé mobilité, isolement, logement, des publics plus exclus que sur d'autres secteurs. L’offre de formation, pourtant relativement riche pour un milieu rural, ne couvre pas tous les besoins. Beaucoup d'orientations se font par défaut mais ne correspondent pas forcément aux attentes des entreprises locales. De fait, les jeunes sont nombreux à partir faire des études mais ne reviennent pas, ou se détournent des études pour différentes raisons (distance, offre pas adaptée à leur projet, etc.) Côté entreprise, le territoire possède un tissu relativement important de TPE/PME notamment industrielles, avec des besoins assez spécifiques : techniciens de maintenance, soudeurs, chaudronniers, opérateurs de machines à commande numérique, etc.

 

Depuis la disparition du GEIQ Val de Garonne, le paysage des GEIQ a bien changé. En Gironde il en existe désormais une dizaine, et beaucoup souhaitent se développer. Plutôt que d’en créer un nouveau, le Comité Régional des GEIQ de Nouvelle-Aquitaine proposait d’étudier les conditions pour que des groupements existants viennent déployer leur offre de services sur ce territoire. Nicolas Jaudard a été chargé de jouer ce rôle d’émulation entre les acteurs locaux, afin qu’ils se familiarisent avec les GEIQ de Gironde et que, finalement, des relations s’établissent et que les entreprises soient intégrées dans la boucle.

 

Deux groupements ont exprimé leur volonté de s’engager dans une initiative commune en Sud-Gironde, le GEIQ BTP de Libourne et le GEIQ des industries technologiques d'Aquitaine. Ils avaient les entreprises, et l’envie de se développer sur place en lien avec les acteurs locaux.  « Donc on avait cette sorte de conjonction avec un territoire qui a la volonté qu’il se passe quelque chose, et des structures qui se disent intéressées, mais avec toutes les difficultés de pouvoir créer un réseau, de pouvoir le faire vivre, d’être sur place, de matérialiser le projet en quelque sorte… »

 

Développer les relations entre acteurs locaux

 

« Ce qui m'a beaucoup interpellé, ce sont les rapports entretenus par les différents acteurs avec les entreprises. Dans chaque structure, ESAT, SIAE, agence Pôle emploi, mission locale, il y avait une personne dédiée qui démarchait les entreprises, chacune individuellement avec ses moyens. Tous ces acteurs de l'emploi et de l'insertion ont pour mission d'emmener les personnes qu'ils accompagnent vers l'entreprise. Malgré l'engagement de chacun, à l'échelle du territoire, le lien avec le tissu de PME reste embryonnaire. Une raison de plus qui explique que les parcours n'aboutissent pas jusqu'aux entreprises. » Autre ambition, celle de faire venir les entreprises dans les instances des structures d’accompagnement, de créer des événements, de l'animation, de rassembler les gens avec lesquels elles pourraient créer des passerelles. Sans oublier la dimension formation.

 

« Aujourd’hui, les GEIQ sont présents en Sud-Gironde et sont des acteurs complètement intégrés à l'écosystème. Ils apportent ce lien avec les entreprises et vont le faire de plus en plus. Leurs actions sont planifiées toute l'année avec Pôle emploi, avec les missions locales. Ils y tiennent des permanences et se rendent, grâce aux structures partenaires (Espace services jeunesse, MDSI, SIAE, tiers lieu) à la rencontre des demandeurs d'emploi. Là, les Geiq représentent et convient les entreprises à certaines instances, des liens ont été tissés et les choses sont en train de se développer. Concrètement il y a également eu de nouvelles entreprises qui ont adhéré aux différents GEIQ.  

 

Exemple d’action avec un groupe de jeunes en CEJ, qui ont réalisé des films sur les métiers de l’industrie dans les entreprises du Bazadais *. C’était l’occasion pour eux de découvrir ces métiers, et pour la mission locale, le GEIQ Industrie et les autres acteurs, de disposer de supports de présentation sur les métiers d’opérateur sur machine à commande numérique ou de conducteur de ligne de fabrication. Les entreprises s’y retrouvent car ces films, qui seront diffusés pendant la semaine de l’industrie, représentent bien leurs réalités. « Ce genre de projet représente bien les liens qui ont été créés entre le GEIQ, les entreprises, les intervenants locaux et les collectivités, qui ne se parlaient pas nécessairement avant. Ces liens ne vont pas retomber du jour au lendemain, ce sont des personnes qui ont travaillé ensemble sur quelque chose de concret, qui leur plaît à toutes, et tout au long de l'année. »

 

« Je crois que les GEIQ n’avaient pas forcément besoin du Sud-Gironde pour exister. En revanche, pour la mission locale l'agence Pôle emploi, les structures d'insertion par l'activité économique, le Département avec ses bénéficiaires RSA, il était nécessaire de disposer de ce type de dispositif qui ouvre les portes des entreprises aux jeunes, aux personnes en reconversion, à tous ceux qui veulent se former en travaillant. Alors certes, pour l’instant cela ne concerne que les entreprises adhérentes des GEIQ, mais les actions sont accessibles à toutes celles qui veulent s’y associer. »

 

 

*Ces films seront présentés le 24 novembre lors d’un évènement public.

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