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La République tchèque, rattrapée par l’épidémie de Covid-19, prend des mesures drastiques

Dès mercredi et jusqu’au 3 novembre, les bars, restaurants et écoles seront fermés afin d’éviter « un scénario à l’israélienne ou à l’italienne ». Le pays craint de manquer de capacité hospitalière.

Par  (Vienne, correspondant régional)

Publié le 14 octobre 2020 à 03h56, modifié le 14 octobre 2020 à 10h39

Temps de Lecture 4 min.

Sur le Pont Charles à Prague, le 7 octobre.

Quelle différence avec le mois de mars, quand la République tchèque donnait des leçons à toute l’Europe en prétendant avoir échappé au Covid-19 en rendant le masque obligatoire avant tout le monde pour stopper l’épidémie ! Vendredi 9 octobre, le pays d’Europe centrale a enregistré le chiffre record de 8 618 cas détectés en un seul jour, pour une population d’à peine 10,7 millions d’habitants. Avec 521,5 contaminations pour 100 000 habitants enregistrés ces quatorze derniers jours, la République tchèque est désormais de loin le pays d’Europe le plus exposé au SARS-CoV-2, selon le Centre européen de contrôle et de prévention des maladies, dépassant la France (299,7) ou l’Espagne (299,8).

Alors que les Praguois avaient symboliquement fêté la fin de l’épidémie en organisant un repas géant sur le célèbre pont Charles, le 1er juillet, l’heure n’est plus à la fête. Lundi 12 octobre, à l’issue d’une interminable réunion gouvernementale témoignant des dissensions au sein de la coalition au pouvoir, le premier ministre, Andrej Babis, a annoncé des mesures drastiques. En plus des institutions culturelles déjà fermées, les bars et les restaurants seront forcés de baisser le rideau à partir de mercredi, sauf pour la vente à emporter. Les réunions de plus de six personnes sont interdites. Surtout, les cours sont suspendus dans l’ensemble des institutions éducatives, à l’exception des écoles maternelles, jusqu’à début novembre au moins. Avec son voisin slovaque, qui a fermé les établissements secondaires, le pays est le premier d’Europe à prendre une telle décision face à la deuxième vague.

« C’est une décision très difficile, mais nous n’avons droit qu’à un seul essai, et il doit être couronné de succès », a justifié M. Babis, en expliquant qu’il fallait absolument stopper la propagation de l’épidémie avant fin octobre pour éviter « un scénario à l’israélienne ou à l’italienne ». Avec 2 146 patients hospitalisés, dont 426 en soins intensifs, les hôpitaux tchèques ne sont pas encore débordés, mais, dans un entretien à la radio publique, le vice-ministre de la santé, Aleksi Sedo, a déclaré : « Nous pouvons nous attendre à ce qu’environ quatre mille patients soient hospitalisés d’ici à la fin du mois ».

L’objectif des mesures présentées lundi, qui ressemblent de plus en plus à un second confinement, même si le gouvernement refuse d’en dire le nom, est d’éviter ce pic. Même si l’exécutif estime pouvoir ouvrir jusqu’à dix mille lits d’hôpital réservés aux patients atteints du Covid, le pays souffre d’un taux de contamination inquiétant de ses personnels hospitaliers, avec près de trois mille médecins et infirmiers officiellement malades.

Réaction tardive

Ces mesures sont aussi destinées à répondre aux critiques, alors que M. Babis est accusé d’avoir sous-estimé la deuxième vague. Ce milliardaire de 66 ans, désigné premier ministre, en 2017, à la tête d’une formation « antisystème », a lui-même reconnu avoir réagi trop tard après la rentrée. Et, depuis, les signes de cacophonie se multiplient entre son parti, nommé Action des citoyens mécontents (ANO), et ses alliés sociaux-démocrates incarnés par leur très actif président, le ministre de l’intérieur, Jan Hamacek, qui a évoqué la perspective de déployer « des congélateurs pour les cadavres dans les rues » si aucune décision n’était prise.

Le 21 septembre, face aux premiers signes de résurgences, le ministre de la santé membre d’ANO, avait déjà préféré démissionner pour laisser sa place à un épidémiologiste reconnu, Roman Prymula. Depuis, ce dernier s’emploie à faire regagner de la cohérence à la politique sanitaire du gouvernement. « Combattre toute épidémie est un processus à long terme, et une stratégie claire et réfléchie est nécessaire pour la gérer avec succès », a répété le ministre, mardi soir, en présentant également « ses excuses » pour la levée de toutes les mesures de restriction pendant l’été. De nombreux Tchèques en avaient profité pour partir en vacances à l’étranger et avaient cessé de porter le masque dans tous les espaces publics.

En multipliant les propos à tout-va, comme à son habitude, M. Babis ne semble toutefois pas pouvoir s’en tenir à la ligne fixée par M. Prymula. Alors que la République tchèque affiche aussi le taux de mortalité le plus fort de l’Union européenne avec quatre décès pour cent mille habitants ces quatorze derniers jours et qu’elle a franchi la barre symbolique des mille morts, il n’a ainsi pu s’empêcher de minorer ce palier. « Mille morts, c’est la mortalité de trois jours normaux en République tchèque », a-t-il déclaré, avant d’évoquer « la grand-mère de [leur] collègue, qui a eu un accident vasculaire cérébral et qui a été hospitalisée à côté de quelqu’un atteint du Covid. Et qui, du coup, est morte du Covid ».

Cette déclaration a suscité la colère de l’opposition qui a demandé l’organisation d’un vote de confiance, alors que la coalition au pouvoir ne tient que grâce au soutien sans participation du Parti communiste. « Il est inacceptable que le pays soit dirigé plus longtemps par ce premier ministre qui est personnellement responsable de la situation désespérante actuelle et ne sait manifestement pas comment en sortir », a ainsi fustigé Petr Fiala, le président du Parti démocratique civique (ODS, conservateur).

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