A l’issue de vifs débats, l’Assemblée nationale s’est à nouveau opposée, mercredi 29 juillet, à la procréation médicalement assistée (PMA) post-mortem avec les gamètes d’un conjoint décédé, lors de l’examen en deuxième lecture du projet de loi de bioéthique.
Les députés, puis les sénateurs, s’étaient déjà prononcés contre en première lecture, suivant en cela l’avis du gouvernement, avec un vote plus serré. Comme d’autres sujets de bioéthique abordés par le texte, la question a ouvert des divisions au sein de la majorité, au point que, mardi matin, le premier ministre, Jean Castex, s’est invité à la réunion du groupe majoritaire pour appeler à « l’équilibre » et « au compromis » lors de l’examen.
Interdite en France mais autorisée en Belgique ou en Espagne, la procréation médicalement assistée post-mortem consiste à réaliser une PMA après la mort du conjoint, sous forme d’insémination de sperme ou d’implantation d’un embryon conçu avec les gamètes du couple, puis congelé avant le décès de l’homme.
Débats au sein de la majorité
Certains députés défendaient d’ailleurs une PMA post-mortem limitée aux embryons déjà conçus, dans le sillage d’un avis du Conseil consultatif national d’éthique (CCNE).
Les partisans de la PMA post-mortem, dont le corapporteur La République en marche (LRM) Jean-Louis Touraine, ont estimé qu’il était « paradoxal » d’autoriser les femmes seules à recourir à une PMA, comme le prévoit ce projet de loi, mais de ne pas permettre à une femme de poursuivre après la mort de son conjoint un « projet parental » déjà engagé.
Contre cette mesure, la ministre de la recherche, Frédérique Vidal, a souligné les « pressions familiales » qui pourraient s’exercer sur les veuves, mais aussi les problèmes en matière de filiation ou de succession. « On a beaucoup entendu parler de projet parental », mais « le décès d’un membre du couple détruit le projet tel qu’il a été imaginé et pensé », a-t-elle estimé. « Concevoir un enfant orphelin me met mal à l’aise », a aussi insisté la députée (LRM) des Bouches-du-Rhône Anne-Laurence Petel.
Pour son collègue « marcheur » du Val-de-Marne Jean François Mbaye, ça n’a, au contraire, « aucun sens » de ne pas autoriser la PMA post-mortem si on autorise la PMA aux femmes seules. « Les femmes n’ont pas besoin que nous décidions à leur place. Pourquoi nous sentons-nous obligés de nous immiscer dans l’intimité de ces femmes ? », a-t-il lancé. L’enfant n’est « pas un palliatif » à la mort de son conjoint, mais « laissons le choix aux femmes », a aussi plaidé Emilie Chalas (LRM, Isère).
La droite et le gouvernement hostiles à des ajouts au texte
Au sein des députés Les Républicains (LR), « nous nous opposons à la PMA post-mortem. Une veuve et une femme seule, ce n’est pas la même chose », a souligné, pour sa part, la députée Annie Genevard (Doubs).
A l’heure où la droite se mobilise pour atténuer le texte, le gouvernement tente de calmer les ardeurs de certains députés LRM qui veulent aller plus loin sur ce projet de loi de bioéthique et la PMA pour toutes.
Outre la visite du premier ministre aux députés, le président des députés LRM, Gilles Le Gendre, et la responsable du texte Aurore Bergé (Yvelines) se démènent en coulisses pour éviter les divisions internes, plus marquées qu’il y a neuf mois, et s’en tenir à la première version du projet de loi adoptée alors. Ils sont « comme des fous, nuit et jour au téléphone pour essayer de rabattre » des troupes et garantir les votes, glisse un député, après déjà des réunions de déminage.
Le débat se concentre principalement sur deux mesures votées en commission spéciale, alors que le gouvernement y est hostile. La première, finalement rejetée mercredi dans l’Hémicycle, est la réception d’ovocytes de la partenaire, selon la technique dite « ROPA » – la partenaire pouvant ainsi porter l’enfant après une fécondation in vitro. La seconde concerne l’élargissement du diagnostic préimplantatoire à la recherche d’anomalies chromosomiques (DPI-A), pour repérer des embryons non viables ou une éventuelle trisomie 21.
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