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Procès du Mediator : « Le terreau des conflits d’intérêts à l’hôpital reste fertile »

Alors que se déroule le procès du Mediator, un collectif de médecins et d’universitaires de CHU, dont Irène Frachon, propose, dans une tribune au « Monde », l’adoption de neuf mesures afin de lutter contre les conflits d’intérêts dans le monde médical.

Publié le 04 février 2020 à 01h52, modifié le 04 février 2020 à 11h22 Temps de Lecture 8 min.

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Tribune. Le procès du Mediator se déroule actuellement à Paris. Commencé depuis le 23 septembre, c’est le procès le plus long à s’être jamais tenu en France à propos de ce qui restera, il faut l’espérer, l’un des plus grands scandales sanitaires français. Une des interrogations que ce procès aborde concerne l’agence de régulation : comment cette mécanique sanitaire supposée alerter et retirer un produit du marché suspect d’être dangereux pour les patients a pu faillir à sa mission. Cette question appellera inévitablement celle des conflits d’intérêts. Or cette question embarrasse le monde médical : en témoigne un relatif silence autour du procès. En tant que médecins et universitaires de CHU français investis dans le champ des conflits d’intérêt, nous souhaitons au contraire profiter de ce moment pour proposer de nouvelles avancées.

Arsenal législatif

Le risque qu’une nouvelle affaire Mediator surgisse n’est en effet pas totalement écarté. Bien entendu, un véritable arsenal législatif a été mis en place, par plus ou moins petites touches : depuis 1993 et au cours des trois décennies qui ont suivi, six lois différentes dont trois post-Mediator ont abordé la question des conflits d’intérêt. Encore récemment, un amendement porté par le gouvernement a accru la séparation entre étudiants en médecine et laboratoires pharmaceutiques. On ne peut que se réjouir que le « sens de l’histoire » aille vers davantage d’indépendance dont découle directement la crédibilité de la parole scientifique.

Pour autant, le terreau des conflits d’intérêts dans le monde médical reste fertile, non parce que le monde médical serait particulièrement vénal, mais en raison de circonstances favorisantes jouant les unes avec les autres. Il y a d’abord ce que Philip Tetlock (chercheur universitaire américain) a appelé un « compromis tabou ». Pour le médecin, il existe une tension entre l’intérêt qu’il porte au patient et l’intérêt qu’il porte à la santé publique et à ses contingences économiques et sanitaires. Un compromis devrait s’imposer entre ces deux tensions, notamment parce que des prescriptions inconsidérées pourraient mettre en danger le système collectif de soin. Mais ce compromis est tabou car un médecin aura toujours tendance à privilégier le « sacré de la vie » de son patient.

A cela se rajoute le goût des médecins pour l’innovation (qu’ils partagent avec d’autres, notamment les associations de patients). Un grand nombre de nos confrères vont avoir tendance à privilégier les molécules qualifiées d’« innovantes » par l’industrie pharmaceutique. Ces prescriptions sont généralement faites de bonne foi, ce qui rend la situation d’autant plus à risque qu’une éventuelle « culpabilité sociétale » ne peut jouer le rôle de garde-fou. Or nous savons, grâce aux analyses de la commission de transparence de la Haute Autorité de santé (HAS), qui étudie leur valeur de façon indépendante, que seule une très petite minorité de ces nouveaux médicaments apporte réellement un progrès. Rajoutons à cela d’une part la particularité française d’une assurance sociale nationale et publique et, d’autre part, le paiement à l’acte des médecins favorisant une prescription facile (et pas toujours utile) et vous obtenez le cocktail dans lequel les entreprises du secteur de la santé se sont et continuent de s’engouffrer.

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