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Coronavirus, déconfinement, bac, crise économique : ce qu'il faut retenir des déclarations d'Edouard Philippe sur TF1

Le Premier ministre a participé ce jeudi soir sur TF1 à un long exercice d'explication sur la crise de coronavirus que traverse la France. A l'aube des vacances scolaires, il a fermement appelé les Français à ne pas se déplacer et a prévenu que « le déconfinement ne serait pas pour demain ». Pour la sortie de crise, il a écarté des « hausses d'impôts » qui seraient, selon lui, le pire signal quand on veut redémarrer l'économie.

Edouard Philippe, le Premier ministre.
Edouard Philippe, le Premier ministre. (Jacques Witt/SIPA)

Par Isabelle Ficek, Valérie Mazuir

Publié le 2 avr. 2020 à 21:11Mis à jour le 3 avr. 2020 à 15:09

C'était la suite « pédagogie et transparence » de sa conférence de presse de samedi dernier . Ce jeudi soir, Edouard Philippe était l'invité principal d'une émission spéciale sur TF1 et LCI baptisée « Le Premier ministre face à la crise ».

Tour d'horizon de ses principales déclarations :

C'est d'abord au sujet des personnes âgées confinées dans les Ehpad que le chef du gouvernement est intervenu alors que les décès dus au covid-19 ont, pour la première fois ce jeudi soir, été donnés par le directeur général de la Santé, Jérôme Salomon, dans le bilan quotidien de l'épidémie, justifiant les mesures difficiles, comme l'interdiction des visites.

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« Le virus ne prend pas de vacances »

Puis, à l'aube des vacances scolaires de printemps et alors qu' il a commencé à parler publiquement du déconfinement , le Premier ministre a fermement rappelé que « le virus ne prend pas de vacances » et appelé les Français à ne pas se déplacer, ce qui « viendrait à ruiner l'effort que nous faisons depuis trois semaines » et indiqué qu'il avait demandé au ministre de l'Intérieur que les forces de l'ordre soient particulièrement mobilisées pour contrôler les déplacements. « Ces règles ne sont pas là pour nous ennuyer mais pour nous protéger tous ensemble et je suis convaincu que la plupart des Français le savent », a-t-il déclaré, appelant à leur « civisme. »

« La digue tient » mais « respectez les consignes »

« L'indicateur que nous regardons, c'est le nombre d'entrées en service de réanimation, c'est lui qui va valider la stratégie de confinement », a-t-il lancé, saluant « l'extraordinaire mobilisation des soignants » et soulignant au passage « l'effort exceptionnel » sur le nombre de lits disponibles qui a « plus que doublé. » « C'est grâce à cet effort que nous pouvons tenir », a-t-il affirmé, expliquant aussi les « exploits logistiques » de transferts de patients, au nombre de plus de 550 d'ici ce week-end.

« Notre système tient parce qu'il est mobilisé de façon extraordinaire et parce que nous ne relâchons pas l'effort de confinement qui est le seul moyen aujourd'hui de permettre à nos soignants de tenir la vague. La digue tient », a-t-il martelé, ajoutant qu'il avait « beaucoup de lucidité » sur les difficultés, mais aussi « beaucoup d'espoir sur notre système hospitalier. » « Respectez les consignes, ne soyons pas des spectateurs mais des acteurs en respectant les consignes » a-t-il invité comme lors de son audition devant la mission d'information de l'Assemblée nationale .

Médicaments et stocks, source d'inquiétude

Sur l'épineuse question des médicaments ou matériels nécessaires à la réanimation et qui est un profond sujet d'inquiétude pour les soignants comme pour l'exécutif, le chef du gouvernement a souligné que la « tension est mondiale ». Sur les 8 molécules indispensables à la réanimation, il a assuré qu'il y avait des stocks et que sa « priorité » était le « sourcing » pour répondre à la demande. « Il y a là un sujet d'importance mais nous avons des ressources et la volonté », veut-il croire.

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Un plateau technique à l'hôpital de Créteil

« Sur l'Ile-de-France, nous avons accéléré l'ouverture d'un plateau technique à l'hôpital Henri-Mondor de Créteil qui va permettre d'accueillir 86 patients dès mi-avril alors que ce plateau ultra-moderne devait ouvrir en juin », a annoncé Edouard Philippe en réponse à la question d'un Français qui lui demandait pourquoi ne pas installer en région parisienne, comme à Mulhouse, un hôpital de campagne militaire et alors que les interrogations sur les transferts plutôt que l'ouverture de structures en Ile-de-France, notamment chez les soignants, montent ces derniers jours.

Différence avec l'Allemagne

A la question de savoir pourquoi l'Allemagne comptait moins de morts, il a refusé d'entrer dans les comparaisons et expliqué, aussi, que chaque pays apprenait des autres et de ceux qui ont vu la vague arriver plus tôt, comme la France de l'Italie. Il a suggéré que la vague arrivait un peu plus tard en Allemagne qu'en France et au passage remercié l'Allemagne pour l'accueil de patients français. Et puis, parlant d'« humilité », il a aussi dit que « nous aurons à apprendre des choses des autres systèmes de santé », sans entrer dans les polémiques comme mercredi soir à l'Assemblée sur le nombre de tests réalisés.

« Il faudra donner les moyens à l'hôpital de se reconstruire »

Interrogé sur les moyens de l'hôpital, le Premier ministre a concédé que « de toute évidence, il faudra donner les moyens à l'hôpital de se reconstruire, de s'organiser dans la durée contre l'épidémie ». Il a rappelé le « plan massif » évoqué par le chef de l'Etat, tout en soulignant qu'« aucun système de santé n'a été conçu pour faire face à une épidémie aussi forte et aussi rapide. » « Il faudra tirer des leçons de cette crise pour être plus agile, et savoir anticiper, tout en sachant que c'est rarement en pensant la crise d'avant que l'on prépare la crise d'après. »

« Le déconfinement, ce n'est pas pour demain matin »

Sur le déconfinement, il a redit que « c'est une question très difficile. On commence à s'interroger sur le déconfinement et je comprends l'impatience, elle est générale. Mais je veux dire très clairement aux Français que le déconfinement, ce n'est pas pour demain matin. Aujourd'hui, la logique du confinement, elle prévaut, au moins jusqu'au 15 avril et sûrement pour longtemps. »

Edouard Philippe a aussi prévenu qu'il n'était pas totalement possible de s'inspirer de l'exemple du Hubei, en Chine, puisque la France entière est en confinement. Il a aussi souligné toutes les « inconnues auxquelles nous devons faire face : Existera-t-il au moment où nous déconfinerons un traitement qui limitera l'impact de la maladie ? Saurons-nous quel sera le taux d'immunité des Français ? Tout cela est à ce stade des inconnues. »

« Il est quasiment acquis qu'il va falloir procéder progressivement. Il est aussi probable qu'il y ait une deuxième vague. Nous allons trouver les méthodes pour prendre les meilleures décisions », a insisté le chef du gouvernement.

Jean Castex, responsable des scénarios de sortie de confinement

C'est Jean Castex qui sera responsable des scénarios de sortie de confinement a annoncé ce jeudi soir Edouard Philipppe.

Enarque né en 1965, ancien directeur de cabinet de Xavier Bertrand au ministère du Travail, Jean Castex a ensuite été secrétaire général adjoint à l'Elysée auprès de Nicolas Sarkozy. Proche de l'actuel secrétaire général de l'Elysée, Alexis Kohler, Jean Castex avait été nommé en septembre 2017, délégué interministériel aux Jeux Olympiques de 2024, puis, en janvier 2018, délégué ministériel aux grands événements sportifs et avait pris en 2019 la présidence de l'Agence nationale du sport.

Ce préfet de formation, réélu en 2014 maire de Prades, dans les Pyrénées-Orientales, avait été donné fin 2018 comme favori pour le poste de ministre de l'Intérieur du gouvernement d'Edouard Philippe, à la place de Gérard Collomb.

Baccalauréat : « Ce sera vers du contrôle continu total qu'il faudra se diriger »

Sur une question très attendue des familles, le baccalauréat, il a confirmé qu'il ne pourrait avoir lieu normalement. « Il est acquis définitivement que les épreuves du bac ne pourront se dérouler normalement en juin ni en juillet […] Très probablement il faudra les organiser de façon totalement neuve et originale : soit via un contrôle continu complet, soit via un contrôle continu pour le premier et deuxième trimestre, avec une seule épreuve en juin si les cours peuvent reprendre courant mai et courant juin. Mais je crois que ce sera vers du contrôle continu total qu'il faudra se diriger. » Le ministre de l'Education nationale, Jean-Michel Blanquer, doit s'exprimer ce vendredi sur le sujet.

Report des municipales : « Le Parlement choisira »

Quant aux municipales, Edouard Philippe a indiqué que le rapport du Conseil scientifique sur le scrutin serait rendu le 23 mai et que la décision d'un report sera prise à ce moment-là, mais il a indiqué que « tout le monde pressent » que le second tour ne pourra avoir lieu en juin et qu'alors les élections municipales devront être réorganisées - pour les municipalités dont le premier tour n'a pas été conclusif, soit pour 5.000 communes - en octobre ou plus tard, mais alors « ce sera le Parlement qui choisira car il faut une loi. »

Tests sérologiques ou virologiques

Allons-nous devoir être tous testés ? A cette question, le Premier ministre a répondu que s'il s'agit de tests virologiques, « il faudrait beaucoup de temps ». En revanche, « quand les tests sérologiques existeront, nous pourrons monter très fort en puissance pour voir qui est immunisé », a-t-il avancé, précisant qu'il voulait « vérifier que les tests fonctionnent bien », prenant l'exemple de déboires de pays voisins sur des tests non fiables. Et en attendant, il va y avoir une montée en charge sur les tests virologiques.

Difficultés sur les masques

Sur la difficile question des masques, le chef du gouvernement a assuré que « dès que nous avons senti que nous aurions besoin de davantage de masques » - outre les stocks de 170 millions de masques - les autorités ont tenté d'intensifier d'une part la production française et d'autre part ont commandé des masques en Chine. Mais il n'a pas caché les difficultés - la demande est mondiale - à faire produire et acheminer ces masques. Surtout, il a justifié les déstockages très parcimonieux des réserves stratégiques de masques alors que la consommation de masques pour les soignants s'est avérée bien supérieure à celle estimée, en expliquant que « notre souci, c'est que les soignants soient protégés dans la durée ».

A la question de savoir pourquoi, contrairement à de nombreux pays d'Asie, il n'a pas été conseillé pour tous de porter des masques, Edouard Philippe a glissé que les médecins n'ont pas toujours le même avis et s'est contenté de s'appuyer à nouveau, comme il l'a fait à l'Assemblée nationale, sur le directeur des programmes d'urgence de l'OMS, Mike Ryan, qui a indiqué que le port du masque par la population générale ne serait pas l'alpha et l'oméga et que le respect des gestes barrières est plus important.

« Faire repartir la machine économique »

Sur la situation économique, Edouard Philippe a estimé « le pire quand on sort d'une crise et qu'on veut faire redémarrer le pays, ce serait d'augmenter les impôts. » Il a souligné au passage que la France continuait à pouvoir emprunter à des taux assez bas. « L'urgence, c'est de passer la crise sanitaire, ensuite, ce sera de faire repartir la machine économique et pour cela il ne faut pas que les entreprises meurent », a-t-il expliqué, soulignant les « instruments de chômage partiel très généreux pour pouvoir conserver le muscle nécessaire pour repartir ». « C'est cela qui nous occupe aujourd'hui, c'est là qu'est le combat », a-t-il martelé.

« Je ne doute pas que certains se feront les spécialistes pour dire ce qu'il faut faire des productions, des dettes souveraines … Aujourd'hui, la bonne santé de l'économie française fait que nous pouvons passer la crise sanitaire, c'est là l'essentiel. A partir de là, nous pourrons reconstruire », a-t-il botté en touche sur les questions de l'après.

La question des primes

Il a redit la possibilité de doubler la prime Macron à 2.000 euros pour toutes les entreprises qui ont un accord d'intéressement et promis que la prime pour les fonctionnaires serait bientôt précisée, saluant, une fois encore, le travail des enseignants.

« Suspendre » la réforme des retraites

Sur la réforme des retraites, Edouard Philippe a dit que « nous sommes face à une crise inconnue » et admis qu'il fallait pour cela « l'unité nationale » et donc « suspendre ce qui provoque des désaccords et n'a pas lieu d'être pour l'instant. » « Suspendre », a-t-il insisté même si nombreux sont ceux, y compris parmi ses soutiens, qui pensent qu'il sera impossible de remettre sur le métier cette réforme à l'issue de la crise sanitaire.

Détermination

Pour conclure, le Premier ministre a à nouveau prévenu que la situation était difficile et le serait encore un moment, il a assuré sa détermination et sa volonté à traverser cette crise, même s'il aura parfois fait des « erreurs », a-t-il dit, mais il a aussi voulu, comme lors de sa conférence de presse samedi, terminer avec une note d'espoir, voulant croire dans les grandes ressources du pays. « Le découragement ne fait pas partie de la gamme d'émotions que je m'autorise », avait-il alors lâché.

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>>> La France face à l'épidémie de coronavirus. Quelles ont été les différentes étapes de l'alerte ? Quelle est la situation épidémiologique au jour le jour ? Quelles sont les mesures décidées par le gouvernement pour limiter la propagation de la pandémie ? Pour soutenir l'économie ? Réponses ici dans le dossier spécial des « Echos » .

Isabelle Ficek et Valérie Mazuir

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