Un agenda social chargé pour Jean Castex

Un agenda social chargé pour Jean Castex

20.07.2020

Gestion du personnel

A l’issue de la conférence de dialogue social qui s’est tenue vendredi à Matignon avec les partenaires sociaux, le nouveau Premier ministre, Jean Castex, a dévoilé le calendrier et les concertations pour les mois à venir. Il a repoussé les réformes des retraites et de l’assurance chômage.

Relancer le dialogue social, faire des gestes forts. Le nouveau Premier ministre, Jean Castex, qui a réuni vendredi à Matignon les partenaires sociaux, a présenté, à l’issue de la conférence de dialogue social, une nouvelle feuille de route en fixant un calendrier de concertations et de négociations pour la semaine et les mois à venir. Plusieurs ministres étaient présents, Elisabeth Borne (travail) mais aussi Barbara Pompili (transition écologique), Bruno Le Maire (économie), Olivier Véran (solidarités et santé) et Brigitte Bourguignon (autonomie).

"Beaucoup de sujets sont sur la table et je suis heureux de la qualité du dialogue que nous avons établi ce matin avec les partenaires sociaux", s’est félicité le Premier ministre. "Nous ne serons pas toujours d’accord", a-t-il ajouté, mais il est "important" de rechercher "le maximum d’unité".

Jean Castex a promis de réunir les organisations patronales et syndicales "autant que de besoin" et de tenir "le plus grand compte" de leurs propositions. Dès octobre, une nouvelle conférence aura lieu sur le même modèle. Un dialogue territorial sera également décliné en parallèle pour "suivre les recommandations de terrain".

Assurance chômage : la réforme est reportée

Le chef du gouvernement a tout d’abord déminé deux sujets sensibles. Il a décidé de reporter l’application de la réforme d’assurance chômage, très controversée, à 2021 pour revenir aux règles ex-ante. Ce décalage vise les deux volets de la réforme. Le premier, effectif depuis novembre dernier, concerne le durcissement les règles d’indemnisation des demandeurs d’emploi (il faut depuis cette date avoir travaillé six mois lors des 24 derniers mois, contre quatre mois sur 28 auparavant), la dégressivité de l’indemnisation des cadres et les règles de rechargement des droits. Le second volet, qui devait entrer en vigueur le 1er novembre, porte sur le nouveau calcul du salaire journalier de référence qui risquait d’impacter fortement les personnes travaillant de manière discontinue, c’est-à-dire alternant contrats courts et périodes de chômage. Le bonus-malus, prévu pour le 1er mars 2021, dans sept secteurs d’activité pourrait aussi être décalé. Des réunions de concertation reprendront avec les syndicats dès cet automne.

Retraite : nouvelles projections du Cor

Quant à la réforme des retraites, Jean Castex a promis une "nouvelle méthode" en dissociant deux volets. Dans un premier temps, c’est le volet financier de la réforme - et le déficit du système de pensions - qui sera abordé via une négociation tripartite qui démarrera à l’automne. Elle s’appuiera sur de nouvelles projections du Conseil d‘orientation des retraites (Cor) dont les résultats seront connus en septembre. Dans un second temps, c’est le régime universel par points - et ses modalités - qui sera débattu. Le périmètre des négociations devrait englober les questions liées aux salariés âgés, que ce soit sur l’usure professionnelle, la transmission des savoirs ou encore des transitions emploi/retraite.

Mais le chef du gouvernement a aussi affirmé que ces deux dossiers seront menés à terme.

L’emploi, "priorité des priorités"

Dans l’immédiat, le premier gros dossier de l’agenda social concerne l’emploi, la "priorité des priorités". Et notamment des jeunes. "250 000 jeunes de plus que l’an dernier vont se retrouver sans emploi à la fin de l’année", prédit un proche du Premier ministre. Aussi, sans tarder, dès le début de la semaine, des concertations se dérouleront au ministère du travail avec les partenaires sociaux. Si l’exécutif a d’ores et déjà annoncé une aide qualifiée d’"exceptionnelle" de 4 000 euros par an pour les jeunes de moins de 25 ans, jusqu’à 1,6 Smic, rien ne semble être encore tranché sur la forme de ce coup de pouce : exonération de charges ? Prime à l’embauche ? Plusieurs organisations patronales souhaitent aussi que l’aide soit attribuée au-delà du seuil de 1,6 Smic.

Dans la foulée, Bruno Le Maire et Elisabeth Borne entameront des discussions sur le plan de relance, doté de 100 milliards d’euros et décliné par filière et par territoire. Des concertations sectorielles et territoriales permettront, selon l’exécutif, de décliner ce programme "à partir de septembre".

Modes de travail et partage de la valeur

D’autres temps forts rythmeront cet agenda. A commencer par des discussions sur les modes de travail. Outre les sujets portant sur le télétravail et la santé au travail qui font actuellement l’objet de discussions entre organisations syndicales et patronales, de nouvelles thématiques devraient s’inviter dans les débats. Devraient y figurer la question du partage de la valeur, incluant à la fois l’intéressement, la participation, l’actionnariat salarié mais aussi la participation à la gouvernance de l’entreprise, et celle de la lutte contre la précarité qui englobera la résorption du travail détaché et l’instauration de nouveaux droits pour les travailleurs des plateformes.

Métiers en tension et salariés de "deuxième ligne"

Au menu également de l’agenda social figurent d’autres chapitres pour le moins ambitieux : les métiers en tension, qui seront appréhendés branche par branche ainsi que le sujet des travailleurs de "deuxième ligne". Autrement dit, les salariés sur le front pendant la crise. "La question de la revalorisation de ces métiers passe par un recensement des branches concernées et par un diagnostic de leur classification, des minima sociaux de branche et de leur rémunération", précise l’entourage du Premier ministre.

S’y ajouteront, dans le cadre "de la transformation de notre modèle social", des discussions sur la création d’une cinquième branche de la sécurité sociale dédiée à la dépendance et la restructuration des branches professionnelles, déjà très engagées, prévues à l’automne.

La mise en œuvre de propositions de la concertation citoyenne pour le climat, portée par la ministre de la transition écologique, Barbara Pompili, sera, elle, évoquée en septembre.

Au final, un agenda "exigeant", a indiqué Jean Castex qui devrait envoyer le détail de la feuille de route aux partenaires sociaux en début de semaine. "Il y a beaucoup, beaucoup de choses sur la table, peut-être un peu trop", a estimé de son côté Geoffroy Roux de Bézieux (Medef) en comparant ces chantiers qui devront être achevés presque tous d’ici à la fin de l’année aux "douze travaux d’Hercule".

 

Les réactions des partenaires sociaux
François Asselin (CPME)

"Le premier antidote à la perte d’emploi est l’activité. Avant que la relance soit effective au début du mois de septembre, les entreprises ont besoin d'être soutenues".

La CPME salue l’annonce faite par le ministre de l’économie de permettre aux entreprises jusqu’à 250 salariés de pouvoir étaler si besoin le report des cotisations sociales jusqu’à 36 mois.

Geoffroy Roux de Bézieux  (Medef)

"La concertation fut dans son ensemble positive. La priorité est le plan de relance, l’emploi".

Le Medef met en avant une concertation résumée comme "les 12 travaux d’Hercule", c’est-à-dire une rencontre reposant sur l’établissement d’une liste très importante de sujets à traiter avant la fin de l’année (plan jeune, projet de loi sur la convention citoyenne sur le climat, dépendance, santé au travail ainsi que le télétravail, etc.).

Du fait de cet agenda chargé, le Medef se demande si tous les sujets énoncés pendant la réunion pourront être effectivement traités.

Yves Veyrier (FO)

"Il y a eu un changement de ton ; le dialogue social fut franc et direct". FO se félicite que le gouvernement accepte de revenir notamment sur la négociation santé au travail.

"Il reste des points de désaccords à propos de l’assurance chômage et de la réforme des retraites".

FO estime positif que le gouvernement sépare les différents sujets de négociation, au lieu de les réunir en une seule "conférence sociale". Concernant le plan de relance, FO insiste sur le fait "de garder un œil un peu plus précis sur son évaluation et ses conditions de mise en œuvre".

Yves Veyrier souligne également l’importance de relavoriser notamment tous les emplois qualifiés de "deuxième ligne" (caissiers, métiers de service à la personne, etc.).

Laurent Berger (CFDT)

La CFDT a constaté une volonté de dialogue "sincère" de la part du Premier ministre.

"Une affirmation forte ressort : la priorité absolue sur l’emploi, la relance économique et la lutte contre le chômage".

La CFDT s’estime satisfaite à propos du report des mesures relatives à la réforme de l’assurance chômage. Elle continue de croire qu’un système de retraite universel serait plus juste.

Philippe Martinez (CGT)

La CGT constate également un dialogue centré sur l’écoute. Elle a formulé au Premier ministre des propositions notamment en matière de réindustrialisation, elle est d'ailleurs favorable au rétablissement d'un Commissariat au plan.

Le syndicat note avec satisfaction "que le gouvernement a décidé de reporter les mesures concernant la réforme de l’assurance chômage et la réforme des retraites, même si la reprise des discussions sur ces sujets reste encore floue".

A propos de l’emploi des jeunes, Philippe Martinez insiste sur le fait "que les aides attribuées aux entreprises doivent se concrétiser par des CDI, et non pas par des aides dites provisoires qui généreraient de l’emploi précaire".

François Hommeril (CFE-CGC)

La CFE-CGC salue une "réunion productive, ainsi qu’un changement positif dans la méthode du gouvernement".

Elle s’estime prête à répondre cet été aux sollicitations de concertation du gouvernement au vu du calendrier dense qui est prévu.

Concernant le plan jeune, la confédération réaffirme "qu’elle n’est pas favorable à des dispositifs de primes ou d’exonérations, au vu de leur coût important et de leur inefficacité". Elle préconise "d’investir au contraire dans des dispositifs plus sophistiqués, tel que le financement d’une formation pour les jeunes embauchés".

Pour la CFE-CGC, il faut créer les conditions de la "conditionnalité" des aides publiques aux entreprises, avec davantage de contrôle et davantage de suivi de l’utilisation de l’argent public.

Cyril Chabanier (CFTC)

La CFTC ressort satisfaite de cette réunion, placée sous l’égide du dialogue social.

Le syndicat demande la reconnaissance des métiers à fortes valeurs sociales et sociétales.

Sur l’emploi des jeunes, la CFTC salue les premières mesures envisagées par le gouvernement. Elle souhaite par ailleurs que le gouvernement tende vers l’élaboration d’une "compétitivité de la qualité" (avec des investissements sur le numérique et la transition écologique), qui pourra permettre "de générer un cercle vertueux en matière d’emploi ainsi que sur le plan économique".

Sur la réforme des retraites, la CFTC continue de défendre le régime universel par points.

 

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La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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